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Reçu aujourd’hui — 25 novembre 2025

La Chine profite des sanctions contre la Russie pour lui vendre au prix fort ses fournitures de guerre

25 novembre 2025 à 13:41

Les exportateurs chinois ont nettement augmenté les prix des biens essentiels qu’ils vendent au secteur militaro-industriel russe, profitant de la dépendance accrue du Kremlin face aux sanctions occidentales. C’est la conclusion d’une étude récente de l’Institut des économies émergentes de la Banque de Finlande (Bofit), citée notamment par le Financial Times.

Selon celle-ci, les prix des produits soumis au contrôle des exportations expédiés depuis la Chine vers la Russie ont augmenté de 87 % en moyenne entre 2021 et 2024. À titre de comparaison, le prix de produits similaires expédiés ailleurs n’a augmenté que de 9 % sur la même période.

Par conséquent, ces hausses de prix restreindraient la capacité de Moscou à acquérir des technologies sensibles, alors même que la Russie parvient à contourner une partie des sanctions en s’appuyant sur des fournisseurs chinois. Un haut responsable occidental chargé des sanctions a confirmé cette dynamique au Financial Times. Il estime que le fait que des entreprises chinoises "exploitent" les acheteurs russes peut être considéré comme "un résultat plutôt positif". Selon lui, "augmenter le prix d’un bien de 80 % revient à presque diviser par deux ce que les clients peuvent réellement acheter".

"Parfois il s’agit tout simplement de vol"

Alors que les échanges bilatéraux entre les deux pays sont passés de 146,9 milliards de dollars en 2021 à un niveau record de 254 milliards de dollars en 2024, le Bofit indique que cette hausse est principalement due à l’augmentation des prix plutôt qu’à une hausse des volumes. "Les importations de roulements à billes chinois ont progressé de 76 % en valeur, mais ont reculé de 13 % en volume", reprend ainsi le Moscow Times.

De quoi donner raison à cette source proche du gouvernement russe, qui constatait cet été auprès de Reuters que Pékin agit avant tout dans son propre intérêt : "La Chine ne se comporte pas comme une alliée […] Parfois, elle profite de la situation, parfois il s’agit tout simplement de vol." Une autre source anonyme, toujours auprès de Reuters, souligne que la Russie demeure fortement dépendante de la technologie chinoise. "Sans eux, nous n’aurions pas pu fabriquer un seul missile, encore moins un drone […]. S’ils avaient voulu, la guerre serait terminée depuis longtemps."

Des sanctions qui ont "limité les capacités technologiques de la Russie"

Les auteurs de l’étude du Bofit, Iikka Korhonen et Heli Simola, se sont concentrés sur le commerce des "machines et appareils mécaniques", une catégorie clé pour l’industrie de défense russe. Ils concluent que les sanctions ont "limité les capacités technologiques de la Russie en faisant grimper le prix des importations de biens essentiels", rapporte le Financial Times.

Moscou cherche activement à faire lever les sanctions occidentales - un sujet présent dans le plan de paix en 28 points récemment discuté entre les États-Unis et la Russie — présenté à l’Ukraine. De son côté, Pékin nie fournir des armes létales à Moscou et affirme s’opposer aux sanctions "unilatérales" freinant le commerce entre entreprises chinoises et russes. Reste à savoir si cette alliance russo-chinoise résistera à cet aléa économique.

© AFP

Vladimir Poutine et Xi Jinping à Moscou, le 8 mai 2025.

La Chine profite des sanctions contre la Russie pour lui vendre au prix fort ses fournitures de guerre

25 novembre 2025 à 13:41

Les exportateurs chinois ont nettement augmenté les prix des biens essentiels qu’ils vendent au secteur militaro-industriel russe, profitant de la dépendance accrue du Kremlin face aux sanctions occidentales. C’est la conclusion d’une étude récente de l’Institut des économies émergentes de la Banque de Finlande (Bofit), citée notamment par le Financial Times.

Selon celle-ci, les prix des produits soumis au contrôle des exportations expédiés depuis la Chine vers la Russie ont augmenté de 87 % en moyenne entre 2021 et 2024. À titre de comparaison, le prix de produits similaires expédiés ailleurs n’a augmenté que de 9 % sur la même période.

