TEST Date Everything! – un dating simulator aussi bizarre qu’attachant
Si vous n’avez toujours pas trouvé la perle rare du dating simulator, peut-être que Date Everything! est celui qu’il vous faut. Édité par Team17 et réalisé par la brillante société Sassy Chap Games, Date Everything!, ce nouveau simulateur de rencontres en mode bac à sable, vous plonge dans un univers coloré et déjanté avec près de 100 protagonistes hauts en couleur attendant d’être découverts. Mélangeant humour anglais, esthétique éclatante et sujets sensibles, Date Everything! ne se contente pas de proposer une histoire niaise : il est bien plus que ce qu’il semble être à la surface. Étant un genre parfois compliqué à appréhender, vaut-il vraiment le détour ?
Test réalisé sur Nintendo Switch grâce à une version numérique fournie par l’éditeur
Quand votre salon devient votre application de rencontres
Date Everything! commence de manière étonnamment sobre avec le début d’une journée de travail ordinaire au sein de Valdivian, en tant qu’employé au service après-vente. Malheureusement, cela ne se passe pas comme prévu, car dès le premier jour, nous sommes immédiatement licenciés, l’entreprise ayant décidé de remplacer sa main-d’œuvre par de l’intelligence artificielle. Heureusement pour nous, notre vie change immédiatement pour le mieux lorsqu’un mystérieux ami en ligne nous offre une paire de Dateviators, des lunettes magiques qui vont totalement changer la manière de voir notre environnement. En effet, ces dernières nous permettent de voir tout ce qui se trouve dans notre maison comme des Dateables, des objets à apparence humaine.
De manière plus concrète, tous les objets potentiels, Dateables, de votre maison peuvent désormais être des humains lorsque vous portez ces lunettes. Cependant, qui dit simulateurs de rencontres, dits des humains avec des sentiments, une personnalité et surtout une histoire. Des humains qui, bien sûr, peuvent mener à de l’amitié, de la romance ou de la haine. Toute l’attention de ce titre se focalise donc sur la rencontre de ce beau monde au sein même de votre propre intérieur.

Votre mission sera simple : explorez votre maison et rencontrez les 100 personnages qui s’y trouvent. 100 protagonistes au sein de votre maison, allant de votre canapé à votre téléphone, mais aussi à ce qu’il s’y trouve à l’intérieur ou vos cauchemars. Au fil du temps, vous pourriez développer une relation avec chacun d’eux. Et si vos échanges vont suffisamment loin, vous aurez même l’opportunité de les rendre humains de manière permanente et, par conséquent, de ne plus avoir besoin de lunettes. Cela implique aussi qu’ils puissent partir définitivement de votre foyer pour vivre pleinement leurs vies ou rester à vos côtés. Le tout dépendra de vos choix, de vos réponses et de la nature de votre relation avec chacun. Pour mener à bien cette aventure, le dialogue sera votre meilleur allié.
Le jeu étant intégralement en anglais, une bonne maîtrise de la langue est nécessaire, d’autant plus que certains dialogues regorgent de jeux de mots pointus ou d’humour absurde ; entre autres, une blague sur des composants électroniques ou un tapis de course viking, pour ne citer qu’eux. Comptez une bonne trentaine d’heures de jeu pour découvrir l’ensemble des interactions et des dénouements possibles dans cette histoire plus que rocambolesque.
100 objets et moi
Comme tout dating simulator qui se respecte, le public visé est plutôt de niche. Le genre, très particulier, est capable d’en dérouter plus d’un, malgré l’histoire plus qu’originale. Ici, nous faisons face à un gameplay réduit au strict minimum, à mi-chemin entre le visual novel et l’exploration narrative : les dialogues sont au cœur de l’expérience. Toutefois, au contraire des visual novels, aucun historique des échanges ni d’option d’ajustement de la vitesse de lecture ne seront présents via une interface dédiée. À la place, vous disposez d’un Data-ex, un équivalent de Pokédex pour suivre les histoires de chacun, l’avancement dans la découverte des protagonistes et la relation que vous avez avec ces derniers.
À cela s’ajoute un système de SPECS, des traits de personnalité que l’on développe au fil des interactions. Ces SPECS influencent directement la qualité des dialogues avec les objets de notre maison. Selon notre degré d’humour, d’empathie ou d’intuition, nous pouvons débloquer certaines réponses ou établir des liens plus profonds avec certains personnages. Souvent, ces dialogues supplémentaires permettent toujours d’avancer de manière positive dans le jeu.

