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Reçu aujourd’hui — 17 octobre 2025 L'Express

Virginia Contreras : "Donald Trump n’est pas la solution miracle pour le Venezuela"

17 octobre 2025 à 17:00

Le Venezuela est sur le pied de guerre. Alors que l’administration Trump a autorisé, jeudi 16 octobre, des opérations clandestines de la CIA contre le régime de Caracas et que le Pentagone a mené, ces dernières semaines, plusieurs frappes en mer des Caraïbes sur des bateaux, tuant 27 narcotrafiquants présumés, la pression est maximale sur le président Nicolás Maduro. Sept navires de guerre américains ont été déployés depuis le mois d’août dans la zone, dont un dans le Golfe du Mexique. Le 16 octobre, Caracas a renforcé sa présence militaire dans les Etats frontaliers avec la Colombie, dans le cadre de manœuvres impliquant près de 17 000 soldats. Une tension croissante, marquée par deux interrogations essentielles qui préoccupent l’ensemble de la région : les Etats-Unis envisagent-ils des frappes sur le territoire vénézuélien ? Sur ce sujet, le locataire de la Maison-Blanche entretient le doute : "Nous regardons du côté de la terre ferme à présent, car nous contrôlons très bien la mer…". Envisage-t-il par la même occasion de renverser son ennemi juré en Amérique latine ? "C’est une question ridicule qu’on me pose là. Enfin, ce n’est pas vraiment une question ridicule, mais ne serait-ce pas ridicule de ma part d’y répondre ?". Officiellement, Washington accuse le président vénézuélien et de son gouvernement de diriger une vaste organisation de trafic de drogue vers les Etats-Unis - un thème qui a d’ailleurs constitué l’un des arguments de campagne du candidat républicain. En parallèle, les cercles du pouvoir vénézuélien redoutent que Donald Trump ne cherche à mettre la main sur les importantes réserves de pétrole du pays.

A L’Express, Virginia Contreras ne cache pas son inquiétude même si, selon elle, Donald Trump agite un "nouvel écran de fumée". Cette ex-ambassadrice du Venezuela auprès de l’Organisation des Etats américains (OEA), à Washington, et ancienne avocate de Hugo Chávez, désormais fervente opposante au régime et exilée aux Etats-Unis, ne voit pas d’un bon œil la volonté interventionniste de Donald Trump dans les affaires de son pays. Entretien.

L’Express : Comment interprétez-vous la volonté du président Trump d’autoriser des actions clandestines de la CIA contre le Venezuela ?

Virginia Contreras : Cela relève presque de la plaisanterie : ce type d’opération est, par définition, secret. Dès lors qu’on l’annonce publiquement, cela cesse de l’être… Cette mise en scène semble surtout destinée à créer un écran de fumée et à projeter une image de puissance des Etats-Unis. Il serait naïf de croire que la CIA n’est pas présente au Venezuela depuis longtemps. A l’époque, Hugo Chavez dénonçait régulièrement la présence de la CIA. Ce n’est donc pas une révélation. Ce service de renseignement a toujours opéré dans de nombreux pays d’Amérique latine, participant à plusieurs coups d’Etat, notamment celui contre Salvador Allende au Chili, qui permit l’arrivée au pouvoir d’Augusto Pinochet.

L’annonce d’une possible intervention de la CIA au Venezuela vise probablement à exercer une pression sur le président Maduro tout en cherchant à galvaniser l’opposition. Si l’on ajoute à cela la récompense de 50 millions de dollars promise par le gouvernement américain pour la capture de Nicolás Maduro, ainsi que la destruction récente de bateaux transportant de présumés narcotrafiquants, il est clair que la pression s’intensifie. Néanmoins, il est peu probable que ces actions entraînent un changement dans la politique du gouvernement vénézuélien à court terme.

Pourquoi ?

Nicolás Maduro n’est pas seul. Il bénéficie d’aide des services de renseignement russe, iranien, cubain et sans doute chinois. Si la CIA avait réellement été efficace, ni Nicolás Maduro ni même Hugo Chávez n’auraient conservé le pouvoir ; leur chute aurait été provoquée bien avant. Je ne crois pas que l’entourage de Maduro souhaite son départ, car cela entraînerait l’effondrement du pouvoir en place. Ceux qui détiennent leurs privilèges et de l’argent grâce à lui ne peuvent se résoudre à le voir partir. Il a une administration solide - bien que corrompue -, issue du chavisme, qui demeure loyale et refuse de se détacher de lui. Si Maduro part, où iront ces gens ?

Le Venezuela prend cette menace très au sérieux. Il a créé le Conseil national pour la souveraineté et la paix en septembre pour gérer cette crise. Comment peut régir le gouvernement vénézuélien ?

Le gouvernement vénézuélien a déjà annoncé la mise en détention des étrangers entrant sur le territoire, en particulier des ressortissants américains. Cette politique pourrait servir à justifier l’arrestation d’Américains, y compris innocents, sous prétexte qu’ils agissaient pour le compte de la CIA. Ce type de pratique n’est pas inédit. À plusieurs reprises sous l’administration Biden, des citoyens américains ont été arrêtés puis échangés contre des ressortissants vénézuéliens. On se souvient notamment de deux neveux de l’épouse du président Maduro, condamnés pour trafic de drogue et incarcérés à New York, avant d’être libérés en échange de citoyens américains détenus au Venezuela. Des échanges comparables avaient déjà eu lieu sous l’administration Trump.

Si Donald Trump ne met pas sa menace à exécution. Quels sont les autres moyens de rétorsion à sa disposition ?

Parallèlement, les mesures prises par Donald Trump à l’égard des Vénézuéliens, y compris de ceux résidant légalement aux Etats-Unis, se sont durcies. Certains, ayant déposé une demande de protection temporaire ou d’asile, ont vu leurs démarches rejetées, tandis que d’autres ont été expulsés, notamment vers le Salvador Autrement dit, rien n’indique une quelconque bienveillance des Etats-Unis envers les ressortissants vénézuéliens, contrairement à ce que continuent malheureusement de penser de nombreux opposants au régime de Caracas.

Le président Trump exploite la bonne foi des Vénézuéliens qui aspirent à un changement démocratique. Il est difficile de croire qu’un dirigeant qui, aux Etats-Unis, manifeste un mépris constant pour l’Etat de droit et pour le principe de séparation des pouvoirs, puisse sincèrement vouloir défendre les droits des citoyens ailleurs. Il apparaît dès lors contradictoire de prétendre être le VRP de la démocratie au Venezuela tout en fragilisant ses fondements mêmes sur le sol américain. Cela n’a tout simplement aucun sens.

Nicolás Maduro est-il fragilisé ?

Maduro est considérablement affaibli en raison d’un problème majeur d’illégitimité. Le gouvernement vénézuélien a très mal géré les élections de l’année dernière, c’est indéniable. Il n’a pas été en mesure de fournir des résultats clairs. De nombreux observateurs estiment que la candidate (NDLR : Corina Yoris, une universitaire de 80 ans sans expérience politique) soutenue par María Corina Machado aurait remporté le scrutin. De surcroît, le gouvernement vénézuélien a aggravé la situation par une gestion catastrophique : au lieu de répondre aux critiques des autres chefs d’Etat, il s’est montré intransigeant et s’est isolé. Lors des frappes contre les bateaux, il est intéressant de souligner que, bien que certains Etats se soient exprimés, notamment le Brésil, la Colombie, la Chine et la Russie, alliés stratégiques du Venezuela, aucune déclaration forte et décisive n’a été formulée en appui du gouvernement de Maduro. A chaque fois, le Venezuela fait le choix de s’isoler en répondant par des insultes ou en rompant les relations diplomatiques. Cela s’est encore vu lorsque le Venezuela a confirmé avoir fermé son ambassade à Oslo, trois jours après l’attribution du prix Nobel de la paix à Maria Corina Machado.

Donald Trump fait preuve d’un appétit géopolitique féroce depuis qu’il est de retour à la Maison-Blanche. Redoutez-vous qu’il ait des visées sur les ressources du Venezuela ?

Je doute sérieusement de la volonté du président Trump de mener une véritable lutte internationale contre le trafic de drogue. Donald Trump ne prévoit pas d’intervenir au Mexique, où circulent des cartels de fentanyl, ni d’actions contre la Colombie, principal producteur de cocaïne en Amérique latine… Derrière cet affichage, il y a évidemment un grand intérêt du gouvernement américain pour les minerais, les terres rares, le pétrole "lourd" vénézuélien qui convient aux raffineries américaines… Il y a une forme d’hypocrisie car malgré toutes les tensions, le Venezuela continue de fournir du pétrole aux Etats-Unis. Et le sous-sol vénézuélien contient un pétrole inexploité qui pourrait être exploité pendant des siècles, un domaine d’intérêt stratégique majeur pour les Etats-Unis.

A qui s’adresse Trump lorsqu’il parle de guerre contre les narcos ?

Il parle à son électorat - notamment hispanique - qui l’a soutenu. Cela prend encore plus de sens dans ce contexte de crise, où tous les sondages le montrent en position très fragile aux Etats-Unis. Dans cette crise, il convient de souligner que Trump fait éliminer des individus sans qu’aucune information ne soit disponible sur leur identité ni sur les crimes qu’ils auraient pu commettre, et ce, sans le moindre procès. C’est criminel. Il y a une inquiétude bien légitime au sein du Pentagone. Ceux qui ont exécuté ces ordres pourraient tôt ou tard être traduits en cour martiale…

Donald Trump serait-il, selon vous, la pire personne pour régler les problèmes du Venezuela ?

Je ne soutiendrai jamais une action menée par un pays étranger - pas même le Vatican ! - contre le Venezuela pour résoudre ses problèmes. Les difficultés du pays doivent être réglées par les Vénézuéliens eux-mêmes, ce qui suppose une tolérance et un dialogue entre toutes les parties impliquées. À ma connaissance, aucun pays au monde n’a jamais vu ses problèmes résolus par une intervention du gouvernement américain.

Mais la situation politique reste paralysée au Venezuela. Et le gouvernement Maduro discrédité fait preuve de résilience. Quelle pourrait être l’alternative ?

Il existe plusieurs groupes d’opposition, mais aucun ne parvient à trouver un consensus. Ces différents groupes devront un jour s’asseoir ensemble et parvenir à un accord, car il est inutile que chacun reste de son côté en se considérant comme un petit roi. Face à Nicolás Maduro, une telle fragmentation n’a aucun sens. Il est triste de penser que, durant la Seconde Guerre mondiale, des puissances aussi différentes que l’Union soviétique, le Royaume-Uni et les États-Unis aient réussi à s’unir autour d’une même table pour lutter contre l’Allemagne nazie, alors qu’aucun compromis solide ne parvient à être établi aujourd’hui au Venezuela. Il faut le faire parce que Maduro, même s’il obtient une part minime des voix, va continuer de tricher, c’est certain.

Comment ces tensions avec les Etats-Unis sont-elles perçues dans la population vénézuélienne avec qui vous avez contact ?

On observe deux positions extrêmes. D’un côté, certains optimistes pensent que le président Maduro est sur le point de fuir, peut-être vers la Russie, la Chine ou l’Iran, et considèrent déjà le gouvernement comme fini. De l’autre, et c’est mon cas, beaucoup restent sceptiques, rappelant que la situation perdure depuis près de trente ans. Ils ne croient donc pas aux solutions miraculeuses. L’histoire vénézuélienne est tumultueuse : des invasions, des attentats, des élections remportées par l’opposition, des coups d’État, la mort de Chávez… À chaque événement, les attentes se sont effondrées, et la désillusion s’est installée.

Malgré les difficultés de la vie au Venezuela, la population survit. Il ne s’agit évidemment plus du pays que j’ai connu, où je suis né et ai grandi. Les services publics sont aujourd’hui dans un état déplorable, leur qualité est insuffisante et la corruption y est omniprésente. Néanmoins, les Vénézuéliens parviennent chaque jour à se réinventer. Ils sont un exemple de résilience.

© afp.com/Kevin Dietsch

Donald Trump à la Maison-Blanche le 26 septembre 2025

La Chine confirme l'éviction du numéro 3 des armées pour corruption

17 octobre 2025 à 14:52

Le ministère chinois de la Défense a indiqué vendredi que des enquêtes pour corruption avaient été lancées contre le numéro trois des armées, le général He Weidong, ainsi que huit autres responsables militaires de haut rang. Le général He Weidong et les huit autres hommes sont les derniers en date à être rattrapés par la vaste campagne anticorruption lancée par le président Xi Jinping dans les milieux civils et militaires.

Le général He Weidong, jusqu'alors vice-président de la Commission militaire centrale (CMC), n'a plus été vu en public depuis plusieurs mois, une absence qui avait suscité les spéculations.

La CMC est l'organe de commandement militaire suprême de l'appareil chinois. Sa position de vice-président de la CMC faisait du général He Weidong le troisième plus haut responsable des armées, le premier étant le chef de l'Etat Xi Jinping.

Neuf officiers supérieurs expulsés de l'armée

Le général He Weidong était absent de la grande parade militaire donnée le 3 septembre à Pékin pour célébrer la victoire contre le Japon et la fin de la Seconde Guerre mondiale il y a 80 ans. Le Financial Times avait rapporté en avril qu'il avait été arrêté et démis de ses fonctions de vice-président de la CMC. C'est la première fois que le pouvoir confirme officiellement sa disgrâce, sans donner aucune information sur une éventuelle détention.

Les neuf officiers supérieurs ont été expulsés de l'armée, a indiqué dans un communiqué un porte-parole du ministère de la Défense, Zhang Xiaogang. He Weidong et sept autres, membres par ailleurs du comité central du Parti communiste, en ont également été exclus, ajoute le porte-parole. "La punition sévère infligée à He Weidong, Miao Hua, He Hongjun et aux autres démontre une fois de plus la détermination inébranlable du comité central du parti et de la CMC à lutter contre la corruption", dit le porte-parole.

Xi Jinping a fait de la lutte anticorruption une priorité

L'agence officielle Chine nouvelle avait déjà annoncé en juin que l'amiral Miao Hua avait été démis de ses fonctions pour de "graves violations de la discipline", une formule généralement utilisée pour désigner des faits de corruption ou plus rarement de déloyauté.

Depuis son arrivée à la tête du parti en 2012, Xi Jinping a fait de la lutte anticorruption une priorité, à tous les échelons de l'Etat et du Parti communiste. Les partisans de cette campagne affirment qu'elle favorise une gouvernance saine. D'autres estiment qu'elle permet d'écarter de potentiels rivaux politiques.

Les dernières mises à l'écart sont annoncées trois jours avant une session plénière de quatre jours du comité central, un important rendez-vous politique au cours duquel le parti doit définir les grands objectifs économiques, mais aussi politiques ou sociaux pour cinq ans à partir de 2026.

© Xinhua via AFP

Le président chinois Xi Jinping, également secrétaire général du Comité central du Parti communiste chinois et président de la Commission militaire centrale, passe en revue les troupes lors de son inspection de la garnison de l'Armée populaire de libération de la Chine stationnée dans la Région administrative spéciale de Macao, dans le sud de la Chine, le 20 décembre 2024. (Xinhua/Li Gang)

Les cyberattaques russes contre les pays de l’Otan se multiplient, alerte un géant de l’informatique

17 octobre 2025 à 13:41

C’est une autre guerre que mène à bas bruit Moscou contre les pays de l’Otan. Selon le fabricant de logiciel Microsoft, au cours de l’année dernière, la Russie a intensifié de 25 % ses attaques contre des Etats membres de l’Alliance atlantique, peut-on lire dans un rapport annuel sur la cybersécurité. L’entreprise informatique constate que, parmi les dix pays les plus ciblés par les hackers russes, neuf font partie de l’Otan, le 10e étant l’Ukraine.

