La présidente de la Commission européenne Ursula von der Leyen a informé les dirigeants des 27 pays de l’Union européenne, réunis à Bruxelles, du report à janvier de la signature de l’accord commercial entre l’UE et des pays du Mercosur, a-t-on appris jeudi de sources diplomatiques.
Ursula von der Leyen espérait parapher ce traité de libre-échange samedi, lors du sommet du Mercosur dans la ville brésilienne de Foz do Iguaçu. Mais elle avait besoin au préalable de l’aval d’une majorité qualifiée d’Etats membres à Bruxelles, ce qu’elle n’a pas obtenu en raison en particulier de l’opposition de la France et de l’Italie.
Un échange entre Lula et Meloni
Négocié depuis plus de 25 ans, ce traité de libre-échange permettrait à l'UE d'exporter davantage de véhicules, machines, vins et spiritueux en Argentine, au Brésil, au Paraguay et en Uruguay. Dans le sens inverse, il faciliterait l'entrée en Europe de viande, sucre, riz, miel et soja sud-américains, ce qui alarme les filières concernées.
Le président brésilien Lula avait ouvert la voie à ce report quelques heures plus tôt après un échange téléphonique avec la cheffe du gouvernement italien Giorgia Meloni qui lui avait demandé de la "patience", assurant que l'Italie soutiendrait l'accord in fine.
Ce délai supplémentaire est un revers pour la Commission européenne, l'Allemagne et l'Espagne qui poussaient pour une signature dans les prochains jours. Le compte n'y est pas pour signer cet accord", avait répété Emmanuel Macron jeudi.
Des affrontements à Bruxelles
Jeudi à Bruxelles, en marge du sommet, des milliers d'agriculteurs sont venus faire entendre leur colère. Pneus en feu, jets de pommes de terre et de projectiles auxquels ont répondu des canons à eau et des tirs de gaz lacrymogènes de la police. La situation a été particulièrement tendue autour des institutions européennes, protégées par un important dispositif policier.
Selon la police bruxelloise, 7 300 personnes, avec une cinquantaine de tracteurs, ont pris part à la manifestation autorisée, principalement dans le calme.
Mais 950 tracteurs supplémentaires s'étaient massés dans le quartier européen, engorgeant plusieurs rues.
Comment inciter la population à faire plus d'enfants ? La Chine a entrepris une vaste série de mesures pour relancer la natalité du pays, en baisse depuis plusieurs années. La dernière en date : à compter du 1ᵉʳ janvier prochain, une mesure, intégrée à une loi fiscale de 2024, entrera en vigueur : la taxation des moyens contraceptifs. Préservatifs et pilules contraceptives seront désormais soumis à un taux de TVA de 13 %. Une nouveauté, car l'ensemble de ces produits ou traitements demeuraient jusque-là exemptés de tout prélèvement de ce genre. Pour Pékin, cette évolution intervient dans la continuité du changement de doctrine du pays quant à la question de la famille.
Une démographie en berne
En effet, pendant plus de 30 ans, entre 1979 et 2015, la Chine a limité le nombre d'enfants à un seul par ménage. Une "politique de l'enfant unique" strictement appliquée, les parents pouvant être poursuivis pénalement pour avoir enfreint la règle. Mais depuis 2016, le pouvoir chinois a lâché du lest en la matière. Deux enfants ont d'abord été autorisés pour chaque famille, avant qu'un troisième soit à son tour permis en 2021. Aujourd'hui, l'État chinois enjoint même dorénavant à fonder une famille. En cause ? La démographie en berne du pays, qui a perdu 1,39 million d'habitants en 2024 par rapport à 2023. Sur cette même année, seuls 9,3 millions de bébés sont nés en Chine, contre 14,7 millions en 2019. En 2023, l'Inde est devenue, au détriment de Pékin, le premier pays du monde en nombre d'habitants (1,426 milliard).
Ces chiffres ont de quoi inquiéter le président chinois, Xi Jinping. Depuis plusieurs années, son gouvernement a mis en œuvre plusieurs dispositions pour pousser la population à donner naissance à davantage d'enfants. Jusqu'à l'âge de trois ans, une allocation spécifique est versée aux parents d'un nouveau-né pour les accompagner dans les premiers mois post-grossesse. Des allègements fiscaux vont également bientôt être appliqués pour les services de garde d'enfants, ou, plus étonnant, les agences matrimoniales. Les prix pour faire un enfant via une fécondation in vitroont par ailleurs été revus à la baisse.
Dans un article consacré au sujet, The Guardian rapporte que certaines régions vont encore plus loin dans cet objectif de relance de la natalité. Certaines femmes expliquent ainsi avoir déjà reçu des coups de fil de la part d'agents gouvernementaux pour les questionner sur leur désir de fonder une famille. Dans la province du Yunnan, d'autres auraient été forcées de communiquer la date de leurs dernières règles auprès des pouvoirs publics locaux, indique le quotidien britannique, se basant sur des informations parues dans la presse chinoise. De façon plus générale, la télévision et les médias contrôlés par le régime du PCC (Parti communiste chinois) encouragent régulièrement les étudiantes à faire des enfants durant leur cursus universitaire – quitte à mettre à mal la suite de leur parcours.
Difficultés économiques et coûts d'éducation
Tandis que sa population vieillit et que l'économie chinoise n'est plus aussi florissante qu'il y a une décennie, Pékin cherche à s'assurer suffisamment de main-d'œuvre pour ses projets futurs. Dans ce contexte, la nouvelle taxe sur les préservatifs et les pilules apparaît avant tout comme un moyen d'entériner la nouvelle orientation adoptée par le pouvoir sur la natalité. "Maintenant que la politique de natalité de la Chine encourage les naissances et ne promeut plus la contraception, il est raisonnable de rétablir la taxation des contraceptifs, souligne, toujours auprès du Guardian, He Yafu, démographe chinois indépendant. "Toutefois, il est peu probable que cette mesure ait un impact significatif sur le taux de fécondité." Aujourd'hui, le coût d'un préservatif est plutôt faible en Chine et ne dépasse parfois pas 0,60 dollar.
D'autres causes peuvent davantage expliquer cette démographie en berne. Les difficultés économiques rencontrées par certains Chinois peuvent par exemple mettre à mal leur projet de fonder une famille. Cet été, le taux de chômage des jeunes a atteint dans le pays un niveau record. Autre facteur contraignant : la Chine constitue aujourd'hui l'un des États les coûteux au monde pour élever sa progéniture. L'an dernier, l'Institut de recherche démographique YuWa de Pékin avait ainsi dévoilé un rapport montrant qu'une famille chinoise devrait dépenser en moyenne plus de 538 000 yuans, soit environ 65 000 dollars, pour éduquer son enfant. Un niveau largement supérieur au PIB annuel par habitant.
Tant de paramètres qui poussent beaucoup de Chinois à rester célibataires – en 2019, leur nombre s'élevait à environ 240 millions au sein des frontières nationales, selon le gouvernement. Conséquence de l'ensemble de ces éléments : outre le recul des naissances, le nombre de mariages a largement diminué l'an dernier en Chine, à hauteur de - 20 %.
Alors que les Vingt-Sept se réunissent ce jeudi 18 décembre à Bruxelles pour tenter de s’entendre sur une utilisation des avoirs russes gelés, le chef du Kremlin a, lui, une feuille de route toute tracée. Au cours d’une allocution devant tout un parterre d’officiels du ministère de la Défense prononcée la veille, Vladimir Poutine n’a pas retenu ses coups contre "les porcelets" européens. Pas plus qu’il n’a affiché de volonté de compromis. "S’ils ne veulent pas d’une discussion de fond, alors la Russie libérera ses terres historiques sur le champ de bataille", a martelé le président russe, réaffirmant une fois de plus ses vieilles antiennes. Quelques jours plus tôt, Volodymyr Zelensky avait rencontré à Berlin les émissaires américains Steve Witkoff et Jared Kushner pour s’efforcer de trouver un compromis dans les négociations engagées par Washington en vue de mettre fin au conflit.
Au cœur des pourparlers, la délicate question des concessions territoriales, dans un contexte où Poutine exige le retrait des troupes ukrainiennes du Donbass (composé des régions de Donetsk et Louhansk) comme condition préalable à tout cessez-le-feu. Inacceptable pour l’Ukraine, qui plaide, elle, pour un gel de la ligne de front. "Bien sûr, la Russie insiste pour que nous cédions du territoire. Mais nous ne voulons absolument rien céder. C’est pour cela que nous nous battons", a insisté Volodymyr Zelensky le 8 décembre. Et pour cause, au-delà de constituer le bassin de vie de plus de 200 000 Ukrainiens, les 20 % de la région de Donetsk encore sous contrôle de Kiev abritent ses positions parmi les mieux fortifiées du front. "La région concentre d’importantes lignes de défense, abonde Yohann Michel, chercheur à l’Institut d’études de stratégie et défense (IESD). L’Ukraine y a investi de gros moyens depuis 2014 pour bâtir de nombreux bastions défensifs."
"Ceinture de forteresses"
S’étirant sur une cinquantaine de kilomètres, cette zone, désignée comme la "ceinture de forteresses", rassemble au moins quatre grands centres urbains. Dont les villes jumelles de Sloviansk et Kramatorsk, deux cités distantes d’une dizaine de kilomètres qui regroupaient à elles deux plus de 250 000 habitants avant le début de la guerre. Et plus de 100 000 pour celles, plus au sud, de Droujkivka et Kostiantynivka. "La moindre agglomération sert de point défensif et implique un combat urbain dont le taux de létalité est très élevé pour l’agresseur, pointe le général (2S) Jérôme Pellistrandi, rédacteur en chef de la Revue Défense nationale. Sachant que chacune d’elles est précédée de lignes de défenses composées de tranchées, d’obstacles antichars et d’un réseau de barbelés, qui constitue une forme de no man’s land tel qu’il pouvait exister sur le front lors de la Première Guerre mondiale." En clair, un rempart que Moscou n’a pas la capacité de franchir à court terme.
La difficulté de l’armée russe à faire main basse sur les villes de Pokrovsk et Myrnohrad est révélatrice. Bientôt deux ans après avoir commencé sa marche vers ces deux agglomérations, elle n’est toujours pas parvenue à en achever la prise de contrôle. Et a payé au prix fort chacune de ses avancées. "Les forces russes ont subi de lourdes pertes lors des opérations offensives prolongées sur l’axe de Pokrovsk, contribuant au bilan probable de plus de 250 000 soldats russes tués ou portés disparus (présumés morts) depuis le début de l’invasion", relèvent dans une récente note les renseignements britanniques. A l’aube du quatrième anniversaire du conflit, les pertes russes se chiffreraient au total à près de 1,2 million de personnes, en incluant les blessés.
"La capture du reste du Donbass par la force leur en coûterait probablement des centaines de milliers supplémentaires, jauge le général Pellistrandi. Et demanderait a minima encore plusieurs années d’efforts." L’offrir sur un plateau dans le cadre des négociations serait une occasion inespérée pour le Kremlin d’arracher par la voie diplomatique ce qu’il échoue pour l’heure à obtenir par les armes. En plus de priver l’Ukraine d’un atout crucial en cas de nouvelle offensive à l’avenir. "La nature du terrain aux frontières du Donbass rendrait la défense plus difficile, confirme Yohann Michel de l’IESD. La géographie laisse place à des plaines agricoles beaucoup plus ouvertes, qui se prêtent moins bien à la mise en place d’un solide réseau défensif." Et ouvrent la route vers d’autres villes clés comme Kharkiv, au nord, ou Dnipro, à l’ouest.
Précédent historique funeste
Pas de quoi rassurer la partie ukrainienne alors que, comme il l’a rappelé ce mercredi à Moscou, le chef du Kremlin ne semble absolument pas prêt à renoncer à ses ambitions expansionnistes. Un tel abandon des terres ukrainiennes ne serait de facto pas sans rappeler un funeste précédent historique. "La cession de la région des Sudètes à Hitler en 1938 dans le cadre des accords de Munich a privé la Tchécoslovaquie du vaste système de fortifications qu’elle y avait construit pour se protéger de l’Allemagne nazie", reprend Yohann Michel. En conséquence de quoi le pays s’était retrouvé incapable de se défendre moins d’un an plus tard lorsque - trahissant sa promesse - le Troisième Reich a décidé de relancer les hostilités.
Parmi les autres pistes évoquées en coulisses, celle d’une "zone démilitarisée" ou "DMZ" (acronyme anglais, pour "demilitarized zone"), à la manière de la bande de terre d’une dizaine de kilomètres de large séparant les deux Corées depuis 1953 le long du 38ᵉ parallèle. "Les Ukrainiens auront besoin de garanties de sécurité très solides, jauge le général Pellistrandi. Autrement, il n’est pas assuré que cette zone suffise réellement à empêcher une reprise du conflit." Si les Européens ont évoqué le 15 décembre la création d’une "force multinationale" et "un mécanisme de surveillance et de vérification du cessez-le-feu dirigé par les Etats-Unis", l’accord de Moscou reste plus qu’incertain.
De son côté, Washington a suggéré la mise en place d’une "zone économique spéciale" qui verrait les Ukrainiens se retirer de la région de Donetsk. Une perspective qui n’enchante guère les principaux concernés. "Si les troupes d’un camp doivent se retirer et que l’autre camp reste sur place, qu’est-ce qui retiendra ces autres troupes, les Russes ?, a mis en garde Volodymyr Zelensky le 11 décembre. Il n’est pas certain que l’Ukraine y consente." La question reste en effet hautement inflammable politiquement au sein de la population. Selon un sondage du Kyiv International Institute of Sociology publié le 15 décembre, 75 % des Ukrainiens s’opposent à un plan de paix qui inclurait un retrait des troupes du Donbass. Difficile de leur donner tort.
Sur cette photo diffusée par l'agence d'Etat russe Sputnik, le président Vladimir Poutine et le chef d'état-major Valery Gerasimov assistent à une réunion élargie du Conseil du ministère russe de la Défense à Moscou, le 17 décembre 2025.