Par conséquent, ces hausses de prix restreindraient la capacité de Moscou à acquérir des technologies sensibles, alors même que la Russie parvient à contourner une partie des sanctions en s’appuyant sur des fournisseurs chinois. Un haut responsable occidental chargé des sanctions a confirmé cette dynamique au Financial Times. Il estime que le fait que des entreprises chinoises "exploitent" les acheteurs russes peut être considéré comme "un résultat plutôt positif". Selon lui, "augmenter le prix d’un bien de 80 % revient à presque diviser par deux ce que les clients peuvent réellement acheter".

"Parfois il s’agit tout simplement de vol"

Alors que les échanges bilatéraux entre les deux pays sont passés de 146,9 milliards de dollars en 2021 à un niveau record de 254 milliards de dollars en 2024, le Bofit indique que cette hausse est principalement due à l’augmentation des prix plutôt qu’à une hausse des volumes. "Les importations de roulements à billes chinois ont progressé de 76 % en valeur, mais ont reculé de 13 % en volume", reprend ainsi le Moscow Times.

De quoi donner raison à cette source proche du gouvernement russe, qui constatait cet été auprès de Reuters que Pékin agit avant tout dans son propre intérêt : "La Chine ne se comporte pas comme une alliée […] Parfois, elle profite de la situation, parfois il s’agit tout simplement de vol." Une autre source anonyme, toujours auprès de Reuters, souligne que la Russie demeure fortement dépendante de la technologie chinoise. "Sans eux, nous n’aurions pas pu fabriquer un seul missile, encore moins un drone […]. S’ils avaient voulu, la guerre serait terminée depuis longtemps."

Des sanctions qui ont "limité les capacités technologiques de la Russie"

Les auteurs de l’étude du Bofit, Iikka Korhonen et Heli Simola, se sont concentrés sur le commerce des "machines et appareils mécaniques", une catégorie clé pour l’industrie de défense russe. Ils concluent que les sanctions ont "limité les capacités technologiques de la Russie en faisant grimper le prix des importations de biens essentiels", rapporte le Financial Times.

Moscou cherche activement à faire lever les sanctions occidentales - un sujet présent dans le plan de paix en 28 points récemment discuté entre les États-Unis et la Russie — présenté à l’Ukraine. De son côté, Pékin nie fournir des armes létales à Moscou et affirme s’opposer aux sanctions "unilatérales" freinant le commerce entre entreprises chinoises et russes. Reste à savoir si cette alliance russo-chinoise résistera à cet aléa économique.

© AFP

Reçu hier — 24 novembre 2025

Guerre en Ukraine : ce que contient la contre-proposition des Européens au plan américain

24 novembre 2025 à 10:14

L’offensive européenne se dessine. Selon l’agence Reuters, Londres, Paris et Berlin ont rédigé une contre-proposition au plan de paix américain pour l’Ukraine, dévoilée dimanche 23 novembre. La première ébauche de Washington - rédigée sans les alliés européens - avait été rejetée en l’état par Kiev et jugée par nombre d’observateurs bien trop favorable à Moscou. La nouvelle mouture européenne publiée en intégralité sur le site de l’agence, ne rompt pas avec l’approche américaine, puisqu’elle en reprend la structure point par point. Mais le texte apporte quelques modifications.

Alors que les Etats-Unis et l’Ukraine ont affirmé dans la nuit de dimanche à lundi qu’un "futur accord" de paix "devra pleinement respecter la souveraineté" ukrainienne - après des pourparlers qualifiés de "constructifs" à Genève - la copie révisée du camp européen s’aligne sur ce principe en le réaffirmant explicitement : "La souveraineté de l’Ukraine doit être réaffirmée", déclare ainsi le premier point.

Vient ensuite une autre proposition : la conclusion d'"un accord de non-agression complet" entre la Russie, l’Ukraine et l’Organisation du traité de l’Atlantique nord (Otan) destiné à lever les zones grises des trente dernières années. Une formulation proche de celle du plan américain, mais avec un glissement notable : là où Washington mentionnait "l’Europe", les Européens inscrivent clairement "Otan".