Les principales cibles sont les plateformes des autorités, les universités et organismes de recherche, les think tanks ainsi que les ONG. Les Etats-Unis sont le pays le plus victime d’attaques (20 %), suivis par le Royaume-Uni (12 %) et l’Ukraine (11 %).

Quel est le but recherché ? La Russie mène actuellement une "guerre hybride", combinant à la fois l’offensive militaire directe contre l’Ukraine, avec une série d’attaques non conventionnelles contre des membres de l’Otan : attaques de drone, sabotage, et aussi… cyberattaques, alertent plusieurs observateurs.

"C’est une guerre d’un autre genre mais l’hostilité, les cyberattaques, les attaques physiques, le travail de renseignement sont considérables", prévenait le mois passé Eliza Manningham-Buller, ancienne dirigeante des renseignements britanniques, le MI5, selon Skynews.

Amy Hogan-Burney, vice-présidente chargée de la cybersécurité chez Microsoft, a pour sa part indiqué à The Guardian s’attendre à ce que la Russie "poursuive ses activités dans de nombreuses zones relevant de l’Otan" à l’avenir.

Réseaux criminels

Le rapport explique que, pour élargir leurs attaques, les hackers russes n’hésitent pas à aller au-delà de leur propre réseau, et "s’appuient de plus en plus sur l’écosystème cybercriminel" local (logiciels malveillants, proxies). C’est le cas notamment pour les opérations visant à extorquer des fonds ou les "rançongiciels", ciblant des entreprises et institutions publiques.

Les buts recherchés sont variés : certaines attaques sont motivées par l’appât du gain, tandis que d’autres poursuivent des missions de sabotage et de perturbations, comme celles visant par exemple le trafic aérien. Ce sont particulièrement les petites entreprises dans les pays alliés de l’Ukraine qui sont visées, car elles sont perçues comme des points d’entrées plus faciles à percer, dans le but d’atteindre ensuite des organisations plus importantes.

Pour lutter contre ces attaques, le rapport de Microsoft préconise plusieurs solutions : renforcer la sécurité des authentifications des systèmes informatiques (la majorité des attaques étant des violations de mot de passe) ; utiliser l’intelligence artificielle pour débusquer d’autres logiciels malveillants utilisant ce même type de technologie…

Mais surtout, élever la cybersécurité à un niveau "stratégique" par les Etats, en coopération plus étroite avec le secteur privé et ne pas hésiter à sanctionner les hackers, dans un but de dissuasion. "Les gouvernements doivent mettre en place des règlements qui prévoient des conséquences crédibles pour les activités malveillantes qui enfreignent les règles internationales", indique Microsoft.

© afp.com/ALAIN JOCARD

Pour élargir leurs attaques, les hackers russes n’hésitent pas à s’appuyer sur l’écosystème cybercriminel local. Illustration

A Gaza, la paix menacée par la question de la restitution des corps des otages

17 octobre 2025 à 12:55

Lundi 13 octobre, l’heure était à l’euphorie en Israël. Après 738 jours de captivité, les 20 derniers otages vivants étaient libérés par le Hamas. Puis, le décompte macabre des dépouilles a débuté. Conformément aux termes de l’accord de cessez-le-feu conclu avec l'Etat hébreu - sur la base du plan de Donald Trump - le mouvement islamiste devait remettre tous les otages encore détenus à Gaza, vivants ou morts, dans les 72 heures suivant la cessation des hostilités, soit au plus tard lundi à 9 heures. Sur les 28 dépouilles encore retenues à Gaza, seulement neuf ont été restituées à ce jour. Alors que les familles d’otages intensifient les pressions sur le Premier ministre israélien, Benyamin Netanyahou, Israël menace de reprendre la guerre.

Jeudi 17 octobre, Benyamin Netanyahou s’est à nouveau dit "déterminé" à ramener "tous les otages", lors de la commémoration officielle de l’attaque terroriste du Hamas le 7 octobre 2023. Le dirigeant est sous la pression du Forum des Familles d’Otages et de Disparus, qui a déclaré dans un communiqué publié jeudi que "l’accord ne peut continuer à être appliqué sans que le Hamas ne restitue tous les otages". Une prise de position inédite de la part de ce mouvement qui appelait jusqu’à présent à un arrêt des hostilités mais dont les déclarations font écho à celles de l’Etat hébreu, qui accuse le Hamas de violer l’accord de cessez-le-feu.

La livraison d’aide humanitaire menacée

Mercredi soir, le ministre israélien de la Défense, Israël Katz, s'est de fait montré menaçant à l'égard du mouvement islamiste : "Si le Hamas refuse de respecter l'accord, Israël, en coordination avec les Etats‑Unis, reprendra les combats et agira pour une défaite totale", a-t-il déclaré.

De son côté, Itamar Ben Gvir, le ministre israélien de la Sécurité intérieure - qui tient les mêmes positions que son Premier ministre sur le cessez-le-feu - accuse le Hamas de jouer la montre. Le 15 octobre, cette figure de l’extrême droite israélienne a de nouveau appelé Benyamin Netanyahou à couper totalement l’aide humanitaire pour Gaza. Les accès à Gaza, tous contrôlés par Israël, restent très restreints. Après le cessez-le-feu et la libération des otages, Israël doit en principe ouvrir à l’aide humanitaire le point de passage de Rafah, entre l’Egypte et le territoire palestinien, crucial pour l’entrée de l’aide humanitaire. Le chef de la diplomatie israélienne Gideon Saar a annoncé jeudi qu’il pourrait ouvrir dimanche.

Mercredi, Donald Trump avait semblé appeler à la patience. "C’est un processus macabre […] mais ils creusent, ils creusent vraiment" et "trouvent beaucoup de corps", avait affirmé le président des Etats-Unis à la presse.

Une fouille difficile

Le Hamas a réaffirmé ce vendredi "son engagement" envers la "mise en œuvre" de l’accord de cessez-le-feu et à "remettre tous les corps restants" des otages. Le mouvement islamiste argue que son retard est dû aux difficultés qu’il rencontre pour retrouver les corps enfouis, et soutient que les neuf dépouilles restituées sont les seuls corps auxquels il a pu accéder. Il affirme aussi avoir besoin d’un "équipement spécial" pour poursuivre sa tâche. "Le processus de restitution des corps des prisonniers israéliens pourrait prendre un certain temps, car certains de ces corps ont été enterrés dans des tunnels détruits par l’occupation (israélienne, NDLR), tandis que d’autres restent sous les décombres de bâtiments qu’elle a bombardés et démolis", a précisé le Hamas sur Telegram.

La Turquie, proche des dirigeants politiques du Hamas et qui entend jouer un rôle dans l’application du cessez-le-feu à Gaza a annoncé jeudi y envoyer des spécialistes pour participer aux recherches des corps ensevelis, "y compris des otages". Selon les autorités turques, une équipe de 81 secouristes habitués des terrains difficiles, notamment des tremblements de terre, se trouve sur place et attend le feu vert d'Israël pour entrer à Gaza.

Une étude satellite de l’université de l’Oregon citée par le Wall Street Journal estime que Gaza est confronté à un niveau de destruction inégalé depuis la seconde guerre mondiale. Depuis le début de la guerre, les bombardements israéliens auraient endommagé ou détruit 60 % des battements du Territoire palestinien. La Croix-Rouge a qualifié la recherche des corps de "défi immense". Selon le journal américain, "certains ne seront peut-être jamais trouvés".

En échange du retour des dépouilles d’otages, Israël a remis au total 120 corps de Palestiniens à Gaza, selon le ministère de la Santé du Hamas. Une étape ultérieure du plan prévoit notamment le désarmement du Hamas et l’amnistie ou l’exil de ses combattants et la poursuite du retrait israélien, des points qui restent sujets à discussion.

© afp.com/Jack GUEZ

Une femme réagit au milieu de la foule rassemblée sur la "Place des otages" à Tel-Aviv, quelques heures après que le Hamas a remis des corps d'otages dans la bande de Gaza, le 20 février 2025

Ukraine : le Kremlin évoque "de nombreuses questions" à résoudre avant la rencontre Poutine-Trump

17 octobre 2025 à 12:43

Donald Trump et Vladimir Poutine se rencontreront prochainement à Budapest, une annonce surprise faite à la veille d’une entrevue à la Maison-Blanche entre le président américain et son homologue ukrainien Volodymyr Zelensky, ce vendredi 17 octobre. Ce dernier espère obtenir des missiles Tomahawk de la part des Etats-Unis, alors que la Russie multiplie les frappes contre les infrastructures énergétiques en Ukraine.

La rencontre avec Vladimir Poutine a été décidée pendant un échange téléphonique jeudi entre les dirigeants russe et américain, dont le maître du Kremlin a profité pour avertir que la livraison de ces armes américaines "nuirait considérablement" à la relation entre Moscou et Washington. Le sommet aura lieu "dans les deux prochaines semaines", a précisé Donald Trump jeudi pendant un échange avec la presse dans le bureau Ovale.

Les infos à retenir

⇒ Un sommet Trump-Poutine prévu à Budapest dans les prochaines semaines

⇒ Volodymyr Zelensky aux Etats-Unis, pour négocier plus de livraisons d’armes

⇒ L'UE favorable à une rencontre Trump-Poutine à Budapest, si elle fait "avancer le processus de paix"

L'UE favorable à une rencontre Trump-Poutine à Budapest, si elle fait "avancer le processus de paix"

La Commission européenne a accueilli favorablement vendredi la perspective d'une rencontre entre Donald Trump et Vladimir Poutine à Budapest, à la condition qu'elle fasse "avancer le processus de paix" en Ukraine. Bruxelles a indiqué que les avoirs du président russe et de son ministre des Affaires étrangères Sergueï Lavrov étaient actuellement gelés, mais qu'il ne "leur était pas spécifiquement interdit de voyager" dans l'UE.

"Nous vivons dans le monde réel", a souligné Olof Gill, porte-parole de l'exécutif européen. "Les réunions ne se déroulent pas toujours dans l'ordre ou le format que nous souhaiterions, mais si elles nous rapprochent d'une paix juste et durable pour l'Ukraine, alors nous devons les accueillir favorablement", a-t-il ajouté.

Le président russe est visé par un mandat d'arrêt de la Cour pénale internationale (CPI) en raison du transfert "illégal" d'enfants ukrainiens vers la Russie.

Le Kremlin évoque "de nombreuses questions" à résoudre avant la rencontre Poutine-Trump

Le porte-parole du Kremlin Dmitri Peskov a affirmé vendredi qu'il restait de "nombreuses questions" à résoudre avant un possible sommet entre Vladimir Poutine et Donald Trump à Budapest, tout en confirmant la "volonté" d'une rencontre entre les deux dirigeants. "Lavrov et Rubio (les chefs des diplomaties russe et américaine, NDLR) vont commencer à travailler sur la question. D'abord, ils vont s'appeler, se rencontrer et commencer à discuter de toutes les questions, et il y a de nombreuses questions", a déclaré Dimitri Peskov à la presse.

Un sommet entre Donald Trump et Vladimir Poutine aura lieu "dans les deux prochaines semaines", a précisé le président américain jeudi soir pendant un échange avec la presse dans le bureau Ovale. La rencontre a été décidée pendant un échange téléphonique entre les deux dirigeants, dont le maître du Kremlin a profité pour avertir que la livraison de ces armes américaines "nuirait considérablement" à la relation entre Moscou et Washington. "Vladimir Poutine a réitéré son point de vue : les Tomahawk ne modifieront pas la situation sur le champ de bataille mais nuiront considérablement aux relations entre nos deux pays. Sans parler des perspectives de règlement pacifique" en Ukraine, a indiqué le conseiller diplomatique du Kremlin, Iouri Ouchakov.

Sur son réseau Truth Social, Donald Trump a lui jugé cet échange "très productif". "Nous avons décidé qu’une réunion de nos conseillers de haut niveau aurait lieu la semaine prochaine. Les premières réunions seront dirigées par le secrétaire d’Etat Marco Rubio pour les Etats-Unis" dans un lieu encore à définir. "Puis le président Poutine et moi-même nous réunirons dans un endroit déjà convenu, Budapest, en Hongrie, pour voir si nous pouvons mettre fin à cette guerre sans gloire entre la Russie et l’Ukraine".

"Toute réunion qui fait avancer le processus visant à instaurer une paix juste et durable en Ukraine est la bienvenue", a salué vendredi matin affirmé Olof Gill, porte-parole de l'exécutif européen. Le choix de Budapest pour cette rencontre ne s’est pas fait au hasard : Vladimir Poutine est sous le coup d’un mandat d’arrêt de la Cour pénale internationale, dont la Hongrie a décidé de se retirer. Ce retrait sera effectif le 2 juin 2026. "Nous sommes prêts !" a commenté sur X le Premier ministre hongrois Viktor Orbán, allié du chef d’Etat américain et proche du Kremlin.

Kiev veut convaincre les Etats-Unis de lui livrer des missiles Tomahawks

Volodymyr Zelensky s’entretiendra avec Donald Trump à la Maison-Blanche, ce vendredi lors d'une rencontre prévue à 13h00 (19h00 heure française). Le président ukrainien veut convaincre son homologue de lui fournir plus d’armes, dont des missiles Tomahawk, un engin pouvant voler jusqu’à 1 600 kilomètres, alors que la Russie multiplie les frappes contre les infrastructures énergétiques en Ukraine. Il a d'ailleurs indiqué ce matin sur un réseau social avoir rencontré des représentants du fabricant américain des systèmes de missiles Tomahawk et Patriot.

Le président américain s’est toutefois montré très prudent sur l’éventuelle livraison de ces missiles de croisière à Kiev. "Nous ne pouvons pas appauvrir (les réserves de) notre propre pays", a dit Donald Trump, ajoutant : "Nous en avons besoin aussi, donc je ne sais pas ce que nous pouvons faire."

Peu après son arrivée à Washington jeudi, Volodymyr Zelensky a dit espérer que la dynamique de paix au Proche-Orient aidera à mettre fin à la guerre en Ukraine. "Demain (vendredi), une réunion avec le président Trump est prévue, et nous espérons que l’élan pour freiner le terrorisme et la guerre qui a porté ses fruits au Proche-Orient aidera à mettre fin à la guerre de la Russie contre l’Ukraine", a-t-il écrit sur X.

@lexpress

🇷🇺 Après des incursions de drones ou d'avions militaires en Pologne, en Roumanie, au Danemark, en Allemagne et en Belgique, quelle sera la prochaine étape de Vladimir Poutine ? La séquence du mois de septembre est particulièrement révélatrice, voire humiliante, pour les Européens. Face aux provocations russes, le constat est clair : l'Europe n'est pas prête à faire face aux prochaines attaques. Notre journaliste Clément Daniez vous explique en vidéo. 🔗 Lien en bio #russie #monde #international #defense #europe #ukraine #news #newsattiktok #apprendreavectiktok #sinformersurtiktok

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La Russie revendique la prise de trois villages dans l'est de l'Ukraine

La Russie a revendiqué vendredi la prise de trois villages dans les régions de Kharkiv et Dnipropetrovsk, dans l'est de l'Ukraine, notamment des zones que Kiev avait reprises il y a trois ans lors d'une contre-offensive surprise. L'armée russe a annoncé sur Telegram s'être emparée des localités de Pichtchané et Tykhe dans la région de Kharkiv, ainsi que de Pryvillia, dans la région de Dnipropetrovsk.

Les forces russes gagnent progressivement du terrain au cours de combats acharnés dans les régions dévastées de la partie orientale de l'Ukraine. Fin septembre, la Russie exerçait un contrôle total ou partiel de 19% du territoire ukrainien, selon l'analyse par l'AFP des données fournies par l'Institut américain pour l'étude de la guerre (ISW), qui travaille avec le Critical Threats Project (CTP).