Ce n’est pas vraiment une surprise. Élu pape en mai par ses pairs cardinaux, Robert Francis Prevost ne faisait déjà pas franchement figure de potentiel allié pour la galaxie Maga ("Make America Great Again"), tout juste de retour au pouvoir à Washington (États-Unis). L’ex-conseiller de Donald Trump, Steve Bannon, avait même qualifié le nouveau souverain pontife de "pire choix" pour diriger l’Église catholique. Les craintes des conservateurs américains seraient-elles en train de se confirmer ? Devenu Léon XIV, l’actuel pape n’hésite plus à viser – plus ou moins directement – le locataire de la Maison-Blanche et ses choix.
Dernier épisode en date : l’annonce de la nomination par le Vatican, ce jeudi 18 décembre, d’un nouvel archevêque de New York. Ronald Hicks, originaire comme Léon XIV de l’Illinois, va ainsi remplacer Mgr Timothy Dolan, démissionnaire en raison de son âge. En poste depuis 2009, ce dernier se montrait au contraire plutôt clément vis-à-vis de Donald Trump. Membre de la frange conservatrice de l’Église américaine, il avait participé aux deux cérémonies d’investiture du milliardaire républicain, en 2017 et en 2025. Mais cette fois-ci, le profil du nouveau venu se fait bien différent.
Opposé à la politique migratoire de Trump
Plutôt modéré, Ronald Hicks a affiché son soutien à un communiqué de la Conférence des évêques catholiques des États-Unis, publié mi-novembre. L’objectif ? Mettre en cause le tour de vis migratoire organisé par l’administration Trump. Washington s’est en effet fixé l’objectif d’expulser un million de personnes de son territoire sur un an. Les moyens dédiés à la police de l’immigration ont été triplés. "Nous sommes attristés par l’état du débat contemporain et la diabolisation des migrants. […] Nous déplorons que certains immigrants aux États-Unis aient arbitrairement perdu leur statut légal", ont déclaré les évêques dans le document, se disant "opposés à l’expulsion massive et indiscriminée de personnes".
"Profondément ancrée dans notre tradition évangélique d’amour du prochain, cette lettre affirme notre solidarité avec tous nos frères et sœurs et exprime avec clarté et conviction nos préoccupations, notre opposition et nos espoirs", a ajouté Ronald Hicks, en complément de ce document, dans une note publiée sur le site du diocèse de Joliet (Illinois), dont il était jusque-là responsable. Avant d’entrer en fonction dans cette ville de la banlieue de Chicago, le religieux avait aussi réalisé plusieurs missions à l’étranger, notamment au Mexique et au Salvador, pays dans lequel il est resté cinq ans. Une similitude de parcours avec Léon XIV, qui avait lui-même officié comme évêque à Chiclayo (Pérou), de 2015 à 2023.
Léon XIV recherche "l’équilibre" face à Trump
Dans un contexte où le nombre de pratiquants demeure historiquement faible outre-Atlantique, cette nomination revêt pour le Vatican un caractère stratégique essentiel. En effet, le poste d’archevêque de New York constitue l’un des plus influents au sein de l’Église catholique américaine. Toutefois, Ronald Hicks est "légèrement plus à gauche que le cardinal Timothy Dolan, mais en aucun cas un progressiste intransigeant", tempère, auprès de CNN, la journaliste spécialiste du Vatican Elise Allen. Selon elle, le pape "ne recherche ni conservateurs ni progressistes" pour ces fonctions à responsabilité, mais "souhaite des hommes qui partagent ses priorités" et "qui incarnent fondamentalement un équilibre".
Loin des outrances de Donald Trump, Léon XIV cultive pour le moment un style discret. Mais le nouveau pape n’hésite plus à afficher peu à peu ses divergences avec le président américain. Au-delà de la nomination de Ronald Hicks, il s’est montré particulièrement critique à l’égard des mesures déployées par Washington contre les migrants aux États-Unis. En septembre, le souverain pontife a ainsi dénoncé un "traitement inhumain" qui leur était réservé par les autorités américaines. Quelques semaines plus tard, Léon XIV a réitéré de tels propos, jugeant que des personnes immigrées dans le pays faisaient l’objet d’une politique "extrêmement irrespectueuse".
Critiques sur le Venezuela et l’Ukraine
S’il s’inscrit sur ce thème dans le sillage de son prédécesseur François, l’actuel pape se distingue par ses points de vue affirmés sur la politique extérieure menée par Donald Trump. Début décembre, la perspective d’une hypothétique entrée en guerre des États-Unis face au Venezuela avait suscité son inquiétude. "Je crois à nouveau qu’il est préférable de rechercher le dialogue […], en cherchant une autre voie pour parvenir au changement, si tel est le choix des États-Unis", avait-il demandé au président américain.
Les négociations menées par Washington afin de trouver un accord de paix entre l’Ukraine et la Russie l’ont aussi fait réagir. Léon XIV a publiquement reproché aux dirigeants américains d’avoir tenu un temps à l’écart l’Europe des pourparlers. Dans un entretien accordé à Politico le 10 décembre, Donald Trump avait par exemple attaqué les responsables européens, qu’il juge "faibles". "Les propos tenus récemment au sujet de l’Europe, notamment lors d’interviews, visent, à mon avis, à briser ce qui doit être une alliance très importante aujourd’hui et à l’avenir", a dénoncé Léon XIV. Ce dernier estime donc qu’il n’est "pas réaliste" de ne pas "inclure" les Européens dans ces discussions, puisque "la guerre se déroule en Europe".
Avant même son élection, Léon XIV avait déjà fait l’objet de critiques de nombreuses personnalités liées au Parti républicain. Quelques semaines précédant son accession au Saint-Siège, Robert Francis Prevost avait ainsi relayé une tribune critiquant frontalement le vice-président américain, J.D. Vance. De quoi s’attirer les foudres d’une bonne partie de la frange Maga… mais qui n’avait pas empêché Donald Trump de saluer le premier pape américain de l’histoire, une fois son identité révélée.
Le républicain disait à l’époque avoir "hâte" de rencontrer le souverain pontife. Malgré les critiques à son encontre, un face-à-face est-il toujours d’actualité ? "Bien sûr, je le ferai. Pourquoi pas ?", a-t-il lancé, toujours dans le podcast de Politico. "Je suis sûr que c’est un homme charmant…" Avant de poursuivre, en référence aux informations ayant filtré dans la presse sur la famille de Léon XIV : "Son frère est un homme charmant… Savez-vous que son frère est un fervent partisan de Maga ?"
L’opération avait été baptisée "Narnia". Une enquête conjointe du Washington Post et de la chaîne PBS, publiée mercredi 17 décembre, révèle de nouveau détails sur la campagne d’assassinats ciblés contre des scientifiques nucléaires iraniens, lors de la guerre des douze jours entre Israël et l’Iran, en juin 2025.
L’offensive israélienne, qui a contribué à affaiblir considérablement l’arsenal nucléaire iranien, avait pour but de frapper les infrastructures, mais aussi de détruire les têtes pensantes du programme. "Au total, Israël a déclaré avoir assassiné onze scientifiques nucléaires iraniens de haut rang le 13 juin et les jours suivants", indique les médias américains, qui déplorent également des dizaines de victimes civiles ayant péri dans ces mêmes attaques.
71 civils tués
Parmi les premières victimes figurait Mohammad Mehdi Tehranchi, physicien théoricien et expert en explosifs, visé par des sanctions américaines. Il a été tué dans son appartement du 6e étage d’un immeuble de Téhéran. Le Washington Post et le média d’investigation Bellingcat ont cependant confirmé que dix civils, dont un nourrisson de deux mois, ont aussi été tués dans cette frappe d’une puissance comparable à celle d’une bombe d’environ 225 kilos, qui s’est abattue sur le quartier de Saadat Abad à Téhéran.
Parmi les autres personnes ciblées se trouvaient Fereydoun Abbasi, physicien nucléaire qui a dirigé l’organisation iranienne de l’énergie atomique, également sous le coup de sanctions internationales. Il a été tué lors d’une autre frappe sur Téhéran. Au total, l’enquête révèle qu’au moins 71 victimes civiles sont mortes dans ces frappes, d’après des images satellites, des vidéos géolocalisées, des avis de décès, ou encore des registres funéraires.
Lors de la première salve de frappes, Israël a par exemple ciblé le domicile du scientifique Mohammad Reza Sedighi Saber, à Téhéran. Mais ce dernier était absent, et c’est son fils, âgé de 17 ans, qui a été tué. Par la suite, le 24 juin, dernier jour du conflit, Mohammad Reza Sedighi Saber a finalement été tué chez un proche à Astaneh-ye Ashrafiyeh, à trois cents kilomètres de la capitale. Selon le Phnom Penh Post, quinze civils, dont quatre mineurs, sont morts dans ces frappes qui ont détruit deux maisons, désormais enfouies sous des cratères.
Assassinats revendiqués
Ce n’est pas la première fois que le Mossad tue des scientifiques liés au programme nucléaire en Iran. Mais contrairement aux fois précédentes, Israël n’a pas cherché à nier son implication. Les services de renseignement israéliens expliquent ainsi avoir dressé une liste d’une centaine de scientifiques à abattre, avant de choisir une douzaine de cibles prioritaires.
Au total, l’opération globale contre l’Iran, baptisée "Lion ascendant", a combiné des frappes contre des scientifiques iraniens, des chefs militaires du Corps des gardiens de la révolution, mais aussi des infrastructures nucléaires, au moyen d’avions et de drones israéliens, appuyés par des agents infiltrés en Iran.
L’opération aurait permis de détruire "plus de la moitié des lanceurs de missiles balistiques iraniens et d’anéantir le reste de la défense aérienne du pays", rappelle le Washington Post. L’aviation israélienne a notamment bombardé les centrales électriques et les infrastructures nécessaires au fonctionnement des sites de Natanz et de Fordow, les principaux sites d’enrichissement du pays.
Contrairement aux déclarations de Donald Trump, affirmant que le programme iranien avait été "complètement anéanti", les services américains, israéliens et l’AIEA estiment plutôt que le programme a été retardé de plusieurs années.
"Sabotage de la voie diplomatique"
Le directeur de l’AIEA, Rafael Grossi, a souligné que "les dégâts étaient très importants", mais tout en rappelant qu’en absence d’accès aux lieux, toute évaluation reste imprécise. L’Iran conserverait 408 kg d’uranium enrichi à 60 %, bien que ce niveau soit en deçà du seuil militaire.
L’enquête révèle également qu’Israël et les Etats-Unis ont volontairement mené une stratégie diplomatique ambiguë, simulant des désaccords entre eux, pendant qu’ils tentaient d’obtenir un accord politique avec l’Iran, mais sans jamais abandonné les préparatifs d’une intervention militaire israélo-américaine. Peu après le rejet de Téhéran des propositions américaines, Donald Trump a ainsi autorisé l’intervention et les frappes américaines.
Une décision qui a anéanti toute possibilité d’accord diplomatique visant à limiter les activités nucléaires de Téhéran et à les placer sous un contrôle international strict, à l’image des accords sur le nucléaire iranien, dont Donald Trump s’était retiré lors de son premier mandat, en 2018.
Un sommet des dirigeants européens se tient ce jeudi 18 décembre à Bruxelles. Pendant deux jours, les 27 débattront de l’utilisation des avoirs russes gelés pour financer l’effort de guerre en Ukraine. Une échéance cruciale pour Kiev qui, depuis le désengagement financier des Etats-Unis, risque de se retrouver à court de fonds dès le premier trimestre 2026. Pour pallier cette absence - ce à quoi l’Union s’est engagée - les pays membres se disent prêts à en financer les deux tiers, soit 90 milliards d'euros. D’où l’hypothèse des actifs russes, pour éviter un endettement commun.
Une option qui met la majorité des Etats membres d’accord, à l'exception de quelques-uns. Parmi eux, la Belgique qui s’y refuse catégoriquement. En cause : la plus grande partie des fonds, soit quelque 210 milliards d'euros, se trouve aux mains de la société Euroclear, institution financière basée à Bruxelles. Dès novembre, Bart de Wever, le Premier ministre a verbalisé ses craintes de voir les foudres du Kremlin s’abattre sur son pays en cas d’utilisation des avoirs. Un scénario qui a finalement pris forme.
"La Belgique et moi allions le sentir passer pour l’éternité"
Le 2 décembre, le Flamand tirait la sonnette d’alarme : "Qui croit que Poutine va accepter la confiscation des avoirs russes calmement ? Moscou nous a fait savoir qu’en cas de saisie de ses avoirs, la Belgique et moi allions le sentir passer pour l’éternité". Dix jours plus tard, la Russie a officiellement déposé plainte contre Euroclear, exigeant d’être indemnisée à hauteur de 230 milliards de dollars pour l’hypothétique utilisation de ses avoirs que le pays décrit publiquement comme un vol.
Selon les révélations du quotidien britannique The Guardian, les menaces russes se seraient étendues au reste de la classe politique belge. Une offensive que la sécurité intérieure belge attribue aux services de renseignement militaire russes (GRU), bien que son degré d’intensité soit sujet à débat. "Ils ont clairement recours à des tactiques d’intimidation", a protesté un responsable européen dans les colonnes du journal britannique.
"Tu ne veux pas finir comme ça, n’est-ce pas ?"
Quant à la société détentrice, Euroclear, elle a également été ciblée par Moscou. Sa directrice générale, Valérie Urbain, a fait l’objet de plusieurs menaces. Un proche du Kremlin, Olivier Huby, aurait dit à la femme d’affaires "deux amis à moi veulent te voir" et de lui montrer des photos d’officiers des services de renseignement russes, selon les informations du média EUobserver.