Autre point très important : la troisième proposition du plan américain - qui suggérait que la Russie n’envahisse pas ses voisins et que l’Otan ne s’étende pas davantage - disparaît du texte européen. Dans cette version, l’intégration de l’Ukraine à l’Alliance n’est plus exclue, mais explicitement conditionnée au consensus des alliés : "L’adhésion de l’Ukraine à l’Otan dépend du consensus des membres de l’Alliance, qui n’existe pas", rappelle le document. Celui-ci demande un dialogue direct Russie-Otan, immédiatement après la signature d’un accord de paix, pour ouvrir un cycle de "désescalade" et de clarification stratégique.

Un important volet économique

Par ailleurs, les garanties de sécurité à offrir à Kiev sont renforcées par le projet européen : limitation des effectifs militaires ukrainiens à 800 000 hommes en temps de paix (au lieu de 600 000 dans le plan américain), absence de troupes de l’Otan en Ukraine mais stationnement d’avions de chasse de l’Alliance en Pologne, comme le prévoyait le plan de Washington.

L’Europe introduit aussi un important volet économique. Comme le prévoyait déjà le plan américain, Kiev sera éligible à l’adhésion à l’UE, avec un accès préférentiel au marché européen dès la phase d’évaluation. Bruxelles confirme aussi un paquet mondial de mesures pour reconstruire l’Ukraine, incluant la création d’un fonds de développement pour l’Ukraine, la réhabilitation des zones touchées par la guerre ou encore la reprise de l’extraction de minéraux et de ressources naturelles. Ce qu’elle ajoute à ce vaste plan de reconstruction ? Un partenariat entre les Etats-Unis et l’Ukraine "pour restaurer, développer, moderniser et exploiter les infrastructures gazières ukrainiennes (pipelines et installations de stockage)".

Un allègement des sanctions russes "par phases"

Concernant la Russie, les Européens se montrent moins conciliants que leurs alliés américains. Alors que ces derniers prévoient une réintégration de la Russie dans l’économie mondiale, Bruxelles rajoute une temporalité : "l"allègement des sanctions discuté et convenu par phases et au cas par cas." Les deux versions s’accordent cependant sur un retour de la Russie au sein du G8.

Cependant, sur les questions territoriales, les Européens rompent avec la ligne maximaliste de Kiev. L’Ukraine s’engagerait ainsi à ne pas récupérer militairement les territoires occupés. De futures négociations commenceraient à partir de la "ligne de contact actuelle", avec une interdiction de modifier ultérieurement tout accord par la force. Le plan modifié par les Européens comprend une task force conjointe de sécurité - incluant Etats-Unis, Ukraine, Russie et Européens - qui garantirait la mise en œuvre de l’accord.

Une amnistie totale qui disparaît

Et sur l’après ? Dans le projet européen, la question de l’amnistie totale pour toutes les parties impliquées dans ce conflit disparaît. A la place, une vision assez large : "Des mesures seront prises pour répondre aux souffrances des victimes du conflit."

Reste que tout ne fait pas consensus au sein du camp européen. La Première ministre italienne, Giorgia Meloni, a défendu dimanche l’idée que le plan américain "contient déjà de nombreux points acceptables" et qu’il n’était "pas nécessaire de présenter une contre-proposition complète". Selon elle, la discussion porte davantage sur certains nœuds — territoires, reconstruction, armée ukrainienne — que sur le cadre général proposé par Washington. Reste à savoir si les différentes parties trouveront un terrain d’entente.

© AFP

Guerre en Ukraine : ce que contient la contre-proposition des Européens au plan américain

24 novembre 2025 à 10:14

L’offensive européenne se dessine. Selon l’agence Reuters, Londres, Paris et Berlin ont rédigé une contre-proposition au plan de paix américain pour l’Ukraine, dévoilée dimanche 23 novembre. La première ébauche de Washington - rédigée sans les alliés européens - avait été rejetée en l’état par Kiev et jugée par nombre d’observateurs bien trop favorable à Moscou. La nouvelle mouture européenne publiée en intégralité sur le site de l’agence, ne rompt pas avec l’approche américaine, puisqu’elle en reprend la structure point par point. Mais le texte apporte quelques modifications.

Alors que les Etats-Unis et l’Ukraine ont affirmé dans la nuit de dimanche à lundi qu’un "futur accord" de paix "devra pleinement respecter la souveraineté" ukrainienne - après des pourparlers qualifiés de "constructifs" à Genève - la copie révisée du camp européen s’aligne sur ce principe en le réaffirmant explicitement : "La souveraineté de l’Ukraine doit être réaffirmée", déclare ainsi le premier point.