L’Europe s’accorde sur un projet de soutien à l’industrie de la défense

L’Union européenne est parvenue jeudi à trouver un accord au terme d’une longue négociation pour mettre en place un programme d’aide à l’industrie de défense en Europe, a annoncé le Conseil de l’UE. Doté d’une enveloppe initiale de 1,5 milliard d’euros sous forme de dons, ce programme, baptisé Edip, doit permettre de favoriser le lancement de projets communs en matière de défense, sur la période 2025-2027, selon un communiqué.

"Cet accord constitue une étape majeure pour la sécurité du continent européen et le développement de notre industrie de défense", s’est félicité l’eurodéputé français François-Xavier Bellamy (droite), co-rapporteur du projet au Parlement européen. "Edip va renverser la logique d’importation qui prévalait en Europe pour soutenir concrètement le renforcement de notre base industrielle", a-t-il ajouté.

L’accord a été trouvé après de laborieuses discussions qui ont longtemps achoppé sur la question de la préférence européenne. Certains Etats membres étaient favorables à une plus grande flexibilité devant permettre à ce programme de financer également des investissements en armement hors de l’UE, notamment en provenance des Etats-Unis. Un compromis a finalement été trouvé qui limite le coût des composants fabriqués en dehors de l’UE ou dans certains pays partenaires comme la Norvège, à 35 % du coût total de l’investissement recherché. L’Ukraine sera également partie prenante du projet en bénéficiant de 300 millions d’euros au sein de l’enveloppe globale.

© afp.com/ANDREW CABALLERO-REYNOLDS

Donald Trump et Vladimir Poutine, à Anchorage, en Alaska, le 15 août 2025

Gaza : "Il faudra du temps" pour remédier à la famine, dit l'ONU

17 octobre 2025 à 12:37

Une semaine après l’entrée en vigueur du cessez-le-feu entre Israël et le Hamas, dans le cadre de l’accord basé sur le plan de Donald Trump pour la paix à Gaza, le mouvement palestinien s’est engagé ce vendredi 17 octobre à rendre à l’Etat hébreu tous les corps des otages. Seules neuf dépouilles sur 28 ont été restituées jusqu’ici, provoquant la colère en Israël, le ministère israélien de la Défense menaçant de reprendre les combats.

Les infos à retenir

⇒ "Il faudra du temps" pour remédier à la famine à Gaza, dit l'ONU

⇒ Le Hamas s’engage à rendre à Israël tous les corps d’otages

⇒ Liban : un mort et sept blessés dans des frappes israéliennes

"Il faudra du temps" pour remédier à la famine à Gaza, dit l'ONU

Remédier à la situation de famine dans la bande de Gaza "prendra du temps", a estimé vendredi le Programme alimentaire mondial, appelant à l’ouverture de tous les points de passage vers ce territoire pour "l’inonder de nourriture".

"Il faudra du temps pour réduire la famine" constatée depuis fin août par l'ONU dans une partie du Territoire palestinien, a annoncé devant la presse à Genève Abeer Etefa, porte-parole du PAM. "Nous disposons actuellement de cinq points de distribution opérationnels, plus proches des populations […] Notre objectif est d’en déployer 145" pour "inonder Gaza de nourriture", a-t-elle précisé.

"Les conditions à Gaza sont extrêmement difficiles. L’accès routier, la capacité d’entreposage, le fait que la communauté se déplace et que les gens rentrent chez eux, l’approvisionnement alimentaire dont nous avons besoin à grande échelle... Nous sommes encore loin du compte", a encore expliqué Abeer Etefa.

A ce jour, a-t-elle indiqué, seuls les points d'entrée de Kerem Shalom (sud) et de Kissoufim (centre-est) sont ouverts. Pour le PAM, "le plan est d'augmenter progressivement l'aide pour atteindre 1,6 million de personnes à l'intérieur de Gaza au cours des trois prochains mois".

Le Hamas s’engage à rendre à Israël tous les corps d’otages

Le Hamas a réaffirmé ce vendredi "son engagement" envers la "mise en œuvre" de l’accord de cessez-le-feu à Gaza négocié avec Israël sous l’égide des Etats-Unis, et s’est à nouveau engagé à "remettre tous les corps restants" des otages. "Le processus de restitution des corps des prisonniers israéliens pourrait prendre un certain temps, car certains de ces corps ont été enterrés dans des tunnels détruits par l’occupation (israélienne, NDLR), tandis que d’autres restent sous les décombres de bâtiments qu’elle a bombardés et démolis", a précisé le mouvement islamiste palestinien sur Telegram.

Israël accuse le Hamas de violer l’accord de cessez-le-feu entré en vigueur le 10 octobre, qui prévoyait un retour de tous les otages, vivants et morts, avant lundi matin. Dans le cadre de cet accord, le Hamas a libéré dans les temps les 20 derniers otages vivants retenus dans la bande de Gaza, mais n’a remis jusqu’ici que neuf dépouilles sur les 28 qu’il retient. Le Hamas soutient que ce sont les seuls corps auxquels il a pu accéder, disant avoir besoin d’un "équipement spécial" pour poursuivre sa tâche.

La Turquie, proche des dirigeants politiques du Hamas et qui entend jouer un rôle dans l’application du cessez-le-feu à Gaza a annoncé jeudi y envoyer des spécialistes pour participer aux recherches des corps ensevelis, "y compris des otages".

Liban : un mort et sept blessés dans des frappes israéliennes

Des frappes israéliennes dans le sud du Liban ont fait un mort et sept blessés jeudi, l’armée israélienne affirmant avoir ciblé le Hezbollah et ses alliés tandis que le président libanais déplore des frappes contre des "installations civiles" et condamne ce qu’il considère comme une violation du cessez-le-feu négocié l’année dernière. "L’agression israélienne répétée s’inscrit dans le cadre d’une politique systématique visant à détruire les infrastructures productives, à entraver la reprise économique et à saper la stabilité nationale sous de faux prétextes sécuritaires", a déclaré Joseph Aoun.

L’Iran a condamné ce vendredi ce qu’il a aussi qualifié de "violation du cessez-le-feu". Le porte-parole du ministère des Affaires étrangères, Esmaïl Baghaï, a accusé la France et les Etats-Unis, garants du cessez-le-feu, de "continuer à rester inactifs" envers Israël face à ce qu’il a qualifié de "violations répétées" de l’accord.

© afp.com/Bashar TALEB

Un camion transportant une aide fournie par le Programme alimentaire mondial (PAM) circule sur une route à Deir el-Balah, dans le centre de la bande de Gaza, le 15 octobre 2025

Tensions avec le Venezuela : cette démission qui expose les divisions au sein de l’armée américaine

17 octobre 2025 à 11:22

C’est une décision pour le moins "abrupte et surprenante", relève le Washington Post. Jeudi 16 octobre, l’amiral Alvin Holsey, le responsable militaire chargé de superviser les opérations américaines au large du Venezuela, a annoncé sa retraite anticipée, après 37 ans de carrière. Cette démission intervient alors que les Etats-Unis intensifient leurs frappes, officiellement contre des navires de néo-trafiquants, ce que certains voient comme le prélude à une invasion américaine, qui ne fait pas l’unanimité.

L’amiral, chargé de l’Amérique Centrale et du Sud, sera resté un an en poste seulement, contre les trois années prévues normalement. Il a annoncé "prendre sa retraite de la Marine" à partir du 12 décembre, sur le réseau social X, sans expliquer les raisons de son départ précipité.

Mais le Washington Post, citant deux personnes proches du dossier, estime que "Pete Hegseth [le secrétaire de la Défense, NDLR] avait des divergences croissantes avec Holsey et voulait qu’il parte". Ce retrait intervient alors que les Etats-Unis déploient des moyens militaires importants - sept navires et des avions de combat furtifs - au service de ce qu’ils présentent comme une lutte contre le narcotrafic dans les Caraïbes.

Légalité douteuse

Au moins 27 personnes ont ainsi été tuées au cours de cinq frappes connues jusque-là au large du Venezuela, menées depuis début septembre. La légalité de ces frappes dans des eaux étrangères ou internationales, contre des suspects ni interceptés ni interrogés, fait débat.

Certains y voient la préparation à une invasion plus large. Washington accuse le président vénézuélien Nicolás Maduro et son gouvernement d’être à la tête d’une vaste organisation de trafic de drogue vers les Etats-Unis. Caracas dément vigoureusement et accuse Washington d’utiliser le trafic de drogue comme prétexte "pour imposer un changement de régime" au Venezuela et s’emparer des importantes réserves de pétrole du pays.

"Qui aux Etats-Unis a envie de se lancer dans une guerre contre le Venezuela ? Pas grand monde", affirme le député démocrate Adam Smith, soulignant les divergences suscitées par ce projet. Le sénateur américain Jack Reed a également vivement réagi : "La démission de l’amiral Holsey ne fait que renforcer ma crainte que cette administration ignore les leçons durement acquises lors des précédentes campagnes militaires américaines".

Depuis son retour à la Maison Blanche en janvier, Donald Trump a mené une purge chez les plus hauts gradés de l’armée américaine en désaccord avec l’administration, ou trop favorables à son goût aux politiques touchant à l’inclusion et la diversité. Il l’a d’ailleurs répété le 30 septembre, lors d’une réunion sans précédent de hauts responsables militaires : "Si ce que je dis ne vous convient pas, vous pouvez quitter la salle – bien sûr, votre grade en dépend, et votre avenir en dépend".

"Mépris de la constitution"

Alvin Holsey, qui est par ailleurs "l’un des seuls officiers noirs à avoir obtenu le grade de quatre étoiles dans l’armée", remarque le Washington Post, rejoint ainsi une longue liste de militaires purgés. A commencer par le chef d’état-major interarmées, le général Charles "CQ" Brown, lui aussi évincé sans explication en février.

D’autres hauts responsables, à la tête de la Marine et des garde-côtes, de l’agence de renseignement NSA, ou encore un amiral en poste à l’Otan, ont aussi été démis de leurs fonctions. Le chef d’état-major de l’armée de l’air a également annoncé mi-août son départ anticipé, après deux ans au lieu de quatre.

Au moment de sa démission après 24 ans de service, Doug Krugman, colonel des Marines, a lui expliqué dans une tribune au Washington Post : "J’ai abandonné ma carrière par souci pour l’avenir de notre pays", critiquant notamment le mépris de Donald Trump de la Constitution et un possible "effondrement du système gouvernemental américain conventionnel". Pour lui, l’armée "devrait oser remettre en question les ordres potentiellement immoraux ou illégaux". Doug Krugman a également dénoncé le déploiement de la Garde nationale dans plusieurs villes démocrates, pour s’arroger le pouvoir, en "tirant parti de lois vagues afin d’assumer des pouvoirs d’urgence", qu’il a qualifié "d’immoral".

© AFP

Le chef du Commandement Sud des États-Unis, l'amiral Alvin Holsey, a annoncé sa retraite anticipée après 37 ans de carrière.

Guerre en Ukraine : la traque de la Russie contre des opposants, accusés de terrorisme

17 octobre 2025 à 08:00

La Russie suit de près les activités des opposants à la guerre en Ukraine, même au-delà de ses frontières. Mardi 14 octobre, le service de renseignement russe FSB a annoncé l’ouverture d’une enquête contre 23 dissidents en exil qui forment le "comité russe antiguerre".

Le Kremlin accuse le groupe de chercher à renverser le gouvernement et de former une "organisation terroriste", selon Reuters. Le comité antiguerre a été fondé en 2022 par le magnat du pétrole Mikhail Khodorkovsky - qui a passé dix ans en prison pour des motifs politiques selon ses avocats - en opposition à l’invasion de l’Ukraine.

Les "ennemis de l’étranger"

L’ouverture de cette enquête n’a rien de fortuit. Elle intervient quelques jours après l’annonce par le Conseil de l’Europe de la mise en place d’une "plateforme de dialogue avec les forces démocratiques russes en exil". L’institution, indépendante de l’Union européenne et qui réunit 46 pays, veut ainsi permettre à un groupe de participants d’échanger avec elle sur des "questions d’intérêt commun". Les personnes choisies devront, entre autres, "reconnaître la souveraineté de l’Ukraine, son indépendance et son intégrité territoriale" et "œuvrer pour un changement de régime" en Russie, écrit le Conseil de l’Europe dans un communiqué.

La FSB n’a pas attendu que le Conseil de l’Europe sélectionne et annonce les membres de cette plateforme pour réagir. Le service de renseignement a accusé l’organe intergouvernemental de vouloir "installer une alternative aux structures de pouvoir" en Russie, rapporte le New York Times. Interrogé par Reuters sur l’opportunité pour le comité antiguerre d’utiliser la plateforme de dialogue pour prendre le pouvoir en Russie, le porte-parole du Kremlin a indiqué qu’il y avait "des ennemis du pays au sein du pays et des ennemis à l’étranger". "Ils se livrent à des activités hostiles, et nos agences prennent donc les mesures nécessaires", a poursuivi Dmitri Peskov.

D’anciens conseillers du Kremlin en exil

La décision du FSB est à la fois un avertissement pour l’opposition russe à l’étranger et pour toute tentative occidentale de les reconnaître officiellement. Pour Mikhail Khodorkovsky, l’émergence d’une opposition coordonnée et organisée inquiète Vladimir Poutine, qui craint qu’elle ne le remplace un jour. "Le principal danger pour le Kremlin et pour Poutine est le suivant : qu’en cas de transition de pouvoir, ce groupe devienne l’une des alternatives légitimes au Kremlin", a déclaré à Reuters celui qui vit désormais en exil à Londres (Royaume-Uni).

Le comité russe antiguerre rassemble plusieurs personnalités de la société civile, tels que des politiques en exil ou des professeurs de droit, détaille le New York Times. Certains ont même conseillé le gouvernement russe avant le déclenchement de la guerre en Ukraine. Parmi eux, Mikhail Kasyanov, ancien premier ministre de Vladimir Poutine de 2000 à 2004, le doyen de la London Business School et économiste Sergeï Guriev, ou encore Iekaterina Schulmann, politologue. Le groupe n’a pas émis d’appels publics à la violence, précise le journal américain.

© AFP

Le Kremlin accuse le "comité russe anti-guerre" de chercher à renverser le gouvernement et de former une "organisation terroriste".

Vendetta judiciaire de Donald Trump : son ex-conseiller John Bolton inculpé

17 octobre 2025 à 07:43

La liste continue de s’allonger. Un ancien conseiller à la sécurité nationale de Donald Trump lors de son premier mandat, John Bolton, est devenu jeudi 16 octobre la troisième personnalité ciblée par le président américain à être inculpée depuis son retour à la Maison-Blanche. John Bolton, 76 ans, a été inculpé par un jury du Maryland, près de Washington, de 18 chefs d’accusation de divulgation ou de rétention de documents relevant de la défense nationale, selon l’acte d’accusation. "C’est un sale type, c’est dommage. Mais c’est comme ça", a réagi le président républicain, interrogé sur cette inculpation par des journalistes à la Maison-Blanche.

Donald Trump a maintes fois exprimé pendant la campagne électorale sa volonté, une fois revenu au pouvoir, de se venger de tous ceux qu’il considère comme des ennemis personnels. John Bolton est de ceux-là, lui qui avait publié en juin 2020 un livre au vitriol sur ses 17 mois passés comme conseiller à la sécurité nationale de Donald Trump, décrit comme "inapte" à diriger les Etats-Unis. La Maison-Blanche avait à l’époque tenté en vain de bloquer en justice la publication de ce livre, invoquant notamment des impératifs de sécurité nationale.