Cet incident ne serait pas une première. Courant 2024, Olivier Huby aurait également intimidé un membre du comité exécutif d’Euroclear pour le convaincre de rencontrer des contacts des services de renseignement russes. Début 2025, le membre en question a été impliqué dans un violent incident à l’extérieur d’un bar. Toujours selon les révélations d’EUobserver, Olivier Huby aurait ensuite contacté Valérie Urbain : "Tu ne veux pas finir comme ça, n’est-ce pas ?".
"Choquée", la femme d’affaires a demandé une protection policière pour elle et sa famille, requête refusée, malgré un risque évalué comme élevé par l’Organe de coordination pour l’analyse de la menace belge (Ocam). Sa protection est depuis assurée par un service de sécurité privé. Malgré ces incidents, l’Union européenne demeure majoritairement favorable à l’utilisation des actifs russes. La question sera scellée jeudi ou vendredi.
Les dirigeants européens se rencontrent ce jeudi 18 décembre lors d'un sommet à haut risque à Bruxelles dont l'issue reste incertaine. Au programme : le financement de l'effort de guerre en Ukraine. Et le temps presse pour trouver une solution à Kiev, qui fait face à l'invasion de son territoire depuis février 2022, et qui sera à court d'argent dès le premier trimestre 2026, en l'absence d'accord des 27. Face à au soutien européen, Vladimir Poutine a affirmé mercredi que les objectifs de son offensive en Ukraine "seront sans aucun doute atteints".
Après Bruxelles ce jeudi, Volodymyr Zelensky se rendra à Varsovie vendredi pour une première rencontre avec son homologue polonais, le nationaliste Karol Nawrocki, connu pour ses positions critiques vis-à-vis de Kiev. Un rendez-vous sous tension mais indispensable pour deux voisins alliés.
Les infos à retenir
⇒ L'absence de décision sur les avoirs russes, "un gros problème" pour l'Ukraine, dit Volodymyr Zelensky
⇒ Les 27 "ne quitteront" pas le sommet européen sans solution financière pour l'Ukraine, affirme Ursula von der Leyen
⇒ De nouveaux pourparlers américano-ukrainiens auront vendredi et samedi aux Etats-Unis
Un haut responsable ukrainien à Pékin pour des discussions avec des diplomates chinois
Le premier vice-ministre ukrainien des Affaires étrangères Serguiï Kyslytsia est arrivé jeudi 18 décembre en Chine, pays allié de la Russie, pour des discussions avec des diplomates chinois, a-t-il annoncé sur les réseaux sociaux. Une telle rencontre entre des représentants de Kiev et de Pékin est rare, alors que la Chine est accusée d'aider la Russie dans son offensive à grande échelle en Ukraine lancée en février 2022.
La Chine, l'un des principaux partenaires commerciaux de la Russie, affirme avoir une position neutre dans le conflit en Ukraine, mais elle s'est abstenue de condamner l'agression russe.
L'absence de décision sur les avoirs russes, "un gros problème" pour l'Ukraine, dit Volodymyr Zelensky
Le président ukrainien Volodymyr Zelensky a affirmé jeudi que Kiev aurait un "gros problème" si les dirigeants de l'Union européenne ne parviennent pas à un accord sur l'utilisation des avoirs russes gelés pour financer une aide à l'Ukraine.
Les chefs d'Etat et de gouvernement de l'UE se rencontrent pour discuter de cette question épineuse alors que le temps presse pour trouver une solution de financement pour l'Ukraine qui fait face à l'invasion russe de son territoire depuis février 2022 et compenser la fin annoncée de l'aide américaine. La Commission européenne veut aider Kiev avec un "prêt de réparation" adossé sur les avoirs russes gelés par les sanctions de l'UE. Mais la Belgique, où se trouve la majorité de ces avoirs, redoute des représailles économiques et juridiques de la part de la Russie et réclame une garantie de responsabilité collective.
"La Russie doit comprendre que nous sommes en position de force", a déclaré Volodymyr Zelensky aux journalistes, estimant qu'un accord sur le financement d'un tel prêt signifierait "que l'Ukraine aura des fonds pour 2026 et 2027". "C'est un signal à la Russie selon lequel l'Ukraine ne s'effondrera pas simplement en raison d'un manque de financement — que ce soit pour les armes, le soutien à la population etc", a ajouté le président ukrainien.
A l'inverse, en l'absence d'accord des 27, l'Ukraine sera à court d'argent dès le premier trimestre 2026. La présidente de la Commission européenne Ursula von der Leyen a promis jeudi que les dirigeants des Etats membres ne quitteraient pas le sommet sans accord pour financer l'Ukraine.
De nouveaux pourparlers américano-ukrainiens vendredi et samedi aux Etats-Unis
De nouveaux pourparlers entre l'Ukraine et les Etats-Unis auront lieu vendredi et samedi aux Etats-Unis, a annoncé jeudi le président ukrainien Volodymyr Zelensky, dans le cadre de discussions sur le plan visant à mettre fin à la guerre avec la Russie. "Vendredi et samedi, notre équipe sera aux Etats-Unis, elle est déjà en route pour les Etats-Unis, et les Américains les y attendent. Je ne sais pas qui d'autre pourrait être présent — peut-être qu'il y aura des Européens", a-t-il déclaré à des journalistes. Il n'a pas précisé la composition de la délégation ukrainienne.
Ce nouveau cycle de pourparlers américano-ukrainiens va se dérouler juste avant une rencontre entre émissaires russes et américains sur la guerre en Ukraine prévue, selon un responsable de la Maison-Blanche, ce week-end en Floride.
La présidence américaine n'a fourni aucun détail sur la composition des délégations russo-américaines. Selon le site Politico, les Etats-Unis seront représentés par l'émissaire pour l'Ukraine Steve Witkoff et le gendre du président Donald Trump Jared Kushner, tandis que la Russie devrait envoyer l'émissaire du Kremlin pour les questions économiques Kirill Dmitriev.
Les 27 "ne quitteront" pas le sommet européen sans solution financière pour l'Ukraine
Les dirigeants de l'Union européenne ne quitteront pas le sommet organisé jeudi à Bruxelles sans accord pour financer l'Ukraine, a déclaré à la presse la présidente de la Commission européenne Ursula von der Leyen.
"Nous devons trouver une solution aujourd'hui", a affirmé la dirigeante de l'exécutif européen, tout en disant "soutenir totalement les demandes belges que les risques associés au prêt de réparations (un montage qui impliquerait de mobiliser les avoirs russes gelés pour financer un prêt à Kiev, ndlr) soient partagés par nous tous".
En Russie, trois morts dans des attaques de drones visant un port de la mer d'Azov
Une attaque de drones visant la zone portuaire russe de Rostov-sur-le-Don, sur la mer d'Azov a fait trois morts, a indiqué jeudi le gouverneur régional Iouri Slioussar. L'attaque a provoqué un incendie sur un cargo dans le port de la capitale régionale, tuant deux membres d'équipage et en blessant trois, a précisé le responsable sur son compte Telegram. L'incendie a été maîtrisé, selon lui. Dans la localité de Bataïsk, voisine des installations portuaires, un civil est mort et six autres ont été blessés, a-t-il ajouté.
En riposte aux bombardements quotidiens dont son territoire est la cible depuis près de quatre ans, l'Ukraine envoie des dizaines de drones chaque nuit vers le territoire russe, concentrant ses attaques sur les infrastructures énergétiques qui permettent à Moscou de financer son offensive.
Ces dernières semaines, l'Ukraine a revendiqué des attaques de drones navals contre des pétroliers liés à la Russie dans la mer Noire. Elle a aussi attaqué des ports russes, dont celui de Novorossiïsk près duquel un important terminal pétrolier avait été forcé d'interrompre ses activités fin novembre. La Russie bombarde de son côté régulièrement le port ukrainien d'Odessa, où des navires de transport turcs ont été touchés ces derniers jours.
Ces attaques ont poussé le président turc Recep Tayyip Erdogan à mettre en garde la semaine dernière contre la transformation de la mer Noire en "zone de confrontation", alors que la côte nord de son pays fait face à l'Ukraine et à la Crimée.
Une colonne de chars dévale une avenue fantomatique où la vie a déserté. Seul, au milieu de la route, un homme se tient debout, un sac de courses à la main. L’inconnu est déterminé à empêcher les véhicules de poursuivre leur course meurtrière : nous sommes le 5 juin 1989, à Pékin, et la veille, des milliers de manifestants contre le régime chinois ont été massacrés dans les rues. Le blindé de tête tente de contourner l’individu, mais celui-ci refuse de bouger. La scène, immortalisée par les photographes Jeff Widener et Charlie Cole, est devenue l’un des symboles de la résistance face à la répression du soulèvement de Tiananmen. De cet anonyme (baptisé "tank man"), et de centaines de disparus, on ne sait toujours pas aujourd’hui ce qu’il est advenu - le massacre demeurant un tabou.
Des vidéos inédites
Mais un document ayant fuité ces dernières semaines en Chine nous permet de mieux comprendre les coulisses de cet épisode sanglant de l’histoire. Il s’agit des vidéos inédites du procès de Xu Qinxian, un général devenu célèbre pour avoir refusé d’ouvrir le feu sur les étudiants qui manifestaient contre Deng Xiaoping. Pendant des années, les motivations de cet officier, décédé en 2021 à l’âge de 85 ans, sont restées floues. Mais ces enregistrements, maintenus jusqu’ici secrets, nous donnent des indications sur la manière dont a été prise la décision de décréter la loi martiale, et les désaccords suscités au sein du commandement chinois de l’époque.
Lors de son audience devant une cour martiale en 1990, l’ancien général de la 38e armée (une force d’élite de l’Armée de libération populaire) a ainsi déclaré avoir agi par "jugement professionnel". Pour le général, envoyer des troupes armées contre des civils engendrerait le chaos et un bain de sang. "J’ai expliqué que celui qui accomplirait bien cette tâche pourrait être un héros [mais] celui qui l’accomplirait mal deviendrait un pécheur au vu de l’Histoire", s’est justifié Xu.
On comprend également, dans ces enregistrements de six heures, que les dirigeants chinois ont secrètement élaboré et transmis les plans de la loi martiale et tenté de calmer toute vague au sein de l’Armée populaire de libération. Les ordres ont ainsi été transmis à l’oral aux généraux, convoqués individuellement, afin de ne pas pouvoir se concerter ou exprimer d’opposition.
"Eviter un carnage"
En effet, le 18 mai 1989, alors que des étudiants occupent la place Tiananmen depuis plusieurs semaines, le gouvernement chinois de Deng Xiaoping envisage déjà la solution forte. "J’ai dit que j’avais des désaccords à ce sujet. Les manifestations devraient être résolues principalement par des moyens politiques, et non par la force".
Xu Qinxian explique que, si bien l’armée devait rendre des comptes aux dirigeants du Parti communiste chinois, la décision de décréter la loi martiale devait, selon lui, passer par une instance plus large, comme l’Assemblée législative. A l’époque, un secteur plus modéré de parlementaires espérait, en effet, pouvoir encore enrayer le carnage, et trouver une issue politique à la crise. A ce sujet, les dirigeants du Parti communiste, notamment Xi Jinping, ont d’ailleurs depuis "condamné l’idée d’une armée nationale, la considérant comme une menace pour le contrôle du Parti sur les forces armées", note le New York Times.
Sous la pression de ses supérieurs, le général Xu avait fini par transmettre les détails de la loi martiale à un de ses collègues de la 38e armée, tout en réitérant ses désaccords. Il avait ensuite été condamné à cinq ans de prison. La vidéo de son procès partagée sur YouTube, site bloqué en Chine, a suscité un vif intérêt, avec plus d’un million de vues sur une seule chaîne.
Et pour cause, ce massacre demeure l’un des plus grands scandales politiques de l’Histoire récente de la Chine. On ne connaît pas, par exemple, le nombre exact de victimes : en 1989, les autorités chinoises avaient publié un rapport indiquant que "plus de 3 000 civils avaient été blessés et plus de 200, dont 36 étudiants, avaient perdu la vie dans les émeutes". Mais des témoins, dont l’ambassadeur du Royaume-Uni de l’époque, avait estimé à au moins "dix milliers" le nombre de morts. Chaque année, des proches de victimes, des rescapés et des défenseurs des droits humains, rassemblés au sein des Mères de Tiananmen, continuent ainsi de demander vérité et réparation à l’Etat chinois.
Le gouvernement américain a approuvé la deuxième vente d'armes à Taïwan depuis le retour au pouvoir de Donald Trump, pour une valeur de 11,1 milliards de dollars face à la menace chinoise, a annoncé Taipei jeudi 18 décembre. Il s'agit de la vente la plus importante depuis 2001, lorsque George W. Bush avait validé la livraison 18 milliards de dollars d'armes à Taïwan.
La peur d'une invasion chinoise
Le président taïwanais Lai Ching-te a annoncé le mois dernier que son gouvernement allait proposer 40 milliards de dollars de dépenses de défense supplémentaires sur plusieurs années, alors que l'île tente de se prémunir contre une potentielle invasion chinoise. Les huit contrats annoncés jeudi portent sur des systèmes de missiles Himars, des obusiers, des missiles antichars, des drones et des pièces détachées pour d'autres équipements, selon le ministère taïwanais des Affaires étrangères.
"Il s'agit de la deuxième vente d'armes à Taïwan annoncée au cours du second mandat de l'administration Trump, démontrant une fois de plus l'engagement ferme des Etats-Unis envers la sécurité" de l'île, a souligné cette source. Validée par le département d'Etat américain mais en attente de l'approbation du Congrès, la vente devrait entrer en vigueur dans environ un mois, selon le ministère taïwanais de la Défense. Le Yuan législatif, parlement monocaméral de l'île contrôlé par l'opposition formée par le Kuomintang (KMT) et son allié le Parti populaire de Taïwan (PPT), doit également approuver ces contrats.
Les Etats-Unis ne reconnaissent pas officiellement le statut d'Etat à Taïwan mais demeurent le principal partenaire et fournisseur d'armes de l'île. En 2019, Washington avait approuvé pour 10 milliards de dollars de vente, dont 8 pour des avions de combat. La Chine revendique Taïwan comme faisant partie de son territoire, et n'écarte pas de recourir à ses forces armées pour s'en emparer, soumettant l'île à une forte pression militaire, économique et diplomatique.