En parallèle, le jeu regorge de collectables à découvrir : entre objets cachés, souvenirs à collectionner pendant les différentes conversations et easter eggs sur les personnages, les plus curieux auront de quoi s’occuper pendant de nombreuses heures. Le Data-Ex les recense également, ce qui permet de suivre votre complétion à tout moment. Une autre fonctionnalité plutôt appréciable dans le titre repose dans le système d’indices. Comme il n’est pas évident de trouver seul les 100 personnages dans une aussi grande maison, des rumeurs peuvent ainsi être débloquées lors de discussions avec les différents personnages, comme avec Maggie, la loupe ou Phoenicia, le téléphone. La notion d’indice peut être à double tranchant : soit ils sont limpides, soit vous vous retrouverez bloqué sans savoir que faire pendant de nombreuses heures.
Côté ergonomie, le menu est simplissime, pour nous rappeler que le genre sert avant tout l’histoire plutôt qu’un gameplay révolutionnaire, mais parfois un peu trop. Exit l’utilisation d’innombrables touches, ici le minimalisme fait foi. Quelques actions pour équiper vos lunettes, pour interagir avec l’environnement comme ouvrir les volets ou une porte, pour tenter de draguer un objet et vous obtiendrez l’ensemble des actions disponibles au cours d’une journée. Chaque journée est découpée en 5 actions, du matin au soir, avant que vous ne retrouviez le sommeil – ou le lit Betty, pour les intimes. Tous les personnages n’accepteront peut-être pas de vous parler dès le réveil ou certains vous demanderont de venir plutôt le lundi ou le vendredi. À vous de choisir de manière précise votre parcours pour avancer correctement dans le jeu et d’obtenir une fin pour chacun entre amour, amitié ou haine. Ces trois statuts sont débloqués à force de nombreuses interactions et de nombreuses petites missions à effectuer pour chacun, cela se résume souvent à aller parler à un autre protagoniste pour x raisons.

Là où brille Date Everything! est dans la direction artistique, la bande-son et la richesse de son écriture. Le chara design des personnages est bluffant. Chaque personnage est immédiatement reconnaissable et cohérent avec l’objet qu’il représente, même sans connaître sa version « réelle » dans la maison. Le jeu mêle exploration en 3D et phases de dialogues en 2D, avec quelques animations et effets visuels pas des moindres. Cela donne une impression de vie face aux mouvements de chaque personnage sans tomber dans le grotesque. Tout est finement dosé, proposant une expérience la plus humaine possible. La bande-son ajoute à cela une expérience encore plus complète. Chaque personnage dispose de sa propre bande-son. Le tout est sublimé par un voice acting de qualité, entièrement doublé en anglais pour chacun des protagonistes rencontrés. Et le travail est colossal de ce côté-ci au vu du nombre de personnages à doubler, ainsi que de la quantité de dialogues.