L’inculpation de John Bolton suit celle de l’ancien directeur de la police fédérale (FBI) James Comey et de la procureure générale de l’Etat de New York, Letitia James. "Quiconque abuse d’une position de pouvoir pour mettre en péril notre sécurité nationale devra rendre des comptes. Personne n’est au-dessus de la loi", a réagi dans un communiqué la ministre de la Justice Pam Bondi, qui avait déjà commenté dans des termes similaires les inculpations de James Comey et Letitia James.

Partage de documents et piratage

Il est reproché à John Bolton d’avoir "abusé de sa position de conseiller à la sécurité nationale en partageant plus d’un millier de pages de documents sur ses activités au quotidien" dans ces fonctions avec deux personnes de son entourage ne disposant pas d’une accréditation de sécurité.

Ces deux personnes, non identifiées dans l’acte d’accusation, seraient son épouse et sa fille, rapportent des médias américains, dont CNN. Il aurait partagé ces informations confidentielles avec elles via ses messageries électroniques personnelles non sécurisées, selon l’acte d’accusation.

Circonstance aggravante, en juillet 2021, un représentant de l’ex-conseiller à la sécurité nationale a informé le FBI que l’un des comptes de messagerie électronique qu’il utilisait avait été piraté après son départ du gouvernement par un hacker lié selon lui à l’Iran, pays envers lequel John Bolton prônait une ligne dure. Mais à aucun moment il n’a alerté les autorités sur le fait qu’il avait partagé sur ce compte "des informations relevant de la défense nationale, y compris des informations classifiées", soulignent les procureurs.

Par ailleurs, lors d’une perquisition en août au domicile de John Bolton, le FBI y a découvert des documents relevant de la défense nationale, selon l’accusation.

Pressions de Donald Trump

En septembre, Donald Trump avait publiquement fait pression sur sa ministre de la Justice, Pam Bondi, s’étonnant sur sa plateforme Truth Social que James Comey, Letitia James et une autre de ses bêtes noires, le sénateur démocrate Adam Schiff, n’aient toujours pas été inculpés.

Après avoir poussé à la démission le procureur du district est de Virginie, lui reprochant implicitement son manque de zèle pour engager ces poursuites, le président républicain l’avait aussitôt remplacé à ce poste stratégique par Lindsey Halligan, une conseillère de la Maison-Blanche. C’est cette dernière qui a personnellement lancé les poursuites ayant conduit à l’inculpation de James Comey le 25 septembre, puis de Letitia James le 9 octobre.

L’ancien directeur du FBI a plaidé non coupable d’entrave à une commission d’enquête parlementaire et fausses déclarations au Congrès en septembre 2020. Son avocat a annoncé qu’il introduirait des recours en annulation des poursuites, faisant valoir qu’elles étaient motivées par une volonté de vengeance.

Letitia James, accusée de déclaration mensongère dans une demande de prêt immobilier, a dénoncé des "représailles politiques" de la part de Donald Trump, qu’elle avait fait condamner à une amende de près d’un demi-milliard de dollars en février 2024.

© afp.com/Brendan Smialowski

John Bolton, alors conseiller américain à la sécurité nationale, écoute le président Donald Trump parler à la presse avant une rencontre avec le Premier ministre hongrois, Viktor Orban, à la Maison-Blanche à Washington, le 13 mai 2019

María Corina Machado, Prix Nobel de la paix… d’extrême droite ? Les folles accusations de la gauche pro-Maduro

17 octobre 2025 à 07:30

Rarement – plus précisément : jamais – le récipiendaire d’un prix Nobel de la paix n’a, depuis la création de cette récompense en 1901, fait l’objet d’attaques aussi nourries et coordonnées à l’échelle mondiale de la part de la gauche latino-américaine et européenne. Il aura fallu moins d’une heure, le 10 octobre, pour que, à l’annonce du nom de María Corina Machado, la mouvance altermondialiste, poussée par le mouvement castro-chaviste, se mobilise massivement dans les médias et sur les réseaux sociaux. Objectif : dénigrer l’opposante au régime de Nicolás Maduro, minimiser son courage, effacer ses mérites et, in fine, faire oublier que, tout comme Cuba, le Venezuela est au XXIe siècle ce que les dictatures de droite étaient au précédent.

Pour abîmer l’image de la lauréate, les dignes héritiers de l’intelligentsia qui encensait autrefois Castro, Mao ou Pol Pot, recourent à la technique du gaslighting. Le terme provient du film Gas Light de George Cuckor (1944) où le personnage principal manipule psychologiquement sa femme pour inverser les rôles coupable-victime. Aujourd’hui, sur les réseaux sociaux et dans certains médias, la manipulation cognitive passe par une distorsion des faits, des omissions volontaires et des mensonges purs et simples conduisant à faire douter le grand public de leur perception de la réalité vénézuélienne.

Coutumier du gaslighting, Vladimir Poutine assène que Volodymyr Zelensky, le président ukrainien d’origine juive, est un nazi. Suivant la même méthode, les soutiens du régime vénézuélien présentent María Corina Machado comme une personnalité d’extrême droite doublée d’une putschiste, avec la circonstance aggravante d’être née dans la bourgeoisie. Il s’agit de s’adresser à l’imaginaire des opinions mondiales dont la connaissance de l’histoire du Venezuela (et de l’Amérique latine) se résume parfois à une série de clichés – auxquels la lecture de Tintin et les Picaros n’a pas peu contribué.

"Donner le prix à Hitler"

Dans le concert de calomnies, la palme revient à Pablo Iglesias, ancien chef de file de Podemos et alter ego espagnol de Jean-Luc Mélenchon, pour qui le comité Nobel aurait "aussi bien pu donner le prix à Hitler"! La présidente du Mexique Claudia Sheinbaum s’est, elle, contentée d’un méprisant "sans commentaires…" au sujet de la lauréate. L’attitude du président colombien Gustavo Petro est du même tonneau. En Espagne, où l’Amérique latine relève quasiment du débat de politique intérieure, le chef du gouvernement Pedro Sanchez, qui est cerné par les scandales, a lui aussi choisi le boycott par le silence. Très proche du Venezuela à travers la figure de son prédécesseur José Luis Rodríguez Zapatero, le dirigeant socialiste affirme que, "par principe", il ne félicite jamais les lauréats du Nobel. C’est faux : il a plusieurs fois félicité des Nobel.

La présidente du Mexique Claudia Sheinbaum s'exprime lors d'un rassemblement public à Mexico le 18 mars 2025
La présidente du Mexique Claudia Sheinbaum s'exprime lors d'un rassemblement public à Mexico le 18 mars 2025

En France, des journalistes qui n’ont jamais posé le pied au Venezuela ont pris l’habitude de qualifier María Corina Machado de dirigeante de la "droite radicale" – une façon codée de dire "extrême droite". L’expression a été prononcée récemment sur les ondes de Radio France Internationale (RFI), puissante chambre d’écho internationale. Autre exemple : à l’Institut des relations internationales et stratégiques (Iris), un "expert" du Venezuela explique tranquillement que la "nobélisée" est une femme "dure et intransigeante" – elle est plutôt opiniâtre et déterminée – mais aussi un "agent du chaos".

Et cela, sans jamais expliquer pourquoi les Vénézuéliens des classes populaires qui avaient porté le colonel Hugo Chavez au pouvoir en 1999 votent désormais pour Vente : à la présidentielle 2024, volée par Maduro, le candidat du parti a recueilli 70 % des suffrages. Ce parti libéral et démocratique a été crée par "Maria Corina" en 2012 dans l’espoir de restaurer la démocratie par la voie des urnes. Un an plus tard, elle s’était fait tabasser jusqu’au sang par des députés pro-Chavez et pro-Maduro dans l’enceinte du Parlement, avec quatre fractures au nez. Aucun de ces commentateurs fascinés par la "révolution" chaviste ne rappelle davantage pourquoi l’intéressée vit depuis un an dans la clandestinité : afin de n’être pas jetée dans la Tumba (la tombe) et l'Hélicoïde, les prisons de la police secrète de Caracas où l’on pratique la torture blanche (c’est-à-dire psychologique) inspiré des méthodes de la Stasi est-allemande avec, par exemple, la lumière allumée vingt-quatre heures sur vingt-quatre.

Mais sur quoi, au juste, reposent les accusations des altermondialistes pro-Maduro qui reprochent à Machado, premièrement, d’être issue de la bourgeoisie? Indéniablement, Machado est née dans la "clase alta", la plus haute classe sociale d’un pays pétrolier autrefois riche (c’était avant d’avoir été ruiné par Chavez et Maduro). Industriel de la sidérurgie et du pétrole, son père, un démocrate-chrétien, appartenait à la génération d’entrepreneurs qui ont développé et modernisé le pays après la chute du dictateur Marco Perez-Gimenez (1958). Mû par de nobles idéaux, il finançait d’ailleurs des bourses d’études pour des ouvriers dont il percevait le potentiel intellectuel et professionnel.

Fidel Castro trouve un allié inconditionnel en la personne d'Hugo Chavez (G), le président vénézuélien et fils spirituel du
Fidel Castro trouve un allié inconditionnel en la personne d'Hugo Chavez (G), le président vénézuélien et fils spirituel du "Lider Maximo" (G), ici à La Havane le 21 juillet 2006

Un jour, il a reçu, un appel téléphonique d’Hugo Chavez (1999-2013) lui intimant d’arrêter ses bonnes œuvres : "Désormais, c’est nous qui nous occupons de la formation du peuple", lui a expliqué le jeune président pour qui charité ordonnée commence par l’Etat socialiste. Puis son entreprise a été confisquée par Chavez. Autre grief à l’encontre de María Corina Machado : elle est de droite. Formée en partie à Harvard, l’opposante, qui est ingénieure, est en effet libérale. Elle prône la privatisation d’une partie de l’industrie pétrolière. Pour ressusciter un secteur ravagé par vingt-cinq ans de négligence et cleptocratie chaviste, il n’y a pas d’autre choix que d’attirer des capitaux étrangers et faire appel à Exxon, Total, Repsol, BP ou Total, explique-t-elle à juste titre.

Dépeinte comme une putschiste d'extrême droite

Selon les altermondialistes cubanophiles (Cuba reste le modèle indépassable des partisans de Maduro), Machado serait aussi une putschiste. L’argument est répété en boucle. Il fait référence aux 47 heures pendant lesquelles Hugo Chavez a été chassé du pouvoir le 11 avril 2002. A l’époque, la popularité du colonel-président est en chute libre. La raison ? Il a renvoyé des milliers de salariés de l’industrie pétrolière, initié le démantèlement des institutions, menacé la presse et commencé à réécrire les programmes scolaires en les politisant.

Réagissant aux brutalités des forces de l’ordre qui ont tiré sur la foule lors d’une grève qui s’éternise, une gigantesque manifestation populaire défile dans la capitale dans un climat de tension sociale alimenté par le président en personne. Par ailleurs, des hauts gradés ourdissent une conspiration pour se débarrasser de lui. Cette combinaison de facteur abouti au départ du président, à un vide du pouvoir et, faute de mieux, à l’avènement du "patron des patrons" Pedro Carmona au sommet de l’Etat. Presque aussitôt, les militaires se ravisent et, à la faveur de dissensions entre généraux, Chavez, aidé par Fidel Castro en coulisse, retrouve son fauteuil de président.

Entre-temps, Carmona a reçu le soutien de María Corina Machado qui, comme d’autres, a depuis belle lurette perçu la dérive dictatoriale du chavisme (l’avenir lui donnera raison). Ultérieurement, les soutiens de Chavez et Maduro présenteront ce putsch d’opérette comme un événement historique considérable afin de mieux rehausser l’image de celui qui avait fui sans gloire ni héroïsme. En fait – personne ne le rappelle jamais – le seul authentique putschiste connu au Venezuela, c’est feu Hugo Chavez ! En 1992, sa tentative de coup d’Etat s’était soldée par une centaine de morts et le projet d’assassinat raté contre le président social-démocrate Carlos Andres Perez.

Hugo Chavez en 1992, après son putsch manqué à la
Hugo Chavez en 1992, après son putsch manqué à la "une" d'El Nacional

Enfin, María Corina Machado est accusée d’être d’extrême droite (leader de "droite extrême", écrit L’Humanité), du fait qu’elle s’est déclarée proche de Donald Trump, de l’Argentin Javier Milei et de Benyamin Netanyahou et les a remerciés publiquement pour leurs soutiens. Pour comprendre ce positionnement, il faut savoir que l’opposition vénézuélienne n’a, depuis deux décennies, reçu le soutien substantiel d’aucun pays européen, pas même du "pays des droits de l’homme", la France. Abandonnée par l’Europe, Machado s’est donc tournée vers les alliés qu’il lui restait. Comme l’a dit Churchill à propos de la nécessité de s’allier avec Staline qui n’était pourtant pas sa tasse de thé : "Si Hitler avait envahi l’enfer, je me serais débrouillé pour avoir un mot gentil pour le Diable."

A devoir défendre le choix du comité Nobel (critiqué, aussi, par Vladimir Poutine, assurément un expert en matière de paix…) qui récompense le combat pacifique de Machado pour la démocratie, on en oublie l’essentiel. En raison de la répression politique et de la ruine économique causée par Hugo Chavez et Nicolás Maduro, environ 9 millions de Vénézuéliens vivent aujourd’hui en exil et rêvent de rentrer chez eux. Depuis 2014, 18 506 personnes ont été arrêtées et emprisonnées pour des raisons politiques. Il y a actuellement 845 détenus politiques au Venezuela, dont 173 militaires, 103 femmes et 4 adolescents (source : foropenal.com). Au fil des ans, des escadrons de la mort appelés "collectivos" ont assassiné des centaines de personnes. Enfin, le régime de Maduro est intimement lié au narcotrafic et à l’exploitation illégale des réserves aurifères qui cause des ravages écologiques en Amazonie vénézuélienne, au sud du pays. Mais de cela, les supporters du régime de Caracas n’ont jamais entendu parler.

© Federico PARRA / AFP

La prix Nobel de la paix 2025 Maria Corina Machado, le 3 août 2024, à Caracas, au Venezuela.

L’actu à La Loupe : à Gaza, les dilemmes après la guerre

17 octobre 2025 à 06:00

Alors que les premiers otages israéliens et les prisonniers palestiniens étaient en voie de libération, Donald Trump était lui au pupitre du sommet sur le futur de Gaza à Charm el-Cheikh, déclarant que "la guerre à Gaza est finie." Le président américain, chaleureusement accueilli par son homologue égyptien al-Sissi, s'est félicité de l’accord trouvé entre Israël et le Hamas. Et nombreux sont les dirigeants qui ont attentivement écouté son plan.

Si certains se sont montrés perplexes lorsqu'il a assuré que "la reconstruction de Gaza [...] sera la partie la plus facile", c’est que la suite s’avère en réalité complexe...

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Cet épisode a été écrit et présenté par Charlotte Baris, monté par et réalisé par Jules Krot.

Crédits : Bloomberg

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Le président américain Donald Trump salue le président palestinien Mahmoud Abbas lors d'un sommet sur Gaza à Charm el-Cheikh, le 13 octobre 2025
Reçu hier — 16 octobre 2025 L'Express

Etats-Unis : le nouveau plan ultra-restrictif de Donald Trump pour l’immigration

16 octobre 2025 à 18:01

Après plusieurs mois de raids musclés de la police de l’immigration suivis d’expulsions massives de migrants, l’administration Trump prépare la refonte de son système d’immigration. Et elle le veut très restrictif et orienté.

La croisade de Donald Trump contre l’immigration n’a rien de nouveau, puisqu’il avait suspendu dès le début de son mandat le programme d’accueil des réfugiés, pourtant historiquement soutenu par les démocrates comme les républicains. Celui-ci permet, après de nombreux contrôles administratifs et des années d’attente, d’entrer légalement aux Etats-Unis. Le chef d'Etat américain avait ensuite demandé à son administration de formuler des propositions sur la poursuite de ce programme, qui ont été rendues à la Maison-Blanche en avril et juillet dernier et dont une partie a été obtenue par la presse américaine.