Augmentation des dépenses de défense de Taïwan
Lai Ching-te Il a évoqué des projets d'augmentation des dépenses de défense à plus de 3 % du PIB en 2026, et de 5 % à horizon 2030, répondant aux demandes américaines en ce sens. Bien que Taïwan dispose de sa propre industrie de défense, le territoire reste fortement dépendant des armes américaines face à la puissance de feu chinoise.
Washington avait approuvé en novembre une première vente d'armes à Taïwan portant sur "des composants, des pièces de rechange et des accessoires, ainsi qu'un soutien pour la réparation et le retour des avions F-16, C-130 et Indigenous Defense Fighter (IDF)" pour un montant de 330 millions de dollars, selon une déclaration publiée par l'Agence de coopération pour la sécurité de la défense des Etats-Unis.
La Chine déploie presque quotidiennement des avions militaires et des navires de guerre autour de Taïwan, ce que les experts et le gouvernement taïwanais qualifient de tactiques de "zone grise", des manœuvres coercitives qui ne constituent pas pour autant des actes de guerre.
Le ministère taïwanais de la Défense a déclaré que 40 avions militaires chinois, dont des chasseurs, des hélicoptères et des drones, ainsi que huit navires de guerre, avaient été détectés autour de Taïwan entre mercredi et jeudi matin. Selon les autorités taïwanaises, le troisième et plus récent porte-avions de Pékin, le Fujian, a traversé mardi le détroit de Taïwan.
Le président taïwanais Lai Ching-te (au centre) avec des réservistes au centre de services du parc industriel Loung Te, dans le comté de Yilan, le 2 décembre 2025.
Le Congrès brésilien a approuvé mercredi 17 décembre une proposition de loi pour réduire la peine de prison de l'ex-président Jair Bolsonaro, condamné en septembre à 27 ans de réclusion pour tentative de coup d'Etat. Le texte, porté par la majorité conservatrice et adopté à 48 voix contre 25 mercredi par le Sénat, pourrait réduire sa durée d'incarcération à deux ans et quatre mois pour cette condamnation qui a provoqué la colère de Donald Trump.
Son approbation par la Chambre des députés la semaine dernière avait suscité de nombreuses critiques. Des manifestations contre la mesure dimanche ont rassemblé des dizaines de milliers de personnes dans plusieurs grandes villes du pays. "Ce n'est pas exactement ce qu'on souhaitait, ce n'est pas pour cela que nous nous battions, mais c'est ce qui était possible dans ce contexte", a réagi dans une vidéo le sénateur Flávio Bolsonaro, fils de l'ex-président, qui l'a désigné comme candidat à l'élection présidentielle de 2026.
L'ancien dirigeant d'extrême droite (2019-2022) a commencé à purger sa peine fin novembre dans les locaux de la Police fédérale à Brasilia. Le président brésilien Luiz Inacio Lula da Silva peut apposer son veto à la loi de réduction de peine, mais celui-ci peut à son tour être annulé par le Congrès. En l'état, Jair Bolsonaro, 70 ans, pourrait demeurer incarcéré environ huit ans avant de bénéficier d'un éventuel aménagement de sa peine, selon le Tribunal d'exécution des peines de la capitale brésilienne.
Liberté conditionnelle aux partisans condamnés pour les émeutes
Le nouveau texte prévoit également d'accorder la liberté conditionnelle à des dizaines de ses partisans condamnés pour les émeutes du 8 janvier 2023 à Brasilia. Ce jour-là, des milliers de bolsonaristes avaient saccagé le Parlement, le palais présidentiel et la Cour suprême, réclamant une intervention militaire pour déloger du pouvoir le président actuel de gauche Lula, une semaine après son investiture.
Le sénateur centriste Renan Calheiros a qualifié le vote de "farce" et quitté la séance, accusant les alliés du gouvernement d’avoir laissé passer le texte en échange de soutien à une initiative augmentant la fiscalité sur certaines entreprises. Le sénateur du Parti des travailleurs au pouvoir Randolfe Rodrigues a nié tout accord de ce type.
Au sein d'un Parlement à forte majorité conservatrice, les bolsonaristes tentent en vain depuis février de faire voter un texte permettant à Jair Bolsonaro de bénéficier d'une amnistie totale. Mais à l'approche des vacances parlementaires de fin d'année, ils ont estimé que la réduction de sa peine constituait "une première étape". La semaine dernière, la proposition de loi avait été approuvée par les députés à l'issue d'une séance houleuse. Ce vote avait permis une levée de mesures américaines, dont certains droits de douane et des sanctions à l'encontre du juge Alexandre de Moraes qui avait condamné Jair Bolsonaro, allié de Donald Trump.
Lula peut censurer le texte
Le procès de l'ex-président, au centre de la crise entre les Etats-Unis de Donald Trump et le Brésil de Lula, avait entrainé des droits de douane américains de 40 % sur certains produits brésiliens. Le rapporteur de la proposition de loi à la chambre haute, Espiridao Amin, allié de Jair Bolsonaro, a changé la formulation du texte pour que la réduction de peine ne concerne que les personnes condamnées "pour des crimes contre l'Etat de droit".
L'entrée en vigueur d'une éventuelle réduction de peine pour Jair Bolsonaro pourra être retardée si le président de gauche Luiz Inacio Lula da Silva décide de censurer le texte avant sa promulgation. "Ce texte est voué au veto", a dit aux journalistes le sénateur de gauche Randolfe Rodrigues. Mais le Parlement aura le dernier mot et pourrait voter l'annulation du veto présidentiel.
En septembre, à l'issue d'un procès historique, Jair Bolsonaro a été reconnu coupable par la Cour suprême d'être le leader d'une "organisation criminelle" ayant conspiré pour son maintien au pouvoir malgré sa défaite à la présidentielle de 2022. Selon l'accusation, ce projet putschiste, qui prévoyait même l'assassinat de Lula après son élection au second tour, a échoué faute de soutien du haut commandement militaire.
L'Ukraine risque de se retrouver à court d’argent à partir du premier trimestre 2026. Mais alors, comment financer les besoins militaires et civils du pays pour les prochaines années ? Une chose est sûre, il ne faudra pas compter sur les Etats-Unis. Donald Trump l’a réitéré le 2 décembre, son pays se désengage financièrement du soutien à l’Ukraine. Pour y palier, ce à quoi l’UE s’est engagée, il faudra fournir un effort supplémentaire afin de réunir les 140 milliards d’euros prévus pour la période 2026-2027.
Deux possibilités se présentent alors à l’Union européenne : mobiliser les avoirs gelés russes pour émettre un prêt à taux zéro, ou emprunter l’argent sur les marchés conjointement. La dernière semble d’ores et déjà exclue : l’accord des 27 Etats membres est requis pour emprunter, or la France et l’Allemagne ont rejeté cette option. Aussi, si la balance penche indéniablement en faveur du recours aux avoirs russes, deux pays s’y opposent farouchement : la Belgique et la Hongrie. Et si leurs raisons sont diamétralement opposées, leurs protestations finissent par convaincre. La question sera débattue ces 18 et 19 décembre, à l’occasion d’un sommet européen.
La Belgique, seule face à Moscou
Ursula von der Leyen a déjà exprimé sa position publiquement : elle est favorable à l’utilisation des avoirs gelés russes. "C’est le moyen le plus efficace de soutenir la défense et l’économie de l’Ukraine", avait déclaré la présidente de la Commission dans un discours devant le Parlement européen en novembre. Et de renchérir : c’est "la manière la plus claire de faire comprendre à la Russie que le temps ne joue pas en sa faveur".
Si l’hypothèse a su rapidement séduire la majorité des pays membres, la Belgique s’est immédiatement postée en frondeuse. Conférence de presse, discours, interviews, le Premier ministre du plat pays, Bart De Wever, n’a manqué aucune opportunité de marteler son opposition. En cause : la Belgique, principal dépositaire des actifs russes - 185 milliards sur 200 sont chez Euroclear - est sous pression. D’une part, les Américains aspirent à une tranche de ces avoirs. De l’autre, Moscou fait craindre une réprimande juridique.
Dans une lettre adressée à Ursula von der Leyen, le Flamand a épanché ses inquiétudes : "Pourquoi s’aventurer ainsi dans des eaux juridiques et financières inconnues, avec toutes les conséquences possibles, si cela peut être évité ?" Un risque admis par le Commissaire européen letton Valdis Dombrovskis : "Il doit évidemment y avoir de la solidarité sur ces risques, qui doivent être partagés". Et ce dernier de tenter d’apaiser les tensions : les risques sont "également reconnus" par les autres Etats membres.
Pour convaincre la Belgique de céder, la Commission européenne tente de trouver la bonne combine juridique pour mettre à profit la Russie dans le financement de l’aide à l’Ukraine. Utiliser les "liquidités" d’Euroclear, et non la "créance" russe ? C’est toujours non pour Bart De Wever. "Je n’engagerai jamais la Belgique à supporter seule les risques et l’exposition qui découleraient de l’option d’un prêt de réparation", a-t-il tranché dans sa correspondance épistolaire avec Ursula von der Leyen.
Et le Premier ministre belge est soutenu par son pays : 65 % de ses concitoyens sont opposés à un tel prêt. Le Flamand préfère opter pour l’emprunt, quitte à créer une nouvelle dette commune.
Une croisade payante
D’abord isolée, la fronde de Bart De Wever a fini par convaincre. Début décembre, trois Etats membres ont verbalisé leurs méfiances. Sans rejeter ouvertement l’option des actifs russes, ce recul alerte à quelques jours du vote. Dans une déclaration, l’Italie, la Bulgarie et Malte ont appelé la Commission européenne à considérer des "solutions alternatives" aux "paramètres prévisibles" et aux "risques nettement moindres". Les signataires espèrent que ces alternatives puissent servir de "pont" permettant d’assurer une continuité du financement à l’Ukraine tout en laissant le temps au 27 de poursuivre les débats jusqu’à trouver un accord.
Ce mercredi 17 décembre, Giorgia Meloni a abordé ces "décisions complexes" devant le Parlement italien. La Première ministre entend "demander des éclaircissements concernant les risques potentiels liés à l’utilisation proposée des liquidités générées par l’immobilisation d’actifs, en particulier liés à la réputation, aux représailles ou à de nouvelles charges lourdes pour les budgets nationaux".
Un autre pays s’est aligné sur l’opposition de Bart De Wever : la République tchèque. Nommé il y a tout juste une semaine, le Premier ministre, Andrej Babis, a demandé à la Commission de trouver "d’autres moyens" d’apporter son aide à Kiev. Et ce dernier, qui ne cache pas sa proximité avec le trumpisme, de se retirer complètement : "En tout état de cause, nous ne contribuerons pas financièrement à l’aide. […] "Nous ne pouvons pas fournir d’argent provenant du budget tchèque ou de garanties."
Quantà la France, elle se fait étonnamment discrète sur la question. L’Hexagone détient 18 milliards d’actifs russes gelés dans des banques privées, selon le Financial Times. De quoi rendre le pays plus timide dans ses déclarations, qui a assumé travailler "sur d’autres options, ou des options plus larges".
La Hongrie, éternel soutien de Moscou
Sans grande surprise, la Hongrie a également refusé d’apporter son soutien à l’Ukraine. Et ce, quelle que soit la méthode choisie.
La justification ? Une position belliqueuse reprochée aux Vingt-Sept : "L’Europe veut continuer la guerre, et même l’étendre. Elle veut la poursuivre sur la ligne de front Russie-Ukraine et l’étendre à l’arrière-pays économique en confisquant les avoirs russes gelés" a-t-il éructé. Fidèle soutien du Kremlin, Viktor Orban appelait les Etats membres à adhérer au projet américain pour mettre un terme à la guerre en Ukraine dans une lettre à Ursula von der Leyen, en novembre.
Quant au président Slovaque - et allié de Viktor Orban - Robert Fico, s’il a également prévenu qu’il refusera toute nouvelle aide militaire à l’Ukraine, il n’est pas opposé à une aide financière pour soutenir la reconstruction du pays. Son vote demeure encore incertain. Réponse dans les prochains jours.
Le Congrès américain a adopté ce mercredi 17 décembre un texte de stratégie de défense pour 2026. Etonnament, ce texte réaffirme son soutien aux alliances des Etats-Unis en Europe, à rebours de signaux récents de Donald Trump et de son gouvernement. Nommé le NDAA, c’est l’une des seules lois votées chaque année par les deux chambres du Congrès avec un certain consensus entre démocrates et républicains.
Quand le Congrès freine la dynamique de repli américain
Le Pentagone, acteur puissant de la défense américaine et actuellement sous l’égide du ministre proche de Trump Pete Hegseth, tente de recentrer la stratégie de défense des Etats-Unis sur les Amériques, avec plusieurs frappes en mer des Caraïbes et dans l’océan Pacifique contre des embarcations accusées de narcotrafic, sur fond de tensions accrues avec le Venezuela.
Mais la proposition de loi élaborée par le Congrès prévoit le maintien de la présence des Etats-Unis sur le sol européen. Elle empêche le Pentagone de réduire le nombre de soldats américains déployés en Europe sous la barre des 76 000 sans justification auprès du Congrès. Le NDAA anticipe aussi pour 2026 quelque 400 millions de dollars d’achats par Washington d’équipements militaires américains à destination de Kiev, afin de continuer à lutter contre l’invasion russe.
Un contre-pied aux déclarations récentes de Donald Trump, qui s’était notamment moqué de la dépendance des Européens à la protection militaire des Etats-Unis en lançant : "L’Otan m’appelle papa". Certains parlementaires républicains, de tendance isolationniste, ont eux dénoncé le texte, et notamment l’aide militaire à l’Ukraine.