Vient ensuite une autre proposition : la conclusion d'"un accord de non-agression complet" entre la Russie, l’Ukraine et l’Organisation du traité de l’Atlantique nord (Otan) destiné à lever les zones grises des trente dernières années. Une formulation proche de celle du plan américain, mais avec un glissement notable : là où Washington mentionnait "l’Europe", les Européens inscrivent clairement "Otan".

Autre point très important : la troisième proposition du plan américain - qui suggérait que la Russie n’envahisse pas ses voisins et que l’Otan ne s’étende pas davantage - disparaît du texte européen. Dans cette version, l’intégration de l’Ukraine à l’Alliance n’est plus exclue, mais explicitement conditionnée au consensus des alliés : "L’adhésion de l’Ukraine à l’Otan dépend du consensus des membres de l’Alliance, qui n’existe pas", rappelle le document. Celui-ci demande un dialogue direct Russie-Otan, immédiatement après la signature d’un accord de paix, pour ouvrir un cycle de "désescalade" et de clarification stratégique.

Un important volet économique

Par ailleurs, les garanties de sécurité à offrir à Kiev sont renforcées par le projet européen : limitation des effectifs militaires ukrainiens à 800 000 hommes en temps de paix (au lieu de 600 000 dans le plan américain), absence de troupes de l’Otan en Ukraine mais stationnement d’avions de chasse de l’Alliance en Pologne, comme le prévoyait le plan de Washington.

L’Europe introduit aussi un important volet économique. Comme le prévoyait déjà le plan américain, Kiev sera éligible à l’adhésion à l’UE, avec un accès préférentiel au marché européen dès la phase d’évaluation. Bruxelles confirme aussi un paquet mondial de mesures pour reconstruire l’Ukraine, incluant la création d’un fonds de développement pour l’Ukraine, la réhabilitation des zones touchées par la guerre ou encore la reprise de l’extraction de minéraux et de ressources naturelles. Ce qu’elle ajoute à ce vaste plan de reconstruction ? Un partenariat entre les Etats-Unis et l’Ukraine "pour restaurer, développer, moderniser et exploiter les infrastructures gazières ukrainiennes (pipelines et installations de stockage)".

Un allègement des sanctions russes "par phases"

Concernant la Russie, les Européens se montrent moins conciliants que leurs alliés américains. Alors que ces derniers prévoient une réintégration de la Russie dans l’économie mondiale, Bruxelles rajoute une temporalité : "l"allègement des sanctions discuté et convenu par phases et au cas par cas." Les deux versions s’accordent cependant sur un retour de la Russie au sein du G8.

Cependant, sur les questions territoriales, les Européens rompent avec la ligne maximaliste de Kiev. L’Ukraine s’engagerait ainsi à ne pas récupérer militairement les territoires occupés. De futures négociations commenceraient à partir de la "ligne de contact actuelle", avec une interdiction de modifier ultérieurement tout accord par la force. Le plan modifié par les Européens comprend une task force conjointe de sécurité - incluant Etats-Unis, Ukraine, Russie et Européens - qui garantirait la mise en œuvre de l’accord.

Une amnistie totale qui disparaît

Et sur l’après ? Dans le projet européen, la question de l’amnistie totale pour toutes les parties impliquées dans ce conflit disparaît. A la place, une vision assez large : "Des mesures seront prises pour répondre aux souffrances des victimes du conflit."

Reste que tout ne fait pas consensus au sein du camp européen. La Première ministre italienne, Giorgia Meloni, a défendu dimanche l’idée que le plan américain "contient déjà de nombreux points acceptables" et qu’il n’était "pas nécessaire de présenter une contre-proposition complète". Selon elle, la discussion porte davantage sur certains nœuds — territoires, reconstruction, armée ukrainienne — que sur le cadre général proposé par Washington. Reste à savoir si les différentes parties trouveront un terrain d’entente.