Les blancs sud-africains prioritaires

Selon l’agence Associated Press, ces propositions prévoient une diminution drastique du nombre de réfugiés accueillis sur le sol américain pendant la prochaine année fiscale, qui a débuté le 1er octobre. Le gouvernement veut ainsi accueillir 7 500 personnes en tout. En 2024, l’administration Biden s’était, elle, fixé un objectif de 125 000 réfugiés. Ces chiffres n’ont pas encore été finalisés ni transmis au Congrès et ne devraient pas être validés avant la fin du shutdown, qui paralyse l’administration américaine.

Une chose est sûre, cependant : Donald Trump veut privilégier l’accueil des Afrikaners, les descendants des premiers colons européens en Afrique du Sud. Dès le mois de février, le président américain avait annoncé un nouveau programme d’accueil de cette minorité blanche, dont étaient issus les dirigeants du régime ségrégationniste de l’apartheid. Cette dernière serait victime selon Trump de persécution raciale, ce que l’administration sud-africaine dément. Cela n'a pas empêché les Etats-Unis d'accueillir un groupe de 49 personnes, arrivé en mai par un vol spécial.

Accueillir des réfugiés européens "pris pour cible" pour leurs idées

Un autre volet du plan de l’administration américaine consiste, selon des documents consultés par le New York Times, à cibler des Européens "pris pour cible en raison de l’expression pacifique d’opinions en ligne, telles que l’opposition à l’immigration de masse ou le soutien à des partis politiques 'populistes'". Selon le quotidien américain, cela semble faire référence au parti d’extrême droite allemand Alternative für Deutschland (AfD). Plus tôt cette année, le vice-président américain J.D. Vance avait âprement critiqué le "cordon sanitaire" entourant ce parti en Allemagne et son classement comme "extrémiste de droite" par les services de renseignements allemands.

L’administration Trump est actuellement en train d’évaluer la situation en Europe pour déterminer le nombre d'Européens éligibles. Les personnes choisies devront par ailleurs être capables de s’intégrer aux Etats-Unis. Elle prendraient donc des cours sur "l’Histoire et les valeurs américaines" et le "respect des normes culturelles". Selon les documents consultés par le journal, l’administration ne voudrait accueillir que des réfugiés "qui peuvent s’assimiler complètement et correctement et qui sont alignés avec les objectifs du président". Ainsi, les propositions prévoient d’annuler la candidature de centaines de milliers de personnes déjà engagées dans les procédures pour demander le statut de réfugié aux Etats-Unis, dont certaines ont déjà passé les contrôles de sécurité et obtenu les recommandations nécessaires. Lorsqu'on les met en perspective, ces mesures donnent un aperçu d’un programme "qui symbolise les Etats-Unis comme un sanctuaire", analyse le NYT. Le quotidien n’a pas eu connaissance d’une date butoir quant à l’approbation ou non de ces propositions.

Quelques semaines avant la publication des plans de l’administration Trump sur les réfugiés, celle-ci avait défendu son approche à l’Assemblée générale des Nations Unies. Le sous-secrétaire d’Etat américain, Christopher Landau, avait appelé fin septembre à revoir le système d’asile international, coordonné par l'ONU et régi par le droit international. Selon CNN et Reuters, les Etats-Unis avaient appelé à davantage de "souveraineté" pour les Etats dans le choix de leur politique d’asile et enjoint les autres pays du monde à les suivre dans leur politique de restriction de l’immigration. Le dernier document obtenu par le New York Times veut justement donner davantage de pouvoir aux Etats-Unis par rapport à l'ONU sur le processus de demande d’asile.

© afp.com/Anna Moneymaker

Les propositions de l'administration Trump prévoient une diminution drastique du nombre de réfugiés accueillis sur le sol américain pour la prochaine année fiscale.

L'Union européenne défend son projet de "mur" antidrones face à la menace russe

16 octobre 2025 à 17:38

"Les drones redéfinissent déjà la guerre. Avoir des défenses contre les drones n’est plus une option pour quiconque", a déclaré Kaja Kallas devant la presse, ce jeudi 16 octobre, en présentant une "feuille de route" visant à assurer une défense "crédible" de l’Union européenne d’ici 2030 face à la Russie.

Critiquée par plusieurs Etats membres, la Commission a défendu ce projet, jugé prioritaire et qu’elle entend rendre totalement opérationnel d’ici 2027. Autre objectif : renforcer la défense de l’Europe dans l’espace, dans les airs et sur le flanc oriental. "Il est clair que nous devons renforcer nos défenses contre la Russie", a affirmé Kaja Kallas. Et d’abonder "la Russie n’a pas la capacité de lancer une attaque contre l’UE aujourd’hui, mais elle pourrait se préparer dans les années à venir".

La réponse de l’Otan à l’entrée d’une vingtaine de drones russes dans l’espace aérien de la Pologne avait mis en évidence les lacunes de l’arsenal européen. Pour abattre trois de ces drones, l’Otan avait dû recourir à de coûteux missiles.

Des "quantités énormes d’argent"

La Commission insiste désormais sur le rôle central des gouvernements pour mettre en œuvre les différents projets identifiés par la Commission européenne. "Les Etats membres sont aux commandes. Ce sont eux qui décident quoi acheter ou développer, quand et auprès de qui", a assuré Kaja Kallas.

La Commission se contentera d’un "rôle de facilitateur", a expliqué de son côté le commissaire européen à la Défense Andrius Kubilius, lors d’une rencontre avec quelques journalistes. Par exemple, elle favorisera le développement de contrats en commun auprès de l’industrie de défense pour promouvoir ces projets, que la Commission juge hors de portée pour un seul pays.

La mise en œuvre de ce projet nécessitera toutefois des "quantités énormes d’argent", admet un responsable européen. "Au cours des dix prochaines années, nous allons dépenser 6 800 milliards d’euros pour la défense", a indiqué Andrius Kubilius. La plus grande partie de ce montant viendra des budgets nationaux, mais, selon le commissaire européen à la Défense, il reste quelque 300 milliards d’euros non utilisés dans les caisses de l’UE.

Les 27 peuvent également puiser dans les 150 milliards d’euros de prêts, mis à disposition par la Commission européenne dans le cadre de son programme Safe. Bruxelles avait calculé un montant nécessaire de quelque 800 milliards d’euros pour parvenir à l’objectif de disposer d’une défense "crédible" en 2030. "On reste sur (ce) chiffrage", a assuré ce responsable européen.

La semaine prochaine, à l’occasion d’un sommet européen à Bruxelles, les dirigeants des pays membres aborderont cette "feuille de route".

Des réactions mitigées

Certains des leaders des 27 n’ont toutefois pas caché leurs inquiétudes. "J’ai de sérieux doutes concernant les délais. Il y a aussi la question du financement. D’où vient l’argent ?", s’est ainsi interrogé un diplomate européen.

Evoquant un projet de défense antidrones lancé par la Pologne et les pays baltes, Andrius Kubilius a assuré que son coût n’avait pas dépassé le milliard d’euros.

Plusieurs pays du sud se sont également inquiétés d’être mis à l’écart de projets concernant essentiellement les pays dits de la ligne de front, géographiquement proches de la Russie. En réponse Kaja Kallas a assuré que tous les projets, y compris l’initiative antidrones, seraient ouverts à l’ensemble des Etats membres.

Une stratégie "voué à l’échec" selon l’armée française

La proposition n’a été mieux reçue par l’armée française. L’initiative européenne pour les drones a le mérite de montrer une "volonté manifeste (NDLR : des Européens) de répondre à des attaques potentielles et des menaces", a jugé le patron de l’armée française, le général Pierre Schill. Mais "c’est dans les détails et la rapidité du déploiement que se jugera la pertinence de ce sujet", selon le militaire. "Est-ce que ça va être un mur étanche sur les milliers de kilomètres de frontières de l’Otan ? Est-ce que ça va combiner des moyens de détection et des moyens de destruction dans la profondeur ? Est-ce que ce sera concentré sur certains points ?", s’est-il interrogé devant la presse.

"La défense exclusivement par le mur est vouée à l’échec parce qu’elle laisse à l’attaquant l’initiative et elle oblige le défenseur à être fort partout", a tranché le général Schill. Pour le chef d’état-major, "dans le combat immémorial de l’épée et de la cuirasse, c’est l’épée qui a l’avantage, c’est les drones qui aujourd’hui l’emportent sur la défense. On n’a pas trouvé la martingale contre les drones, c’est une réalité".

© Dursun Aydemir / ANADOLU / Anadolu via AFP

La Haute Représentante de l’Union européenne pour les affaires étrangères et la politique de sécurité, Kaja Kallas, tient une conférence de presse sur la feuille de route de préparation à la défense de l’UE, à Bruxelles (Belgique), le 16 octobre 2025.

Des eurodéputés proposent un âge minimum de 16 ans pour les réseaux sociaux

16 octobre 2025 à 14:48

Une commission du Parlement européen a proposé jeudi 16 octobre d'interdire aux moins de 16 ans l'accès sans autorisation parentale aux réseaux sociaux et aux assistants d'intelligence artificielle, en raison des risques qu'ils présentent pour la santé et la sécurité des enfants et adolescents.

"Les députés proposent un âge minimum de 16 ans dans toute l'UE pour accéder aux réseaux sociaux, aux plateformes de partage de vidéos et aux compagnons IA (intelligence artificielle), sauf autorisation parentale, et un âge minimum de 13 ans pour accéder à tout réseau social", a précisé le Parlement européen dans un communiqué.

Les 27 Etats membres de l'UE partagés sur la question

Les élus citent notamment "les risques liés à la dépendance, à la santé mentale et à l'exposition à des contenus illégaux et préjudiciables" pour justifier une telle mesure.

Portée par l'eurodéputée danoise Christel Schaldemose (S&D, sociaux-démocrates), cette proposition a été adoptée à une large majorité par la commission du marché intérieur et de la protection des consommateurs. Elle sera soumise à l'ensemble des eurodéputés fin novembre, en session plénière. Cette proposition d'un âge minimum, ou majorité numérique, accroît encore la pression sur les plateformes, alors que la présidente de la Commission européenne Ursula von der Leyen a lancé une réflexion sur l'opportunité de mettre en place une telle mesure à l'échelle de toute l'UE. Un panel d'experts doit remettre à Ursula von der Leyen, elle-même favorable à de telles interdictions, des recommandations d'ici la fin de l'année.

Les 27 Etats membres de l'UE sont partagés sur la question, mais l'idée fait de plus en plus son chemin en Europe. Sous l'impulsion du Danemark, qui exerce la présidence tournante de l'UE et qui vient d'annoncer un projet de majorité numérique fixée à 15 ans, les ministres européens du numérique ont apporté la semaine dernière leur soutien à l'initiative de Mme von der Leyen.

© afp.com/CHANDAN KHANNA

Les 27 Etats membres de l'UE sont partagés sur la question, mais l'idée fait de plus en plus son chemin en Europe.

Taxer les riches pour sauver les finances publiques ? La nouvelle proposition du Royaume-Uni

16 octobre 2025 à 12:59

Si en France le débat sur la taxation des plus riches déchaîne les passions de la classe politique, le Royaume-Uni, lui, va sauter le pas dès le mois prochain. La ministre britannique des Finances, Rachel Reeves, a déclaré que le budget qui doit être voté en novembre comprendra des impôts plus élevés sur les grandes fortunes, a indiqué mercredi 15 octobre le quotidien The Guardian.

La chancelière a fait cette annonce depuis Washington, où elle participe aux réunions annuelles du Fonds monétaire international (FMI). Le gouvernement britannique doit trouver 20 à 30 milliards de livres sterling pour combler le trou dans les finances publiques. Mais "plutôt que de réduire les dépenses consacrées aux services publics ou d’augmenter considérablement les emprunts" la ministre "chercherait à utiliser le levier fiscal", explique The Telegraph, de sources au Trésor britannique.

Parmi les options sur la table : l’augmentation du taux d’impôt sur les plus-values ​​; le prélèvement d’une cotisation sur les revenus locatifs ; ou encore la création de tranches d’impôt foncier plus élevées. Rachel Reeves a défendu sa mesure : "l’année dernière, lorsque nous avons annoncé l’augmentation des impôts pour les fonds de capital-investissement, ou encore celle de la TVA sur les frais de scolarité des écoles privées, il y a eu tellement de critiques selon lesquelles cela n’allait pas rapporter d’argent, que cela effrayerait les gens", explique la ministre citée par The Guardian, qui explique qu’il n’y a pas eu de fuite en masse des grandes entreprises.

Trou dans les finances

Ses commentaires interviennent peu de temps après que le FMI a prédit que le pouvoir d’achat des Britanniques devrait connaître la croissance la plus lente parmi les pays du G7. Les chiffres officiels publiés mardi ont également montré un taux de chômage à son plus haut niveau depuis quatre ans, à 4,8 % en août.

Une faible croissance que le gouvernement impute toujours au Brexit, et à d’autres facteurs externes, comme l’instabilité mondiale. "Nous sommes confrontés à des défis, qu’il s’agisse des incertitudes géopolitiques, des conflits dans le monde, de l’augmentation des tarifs douaniers et des barrières commerciales", rapporte The Telegraph.

"160 milliards en dix ans"

A quelques semaines de la présentation budgétaire, le 26 novembre, le Trésor promet ainsi "d’aider les entreprises à se développer, d’investir dans les infrastructures et d’alléger les formalités administratives pour relancer" le pays. Mais l’exécutif est sous pression des marchés pour équilibrer le budget. Pour trouver les milliards de livres qui manquent, les Britanniques spéculent depuis des semaines sur de nouvelles hausses d’impôts, après des augmentations ces derniers mois qui ont notamment pesé sur les entreprises.

Récemment, une étude réalisée par le King’s College a permis d’établir "qu’au moins 160 milliards de livres sterling auraient pu être collectés pour les finances publiques du Royaume-Uni au cours des trois dernières décennies", si les 0,01 % des contribuables les plus riches avaient été invités à payer un impôt de 2 % sur leurs actifs supérieurs à 10 millions de livres sterling.

"Malgré le ralentissement de la croissance du patrimoine des milliardaires, la dernière liste des plus riches montre que les 40 familles les plus riches du Royaume-Uni possèdent désormais plus de richesses que 50 % de la population, tandis que 14,3 millions de personnes, dont 4,3 millions d’enfants, vivent dans la pauvreté au Royaume-Uni", note le Professeur Ben Tippet, maître de conférences en économie et en inégalités de richesse au King’s College de Londres, chargé de l’étude. Peut-être une source d’inspiration pour d’autres pays européens.

© afp.com/Oli SCARFF

Le Premier ministre britannique Keir Starmer et la ministre des Finances Rachel Reeves, au congrès travailliste de Liverpool, le 23 septembre 2024

Gaza : Donald Trump menace "d'aller tuer" les membres du Hamas

16 octobre 2025 à 20:19

Moins d’une semaine après son entrée en vigueur, le cessez-le-feu à Gaza semble fragilisé ce jeudi 16 octobre par la question délicate de la restitution des corps des otages du Hamas. Le mouvement palestinien a dit mercredi soir avoir remis à Israël toutes les dépouilles auxquelles il avait pu accéder, soit neuf seulement sur les 28 qu’il doit rendre. Si des responsables américains ont estimé que le Hamas entendait "honorer l’accord" conclu avec l’Etat hébreu, ce dernier a menacé de reprendre les combats, et d’agir pour "une défaite totale" de son ennemi.