Rattraper la flotte navale chinoise
La version 2026, longue de plus de 3 000 pages, préconise par ailleurs un budget annuel global de plus de 900 milliards de dollars, en augmentation de 5 milliards par rapport à l’année précédente. "Le moyen le plus sûr d’assurer la paix est de la garder par la force", a assuré mardi le chef de la majorité républicaine au Sénat, John Thune, reprenant le slogan de "paix par la force" adopté par Donald Trump depuis le début de son second mandat.
Parmi les mesures prévues cette année, la construction de davantage de navires militaires "pour aider à réduire l’écart" avec les capacités de construction navale de la Chine, mais également l’établissement du "Dôme d’or" antimissiles voulu par Donald Trump, ou encore une augmentation de 3,8 % de la solde des militaires. Il a également souligné des réformes dans les processus d’achats du Pentagone avec "l’élimination de dizaines de règles et lois pesantes".
Le Congrès américain a voté dans le consensus pour le maintien de la coopération militaire entre les Etats-Unis et l'Europe, à contre-courant de ce que pousse Donald Trump.
C'est une douche froide pour la Commission européenne. L’Italie a rejoint la France mercredi 17 décembre pour réclamer un report de l’accord commercial entre l’UE et le Mercosur. Ce nouveau front commun pourrait empêcher la Commission et sa présidente, Ursula von der Leyen, de signer d’ici la fin de la semaine un traité avec ce bloc sud-américain, qui regroupe principalement le Brésil, l’Argentine, l’Uruguay et le Paraguay.
Présenté comme historique, l’accord créerait la plus vaste zone de libre-échange au monde. Il permettrait à l’UE d’accroître ses exportations de véhicules, de machines, de vins et de spiritueux vers l’Amérique latine, tout en facilitant l’entrée sur le marché européen de produits agricoles sud-américains — viande bovine, sucre, riz, miel ou encore soja. Des importations qui inquiètent les filières agricoles concernées.
La colère est déjà visible sur le terrain. Plusieurs dizaines de milliers d’agriculteurs ont promis de se rendre ce jeudi à Bruxelles pour manifester contre le traité, alors que s’y déroulera un sommet européen. Une première mobilisation s’est tenue ce mercredi à l’aéroport de Liège, point d’entrée majeur de denrées extra-européennes.
Rome change la donne
Ursula von der Leyen espérait signer l’accord samedi, en marge du sommet du Mercosur à Foz do Iguaçu, au Brésil. Mais elle doit au préalable obtenir l’aval d’une majorité qualifiée des Etats membres. Or, si des pays comme l’Allemagne, l’Espagne ou les Etats scandinaves poussent pour une signature rapide — pour relancer une économie européenne à la peine face à la concurrence chinoise et aux taxes douanières américaines — la position italienne complique sérieusement l’équation.
Avec la France, la Pologne et la Hongrie, l’Italie est en mesure de constituer une minorité de blocage au sein des Vingt-Sept, empêchant l’examen du texte dans l’immédiat. Pour la France, dont le Premier ministre Sébastien Lecornu a promis qu’il voterait contre si l’UE tentait de "passer en force", l’arrivée de l’Italie prouve qu’elle "n’est pas seule".
Plus mesurée, la cheffe du gouvernement italien, Giorgia Meloni estime qu’une signature à ce stade serait "prématurée". Rome réclame des "garanties suffisantes", notamment pour le secteur agricole, et estime que les conditions pourraient être réunies "au début de l’année prochaine". Le report, s’il se confirme, porterait un coup sérieux au calendrier de la Commission. "Si on ne le fait pas maintenant, le Brésil ne signera plus l'accord tant que je serai président", a affirmé pour sa part Lula, dont le mandat à la tête du Brésil se termine fin 2026.
Bruxelles promet des garanties… qui pourraient être insuffisantes
Prudente, la Commission européenne continue pourtant d’espérer un compromis. "Les chefs d’Etat et de gouvernement en discuteront lors du sommet européen" qui se déroulera jeudi à Bruxelles, a indiqué son porte-parole. Pour apaiser les inquiétudes agricoles, l’UE a proposé des mesures de sauvegarde : surveillance renforcée des produits sensibles comme le bœuf, la volaille ou le sucre, et possibilité d’intervention en cas de déséquilibre du marché. Ces garanties font encore l’objet de négociations avec les Etats membres et le Parlement européen.
Mais à Paris, elles pourraient ne pas suffire. La France reste sous pression d’un mouvement agricole puissant, déjà mobilisé sur d’autres fronts comme l’épidémie de dermatose qui ravage la filière bovine française. Au sein de l’UE, certains redoutent désormais que Paris ne cherche pas seulement à retarder l’accord Mercosur, mais à le faire définitivement échouer — malgré plus de vingt-cinq ans de négociations.
La Première ministre italienne Giorgia Meloni (à gauche), le président français Emmanuel Macron (au centre) et la présidente de la Commission européenne Ursula Von der Leyen (à droite) se réunissent avant la réunion du G7++ lors du sommet des dirigeants du G20 au Nasrec Expo Centre de Johannesburg, le 22 novembre 2025.
Si l’Ukraine dit vrai, la guerre navale - jusqu’ici largement dominée par la Russie - pourrait connaître un tournant majeur en faveur de Kiev. Lundi 15 décembre, les services de sécurité ukrainiens (SBU) ont affirmé sur Telegram que "des drones sous-marins Sub Sea Baby ont fait exploser un sous-marin russe" de classe Kilo. Le bâtiment, amarré en mer Noire dans le port de Novorossiïsk, n’aurait pas coulé mais aurait été mis "hors service" en raison de "dégâts critiques". Moscou, de son côté, nie toute atteinte au sous-marin.
Au-delà même du conflit russo-ukrainien, il s’agirait d’une première dans l’histoire militaire : jamais un sous-marin n’a été neutralisé par un drone sous-marin. Pour étayer ses déclarations, Kiev a diffusé des images issues de la vidéosurveillance du port de Novorossiïsk, montrant une explosion. Impossible toutefois de déterminer avec certitude si le sous-marin a été touché ou si seules des infrastructures portuaires, comme une jetée, ont été endommagées.
Jusqu’à présent, l’Ukraine avait déjà réussi à frapper des navires de surface et des infrastructures russes en mer Noire, mais jamais un sous-marin. Pour atteindre sa cible, le drone aurait dû franchir un important dispositif de sécurité protégeant ce port stratégique de l’oblast de Krasnodar : patrouilles, capteurs acoustiques et barrières physiques sur les voies maritimes.
Les sous-marins de classe Kilo, en service depuis les années 1980, sont des bâtiments d’attaque conventionnels à propulsion diesel. La Russie en posséderait plus d’une trentaine. Ces engins sont notamment utilisés pour tirer des missiles de croisière Kalibrcontre l’Ukraine. Leur coût unitaire est estimé à environ 400 millions d’euros… Un coût de production bien supérieur à celui des Sub Sea Baby qui l’auraient endommagé.
Vers un renversement du rapport de force naval ?
Peu d’informations ont filtré en revanche sur les drones Sub Sea Baby. Selon Der Spiegel, cette famille de drones maritimes peut être équipée de mitrailleuses ou de lance-roquettes. Jusqu’ici, ils étaient surtout conçus pour des missions de surface, ressemblant davantage à de petites embarcations qu’à de véritables sous-marins. L’une des hypothèses est que ces drones aient été modifiés par l’armée ukrainienne pour cette mission spécifique, notamment afin de poser des charges ou des mines sous-marines. Cette nouvelle efficacité pourrait profondément bouleverser l’équilibre naval du conflit, permettant à Kiev d’infliger des pertes lourdes à moindre coût.
D’autant que deux autres modèles de drones sous-marins seraient actuellement en développement : le Maritschka et le Toloka, deux engins sans pilote s’apparentant à de petits sous-marins. Selon le site spécialisé The War Zone (TWZ), le Maritschka pourrait atteindre une portée d’environ 1 000 kilomètres, couvrant ainsi une large partie de la mer Noire sous contrôle russe.
Depuis le début de la guerre, l’un des objectifs majeurs de Kiev est de neutraliser les vecteurs russes de missiles de croisière et balistiques - principalement les bombardiers et les sous-marins - qui permettent à Moscou de faire pleuvoir les bombes sur les villes et l’armée ukrainiennes. Jusqu’à présent, les dégâts infligés restaient limités. Si l’opération revendiquée par l’Ukraine se confirme, elle pourrait ouvrir la voie à une multiplication d’attaques de drones sous-marins, peu coûteuses mais potentiellement dévastatrices.
Il est l’un des diplomates les plus influents et les plus respectés d’Europe. Vice-Premier ministre, ministre des Affaires étrangères depuis le retour au pouvoir de Donald Tusk (centre droit) en 2023, Radoslaw Sikorski fut déjà le chef de la diplomatie polonaise de 2007 à 2014, après avoir été ministre de la Défense (2005-2007). Diplômé d’Oxford, dont il a gardé l’accent et l’élégance vestimentaire, ce dirigeant de 62 ans connu pour son franc-parler est doté d’un caractère bien trempé. Ancien leader étudiant lors des révoltes contre le pouvoir communiste en 1981, exilé politique au Royaume-Uni, puis reporter de guerre pendant le conflit entre l’URSS et l’Afghanistan, il participa même à des combats aux côtés des Moudjahidines. Plus récemment, il a lancé à la tribune de l’ONU un avertissement solennel à Vladimir Poutine, menaçant de destruction tout nouvel appareil russe qui pénétrerait dans l’espace aérien de l’Otan.
En pleines discussions entre Européens et Américains pour obtenir la fin de la guerre en Ukraine, Radoslaw Sikorski, cravate bleue à motif sur chemise à carreaux, regard bleu perçant et sourire intense lorsqu’il veut insister sur une idée, nous a reçus dans son bureau, à Varsovie. Celui auxquels certains prédisent un destin de Premier ministre presse les Européens de s’armer davantage, insiste sur la nécessité absolue de débloquer les avoirs russes pour financer l’Ukraine, explique le réalignement stratégique de la Pologne avec la Scandinavie et les pays baltes, et critique l’individualisme de certains dirigeants européens. "Lorsqu'il s'agit de discuter de la crise ukrainienne, ce sont certains chefs d’Etat représentant leur pays qui s'en chargent. Et ensuite, ils s'étonnent que l'UE ne tire pas profit de son pouvoir collectif !", observe Radoslaw Sikorski, pour qui, depuis l'invasion russe, "l'ère des illusions est révolue". Entretien exclusif.
L'Express : Êtes-vous préoccupé par les négociations de paix en cours en Ukraine ? Comment les Européens devraient-ils réagir au plan élaboré par les États-Unis, largement inspiré par la Russie ?
Radoslaw Sikorski : Nous y répondrons lorsque nous en connaîtrons le contenu. Mais nous avons besoin d'un accord équitable pour l'Ukraine, car ce pays défend un principe fondamental que deux guerres mondiales sanglantes nous ont appris : il est inacceptable de modifier des frontières par la force sous prétexte de venir en aide à une minorité nationale. Sans parler du fait que l'Ukraine est censée bénéficier de garanties de sécurité de la part de la Russie, des États-Unis, de la Grande-Bretagne et de la France en échange de l'abandon de son arsenal nucléaire en 1994, avec le Mémorandum de Budapest. La brutalité de la guerre et la duplicité de l'envahisseur ne doivent pas seulement nous préoccuper, elles doivent nous inciter à agir. L'Ukraine nous a donné un temps précieux pour reconstruire nos défenses et nous lui devons notre soutien.
Est-il selon vous possible de mettre fin à cette guerre ? Quels scénarios envisagez-vous pour les mois à venir ?
L'Ukraine a gagné la guerre maritime : elle a coulé le navire amiral de la flotte russe de la mer Noire et permis au commerce de circuler librement entre ce pays et le reste du monde. Dans les airs, cela dépend des nuits, mais les deux parties se rendent coup pour coup. Les Ukrainiens frappent des cibles militaires, des postes de commandement et des raffineries. La Russie, quant à elle, frappe des centrales électriques et des immeubles d'habitation civils. Sur terre, enfin, la Russie gagne de minuscules portions de territoire au prix de la mort de milliers et de milliers de soldats, des victoires à la Pyrrhus. La question est de savoir quel camp pourra tenir le plus longtemps. Les pertes russes sont bien sûr plus importantes. Mais nous ne savons pas qui craquera le premier.
Donald Trump a de nouveau demandé la tenue d'élections en Ukraine. L'Ukraine devrait-elle, selon vous, en organiser rapidement ?
Ce serait formidable si les deux parties de ce conflit organisaient des élections démocratiques. La Russie n'a pas connu d'élections démocratiques depuis vingt ans. Si l’on veut qu’un traité soit signé par des États démocratiques, il serait très souhaitable que des élections démocratiques aient lieu tant en Ukraine qu'en Russie.
Dans quel délai ?
Il est très difficile d'organiser des élections alors que les armes continuent de crépiter. La Grande-Bretagne, une démocratie bien établie, n'a pas organisé d'élections générales pendant la Seconde Guerre mondiale [NDLR : seulement en juillet 1945, après la fin de la guerre en Europe]. Il faut donc d'abord un cessez-le-feu. Je crois comprendre que la Constitution ukrainienne est très claire à ce sujet.
Croyez-vous encore en la diplomatie dans ce monde brutal ? L'Europe a-t-elle raison de persister dans cette approche ?
La plupart des guerres se terminent par une forme de traité. Et cette guerre présente certaines similitudes avec la Première Guerre mondiale. Guerre de tranchées, positions bloquées et bataille pour les ressources nationales et industrielles. Nous devons encourager ceux qui tentent de rapprocher les deux camps. Mais leurs lignes rouges sont encore éloignées.
Pensez-vous que les Européens devraient se montrer plus intimidants envers la Russie ?