© AFP

Le chef du cabinet de Volodymyr Zelensky Andriy Yermal, et le secrétaire d'Etat américain Marco Rubio à Genève, en Suisse, après des pourparlers le 23 novembre 2025.
Reçu avant avant-hier

Kirill Dmitriev, l’homme de Poutine dans l’ombre des négociations pour le plan de paix en Ukraine

23 novembre 2025 à 17:23

Derrière le plan de paix américain en 28 points dévoilé jeudi 20 novembre, se cache un nom rarement cité ouvertement : celui du Russe Kirill Dmitriev. Peu connu du grand public mais bien installé dans les réseaux du pouvoir russe, ce financier de 50 ans est l’un des principaux artisans du document qui reprend les lignes rouges de Moscou sur l’issue du conflit en Ukraine. Aux côtés de l’homme d’affaires américain Steve Witkoff, il serait l'un des architectes de la feuille de route américaine repoussée par Kiev qui l'a jugée trop favorable à la Russie.

Né en 1975 à Kiev, Kirill Dmitriev évite toutefois de se présenter comme Ukrainien. Le média indépendant russe The Bell souligne qu’il préfère se définir comme "enfant de l’Union soviétique". A noter que sa naturalisation russe, survenue au début des années 2000, reste entourée de zones d’ombre : selon plusieurs sources, le renseignement militaire russe (GRU) aurait facilité sa transition au moment où commençait son ascension dans la finance.

À la fin des années quatre-vingt, Kirill Dmitriev suit sa famille aux États-Unis. Diplômé de la prestigieuse université de Stanford, il passe brièvement en tant que stagiaire par le cabinet de consultants McKinsey, qui lui permet de poursuivre un cursus à Harvard. Il entame sa carrière en tant que principal associé dans la société d’investissement Delta Private Equity Partners dont l’un des fonds - Delta Capital Fund - est connu pour avoir été l’une des sociétés les plus rentables dans l’histoire financière russe. Il dirige ensuite le fonds ukrainien Icon Private Equity, lié à l’entourage de l’ancien président ukrainien Leonid Koutchma précise Novaïa Gazeta Europe.

Un proche du Kremlin

En 2011, il est nommé directeur du Fonds russe d’investissement direct (RFPI) – un outil clé du Kremlin pour attirer des capitaux étrangers. C’est à ce moment qu’il entre réellement dans le cercle stratégique de Vladimir Poutine. L’Express soulignait déjà en février dernier son rôle dans la conclusion de l’accord "OPEP + "entre Moscou et Riyad en 2016, qui a permis de stabiliser les prix du pétrole après plusieurs années de tensions. Reuters lui attribue également un rôle discret mais décisif dans certaines négociations d’échanges de prisonniers avec Washington.

Sa proximité avec le pouvoir russe ne se limite pas à l’économie. Il est marié à Natalia Popova, une proche de Katerina Tikhonova, la fille de Vladimir Poutine selon The Insider, repris par nos confrères du Courrier International. Selon plusieurs médias, cette double appartenance - homme d’affaires et membre du cercle restreint du Kremlin - expliquerait sa présence dans le processus de négociation de plan de paix. Dans The Guardian, qui le décrit comme un homme "à l'ambition démesurée", un chercheur avance même que son influence a repris de la vigueur depuis la perspective d’un retour de Donald Trump à la Maison-Blanche. Lors du premier mandat du républicain, il est devenu le principal négociateur de Vladimir Poutine à Washington, rôle qui s'est renforcé sous son actuel mandat.

Si Kiev se méfie aujourd’hui de son rôle, ce n’est pas seulement pour ses liens avec Moscou. La fuite du plan intervient en effet alors que l’Ukraine est ébranlée par un scandale de corruption. Or, certains observateurs y voient une stratégie calculée. Un jour avant la révélation du document, Kirill Dmitriev déclarait, selon L’Opinion, que "les révélations sur l’époque de Zelensky rendent la paix beaucoup plus probable."

© afp.com/Evelyn Hockstein

Kirill Dmitriev est un homme d'affaires qui appartient au cercle restreint du Kremlin.

En Russie, tout étranger doit désormais servir dans l’armée pour obtenir un permis de séjour

23 novembre 2025 à 15:22

C’est désormais officiel. Ecrit noir sur blanc. Depuis la signature de l’oukase n° 821 par le chef d’Etat russe, Vladimir Poutine, le 5 novembre 2025, la règle est la suivante : tout homme étranger âgé de 18 à 65 ans devra s’engager dans l’armée pour espérer obtenir un permis de séjour ou une naturalisation en Russie. Un contrat d’un an est théoriquement requis. Dans la pratique, il lie le soldat jusqu’à la fin de l'"opération militaire spéciale" en Ukraine - une durée donc indéfinie.