Les infos à retenir

⇒ Trump menace "d'aller tuer" les membres du Hamas

⇒ Benyamin Netanyahou dit que "le combat n'est pas terminé" à Gaza

⇒ Les familles d'otages appellent Israël à retarder l'application de l'accord à Gaza

Donald Trump menace de mort les membres du Hamas

Donald Trump a menacé jeudi "d'aller tuer" les membres du Hamas s'ils "n'arrêtaient pas de tuer des gens" à Gaza, après avoir dit mardi que les exécutions sommaires menées par le mouvement islamiste palestinien ne le "dérangeaient pas".

"Si le Hamas continue à tuer des gens à Gaza, ce qui n'était pas prévu dans l'accord, nous n'aurons pas d'autre choix que d'aller les tuer", a écrit le président américain sur son réseau Truth Social. Il n'a donné aucun autre détail, alors que cette formulation semble suggérer une intervention américaine directe sur le terrain.

Le Hamas a diffusé mardi une vidéo montrant des exécutions sommaires de "collaborateurs" présumés en pleine rue à Gaza-ville. Interrogé à ce sujet le même jour, Donald Trump avait déclaré: "Ils ont tué un certain nombre de membres de gangs et cela ne m'a pas beaucoup dérangé, pour être franc avec vous".

Il avait déclaré mardi que les Etats-Unis étaient prêts à "désarmer" le mouvement islamiste palestinien par la force, avant de préciser par la suite qu'il ne serait "pas nécessaire (d'engager des) soldats américains" pour cela.

Ramallah présente son plan pour Gaza malgré les incertitudes sur l'avenir du territoire

Le Premier ministre de l'Autorité palestinienne a rencontré jeudi à Ramallah, en Cisjordanie occupée, des diplomates pour présenter un plan de reconstruction de la bande de Gaza, bien que la gouvernance future du territoire ravagé par la guerre reste floue. "J'aimerais croire que d'ici douze mois, l'Autorité palestinienne sera pleinement opérationnelle à Gaza", a déclaré Mohammad Mustafa, quelques jours après l'entrée en vigueur d'un cessez-le-feu négocié par les Etats-Unis.

Le Hamas a pris le contrôle de la bande de Gaza en 2007, à l'issue d'affrontements avec ses opposants politiques, principalement le Fatah, le parti du président de l'Autorité palestinienne Mahmoud Abbas. Depuis, l'Autorité palestinienne continue de fournir des services publics, même partiellement, dans le territoire, et certains de ses fonctionnaires ont continué d'occuper leur poste dans l'administration mise en place par le Hamas quand d'autres l'ont quittée.

Mohammad Mustafa a déclaré que l'Autorité palestinienne avait élaboré un plan de reconstruction de Gaza, en trois phases et sur cinq ans, d'un coût de 65 milliards de dollars pour 18 secteurs, dont le logement, l'éducation, la gouvernance. Ce plan s'appuie sur les décisions prises lors d'un sommet des pays arabes au Caire en mars. M. Mustafa a rappelé que c'est dans ce cadre que l'Egypte et la Jordanie formaient déjà des policiers palestiniens. "Notre vision est claire", a-t-il affirmé jeudi devant une assemblée de ministres palestiniens, de chefs d'agences de l'ONU et de diplomates.

"Gaza doit être reconstruite comme une partie ouverte, connectée et prospère de l'Etat de Palestine", a-t-il ajouté.

Benyamin Netanyahou dit que "le combat n'est pas terminé" à Gaza

Le Premier ministre israélien Benyamin Netanyahou a déclaré jeudi que "le combat n'est pas terminé" pour son pays, ajoutant être "déterminé à obtenir le retour de tous les otages", lors de la commémoration officielle du deuxième anniversaire de l'attaque du 7 octobre 2023 par le Hamas.

"Le combat n'est pas encore terminé, mais une chose est claire — quiconque lève la main sur nous sait qu'il paiera un prix très lourd", a-t-il déclaré. "Israël se trouve en première ligne du face-à-face entre la barbarie et la civilisation."

S'exprimant depuis le cimetière du Mont Herzl, alors que seulement neuf dépouilles d'otages ont été rendues à ce jour par le Hamas sur un total de 28, le chef du gouvernement a rappelé qu'Israël était "déterminé à obtenir le retour de tous les otages."

Israël a rendu à Gaza les corps de 30 Palestiniens supplémentaires

Israël a rendu jeudi les corps de 30 Palestiniens dans le sud de la bande de Gaza, portant à 120 le nombre total de corps remis, ont déclaré le ministère de la Santé du gouvernement du Hamas à Gaza et l'hôpital Nasser de Khan Yunès.

En vertu d'un accord de cessez-le-feu négocié par le président américain Donald Trump, Israël doit restituer les corps de 15 Palestiniens pour chaque dépouille d'otage rendue. Mercredi soir, le Hamas a remis deux autres dépouilles à Israël et a déclaré avoir restitué tous les corps des otages décédés auxquels il avait accès.

Les familles d'otages appellent Israël à retarder l'application de l'accord à Gaza

Le Forum des familles d'otages a appelé ce jeudi le gouvernement israélien à retarder l'application de l'accord de cessez-le-feu à Gaza, tant que le Hamas n'aura pas remis les 19 dernières dépouilles d'otages. Dans un communiqué, le Forum exige que "le gouvernement cesse immédiatement la mise en œuvre de toute autre étape de l'accord, tant que le Hamas continue de violer ouvertement ses obligations concernant le retour de tous les otages et les dépouilles des victimes".

Mercredi soir, le ministre de la Défense Israël Katz a averti que l'armée pourrait reprendre son offensive dans la bande de Gaza si le Hamas ne respectait pas l’accord de cessez-le-feu, soulignant que celui-ci n’avait pas rendu toutes les dépouilles d’otages. "Si le Hamas refuse de respecter l’accord, Israël, en coordination avec les Etats‑Unis, reprendra les combats et agira pour une défaite totale" du mouvement, indique un communiqué de son bureau.

Le Hamas avait affirmé plus tôt avoir remis à Israël toutes les dépouilles d’otages auxquelles il avait pu accéder, soit neuf seulement à ce stade, sur les 28 retenues à Gaza. "Nous avons rempli notre engagement au titre de l’accord en remettant tous les prisonniers israéliens vivants, ainsi que les corps auxquels nous avons pu accéder", a-t-il assuré. "Quant aux dépouilles restantes, leur récupération et extraction nécessitent des efforts considérables et un équipement spécial."

Le mouvement islamiste palestinien continue de dire qu’il compte "honorer l’accord" sur Gaza et rendre les corps des otages décédés, a indiqué à des journalistes mercredi un haut responsable américain, sous le couvert de l’anonymat.

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🤝 Ovationné lundi 13 octobre par la Knesset, Donald Trump se présente désormais en “président de la paix”, et annonce un “nouveau Moyen-Orient”. Mais pour Karim Emile Bitar, spécialiste du Moyen-Orient, il ne faut pas "aller trop vite en besogne" sur l’avenir de la région. 🔗 Lien en bio #moyenorient #paix #israel #gaza #trump #monde #news #newsattiktok #apprendresurtiktok #sinformersurtiktok

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Israël confirme l’identification de deux otages israéliens morts restitués mercredi

L’armée israélienne a annoncé jeudi avoir identifié les dépouilles des otages Inbar Hayman et Mohammad al-Atrash restituées à Israël la veille au soir par le Hamas. "Après la fin du processus d’identification mené par l’Institut national de médecine légale […] les représentants de Tsahal ont informé les familles d’Inbar Hayman et du sergent Mohammad al-Atrash que leurs corps avaient été rapatriés pour être enterrés", indique un communiqué militaire.

Inbar Hayman, artiste graffeuse originaire de Haïfa, connue sous le pseudonyme "Pink", avait 27 ans lorsqu’elle a été assassinée au festival Nova. Sa dépouille avait été apportée à Gaza, comme celle du sergent Mohammad al-Atrash, soldat d’origine bédouine de 39 ans, tué au combat le 7 octobre.

La date de réouverture du passage de Rafah sera annoncée "ultérieurement"

Les autorités israéliennes ont annoncé jeudi que la date d'ouverture du passage de Rafah entre la bande de Gaza et l'Egypte serait annoncée "ultérieurement". Le Cogat, l'organisme du ministère de la Défense israélien supervisant les activités civiles dans les Territoires palestiniens, a déclaré que le passage serait ouvert pour la "circulation des personnes uniquement". La date sera annoncée "ultérieurement", "une fois que la partie israélienne, en collaboration avec la partie égyptienne, aura achevé les préparatifs nécessaires à l'ouverture du point de passage", a-t-il indiqué dans un communiqué.

Ce passage, selon l'accord de cessez-le-feu entre Israël et le Hamas, devrait permettre l'acheminement d'un plus grand volume d'aide internationale à la bande de Gaza.

Accusant le Hamas de jouer la montre et de violer l’accord de cessez-le-feu, Itamar Ben-Gvir, ministre de la Sécurité intérieure et figure de l’extrême droite israélienne, a de nouveau appelé mercredi le Premier ministre Benyamin Netanyahou à couper totalement l’aide humanitaire pour Gaza.

© afp.com/ANDREW CABALLERO-REYNOLDS

Sur son réseau social Truth Social, le président américain a menacé d'aller "tuer" des membres du Hamas.

En Allemagne, le débat sur le retour du service militaire plonge le gouvernement dans la crise

16 octobre 2025 à 12:10

C’est le projet phare de la Défense allemande, devant permettre de faire passer ses effectifs de 180 000 soldats actuellement à 260 000 en dix ans, sur la base de l’enrôlement volontairement. Mais que faire, si jamais les candidats n’étaient pas assez nombreux ? L’Allemagne devra-t-elle imposer le service militaire obligatoire ? C’est la question qui déchire le gouvernement, alors que le texte doit être débattu ce jeudi 16 octobre au matin au Bundestag.

Il ne reste qu’un peu plus de trois mois avant le retour de la conscription dans le pays. Bientôt, les jeunes Allemands recevront une lettre à leur majorité leur offrant la possibilité de s’enrôler, pour 2 300 euros par mois. Le gouvernement espère recruter 30 000 jeunes par an. Mais en cas d’échec, les conservateurs, favorables au service militaire obligatoire, proposent un tirage au sort.

Une proposition "pourrie", a répondu mercredi le ministre social-démocrate de la Défense Boris Pistorius, parti en croisade aussi bien contre sa propre formation (le SPD) qu’avec les conservateurs (CDU-CSU) du chancelier Friedrich Merz, prêts à faire alliance sur cette mesure. Il s’est aussi moqué de "la rhétorique du pistolero" des conservateurs bavarois, qui réclament d’abattre les drones survolant des sites sensibles depuis des mois, comme ceux ayant paralysé l’aéroport de Munich (sud) début octobre.

Confronté à ces querelles publiques, le gouvernement allemand a tenté mercredi de relativiser l’ampleur des différends en son sein. Interrogé sur le sujet en conférence de presse, le porte-parole de la chancellerie a minimisé la portée des piques et des sarcasmes, notant que l’objectif de Friedrich Merz de bâtir la plus puissante armée conventionnelle d’Europe restait d’actualité, afin de répondre à la menace russe et au repli américain d’Europe.

"Je recommande à tout le monde de réduire un peu la dramaturgie, l’Allemagne n’est pas divisée, affaiblie ou en incapacité d’agir à cause" de ces disputes publiques, a estimé Stefan Kornelius, auquel l’AFP demandait si ces querelles envoyaient un message de faiblesse aux autorités russes. "On souhaiterait voir plus de débats et de démocratie en Russie", a-t-il argumenté.

Querelles profondes

La veille, le ministre de la Défense avait refusé de valider l’accord entre les députés sociaux-démocrates et conservateurs en faveur d’un système de tirage au sort pour recruter dans l’armée, si le nombre des volontaires était insuffisant.

"En trente ans de Bundestag (la chambre basse du Parlement, ndlr), je n’ai jamais vu un ministre torpiller de front une procédure législative importante relevant de son propre domaine de responsabilité", s’est emporté Norbert Röttgen, le vice-président des députés conservateurs, dans les colonnes de la Süddeutsche Zeitung.

Le ministre a voulu corriger le tir mercredi matin, assurant que son coup d’éclat "était bien moins dramatique que ce que l’on dit". Le porte-parole du chancelier a quant à lui insisté sur le fait que l’objectif de transformer l’Allemagne en puissance militaire restait une priorité. En 2035, ce pays compte avoir une armée de "460 000 soldates et soldats", 260 000 d’active et 200 000 réservistes.

Actuellement, les effectifs de la Bundeswehr tournent autour de 180 000 personnes (plus 49 000 réservistes). Il a assuré qu’une loi serait votée et mise en application dès le 1er janvier, comme prévu. Le porte-parole a aussi rappelé que depuis l’attaque à grande échelle de l’Ukraine par la Russie en février 2022, l’Allemagne devait "faire face à une menace nettement plus grave".

Menace russe

Friedrich Merz et Boris Pistorius répètent régulièrement que, face aux tentatives russes de déstabilisation, d’espionnage, de désinformation et d’intimidation, l’Allemagne n’était "pas encore en guerre mais pas non plus en paix".

La coalition entre conservateurs et sociaux-démocrates au pouvoir en Allemagne a été constituée au printemps, sur fond de percée électorale de l’extrême droite pro-russe. Elle est néanmoins régulièrement déstabilisée par des controverses.

Le chancelier allemand a fait des questions de sécurité nationale une priorité, annonçant des investissements sans précédent dans une armée sous-financée et sous-équipée depuis des décennies. Il a aussi réaffirmé son soutien indéfectible à l’Ukraine, dont l’Allemagne est le principal bailleur européen. "Nous ne laisserons pas notre société libre être déstabilisée par des attaques hybrides (...) C'est pourquoi le Conseil national de sécurité, que nous avons récemment créé, élabore actuellement un plan d'action complet pour lutter contre les menaces hybrides, qu'il examinera dans quelques jours lors de sa réunion constitutive", a déclaré ce jeudi le dirigeant allemand.

Le gouvernement est régulièrement accusé de manquer de fermeté face aux agressions dont la Russie est accusée. Ainsi, les conservateurs bavarois, membres de la coalition, militent pour que l’armée et la police abattent les drones survolant des sites sensibles, une solution que d’autres rejettent en raison notamment du risque de dommages collatéraux. Le dirigeant de la Bavière, Markus Söder, a réclamé que la politique soit d'"abattre plutôt qu’attendre". "Ce qui nous aide le moins, c’est la rhétorique du pistolero", a répondu le ministre de la Défense, cité mercredi par le portail The Pioneer.

© afp.com/Tobias SCHWARZ

Le chancelier allemand Friedrich Merz s'adresse au Bundestag, la chambre basse du Parlement allemand, le 16 octobre 2025

Guerre en Ukraine : Donald Trump dit qu'il va rencontrer Vladimir Poutine à Budapest

16 octobre 2025 à 20:32

Donald Trump a rouvert mercredi 15 octobre la controverse sur les importations de pétrole russe. Convaincu que les approvisionnements indiens contribuent à financer la guerre de Moscou en Ukraine, le président américain a affirmé publiquement que le Premier ministre Narendra Modi lui avait promis d’y renoncer, alors que Washington impose depuis fin août à l’Inde des droits de douane punitifs à 50 %. Le locataire de la Maison-Blanche a également pointé du doigt les achats de pétrole russe par la Chine, qui s’est défendue ce jeudi en dénonçant les "intimidations" de Donald Trump.

Ce dernier doit rencontrer demain Volodymyr Zelensky, attendu à Washington dès aujourd’hui. Selon un responsable ukrainien, les missiles Tomahawk seront le "sujet principal" de sa visite.