L'Europe occidentale a trop longtemps profité des dividendes de la paix. Nous comptions sur les États-Unis pour notre sécurité, et ceux-ci ont fini par s'en rendre compte. La Pologne a commencé à se réarmer il y a 20 ans. Nous avons alors adopté une loi très stricte, qui allouait à notre armée 2 % du PIB, un PIB de surcroît en pleine croissance. Et cette année, nous consacrons 4,8 % du PIB à la Défense, en plus du mécanisme de sécurité de l'Union européenne. Donc, oui, nous devons reconstruire nos défenses. La guerre en Ukraine, qui ne répond à aucune provocation, est la démonstration dramatique de l'idéologie étatique agressive de la Russie. Elle ne disparaîtra pas, même s'il y a la paix en Ukraine.
Comment les 27 devraient-ils procéder pour débloquer les avoirs russes gelés en Europe face à l'opposition de la Belgique ?
Il n'y a pas d'autre solution que de persuader la Belgique. Si nous ne débloquons pas la situation, nous n'aurons plus aucune carte en main. La Belgique a un argument valable, à savoir qu'en tant que petit pays, elle a besoin d'être rassurée par ses alliés contre les risques juridiques. J'espère que nous mettrons en place un tel mécanisme. Les avoirs gelés seraient utilisés d'abord pour la défense, puis pour la reconstruction de l'Ukraine.
Les Européens pourraient-ils à eux seuls fournir un soutien militaire suffisant à l'Ukraine en cas de retrait des États-Unis ?
Nous avons combattu la Russie avant même que les États-Unis n'existent. Mais les Ukrainiens affirment que ce dont ils ont le plus besoin, ce sont des renseignements et des munitions pour certains lanceurs antiaériens. Or ils sont fournis par les Etats-Unis. Je me fie à leur parole.
Que pensez-vous de la nouvelle stratégie de sécurité américaine, qui prend pour cible l’Europe ?
Nous sommes encore en train de l'évaluer. Je ne souhaite pas faire davantage de commentaires.
La Pologne est en première ligne de la "guerre hybride" menée par la Russie. Comment décririez-vous la gravité de la situation ?
Au début, il s'agissait de cyberattaques, puis cela a évolué vers des incendies criminels (l’an dernier, ils ont tenté de mettre le feu à une usine de peinture à Wrocław, puis ils ont incendié un immense centre commercial à Varsovie), et maintenant ils en sont arrivés à faire exploser une bombe sous un train en marche, sur une voie ferrée menant à l’Ukraine. Ce n'est que grâce à leur incompétence qu'une tragédie a été évitée. C'est pourquoi nous parlons désormais de terrorisme d'État. Nous avons identifié les personnes qui ont commis ces actes et nous savons qu'elles sont de retour à Moscou. Nous savons également quelle unité du GRU [NDLR : l’organe du renseignement militaire russe] a ordonné l'attaque.
Précédemment, notre espace aérien a été violé par 21 drones au mois de septembre. S'il ne s'agissait que d'un ou deux drones, on pourrait dire que ce sont des accidents. Mais 21 accidents en une nuit, pendant sept heures, c’est difficile à croire...
Par ailleurs, la Pologne doit repousser jusqu'à 4 000 cyberattaques par jour, et chacune de ces actions agressives s'accompagne d'un tsunami de désinformation visant à polariser nos sociétés.
Envisagez-vous la possibilité de nuire à la Russie, en réponse à ces menaces hybrides ?
Nous faisons partie de l’Otan, une alliance défensive. Ce qui nous importe, c’est de ne pas être laissés seuls face à la Russie.
La Russie pourrait-elle lancer une attaque militaire contre la Pologne ou un autre pays européen ?
Pas avant d'avoir reconstitué ses forces, qui sont gravement affaiblies. Nous avons donc encore un peu de temps, s’agissant d'une violation classique du territoire terrestre. Mais la Russie dispose toujours d'une marine, d'une armée de l'air et de ressources spatiales. D'autres formes d'agression sont donc possibles.
Photo prise et fournie par la présidence ukrainienne le 12 septembre 2025, montrant le président ukrainien Volodymyr Zelensky (à droite) et le ministre polonais des Affaires étrangères Radoslaw Sikorski, à Kiev
Les États baltes sont particulièrement exposés…
Je ne veux pas me lancer dans des spéculations. Mais oui, certains de nos alliés baltes se sentent vulnérables.
Face à cette menace russe et compte tenu des positions de l’administration Trump, la Pologne peut-elle compter sur l'Otan ? Quels pays la défendraient en cas d'attaque ?
Notre expérience avec nos alliés, d'un point de vue historique, est mitigée [La France et le Royaume-Uni ne se sont pas intervenus militairement lorsque l’Allemagne a envahi la Pologne en 1939, NDLR]. Mais cette fois-ci, nous sommes intégrés militairement, nous avons des plans d'urgence, des procédures, des exercices communs, des troupes alliées sur notre sol, et cela contribue à renforcer la confiance.
La dissuasion nucléaire française pourrait-elle être une option intéressante pour la Pologne ?
Nous n'envisageons pas cette possibilité.
L'armée polonaise serait-elle capable de se défendre en cas d'attaque russe, ou a-t-elle besoin de plus de temps ?
Aucune armée n'est jamais satisfaite de l'équipement dont elle dispose, et il faut toujours du temps et de l'argent pour s'entraîner. Mais nous avons plus de 200 000 soldats, ce qui fait de nous la plus grande armée terrestre de l'Union européenne à l'heure actuelle. Et nous achetons sans cesse du matériel : nous recevons pratiquement chaque semaine un nouvel obusier coréen, un char Abrams américain ou des véhicules blindés de transport de troupes (APC), sans compter les équipements provenant de nos propres usines.
Parallèlement, nous tirons les leçons de la guerre en Ukraine en développant rapidement nos capacités de production de drones et de systèmes antidrones. Nous avons déjà la plus grande usine de drones de l'UE, mais cela ne suffit pas. Napoléon Bonaparte, qui est mentionné dans notre hymne national, disait qu'un pays qui ne sait pas nourrir sa propre armée est condamné à nourrir celle de l’ennemi. Nous avons intériorisé cette leçon.
Le chef d'état-major français, le général Mandon, a déclaré que, face à la menace russe, la France devait "accepter de perdre ses enfants pour protéger ce que nous sommes". Êtes-vous d'accord avec cette déclaration ?
Notre chef d'état-major a tenu des propos similaires. Nous devons renforcer nos forces armées afin de dissuader Vladimir Poutine et ne pas avoir à envoyer nos enfants à la guerre.
Peut-on parler d’un basculement stratégique de la Pologne vers les pays baltes et scandinaves ?
Nous assurons actuellement la présidence du Conseil des États de la mer Baltique, qui était autrefois une organisation traitant de questions mineures, mais qui, lorsque la Russie a envahi l'Ukraine en 2022 et quitté l'organisation, s'est concentrée sur des questions plus importantes. Au vu des menaces grandissantes dans la Baltique, c’est effectivement devenu un élément important de notre stratégie de sécurité.
Nous devons protéger la Baltique contre les interférences GPS [NDLR : des perturbations de signaux satellites affectant la navigation aérienne et maritime] et contre la violation des zones économiques exclusives par des survols intrusifs. Nous avons, en outre, subi toute une série d'attaques contre des câbles et des pipelines sous-marins. Et puis il y a la "flotte fantôme" russe : un grand nombre de vieux pétroliers naviguant sous de faux pavillons ou sans pavillon et alimentant la machine de guerre de Poutine. Ils représentent en effet la plus grande partie des exportations de pétrole russe par voie maritime.
Nous sommes aussi particulièrement préoccupés pour l’environnement. La mer Baltique n'est pas comme l'Atlantique ou même la Méditerranée, c'est une mer beaucoup plus petite et beaucoup moins profonde. Ces navires de la flotte fantôme ont déjà été impliqués dans des collisions par le passé. En fait, je préfère l'appeler "flotte de vieux rafiots" plutôt que "flotte fantôme". Ces tas de ferrailles rouillés ne répondent à aucune exigence technique, et c'est précisément pour cette raison qu'ils sont si dangereux. Si leur cargaison se déversait dans la Baltique, nous subirions une catastrophe environnementale épouvantable pour la vie marine, les plages et l'industrie touristique, mais également extrêmement coûteuse. C'est pourquoi nous soutenons fermement les sanctions contre ces navires, leurs capitaines et leurs équipages. Nous travaillons aussi sur une proposition visant à modifier le droit maritime international afin de mettre un terme à cette anarchie en mer.
Certains ont évoqué le déplacement à l’Est du centre de gravité de l'Europe depuis le début de la guerre en Ukraine. Selon vous, la Pologne a-t-elle l'influence qu'elle mérite sur le continent ?
Vous savez, nous n'avons pas cherché ce changement d'attention (rire). La Pologne préférerait être entourée de démocraties amicales et pacifiques. Il n'est pas agréable d'être à la frontière de deux plaques tectoniques : le monde de la démocratie et de l'État de droit d’un côté, et le monde de la dictature et de l'agression de l’autre. Nous avons essayé de faire la paix avec la Russie, d’avoir des relations normales avec elle, nous l’avons encouragée à signer l’accord de partenariat et de coopération avec l’Union européenne en 1994.
Lorsque la Russie a déclaré vouloir suivre une trajectoire convergente avec celle de l’Occident, nous l’avons soutenue. Mais la Russie a changé de politique : elle s'est définie comme un pôle d'influence rival, puis a commencé à reconstruire son empire. Dès lors, nous n'avons pas le choix, car nous avons été une colonie russe et nous ne voulons pas le redevenir ! En Europe de l'Est, nous percevons les signes avant-coureurs du danger plus tôt que vous. Nous sommes en quelque sorte votre mine antichar.
Que peut enseigner la Pologne, avec son histoire douloureuse et sa renaissance au cours des dernières décennies, au reste de l'Europe ?
Tout d'abord, que l'ère des illusions est révolue. Parce que nous, Européens, sommes respectueux des lois, et savons qu’utiliser la force pour repousser ses frontières n'a pas de sens, nous pensions qu’il est toujours possible de trouver une solution acceptable par les deux parties, entre "gens civilisés", à chaque conflit.
Malheureusement, c'est désormais une opinion minoritaire à l’échelle de la planète. Même sur notre continent, elle n'est pas acceptée par tout le monde. En conséquence, si nous voulons continuer à vivre dans cette paix kantienne [NDLR : une paix durable fondée sur la morale et le droit], il faut la mettre en place par la force, car en droit international, contrairement au droit national, il n'y a pas d’autorité souveraine pour faire respecter les règles.
Les démocraties doivent non seulement être civilisées, justes et pacifiques, mais elles doivent aussi être fortes. Nous avons gagné la Seconde Guerre mondiale non seulement parce que nous étions dans notre droit, mais aussi parce que nous avons surpassé l'Allemagne nazie en matière de production d’armes. Je sais que cette nouvelle n'est pas réjouissante. Mais c'est M. Poutine qui nous a imposé cette nécessité.
Dans quelle mesure la montée des partis d'extrême droite dans des pays comme la France, l'Allemagne, le Royaume-Uni ou la Pologne pourrait-elle affaiblir l'Europe face à la Russie ?
La progression des partis d'extrême droite, que certains qualifient de "patriotiques", est favorisée par la polarisation de la société, alimentée par les "fermes à trolls" russes et les algorithmes des réseaux sociaux.
Certains de ces partis s'adoucissent avec le temps, d'autres non. La démocratie parlementaire est, d’une certaine manière, un système conçu pour enseigner aux nouveaux venus sur la scène politique comment le système fonctionne réellement. D’après ce que je comprends, le Rassemblement national, qui était très anti-UE il y a quinze ans, l’est moins aujourd'hui. Est-ce une tendance durable ?
Je me suis donné pour mission, dans la politique polonaise, de mettre en garde les gens contre l'euroscepticisme primitif, car j'ai vu ce phénomène en Grande-Bretagne dans les années 1980 et 1990, et je sais où il mène : à un affaiblissement. J’essaye d’expliquer très clairement aux gens quelles seraient les conséquences, par exemple, d’une sortie de l’UE. Et lorsque vous confrontez les gens à des conséquences inévitables, notamment en matière de financement des infrastructures ou d’échanges commerciaux, certains d’entre eux y réfléchissent à deux fois et modifient leur position.
Comment l'Europe peut-elle se protéger face à la déferlante de produits chinois, mais aussi face aux pressions américaines et à la menace russe ?
Nous prenons enfin des mesures contre les importations de colis à bas prix, souvent commandés sur des plateformes chinoises en ligne comme Shein, en leur imposant une taxe forfaitaire. Mais il aurait mieux fallu ne pas attendre le scandale des poupées sexuelles en France [NDLR : mises en vente sur la plateforme Shein] pour agir, car nous savions déjà que certains de ces produits ne respectaient pas nos normes techniques.
Dans ce nouveau contexte international, nous devrions être plus unis. Mais ce n’est pas ce qu’il se passe dans les faits. Nous nous étions engagés, dans le traité de Lisbonne de 2007, à avoir une politique étrangère commune, afin d’avoir plus de poids, tant dans nos relations avec nos adversaires que dans nos relations avec nos alliés. Et pourtant, les dirigeants européens ne respectent pas cet engagement. Lorsqu’il s’agit de discuter de la crise ukrainienne, ce sont certains chefs d’Etat représentant leur pays qui s’en chargent. Et ensuite, ils s’étonnent que l’UE ne tire pas profit de son pouvoir collectif !
Je doute cependant que nous puissions attendre les consensus nécessaires pour une plus grande intégration. Je suis malheureusement arrivé à la conclusion que ce qui est nécessaire pour rendre l’Europe plus puissante est pour l’instant politiquement impossible. Et c'est là notre tragédie.
Les divisions croissantes mettent-elles la démocratie en danger, dans des pays comme la Pologne ou la France ?
A mon sens, la démocratie est en sécurité dans les petits pays européens. Aux Pays-Bas, au Luxembourg, dans les pays scandinaves et baltes, il est plus facile d’instaurer la confiance envers l’élite politique, et entre les médias et l’élite politique, et ainsi de maintenir la cohésion nationale. Dans les grands pays, c’est beaucoup plus difficile.