Mais ce qui étonne le plus dans un univers aussi coloré, c’est la maturité des thèmes abordés. On pourrait croire Date Everything! se contente de jouer avec uniquement les codes de l’amour ou de la haine, mais certains protagonistes vont nous plonger dans des histoires profondes,qui peuvent toucher chacun d’entre nous. Parfois même des récits peut-être un peu trop sensibles, comme le sujet de la mort, du sexe, des violences domestiques ou des relations toxiques, pour ne citer qu’eux. Et le jeu prend ces sujets au sérieux : Skylar, nos lunettes magiques nous demanderont en première interaction si nous acceptons d’être exposés à ce genre de sujet. Cette décision pourra toujours être changée en cours de route dans nos paramètres. Si nous ne souhaitons pas poursuivre cette interaction, nous finirons par choisir simplement notre relation avec le protagoniste en question, évitant tout blocage dans le jeu. Une idée bien amenée pour des âmes plutôt sensibles, proposant une expérience libre, inclusive et modulable. Le jeu se veut aussi inclusif avec des personnages LGBTQIA+, ouverts à tous les esprits, que ce soit dans le corps, dans l’esprit, dans les orientations sexuelles. Certains personnages ne cherchent aucunement l’amour et chercheront uniquement à obtenir une amitié sincère. À vous de comprendre leurs attentes, de choisir les bons mots et de tisser les liens qui vous semblent justes.
L’amour ne fait pas tout
L’histoire est donc centrale pour le genre du dating simulator. On a pourtant une recette parfaite avec tous les éléments cités précédemment. Cependant, il est astucieux de contrebalancer tout ça. Date Everything! souffre de plusieurs problèmes techniques pouvant entacher l’expérience. L’un des défauts les plus marquants concerne les ralentissements fréquents, notamment lors de séquences impliquant plusieurs personnages en même temps où le lancement même du jeu. Cela va même jusqu’à des crashs en fin d’interaction. Heureusement, le jeu propose un système de sauvegarde automatique et manuelle conséquent, qui limite la frustration.
À cela s’ajoute une interface peu intuitive, où les objectifs sont peu indiqués dans le Data-Ex. Certains joueurs peuvent être bloqués dans l’avancement de l’histoire d’un personnage, se sentant perdu ou ne sachant que faire pour débloquer l’interaction suivante. Cela aurait pu être un point positif d’exploration forcée et de réflexion accrue si cela n’était pas amplifié par un manque d’outils pratiques : aucun historique de conversations, aucune possibilité d’accélérer le texte ou de régler la vitesse de défilement, ce qui est regrettable pour un jeu aussi verbeux.
Autre point qui pourrait rebuter une partie du public francophone : Date Everything! est entièrement en anglais, et son écriture repose énormément sur des jeux de mots ou des tournures parfois complexes. Quelque chose qui passera inaperçu pour des amoureux de la langue de Shakespeare, mais peut devenir un obstacle pour les autres, notamment lorsqu’une mauvaise interprétation d’une réplique influence une relation ou la fin de cette dernière. On pensera à Cam, l’ordinateur qui nous aura parlé de composants électroniques de manière un peu trop pointue à notre goût. Fort heureusement, cette exigence linguistique est portée par un voice acting exceptionnel, qui reste l’un des plus grands atouts du titre.
Chaque personnage dispose d’une voix propre, avec une interprétation parfaite, drôle et touchante selon le ton du dialogue. Et parmi les doubleurs les plus marquants, on retrouve Neil Newbon, la voix d’Astarion dans Baldur’s Gate 3, qui signe ici encore une performance remarquable en prenant le rôle de notre séchoir à linge. Nous pouvons aussi citer la voix de Daisuke Tsuji, qui prête autant la voix à Daisuke, notre vaisselle, qu’à Jin Sakai, protagoniste principal de Ghost of Tsushima. Le casting vocal impressionne par sa variété : une tâche colossale au vu du nombre de protagonistes, même ceux qui ont eu l’idée du jeu, Ray Chase et Robbie Daymond, deux acteurs chevronnés, font partie du casting des voix. Il ne fait aucun doute que ce doublage de qualité contribue grandement à l’immersion.

Verdict
Date Everything! est une très bonne découverte pour cet été. Aussi bien inattendu que réussi, c’est un véritable ovni vidéoludique, aussi loufoque qu’ambitieux, qui bouscule les codes du dating simulator en mettant en scène une centaine de personnages, une écriture aussi touchante qu’absurde et un voice acting aux petits oignons. Vous arrachant un sourire d’un côté, vous surprenant de l’autre, Date Everything! vous fera passer par de nombreux sentiments. Attention cependant aux sujets sensibles qui pourront en rebuter plus d’un, un jeu axé à un public adulte qui acceptera les sujets complexes. Si vous êtes curieux, patient, à l’aise avec l’anglais et amateur d’expériences narratives atypiques, vous pourriez bien tomber amoureux… de votre sèche-linge, de votre plaid ou de votre salle de sport. Et honnêtement ? Ce serait totalement normal et on ne vous jugera pas.
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