Les infos à retenir

⇒ Donald Trump dit qu'il va rencontrer Vladimir Poutine à Budapest

⇒ Volodymyr Zelensky s’entretiendra vendredi à Washington avec Donald Trump

⇒ Friedrich Merz va demander à l’UE de prêter à l’Ukraine 140 milliards d’euros garantis par des avoirs russes

Donald Trump dit qu'il va rencontrer Vladimir Poutine à Budapest

Donald Trump a annoncé jeudi qu'il rencontrerait Vladimir Poutine à Budapest, capitale de la Hongrie, sans donner de date précise, après un échange téléphonique avec son homologue russe au cours duquel il assure que "de grands progrès ont été faits". Le président américain a fait cette annonce à la veille d'une entrevue qu'il doit avoir avec son homologue ukrainien Volodymyr Zelensky, lequel espère que Washington lui fournira des missiles Tomahawk malgré les protestations de Moscou.

"Nous avons décidé qu'une réunion de nos conseillers de haut niveau aurait lieu la semaine prochaine. Les premières réunions seront dirigées par le secrétaire d'Etat Mario Rubio pour les Etats-Unis" dans un lieu encore à définir, a écrit Donald Trump sur Truth Social. "Puis le président Poutine et moi-même nous réunirons dans un endroit déjà convenu, Budapest, en Hongrie, pour voir si nous pouvons mettre fin à cette guerre 'sans gloire' entre la Russie et l'Ukraine", a ajouté le président américain.

Sa dernière entrevue avec le maître du Kremlin remonte au 15 août sur une base militaire en Alaska. Elle n'avait débouché sur aucune perspective concrète de règlement du conflit déclenché en février 2022 par l'invasion russe.

De son côté, le Kremlin a également affirmé travailler à l'organisation d'une nouvelle rencontre, possiblement à Budapest. Donald Trump et Vladimir Poutine ont eu un échange téléphonique de "presque deux heures trente" à l'initiative de Moscou. Un échange que la présidence russe a qualifié d'"extrêmement franc et empreint de confiance". "Il est convenu que les représentants des deux pays s'occuperont sans tarder de la préparation d'un sommet, qui pourrait être organisé, par exemple, à Budapest", a déclaré le conseiller diplomatique de Vladimir Poutine, Iouri Ouchakov, devant la presse après cette conversation au téléphone.

L'Ukraine impose des coupures d'électricité dans tout le pays après des frappes russes

Des coupures de courant ont été instaurées dans toute l'Ukraine pour le deuxième jour consécutif en raison des dégâts causés par des frappes russes sur les infrastructures du pays, a annoncé jeudi soir l'opérateur du réseau.

"En raison de la situation difficile sur le système énergétique, des coupures d'électricité d'urgence ont été mises en place dans toutes les régions d'Ukraine", a indiqué Ukrenergo sur Telegram. La Russie a récemment intensifié ses frappes sur le réseau énergétique ukrainien à l'approche de l'hiver.

Volodymyr Zelensky à Washington dès ce jeudi

Le président ukrainien Volodymyr Zelensky s’entretiendra vendredi à Washington avec son homologue américain Donald Trump de la possible livraison à son armée de missiles de croisière Tomahawk, "sujet principal" du déplacement, a indiqué jeudi à l’AFP un haut responsable ukrainien.

Volodymyr Zelensky arrivera dans la capitale américaine dès jeudi pour rencontrer des représentants des industries de défense, a précisé ce responsable sous couvert d’anonymat. Il s’agit de voir "quand les approvisionnements seront vraiment possibles", a-t-il déclaré.

La Chine défend l’achat "légitime" de pétrole russe

La Chine a défendu jeudi comme "légitimes" ses achats de pétrole russe et a qualifié de tentative "d’intimidation" les pressions du président américain Donald Trump pour qu’elle cesse d’en acheter.

"La Chine mène une coopération économique, commerciale et énergétique normale et légitime avec les pays à travers le monde, y compris la Russie", a dit devant la presse un porte-parole des Affaires étrangères, Lin Jian, réagissant à des propos du président américain mercredi.

Donald Trump a déclaré avoir reçu la promesse du Premier ministre Narendra Modi que l’Inde cesserait d’acheter du pétrole russe, sous l’effet des droits de douane punitifs américains. "Maintenant, je dois convaincre la Chine d’en faire de même", a-t-il ajouté.

Sans démentir ni confirmer ses propos, le ministère indien des Affaires extérieures a répété jeudi que la priorité de sa politique énergétique visait à "défendre les intérêts du consommateur indien".

Friedrich Merz va demander à l’UE de prêter à l’Ukraine 140 milliards d’euros garantis par des avoirs russes

Le chancelier allemand Friedrich Merz a annoncé jeudi qu’il proposera la semaine prochaine, lors d’un sommet de l’UE, un plan pour prêter à l’Ukraine 140 milliards d’euros, garantis par des avoirs russes.

Devant les députés allemands, il a appelé à utiliser les avoirs de la Banque centrale russe, gelés depuis l’invasion de février 2022, pour accorder à l’Ukraine "un total de 140 milliards d’euros de prêts sans intérêt", qui seront utilisés exclusivement pour financer l’effort de guerre du pays. "Versés par tranches, (ces prêts) garantiraient la capacité de résistance militaire de l’Ukraine pour des années, si nécessaire", a-t-il insisté dans un discours à la chambre basse du Parlement, consacré au sommet des 22-24 octobre.

Trois ans et demi après l’invasion de l’Ukraine, l’UE débat encore de la manière dont peuvent être utilisés les 210 milliards d’euros de la Banque centrale russe gelés par les sanctions européennes. Car les Européens ne veulent pas les utiliser directement, craignant de créer un précédent qui minerait la confiance dans l’euro et mettrait en danger des actifs européens à l’étranger.

© afp.com/ANDREW CABALLERO-REYNOLDS

Le président américain Donald Trump et le président russe Vladimir Poutine sur la base militaire Elmendorf-Richardson en Alaska, le 15 août 2025

Venezuela : Donald Trump approuve des opérations de la CIA et envisage des frappes terrestres

16 octobre 2025 à 08:19

Le président américain Donald Trump a indiqué mercredi 15 octobre avoir autorisé des actions clandestines de la CIA contre le Venezuela et envisager des frappes sur le territoire vénézuélien, déclenchant la colère de Caracas qui s’est insurgé contre "les coups d’Etats fomentés" par la principale agence américaine de renseignement extérieur.

Donald Trump a refusé de commenter en détail des informations du New York Times selon lesquelles il aurait secrètement autorisé la CIA à mener une action clandestine au Venezuela contre le président Nicolás Maduro. "Mais j’ai donné une autorisation pour deux raisons vraiment", a-t-il cependant confirmé, avant d’énumérer des arguments contre Nicolás Maduro, qu’il accuse de diriger un régime "narco-terroriste" et de libérer des prisonniers pour les envoyer aux Etats-Unis.

Lorsqu’on lui a demandé s’il avait donné à la CIA l’autorisation de "neutraliser" le dirigeant vénézuélien, Donald Trump a répondu : "C’est une question ridicule qu’on me pose là. Enfin, ce n’est pas vraiment une question ridicule, mais ne serait-ce pas ridicule de ma part d’y répondre ?", a-t-il observé.

"Nous regardons du côté du sol à présent"

L’administration Trump a récemment frappé en mer au moins cinq embarcations présentées comme celles de narcotrafiquants dans les eaux internationales, pour un bilan d’au moins 27 morts, après avoir déployé en août huit navires de guerre et un sous-marin à propulsion nucléaire au large des côtes du Venezuela, dans le cadre d’une opération présentée comme visant le trafic de drogue.

Mercredi, la police de Trinité-et-Tobago a indiqué à l’AFP enquêter sur la possibilité que deux ressortissants trinidadiens figurent parmi les six personnes tuées lors de la dernière frappe américaine annoncée mardi par Donald Trump. Les autorités ont été alertées par des habitants du village de pêcheurs de Las Cuevas (nord de l’île de Trinité) de la présence présumée de deux Trinidadiens sur l’embarcation.

De son côté, le président Trump, répondant à une question d’un journaliste sur la possibilité de frappes terrestres contre le Venezuela, a confié : "Je ne veux pas vous en dire plus, mais nous regardons du côté du sol à présent, car nous contrôlons très bien la mer".

Washington accuse le président vénézuélien et son gouvernement d’être à la tête d’une vaste organisation de trafic de drogue vers les Etats-Unis, ce que Caracas dément vigoureusement. Le Venezuela a lancé des exercices militaires et la mobilisation de réservistes en réponse au déploiement américain.

Manœuvres militaires

"Non à la guerre dans les Caraïbes" a lancé Nicolás Maduro dans un discours mercredi. "Non au changement de régime qui nous rappelle tant les guerres éternelles ratées d’Afghanistan, d’Iran, d’Irak […]. Non aux coups d’Etat fomentés par la CIA", a-t-il poursuivi. Des coups "qui nous rappellent les 30 000 disparus causés par la CIA lors des coups d’Etat en Argentine. Le coup d’Etat de Pinochet et les 5 000 jeunes assassinés et disparus. Jusqu’à quand les coups d’Etat de la CIA ? L’Amérique latine ne les veut pas, n’en a pas besoin et les rejette", a-t-il encore accusé devant le Conseil national pour la souveraineté et la paix, organe créé en septembre spécialement pour cette crise.

Les Etats-Unis "admettent publiquement avoir autorisé des opérations visant à agir contre la paix et la stabilité du Venezuela. Cette affirmation sans précédent constitue une violation grave du droit international", a réagi en soirée le ministère des Affaires étrangères dans un communiqué. "Nous observons avec une extrême inquiétude l’utilisation de la CIA, ainsi que les déploiements militaires annoncés dans les Caraïbes, qui configurent une politique d’agression, de menace et de harcèlement contre le Venezuela", précise le texte.

Le président Maduro avait auparavant dans la journée poursuivi un programme de manœuvres militaires à travers le pays, ordonnant notamment un déploiement à la frontière avec la Colombie, dans les Etats de Tachira, Apure et Amazonas. C’est justement par cette zone très poreuse que transite une partie de la cocaïne colombienne, premier producteur mondial. Elle fait partie des cibles possibles évoquées par des sources proches de la Maison-Blanche.

Pour Nicolás Maduro, Washington utilise le trafic de drogue comme prétexte "pour imposer un changement de régime" et s’emparer des importantes réserves de pétrole du pays.

© afp.com/Brendan SMIALOWSKI

Le président américain Donald Trump devant un portrait de l'ex-président républicain Ronald Reagan, dans le Bureau ovale de la Maison Blanche, le 30 septembre 2025

Blaise Metreweli : une révolution à la tête du MI6, le service secret britannique

16 octobre 2025 à 06:00

Quand il est question de femmes et d’espionnage, on pense assez rapidement à M, directrice du MI6 et patronne de James Bond. Le personnage interprété par Judi Dench est librement inspiré de Dame Stella Rimington, première femme à prendre la tête du MI5, le service de renseignement intérieur, en 1992.

Après avoir initialement suivi son mari diplomate en Inde, elle est approchée par un officier de liaison et devient dactylographe à mi-temps du MI5. De retour à Londres en 1969, Rimington obtient un poste permanent au sein du prestigieux service de renseignements. Elle gravit les échelons et parcourt, pendant plus de 20 ans, ses différentes branches.

À la fin de la guerre froide, elle se rend à Moscou pour renouer le contact avec le KGB. Une carrière brillante, jusqu’à briser un plafond de verre : Stella Rimington est nommée directrice du MI5. Durant quatre ans, elle va moderniser le service et ouvrir la porte à d’autres femmes au sein de l’espionnage britannique, et notamment à notre visionnaire du jour : Blaise Metreweli.

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Crédits : EON Productions, Le Figaro, TV5 Monde.

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Reçu avant avant-hier L'Express

Le président syrien dit à Vladimir Poutine vouloir "redéfinir" les relations Moscou-Damas

15 octobre 2025 à 19:58

Le président syrien par intérim Ahmad al-Chareh a dit mercredi en Russie vouloir "redéfinir" les relations Damas-Moscou, lors de sa première rencontre avec Vladimir Poutine depuis le renversement de Bachar al-Assad, un ex-allié clé du Kremlin.

"Bienvenue en Russie"

Devant les caméras, Vladimir Poutine a accueilli chaleureusement Ahmad al-Chareh au Kremlin tandis qu'en coulisses un responsable syrien a affirmé à l'AFP que Damas allait demander à Moscou de livrer Bachar al-Assad, réfugié avec sa famille en Russie depuis sa fuite de Syrie en décembre 2024. "Au cours de toutes ces décennies, nous avons toujours été guidés par une seule chose : les intérêts du peuple syrien. Nous avons vraiment des liens très profonds avec le peuple syrien", a déclaré Vladimir Poutine, aux côtés du dirigeant syrien, lors de cet accueil filmé par la télévision d'Etat russe.

Il a affirmé que plus de 4.000 jeunes Syriens étudiaient actuellement en Russie, disant espérer qu'ils renforceront à l'avenir "l'Etat syrien". "Nous sommes très heureux de vous voir. Bienvenue en Russie", a conclu Vladimir Poutine.

Pour sa part, Ahmad al-Chareh, accompagné d'une délégation de hauts responsables syriens, a dit vouloir "redéfinir" les relations Damas-Moscou, tout en saluant également "des liens historiques anciens" entre la Syrie et la Russie et les "intérêts communs" entre les deux pays.

"Nous respectons tous les accords précédents et cette grande histoire et nous essayons de restaurer et de redéfinir d'une nouvelle manière la nature de ces relations afin que la Syrie puisse jouir de son indépendance, de sa souveraineté, ainsi que de son unité et de son intégrité territoriales (...) de sa sécurité et de sa stabilité", a-t-il ajouté. Il a précisé notamment qu'une partie des besoins alimentaires de la Syrie dépendaient de "la production russe" et que "de nombreuses centrales" électriques syriennes ont besoin de "l'expertise russe".

Livrer Bachar al-Assad

Après la rencontre, qui a duré deux heures trente selon des médias russes, le vice-ministre russe Alexandre Novak a affirmé que les délégations avaient discuté de la livraison d'aide humanitaire à Damas, ainsi que de projets dans les domaines de l'énergie, des transports, du tourisme, de la santé et de la culture.

Selon Alexandre Novak, la Russie est prête à participer à la reconstruction de la Syrie, ravagée par près de 14 ans d'une guerre déclenchée en 2011 par la répression de manifestations prodémocratie. Moscou est aussi prêt à travailler dans le secteur pétrolier syrien. "Il y a des gisements qui nécessitent d'être développés, d'autres en sommeil, et de nouveaux gisements. Nous sommes prêts également à participer", a-t-il déclaré, cité par l'agence Ria Novosti.

Plus tôt mercredi, un responsable gouvernemental syrien ayant requis l'anonymat a affirmé à l'AFP que Damas demanderait à Moscou lors de cette visite de livrer Bachar al-Assad et "tous ceux" ayant commis des "crimes de guerre" et se trouvant en Russie. En fin d'après-midi, aucun dirigeant russe ou syrien n'avait évoqué publiquement cette question.

Lundi, le ministre russe des Affaires étrangères, Sergueï Lavrov, avait réaffirmé que Moscou avait offert à Bachar al-Assad et sa famille l'asile pour "des raisons purement humanitaires" et que ces derniers vivaient "dans la capitale russe".

Etablir des relations pacifiques avec la Russie

Outre le sort de l'ex-dirigeant syrien, se pose celui des bases militaires russes de Tartous et de Hmeimim, situées sur la côte méditerranéenne, et qui constituent les seuls avant-postes militaires officiels de la Russie en dehors de l'ex-URSS. Moscou avait largement utilisé ces installations lors de son intervention en 2015 dans la guerre civile syrienne en soutien à Bachar al-Assad, menant de violents bombardements aériens sur les zones tenues par les rebelles.