Pendant longtemps, en Europe de l’Est, les Français ont été critiqués pour leur arrogance. Cette époque est-elle révolue ? La coopération avec la France, notamment dans le cadre du traité de Nancy et du Triangle de Weimar, est-elle importante pour la Pologne ?
Bien sûr ! La France est un membre fondateur très important de l’Union européenne, avec une influence considérable ; membre permanent du Conseil de sécurité de l’ONU, une puissance nucléaire. C'est aussi un pays dont l'élite pense de manière stratégique et globale, ce qui est moins courant en Europe qu’on peut le penser. La France a toujours eu une politique étrangère et pas seulement une politique industrielle, par exemple. Et votre diplomatie est très habile.
Nous avons négocié et signé le traité de Nancy, un lieu symbolique pour nos deux pays, parce que nous voulons être amis avec la France. Il existe également, comme vous le savez, de profondes affinités culturelles qui remontent à plusieurs siècles, et dépasse largement la relation entre Frédéric Chopin et George Sand. Notre première forme de constitution, les articles henriciens, au XVIe siècle, était un ensemble de règles que les rois, élus par la noblesse, devaient jurer de respecter. Eh bien, figurez-vous que la première prestation de serment, celle d’Henri de Valois, roi de Pologne et futur roi de France sous le nom d’Henri III, a eu lieu à Notre-Dame !
Volodymyr Zelensky se rendra jeudi à Bruxelles pour convaincre les pays de l’UE, réunis lors d’un sommet, d’utiliser les milliards d’avoirs gelés russes en Belgique pour financer l’aide à l’Ukraine. A la veille de cette réunion, il estime que la Russie se prépare déjà à une "nouvelle année de guerre", en réaction aux déclarations belliqueuses du président russe. Plus tôt dans la journée du 17 décembre, Vladimir Poutine a estimé que la Russie atteindra "les objectifs de l’opération militaire" en Ukraine. Une menace, alors que les tentatives diplomatiques se sont multipliées cette semaine depuis Berlin, incluant chaque jour un peu plus les Etats européens. L’avant-veille, ils avaient mis sur la table l’idée d’une "force multinationale" soutenue par les armées européennes et américaines pour garantir la paix en Ukraine, en cas de signature d’accord de paix. Une nouvelle dynamique qui ne semble pas plaire à Vladimir Poutine, qui a estimé que cette nouvelle implication européenne "n’augure rien de bon" pour l’acceptabilité d’un accord de paix par la Russie.
Les infos à retenir
⇒ Vladimir Poutine jure que la Russie atteindra "les objectifs de l’opération militaire" en Ukraine
⇒ Volodymyr Zelensky se rendra à Bruxelles jeudi pour convaincre les Européens d’utiliser les avoirs gelés de la Russie
⇒ Le Parlement européen a approuvé la sortie du gaz russe à l’automne 2027
Moscou se prépare à une nouvelle "année de guerre" selon Kiev
Le président ukrainien a estimé mercredi que la Russie se préparait à mener une nouvelle "année de guerre" en Ukraine en 2026, après des propos de son homologue russe Vladimir Poutine affirmant que les objectifs de Moscou dans le pays seraient "sans aucun doute atteints". "Aujourd’hui, nous avons entendu un nouveau signal de Moscou disant qu’ils se préparent à faire de l’année prochaine une nouvelle année de guerre", a déclaré Volodymyr Zelensky dans son allocution quotidienne.
Selui lui, les autorités russes tentent de "saper la diplomatie" en cherchant "diverses formulations" dans les propositions en cours de négociations "pour dissimuler leur désir de détruire l’Ukraine et les Ukrainiens" et "leur volonté de légitimer le vol de notre territoire".
Volodymyr Zelensky à Bruxelles jeudi pour convaincre l’UE d’utiliser les avoirs russes
Un haut responsable ukrainien qui s’exprime sous couvert d’anonymat a affirmé mercredi à l’AFP Volodymyr Zelensky se rendrait à Bruxelles pour convaincre les Européens, réunis jeudi en sommet, d’utiliser les actifs gelés russes pour financer l’aide à l’Ukraine. Selon lui, le gouvernement de Donald Trump fait "pression" sur les pays européens pour qu’ils "renoncent à l’idée". Quelque 210 milliards d’euros de la Banque centrale russe sont actuellement immobilisés dans l’UE. Ils ont été gelés par les Occidentaux après l’invasion de l’Ukraine en février 2022. Selon le responsable, "Sept pays ne soutiennent déjà pas publiquement cette idée".
Friedrich Merz appelle l’UE à utiliser les avoirs russes gelés pour "intensifier la pression sur Poutine"
Le chancelier allemand a appelé mercredi l’UE à utiliser les avoirs russes gelés pour le financement de l’Ukraine en guerre, à la veille d’un sommet des dirigeants européens appelés à trancher sur le sujet à Bruxelles. "La pression sur Poutine doit encore s’intensifier pour l’amener à négocier sérieusement, et c’est pour cela que nous avons besoin de la décision des chefs d’État et de gouvernement européens", a-t-il martelé devant les députés allemands à Berlin, avant de s’envoler pour Bruxelles. Selon lui, il s’agit "aussi d’envoyer un signal clair à la Russie pour lui faire comprendre que nous allons utiliser les moyens dont nous disposons pour mettre fin à cette guerre".
Ursula von der Leyen propose d’utiliser les avoirs russes gelés pour accorder à l’Ukraine un prêt de 90 milliards d’euros, mais cette initiative rencontre l’opposition de la Belgique alors que les dirigeants de l’UE se réunissent jeudi et vendredi à Bruxelles pour décider du financement de Kiev.
Pour Vladimir Poutine, la Russie atteindra ses objectifs
"Les objectifs de l’opération militaire spéciale seront sans aucun doute atteints", a affirmé Vladimir Poutine lors d’une réunion avec des responsables du ministère de la Défense, alors que les tentatives diplomatiques pour mettre fin au conflit s’intensifient. "Nous préférerions y parvenir et éliminer les causes profondes du conflit par la voie diplomatique" mais, si "le pays adverse et ses protecteurs étrangers refusent de s’engager dans des discussions substantielles", le pays y parviendra "par la voie militaire".
Le Parlement européen approuve la sortie du gaz russe à l’automne 2027
Les eurodéputés ont adopté définitivement mercredi 17 décembre l’interdiction de toutes les importations de gaz russe dans l’Union européenne à l’automne 2027 au plus tard, dans le but de priver la Russie de ressources finançant sa guerre en Ukraine. Le texte a été approuvé à une large majorité. "Sortir du gaz russe est une grande réussite pour l’Union européenne. Un geste véritablement historique", s’est félicité mardi sa rapporteure.
Selon elle, "depuis que la guerre à grande échelle a commencé (NDLR : en février 2022), l’Union européenne a payé plus de 216 milliards d’euros pour de l’énergie fossile russe. Nous payons encore près de 40 millions d’euros par jour (à la Russie) et finançons toujours les massacres en Ukraine".
Washington prépare de nouvelles sanctions contre l’énergie Russe
Les États-Unis préparent une nouvelle série de sanctions contre le secteur de l’énergie russe pour augmenter la pression sur Moscou, et dissuader Vladimir Poutine de refuser l’accord de paix, selon les informations de Reuters. Elles cibleraient principalement le ciblage de navires de la "flotte fantôme" de pétroliers russes, utilisés pour transporter le pétrole russe. Les commerçants facilitant ces transactions seraient aussi visés.
Les prochains jours "cruciaux" pour le financement de l’Ukraine, selon Ursula von der Leyen
"Les prochains jours seront une étape cruciale pour y parvenir ; il nous revient de choisir comment financer le combat de l’Ukraine, et nous en connaissons l’urgence" a appelé la présidente de la Commission européenne à la veille d’un sommet des dirigeants de l’U. Les chefs d’Etat et de gouvernement de l’Union européenne se retrouvent jeudi et vendredi à Bruxelles pour décider des moyens de financer au cours des deux ans à venir l’Ukraine en guerre contre la Russie.
L’une des options consiste à utiliser les avoirs de la banque centrale russe gelés en Europe, dont l’essentiel se trouve en Belgique sous le contrôle de la société Euroclear, pour financer un "prêt de réparation" à l’Ukraine d’un montant de 90 milliards d’euros. Une large majorité des 27 pays de l’UE y est favorable mais la Belgique s’y oppose, redoutant des représailles russes ou d’être le seul pays à payer les pots cassés en cas de problème. La dernière proposition sur la table prévoit des garanties de la part des 27 et de l’Union européenne, mais toujours jugées insuffisantes par la Belgique.
Les eurodéputés ont adopté définitivement, mercredi 17 décembre, l’interdiction de toutes les importations de gaz russe dans l’Union européenne à l’automne 2027 au plus tard, dans le but de priver la Russie de ressources finançant sa guerre en Ukraine.
Le Parlement européen a approuvé à une large majorité ce texte, qui doit encore obtenir un ultime feu vert des Etats membres à la majorité qualifiée - normalement une formalité. "Sortir du gaz russe est une grande réussite pour l’Union européenne. Un geste véritablement historique", s’est félicitée mardi la rapporteure du texte, Inese Vaidere.
"216 milliards d’euros" en quatre ans
"Depuis que la guerre à grande échelle a commencé (NDLR : en février 2022), l’Union européenne a payé plus de 216 milliards d’euros pour de l’énergie fossile russe. Nous payons encore près de 40 millions d’euros par jour (à la Russie) et finançons toujours les massacres en Ukraine", a déclaré l’élue (Parti populaire européen, droite) lettone.
Le texte prévoit une interdiction progressive d’acheter du gaz russe, qui s’appliquera au plus tard le 1er novembre 2027 pour des contrats d’achat de long terme - les plus sensibles car ils courent parfois sur des dizaines d’années. Des pénalités financières pourront être imposées aux entreprises qui contourneront l’interdiction. En revanche, l’accord ne prévoit pas d’interdire totalement les achats de pétrole et de combustible nucléaire russes, auxquels ont encore recours plusieurs Etats européens.
La Hongrie opposée
La Commission européenne a opté pour une proposition législative plutôt que des sanctions, car elle peut être adoptée à la majorité qualifiée des Etats membres plutôt qu’à l’unanimité. Le but est de contourner un veto de la Hongrie et de la Slovaquie, deux pays considérés comme proches de Moscou et fermement opposés à ces mesures.
Le Premier ministre hongrois Viktor Orban a d’ailleurs promis de contester le plan en justice. Dans l’hémicycle, l’eurodéputé d’extrême droite (Patriotes) Thierry Mariani, réputé pro russe, a fustigé mardi une "rupture historique", "imposée […] sans unanimité, et au prix de risques juridiques majeurs pour les Etats et les entreprises".
Cinq ans après le Brexit, le gouvernement britannique a trouvé un accord avec Bruxelles pour réintégrer dès 2027 le programme européen d'échanges universitaires Erasmus, une mesure emblématique d'une volonté de rapprochement avec l'Union européenne.
Les Britanniques avaient quitté ce programme en décembre 2020, au moment de la sortie de leur pays de l'Union européenne. "L'adhésion à Erasmus+ est une victoire majeure pour nos jeunes, en levant les obstacles et en élargissant les horizons afin que chacun, quelle que soit son origine, ait la possibilité d'étudier et de se former à l'étranger", a déclaré le ministre britannique des relations avec l'Union européenne, Nick Thomas-Symonds, dans un communiqué publié mercredi.
"Un grand pas en avant"
Ce retour "ouvre la voie à de nouvelles expériences partagées et à des amitiés durables" à tous les étudiants qui pourront bénéficier de cette extension du programme, a souligné sur X la présidente de l'exécutif européen Ursula von der Leyen, tandis que le commissaire au Commerce, Maros Sefcovic, a salué "un grand pas en avant" pour les relations entre l'UE et le Royaume-Uni.
L'accord s'inscrit dans le cadre de la relance des relations avec l'UE entreprise par le Premier ministre travailliste Keir Starmer depuis son arrivée au pouvoir en juillet 2024, après des années de tensions entre les 27 et les précédents gouvernements conservateurs liées au Brexit. En mai, Londres et Bruxelles avaient conclu un "nouveau partenariat stratégique" pour resserrer les liens, lors d'un sommet inédit.
Outre Erasmus, le Royaume-Uni et la Commission européenne ont annoncé dans un communiqué conjoint des négociations sur la participation britannique au marché européen de l'électricité. "Les accords conclus aujourd'hui démontrent que notre nouveau partenariat avec l'UE fonctionne", s'est félicité le ministre britannique. L'accord trouvé sur Erasmus devra encore être approuvé par les 27 Etats membres.
La décision du gouvernement conservateur de Boris Johnson, annoncée en décembre 2020, de quitter le programme Erasmus, auquel le pays participait depuis 1987 avait suscité la consternation dans l'UE, ainsi que chez les étudiants et les acteurs de l'enseignement supérieur au Royaume-Uni. Boris Johnson avait alors mis en avant le coût du programme, trop élevé selon lui, arguant que Londres accueillait plus d'étudiants européens (35 000 par an environ) qu'il n'envoyait de jeunes Britanniques (17 000) sur le continent. Il avait alors créé son propre programme Alan Turing, du nom de ce célèbre mathématicien britannique.
Erasmus permet aux étudiants d'étudier à l'étranger dans des universités et établissements d'enseignement supérieur partenaires, en offrant des bourses destinées à couvrir leurs frais. Les étudiants participants paient généralement leurs frais d'inscription à leur établissement d'origine, les coûts supplémentaires étant pris en charge par l'Union européenne, via des fonds publics.
Le programme ouvert aux étudiants et apprentis
Depuis le Brexit, les jeunes européens étudiant au Royaume-Uni doivent s'acquitter comme les autres étudiants internationaux de frais universitaires élevés, souvent trois fois supérieurs à ceux payés par les étudiants britanniques. Selon le gouvernement britannique, plus de 100 000 personnes au Royaume-Uni pourraient bénéficier du programme dès la première année.