Si elle semble désormais gravée dans la juridiction russe, cette stratégie n’est pas nouvelle. Depuis les premiers mois de la guerre, des témoignages ont évoqué des pressions exercées sur des migrants originaires du Caucase ou d’Asie centrale. Certains travaillaient dans la restauration ou comme chauffeurs de taxi, rapporte Le Monde. Alors que leur statut précaire - absence de papiers d’identité à jour, renouvellement difficile de titre de séjour - les rendait vulnérables sur le sol russe, des centaines auraient été menacés d’expulsions s’ils refusaient de signer un engagement militaire. Dans certains cas, des personnes migrantes sans papiers auraient été placées dans des centres de rétention et sommés de "choisir".

Avec l’oukase 821, le système officieux est entériné et le champ de personnes concernées élargi. En effet, tout homme vivant déjà en Russie et souhaitant s’y établir durablement est désormais visé. Concrètement, si le candidat veut obtenir un permis de séjour ou déposer une demande de naturalisation, il devra présenter l’un des trois documents suivants : un contrat d’au moins un an avec les forces armées russes, un certificat de démobilisation ou un certificat médical d’inaptitude au service militaire. Un exemple concret ? Un Français marié à une Russe ne pourra plus obtenir de permis de séjour permanent sans signer un contrat avec l’armée.

Une stratégie militaire

Face caméra et sur les médias d’Etat, le chef du Kremlin parle d’une procédure administrative nouvelle liée à l’état de guerre, sans dire clairement qu’il s’agit de compenser la pénurie de combattants sur le terrain. En février 2025, The Center for Strategic and International Studies, think tank américain, estimait le nombre de victimes, depuis le 24 février 2022, à 1 million côté russe (dont 250 000 morts), rappelait le New York Times.

Si aucune donnée officielle n’a été publiée sur le nombre d’étrangers déjà recrutés de cette façon, les estimations varient entre 17 000 et 20 000 hommes toutes nationalités confondues. Un chiffre qui pourrait gonfler à plusieurs centaines de milliers si l’on inclut les citoyens venant des pays de l’ex-URSS, comme le rappellent toujours nos confrères du Monde. Par ailleurs, la nouvelle législation ne dit pas tout : le contrat d’un an n’implique pas de retour possible sur simple demande à l’issue du délai. Une fois intégré, le soldat reste au front tant que dure l’intervention militaire en Ukraine.

L’année dernière, un oukase précédent avait déjà tenté d’attirer des recrues : tout homme acceptant de servir dans l’armée se voyait promettre la nationalité russe. Certains y ont cru, pensant y voir un moyen de contourner la lourdeur administrative. Désormais, ce n’est plus une option, mais bel et bien une condition.

Par ailleurs, cette stratégie ne répond pas seulement aux besoins de l’armée. Elle s’inscrit aussi dans une politique migratoire de plus en plus rigide. Ainsi en 2024, plus de 80 000 personnes migrantes ont été expulsées de Russie pour violation des règles d’entrée et de séjour des étrangers, rapportait au début de l’année le site de l’agence Tass, s’appuyant sur des sources internes au Service fédéral des huissiers de justice. Une proportion qui a quasiment doublé par rapport à l’année 2023. Dans un tel climat, le contrat militaire fonctionne comme une solution imposée : partir au front ou quitter le pays.

© afp.com/MAXIM SHIPENKOV

Le président russe Vladimir Poutine, impose, depuis début novembre, 2025, un contrat militaire à tout ressortissant étranger désireux de vivre en Russie

"Bureaucrates, sadomasochisme et vélos volés" : au cœur d’une saga politico-judiciaire au Danemark

23 novembre 2025 à 11:36

"Toute cette affaire est complètement absurde", s’agace un chroniqueur du média danois centre droit Berlingske. De son côté, le Copenhagen Post semble se délecter de ce "polar nordique" qu’il résume en quelques mots : "bureaucrates, sadomasochisme et vélos volés." Le 5 novembre 2025, tous les yeux étaient braqués sur le tribunal de Lyngby, au nord de Copenhague. Ce dernier a ordonné le versement de 20 000 couronnes (soit environ 2 700 euros) à l’ancien patron du renseignement militaire danois (FE), Lars Findsen, pour atteinte à sa vie privée.