L'armée russe avait notamment bombardé intensivement le bastion rebelle d'Idlib, dans le nord-ouest de la Syrie, qui était tenu en grande partie par les forces de M. Chareh. Fin 2019, lors d'une offensive gouvernementale pour essayer de reprendre cette zone, Moscou y avait mené des centaines de frappes aériennes, faisant des morts et causant la destructions d'écoles, d'hôpitaux, commerces et habitations.

Les nouveaux dirigeants islamistes de la Syrie cherchent à établir des relations pacifiques avec la Russie, malgré l'alliance passée de Moscou avec Bachar al-Assad. En juillet, le ministre syrien des Affaires étrangères, Assad al-Chaibani, avait été le premier haut responsable du nouveau gouvernement à se rendre en Russie. En janvier, le vice-ministre russe des Affaires étrangères Mikhaïl Bogdanov avait conduit la première délégation russe à se rendre en Syrie depuis la chute de Bachar al-Assad.

© Alexander Zemlianichenko / POOL / AFP

Le président russe Vladimir Poutine et le président intérimaire syrien Ahmed al-Sharaa se serrent la main lors de leur rencontre au Grand Palais du Kremlin, à Moscou, le 15 octobre 2025.

Japon : cette épidémie de grippe qui inquiète les scientifiques

15 octobre 2025 à 19:19

Le 3 octobre, le ministère japonais de la Santé, du Travail et des Affaires sociales a tranché : le pays est officiellement en situation d’épidémie de grippe. Une annonce qui a résonné comme un signal d’alarme dans un Japon encore en plein automne. Les autorités expliquent qu’une épidémie est déclarée lorsque le nombre d’infections dépasse les prévisions habituelles pour une période donnée. Cette fois, la hausse est nette, brutale, et surtout précoce. Les chercheurs eux-mêmes se disent surpris : jamais ils n’avaient observé un tel niveau d’infection à cette époque de l’année.

Dans plusieurs régions, les cas se multiplient, et les hôpitaux voient affluer des milliers de malades touchés par ce virus respiratoire. Au-delà de l’archipel, certains spécialistes craignent désormais que la vague japonaise n’enclenche une série d’épidémies hivernales en Asie. Et ce, jusqu’en Europe. L’hiver approche, et avec lui un virus prêt à franchir les frontières.

Une épidémie précoce

Au 10 octobre, les autorités japonaises avaient recensé 6 013 cas de grippe à travers le pays. Une semaine plus tôt, plus de 4 000 personnes étaient déjà hospitalisées, soit une moyenne d’un peu plus d’un patient par établissement médical, ou quatre fois plus que la semaine précédente. Dans 28 des 47 préfectures, les chiffres sont en hausse constante.

Les écoles aussi sont impactées : plus d’une centaine ont dû fermer leurs portes pour tenter de freiner la propagation. En septembre, près de la moitié des 287 patients hospitalisés pour la grippe étaient des enfants de 14 ans ou moins. Okinawa, Tokyo et Kagoshima affichent les taux d’infection les plus élevés.

Rien d’anormal, en soi, à voir la grippe se propager au Japon. Le phénomène se répète chaque hiver, lorsque le froid s’installe. Mais cette année, le virus a pris une longueur d’avance : l’augmentation des cas a commencé cinq semaines plus tôt que d’habitude. Selon Ian Barr, directeur adjoint du Centre collaborateur de l’Organisation mondiale de la santé pour la recherche sur la grippe, interviewé par le média britannique Nature : "le Japon a déjà connu des saisons précoces, mais jamais à ce point-là".

Pour limiter les dégâts, le gouvernement multiplie les appels à la prudence. Les autorités sanitaires recommandent d’éviter les visites non essentielles à l’hôpital afin de ne pas saturer les services, et d’aller consulter rapidement en cas de fièvre ou de toux. Le vaccin est aussi fortement conseillé, tout comme les gestes d’hygiène de base.

Les voyages internationaux pointés du doigt

Les experts avancent plusieurs explications à cette épidémie inhabituelle. En premier lieu, la reprise massive des voyages internationaux depuis la fin des restrictions liées au Covid-19. Les flux entre les pays se sont intensifiés, offrant au virus un terrain idéal pour circuler. À cela s’ajoutent d'autres facteurs : le changement climatique, qui perturbe le rythme saisonnier des maladies, et le manque d’exposition au virus au cours des dernières années, notamment chez les enfants et les personnes âgées.

Ian Barr souligne dans les colonnes de la revue scientifique qu’une souche de grippe A, connue sous le nom de H3N2, semble être à l’origine de cette recrudescence. Celle-ci était déjà particulièrement présente en Australie et en Nouvelle-Zélande au cours des deux derniers mois, avant de remonter vers le nord avec la fin de l’hiver austral. Les échanges fréquents entre ces pays et le Japon auraient facilité sa transmission.

Malgré ces signaux préoccupants, les chercheurs appellent à la mesure : le risque de pandémie mondiale reste faible. Les pays de l’hémisphère sud entrent désormais dans la saison chaude, ce qui devrait freiner la circulation du virus. Au Japon, en revanche, la vigilance reste de mise : le virus s’est invité plus tôt que prévu, et nul ne sait encore jusqu’où il compte aller.

© L'Express

Au 10 octobre, 6 013 cas de grippe avaient été signalés au Japon.

En Ukraine, le bras de fer entre Volodymyr Zelensky et les élus locaux s’intensifie

15 octobre 2025 à 16:24

L’annonce est tombée mardi matin. Volodymyr Zelensky a décidé de priver Gennadi Troukhanov, le maire d’Odessa, de sa citoyenneté ukrainienne. Une annonce sobre, publiée sur Telegram par les services de sécurité ukrainiens (SBU), mais aux répercussions immenses. "La citoyenneté ukrainienne du maire d’Odessa, Gennadi Troukhanov, a été suspendue", y lisait-on, citant le texte signé par le président lui-même. En quelques heures, la nouvelle a déchaîné le pays.

Le SBU l’accuse de détenir un passeport russe, un fait interdit pour un citoyen ukrainien, dans un pays meurtri par la guerre. Lui jure son innocence, répète qu’il n’a jamais possédé un document du "pays agresseur". Ce même jour, un autre nom est tombé : celui du danseur Sergueï Polounine, connu pour ses prises de position polémiques pro-Kremlin.

Un passeport russe délivré en 2015

Ancien député, Gennadi Troukhanov règne sur Odessa depuis 2014, la troisième plus grande ville du pays et un port stratégique sur la mer Noire. Longtemps perçu comme un élu aux affinités pro russes, il avait pourtant opéré un virage spectaculaire après l’invasion de 2022. Devant les caméras, il critiquait violemment Moscou, vantait la résistance d’Odessa, soutenait l’armée ukrainienne. L’homme semblait alors avoir tourné la page. Mais la méfiance n’a jamais disparu.

Dès 2016, les services de sécurité avaient déjà enquêté sur une possible double citoyenneté, sans trouver de preuve. Mais ces dernières semaines, le SBU a affirmé détenir un passeport russe à son nom, daté de décembre 2015 et valable dix ans. La photo du document d’identité, diffusée en ligne, a fait le tour des réseaux sociaux.

Sa révocation ne prive pas seulement Gennadi Troukhanov de sa nationalité : elle menace aussi son fauteuil de maire. Gennadi Troukhanov s’est alors défendu dans un message adressé aux habitants : "je n’ai jamais reçu de passeport russe. Je suis citoyen ukrainien", a-t-il déclaré, affirmant qu’il "continuera à exercer les fonctions de maire élu" tant que possible. Le soir même, Volodymyr Zelensky a annoncé la mise en place d’une administration militaire pour Odessa, justifiant sa décision par des "problèmes de sécurité" persistants.

Une fracture grandissante entre Kiev et les pouvoirs locaux

Cette décision ne vise pas seulement Gennadi Troukhanov, elle illustre une tension de plus en plus vive entre le gouvernement ukrainien et les dirigeants locaux. Depuis plusieurs mois, la défiance monte avec les maires des grandes villes d’Ukraine. Les élus accusent Volodymyr Zelensky d’utiliser la loi martiale, instaurée depuis février 2022, pour étendre ses prérogatives et affaiblir les contre-pouvoirs. Le président, lui, se défend en pointant la "mauvaise gestion" et les "erreurs" commises par certains responsables municipaux, notamment dans la défense civile face aux attaques russes.

À Kiev, le maire Vitali Klitschko a ouvertement dénoncé un abus de pouvoir : dans un message vidéo diffusé en janvier dernier, il accusait le gouvernement de contourner le conseil municipal et de placer à des postes clés des proches du président sans expérience militaire. Selon lui, ces manœuvres mettent même en péril la sécurité de la capitale.

Pour Oleksii Honcharenko, député du parti de Petro Porochenko, "la révocation de la citoyenneté du maire d’Odessa et la mise en place d’une administration militaire sont un signal envoyé à tous les maires : ils sont désormais sous surveillance". A mesure que la guerre s’éternise et que les élections restent suspendues, la légitimité du président est de plus en plus contestée par ses adversaires. Et la bataille pour le contrôle des villes pourrait bien devenir la prochaine épreuve de force du pouvoir ukrainien.

© afp.com/Genya SAVILOV

Le maire de la ville ukrainienne d'Odessa, Guennadi Troukhanov lors d'une interview avec l'AFP, le 20 mai 2022 à Odessa.

A Gaza, le Hamas profite du retrait israélien pour chasser clans rivaux et "collaborateurs"

15 octobre 2025 à 13:06

La trêve à Gaza négociée par les États-Unis a mis sur pause la guerre entre le Hamas et Israël. A sa place a débuté une série d’affrontements entre le mouvement islamiste et ses rivaux sur le territoire palestinien, et une chasse aux "traîtres" ayant collaboré avec l’Etat hébreu.

Alors que les troupes israéliennes se retiraient la semaine dernière pour faciliter l’accord ayant permis la libération des derniers otages, le Hamas a déployé derrière elles de larges forces de sécurité. Selon la BBC, environ 7 000 membres ont été mobilisés et des "gouverneurs" nommés. L’objectif affiché : "nettoyer Gaza des hors-la-loi et des collaborateurs d’Israël". Une démonstration publique d’autorité destinée à montrer clairement que le mouvement reste le pouvoir gouvernant de l’enclave.

De profondes rivalités existent au sein du territoire palestinien, suivant des lignes familiales, chaque clan regroupant des milliers de membres, dont beaucoup sont impliqués dans la contrebande et des activités criminelles. Israël a cependant accentué certaines divisions en tentant, pendant la guerre, de recruter des familles comme contrepoids au Hamas. Selon une enquête du Wall Street Journal, ces familles établies représentent environ 30 % de la population de Gaza.

Le cas de la famille Doghmoush

L’une des premières cibles du Hamas a été la famille Doghmoush, à Gaza-ville, ciblée en raison de la supposée collaboration de dix de ses membres avec Israël. Dimanche soir, des affrontements ont fait des dizaines de morts, après que la situation a dégénéré autour de l’hôpital de Gaza-ville, où un membre de la famille a tué un combattant du Hamas. Celui-ci a riposté en bouclant la zone et assiégé le quartier, avant (selon des membres de la famille) d’incendier des maisons, et de tirer à l’aide de mitrailleuses et de lance-roquettes. Lundi, le "conseil central" de la famille a publié un communiqué affirmant qu’elle avait été la cible d’une campagne d’intimidation et de violence. Elle a tenté d’apaiser la situation en reconnaissant et en désavouant des actes qui selon elle ne la représentent pas, notamment le meurtre du combattant du Hamas.

Le lendemain, la télévision du Hamas n’en a pas moins publié une vidéo montrant des combattants du mouvement traînant plusieurs hommes de la famille Doghmoush sur une place publique en plein jour, puis les exécutant devant une foule de spectateurs. Une source sécuritaire confirmant plus tard à l’AFP qu’il s’agissait de "huit collaborateurs de la famille Doghmoush".

Une répression institutionnalisée

À la suite de ces événements, le ministère de l’Intérieur, contrôlé par le Hamas à Gaza, a déclaré prendre les mesures nécessaires pour rétablir l’ordre après la mise en œuvre du cessez-le-feu, et a annoncé offrir cette semaine une période d’amnistie pour que les combattants rivaux n’ayant pas commis de meurtre puissent se rendre.

L’autorité du Hamas a été gravement érodée par la dévastation infligée à Gaza ces deux dernières années, le mouvement étant accusé par de nombreux Palestiniens en colère d’avoir inutilement prolongé le conflit pour protéger ses propres intérêts et éviter de se rendre. Des familles influentes et groupes armés ont profité de cette faiblesse, défiant publiquement le Hamas et cherchant à établir leur propre autorité dans leurs zones respectives. Selon Benyamin Netanyahou, certains de ces groupes, comme Abu Shabab dans la région de Rafah, ont été armés par Israël dans le but d’affaiblir davantage la mainmise du Hamas.

À présent, le Hamas riposte. Khaled Qaddoumi, envoyé du Hamas à Téhéran, a déclaré il y a peu que le groupe avait renforcé et déployé son armée afin de sévir contre les criminels et les pilleurs, et punir ceux qu’il considère comme des collaborateurs d’Israël. Bras armé de cette répression : l’unité paramilitaire du Hamas Rada’a ("Dissuasion" en arabe). Cette semaine, celle-ci a annoncé avoir arrêté des membres de familles rivales dans les zones méridionales et centrales de la bande, et pris le contrôle de positions de milices rivales dans Gaza-ville.

D’autres familles "armées par Israël" ciblées

Famille Al-Mansi dans le Nord, Al-Astal dans la région de Khan Younès… Dès juillet 2025, une liste avait été publiée par le ministère de l’Intérieur de Gaza, recensant des clans armés et des individus accusés de crimes ou de collaboration avec Israël. Le Hamas utilise depuis ces renseignements pour identifier et neutraliser les rivaux, certains décrits avec leur véhicule et des traits de caractère. Certaines familles continuent malgré tout de provoquer le groupe islamiste, comme le chef du clan Al-Majida, qui déclarait récemment dans un entretien accordé à Ynetnews (site anglophone du quotidien israélien Yediot Aharonot) que "le Hamas est faible".

Après les affrontements avec les Doghmoush, d’autres familles ont été visées. Les Abu Samra ont notamment été pris pour cible, déclenchant des batailles intenses dans la ville centrale de Deir al-Balah, au cœur de Gaza. Au début du mois d’octobre, juste avant le cessez-le-feu, le Hamas s’était déjà livré à des fusillades avec la famille Al-Majaydeh, tuant une demi-douzaine de ses membres. Selon le porte-parole de la famille, les racines du conflit avec le Hamas sont politiques, son clan étant très majoritairement affilié au Fatah et à l’Autorité palestinienne. Pour survivre, cette dernière a finalement décidé de déclarer sa loyauté envers le Hamas et de remettre ses armes.

Le Hamas a depuis indiqué avoir rencontré les dirigeants d’autres familles pour apaiser les divisions. Ces démarches pourraient contribuer à désamorcer les combats, mais elles soulignent surtout le problème plus vaste de la domination croissante du Hamas sur Gaza. Pour le Wall Street Journal, une chose est sûre : "Cette violence souligne les défis à venir, alors que les discussions autour du plan de paix du président Trump dépassent la question des otages pour aborder la tâche plus complexe du désarmement du Hamas et de son remplacement par de nouvelles structures administratives et sécuritaires", estime le journal. Car l’affirmation d’autorité du groupe, si elle persiste, sera en contradiction avec les exigences du plan Trump.

© afp.com/Bashar TALEB

Après deux ans de guerre contre Israël, Gaza se déchire en interne au rythme des affrontements entre le Hamas et des clans rivaux, considérés comme "collaborateurs" d'Israël.
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