En cause : une réunion confidentielle, en janvier 2022, au cours de laquelle le chef du renseignement intérieur (PET), Finn Borch Andersen, aurait dévoilé aux responsables politiques des éléments intimes de sa vie, affirmant notamment que Lars Findsen volait des vélos pour les échanger contre des services sexuels sadomasochistes. Des accusations spectaculaires, mais impossibles à étayer.

La cour les a jugées fausses, illégales et offensantes, et donc largement injustifiables - même au nom de la sécurité nationale. Alors que le parquet a fait appel, ce verdict rouvre une plaie que le gouvernement aimerait refermer au plus vite. Le PET lui est désormais suspecté d’avoir manipulé les responsables politiques pour faire surveiller Lars Findsen.

Cette affaire "découle de l’une des sagas politiques et juridiques les plus extraordinaires de l’histoire récente du Danemark : le fameux "scandale FE", résume le Copenhagen Post.

Un partenariat secret entre le FE et l’agence américaine NSA

Tout commence le 21 août 2020, lorsqu’une agence de contrôle révèle qu’elle a été alertée par un lanceur d’alerte. Selon lui, le FE - le service de renseignement militaire - aurait caché des informations cruciales et pourrait avoir espionné des citoyens danois. Et la sanction ne se fait pas attendre : quelques jours plus tard, le ministre de la défense suspend plusieurs responsables, dont Lars Findsen, figure centrale du renseignement danois depuis plus de vingt ans.

Dans les mois qui suivent, les médias découvrent une autre dimension du dossier : un partenariat secret entre le FE et l’agence américaine NSA, permettant aux États-Unis d’exploiter les câbles sous-marins de télécommunications danois. Ce dispositif, encore officieux à l’époque, aurait servi à espionner des dirigeants européens au début des années 2010. L’information circule, sans jamais être confirmée et certaines fuites encerclent désormais Lars Findsen.

Lars Findsen placé sur écoute

À l’automne 2020, il est placé sous écoute. Le 8 décembre 2021, à son retour d’un déplacement en Macédoine du Nord, il est arrêté à l’aéroport de Copenhague par des agents en civil. La presse parle alors de l’opération de surveillance la plus coûteuse jamais menée dans le pays, rappellent nos confrères du Monde. Trois autres employés du FE sont interpellés puis relâchés. Lars Findsen, lui, passe 71 jours au centre de détention de Hillerød, avant d’être libéré sous conditions. Il racontera cette période dans un livre publié un an plus tard.

Une commission d’enquête blanchira les responsables du FE dès la fin 2021, mais l’affaire connaît un énième rebond : en septemb2022, Lars Findsen et un ancien ministre de la défense, Claus Hjort Frederiksen, sont officiellement mis en examen pour divulgation de secrets d’État. Il faudra attendre octobre 2023 pour que la Cour suprême reconnaisse publiquement, pour la première fois, l’existence du partenariat avec la NSA, confirmant ainsi ce que les autorités avaient longtemps tenté de minimiser. Peu après, les poursuites sont abandonnées. Lars Findsen a depuis quitté ses fonctions avec une compensation financière élevée.

Le PET désormais dans le viseur

Désormais, ce n’est plus le FE qui pose problème, mais la manière dont le PET a géré son enquête. Alors qu’une partie de la classe politique réclame désormais des sanctions contre son chef, les médias aussi se questionnent. Le Berlingske estime que "PET a rompu le contrat tacite entre le citoyen et l’État". Même interrogation dans le média Politiken : "Peut-on faire confiance à un chef du PET qui ment à nos politiciens et à la justice ?", se demande son rédacteur en chef.

Ce qui n’était qu’un scandale autour d’un homme devient peu à peu un test pour l’État de droit danois. De son côté, le gouvernement lui, semble bien décidé à tourner la page. Son objectif : éviter de nouvelles révélations sur l’accord avec les Américains.

© Ritzau Scanpix via AFP

Lars Findsen après son procès au tribunal de Lyngby, le mardi 21 octobre 2025. L'ancien directeur du Service de renseignement de la Défense, Lars Findsen, réclame des dommages et intérêts. Il affirme que le chef du PET a abusé de sa confiance en divulguant des détails de sa vie sexuelle à de hauts responsables politiques dans le cadre de l'affaire où il était accusé de fuite de secrets d'État.
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