Londres a précisé que le programme serait ouvert aux étudiants et apprentis, insistant sur l'importance de voir participer un public large, y compris les "groupes défavorisés". "Les opportunités offertes par Erasmus+ comprennent notamment des stages dans des entreprises européennes de premier plan pour les étudiants de l'enseignement supérieur et les apprentis", explique le gouvernement.
La contribution du Royaume-Uni à ce programme pour l'année 2027-2028 s'élèvera à environ 570 millions de livres (648 millions d'euros). "Toute participation à Erasmus+ dans le prochain cadre financier pluriannuel devra faire l'objet d'un accord futur et reposer sur une contribution équitable et équilibrée", prévient le gouvernement britannique.
Depuis sa création en 1987, neuf millions de personnes ont bénéficié d'Erasmus, qui a également contribué à former une génération de Britanniques pro-européens. Les jeunes Français avaient fait du Royaume-Uni leur destination favorite entre 2014 et 2019, selon les chiffres de l'agence Erasmus+ France, qui gère le programme dans l'Hexagone.
Le Royaume-Uni a trouvé un accord avec Bruxelles pour réintégrer dès 2027 le programme européen d'échanges universitaires Erasmus qu'il avait quitté fin 2020 au moment du Brexit.
Capgemini, DHL, Siemens ou encore Spotify : plusieurs géants européens du numérique pourraient bientôt se voir appliquer des sanctions par Washington. Mardi 16 décembre, les Etats-Unis ont menacé l’Union européenne (UE) de représailles, si elle ne modifiait pas sa réglementation du secteur numérique, qu’ils jugent "discriminatoire", accusant l’Europe de vouloir "restreindre, limiter et décourager" l’activité des entreprises américaines.
"L’Union européenne et certains Etats membres ont persisté dans leur approche discriminatoire et leur harcèlement avec des procès, impôts, amendes et directives visant les fournisseurs américains de services", a écrit dans un message sur X le bureau du représentant de la Maison-Blanche pour le Commerce (USTR). "S’ils persistent", ajoute-t-il, "les Etats-Unis n’auront d’autre choix que d’utiliser tous les outils à disposition pour contrer ces mesures déraisonnables", allant jusqu’à citer des noms de sociétés européennes.
Allocution télévisée
Ces menaces interviennent alors que le président américain doit s’exprimer, mercredi soir, à la télévision américaine, afin de vanter son bilan. De son côté, l’UE a assuré qu’elle allait continuer à réguler le secteur du numérique "équitablement" malgré les menaces américaines, assurant appliquer ses réglementations "sans discrimination" : "comme nous l’avons expliqué à de nombreuses reprises, nos règles s’appliquent de manière égale et équitable à toutes les entreprises opérant dans l’UE", a assuré Thomas Regnier, le porte-parole de la Commission européenne.
La Maison-Blanche n’a cessé de critiquer depuis le début de l’année les régulations européennes sur les services numériques et les enquêtes et amendes infligées par la Commission européenne contre les abus des géants américains.
120 millions d’euros réclamés à Meta
Dernier exemple en date d’amende infligée par l’UE, celle de 120 millions d’euros imposée début décembre au réseau social X, propriété du milliardaire Elon Musk, allié du président américain Donald Trump. La Commission reprochait au réseau social de ne pas respecter le règlement européen sur les services numériques (DSA), une décision vue comme "une attaque contre toutes les plateformes technologiques américaines et le peuple américain", avait fustigé le chef de la diplomatie américaine, Marco Rubio. Ces dernières années, d’autres géants de la tech comme Apple ou Google se sont également vues imposer plusieurs milliards d’euros d’amendes pour non-respect de la législation européenne.
Cette loi est entrée en vigueur il y a deux ans pour lutter contre les contenus illégaux et dangereux en ligne, et impose des obligations renforcées aux plus grandes plateformes actives dans l’UE. Ces dernières années, l’UE a imposé plusieurs milliards d’euros d’amendes aux grands groupes américains du numérique, pour non-respect de la législation européenne.
Les Européens dans le viseur
"Des entreprises européennes de services ont eu la possibilité d’opérer librement aux Etats-Unis depuis des décennies, profitant de l’accès à notre marché et à nos consommateurs", a rappelé le bureau de l’USTR dans son message, citant notamment Accenture, Capgemini, Publicis ou encore la licorne française de l’intelligence artificielle (IA) Mistral. "Si des mesures de représailles étaient nécessaires, la loi américaine permet la mise en place de droits d’entrée ou de restrictions aux services étrangers, parmi d’autres possibilités", a-t-il menacé.
Washington a appelé à plusieurs reprises l’UE à assouplir ses directives relatives au secteur du numérique, mettant notamment dans la balance un abaissement possible des droits de douane imposés à l’acier et l’aluminium européens. Le bureau de l’USTR a également prévenu les "autres pays qui envisagent une stratégie similaire à l’UE en la matière" d’une "réponse identique" de la part des Etats-Unis.
En parallèle, la Maison-Blanche a également annoncé, mardi, la suspension d’un partenariat technologique entre les Etats-Unis et le Royaume-Uni, portant notamment sur l’intelligence artificielle, le nucléaire et l’informatique quantique, au motif que la conclusion de l’accord n’allait pas assez vite.
Le président américain Donald Trump a annoncé mardi un "blocus total" contre les pétroliers sous sanctions se rendant ou partant du Venezuela, renforçant la pression économique sur Caracas en pleine crise entre les deux pays. "Aujourd'hui, j'ordonne un blocus total et complet de tous les pétroliers sanctionnés entrant et sortant du Venezuela", a écrit Donald Trump sur son réseau Truth Social.
Le gouvernement du président vénézuélien Nicolas Maduro utilise le pétrole pour financer "le narcoterrorisme, la traite d'êtres humains, les meurtres et les enlèvements", a justifié Donald Trump, reprenant sa rhétorique habituelle. Dans son message, il a aussi affirmé que "le régime vénézuélien avait été désigné comme une organisation terroriste internationale" par son administration.
Caracas a répondu en qualifiant de "menace grotesque" cette annonce. "Le président des Etats-Unis tente d'imposer de manière absolument irrationnelle un prétendu blocus naval militaire au Venezuela dans le but de voler les richesses qui appartiennent à notre patrie", a rétorqué le gouvernement vénézuélien dans un communiqué.
Le durcissement de la politique américaine salué par Maria Corina Machado
L'administration Trump accuse Nicolas Maduro d'être à la tête d'un vaste réseau de narcotrafic. L'intéressé dément catégoriquement, affirmant que Washington cherche à le renverser pour s'emparer du pétrole vénézuélien, la principale ressource de son pays.
Les Etats-Unis ont déployé depuis cet été un important dispositif militaire dans les Caraïbes, et bombardé des embarcations en provenance du Venezuela au nom de la lutte contre le narcotrafic, des opérations à la légalité mise en doute par les experts. "Le Venezuela est entièrement encerclé par la plus grande armada jamais assemblée dans l'histoire de l'Amérique du Sud", a affirmé Donald Trump. Le déploiement américain "ne fera que s'accroître, et le choc qu'ils subiront sera sans précédent - jusqu'à ce qu'ils rendent aux Etats-Unis d'Amérique le pétrole, les terres et les autres actifs qu'ils nous ont précédemment volés", a ajouté le président américain, qui a toujours maintenu le flou sur la possibilité d'une intervention terrestre sur le sol vénézuélien.
Donald Trump n'a pas développé ses accusations de vols de pétrole et de terres. Dans les années 1970, le Venezuela a nationalisé son industrie pétrolière, et sous la présidence d'Hugo Chavez (1999-2013), les "majors" étrangères ont été obligées, pour rester dans le pays, d'accepter des coentreprises majoritairement détenues par la compagnie d'Etat PDVSA. La compagnie américaine Chevron, qui continue à travailler au Venezuela au bénéfice d'une dispense de sanctions, a indiqué mardi que ses opérations "continuent sans interruption et dans le plein respect des lois".
Le durcissement de la politique américaine contre Caracas a été salué par l'opposante vénézuélienne Maria Corina Machado, prix Nobel de la paix 2025, qui a même appelé ce week-end sur la chaîne américaine CBS à exercer plus de "pression" afin que "Maduro comprenne qu'il doit partir". Soumis à un embargo américain depuis 2019, le pétrole vénézuélien est écoulé sur le marché noir à des prix nettement plus bas, à destination en particulier de la Chine.
Un pétrolier saisi
La semaine dernière, les forces américaines ont saisi en mer des Caraïbes un pétrolier à destination de Cuba, le Skipper. Le navire transportait entre un et deux millions de barils de brut vénézuélien, selon les sources, pour une valeur de 50 à 100 millions de dollars. Selon Washington, le navire était sous sanctions américaines depuis 2022 pour des liens présumés avec le Corps des Gardiens de la Révolution islamique iranienne et le Hezbollah libanais. Selon la Maison-Blanche, les Etats-Unis entendent "saisir le pétrole" du Skipper, reconnaissant cependant que cela posait des questions juridiques.
L'annonce de blocus Donald Trump survient alors que les ministres américains de la Défense et des Affaires étrangères ont défendu mardi au Congrès les frappes menées contre des embarcations soupçonnées de narcotrafic dans les Caraïbes.
Depuis début septembre, le président américain a ordonné des frappes contre au moins 26 navires dans les Caraïbes ou l'est du Pacifique, tuant au moins 95 personnes, sans jamais fournir de preuve de leur implication dans le trafic de drogues. Le sujet a soulevé de vifs débats à Washington, notamment une opération datant de début septembre au cours de laquelle l'armée a tiré deux salves, la seconde achevant les deux survivants d'un bateau déjà en flammes.
Le président américain Donald Trump a annoncé mardi 16 décembre un "blocus total" contre les pétroliers sous sanctions se rendant ou partant du Venezuela.
Donald Trump a étendu mardi 16 décembre les interdictions d'entrée aux Etats-Unis aux ressortissants de sept pays, dont la Syrie, ainsi qu'aux Palestiniens. Le président américain a signé une proclamation "restreignant et limitant davantage l'entrée des ressortissants étrangers afin de protéger la sécurité des Etats-Unis", a indiqué la Maison-Blanche.
Les nouveaux pays concernés par cette mesure sont le Burkina Faso, le Niger, le Mali, le Soudan du Sud et la Syrie, tandis que le Laos et la Sierra Leone passent de restrictions partielles à totales. Les Palestiniens disposant de documents de voyage émis par l'Autorité palestinienne sont également visés.
Quelques exceptions
L'administration Trump avait déjà imposé des restrictions totales visant les ressortissants de douze pays et des dizaines d'autres pays se sont vus imposer des restrictions partielles. S'agissant de la Syrie, la mesure intervient quelques jours après une attaque meurtrière contre des soldats américains dans le centre de ce pays. L'administration Trump dit avoir identifié des pays où les vérifications sont "tellement insuffisantes qu'elles justifiaient une suspension totale ou partielle de l'admission des ressortissants de ces pays".
La proclamation prévoit cependant des exceptions pour les résidents permanents légaux, les titulaires de visas existants, certaines catégories de visas comme les athlètes et les diplomates, et les personnes dont "l'entrée sert les intérêts nationaux des Etats-Unis".
Une mesure "qui vise à protéger les Etats-Unis"
Depuis son retour au pouvoir en janvier, Donald Trump mène une vaste campagne contre l'immigration illégale et a considérablement durci les conditions d'entrée aux Etats-Unis et l'octroi de visas, arguant de la protection de la sécurité nationale. Ces mesures visent ainsi à interdire l'entrée sur le territoire américain aux étrangers qui "ont l'intention de menacer" les Américains, selon la Maison-Blanche. De même, pour les étrangers qui "pourraient nuire à la culture, au gouvernement, aux institutions ou aux principes fondateurs" des Etats-Unis. Le président américain s'en est récemment pris avec virulence aux Somaliens, disant qu'il "ne voulait pas d'eux chez nous".
En juin, il avait annoncé des interdictions d'entrée sur le territoire américain aux ressortissants de douze pays, principalement en Afrique et au Moyen-Orient (Afghanistan, Birmanie, Tchad, Congo-Brazzaville, Guinée équatoriale, Erythrée, Haïti, Iran, Libye, Somalie, Soudan, Yémen).
En revanche, le Turkménistan, pays qui figure parmi les plus reclus au monde, se voit accorder un satisfécit, la Maison-Blanche évoquant mardi des "progrès significatifs" dans cet Etat d'Asie centrale. Les ressortissants de ce pays pourront à nouveau obtenir des visas américains, mais uniquement en tant que non-immigrants. Lors de son premier mandat (2017-2021), Donald Trump s'en était pris de façon similaire à certains pays, ciblant principalement des pays musulmans.
Des grandes annonces de Donald Trump sur le nucléaire, le grand public a surtout retenu la possible reprise des essais militaires sur le terrain, après plusieurs décennies d’arrêt. Mais dans les executive orders du président américain, une autre mesure, historique elle aussi, commence à créer des remous. Dans un souci d’efficacité, l’administration souhaite relever les seuils maximums d’exposition à la radioactivité pour la population. Il n’en fallait pas plus pour accentuer la peur de l’atome.
Aux Etats-Unis, certains médias évoquent déjà un pic de cancers à venir ou l’arrivée, dans les supermarchés, de poêles à frire radioactives fabriquées à partir de matériaux irradiés recyclés. "Le débat mérite pourtant d’être plus nuancé, estime Dominique Greneche, docteur en physique nucléaire et membre de PNC-France (Patrimoine nucléaire et climat). Non seulement des scientifiques tout à fait respectables sont favorables à ce changement de norme. Mais le président américain a le mérite de mettre le doigt sur un problème rarement abordé : l’excès de sûreté en matière de nucléaire civil."
La réglementation sur les radiations
Aux Etats-Unis, deux idées fortes servent de pilier à la réglementation sur les radiations. La première part du principe que le risque lié aux rayonnements est directement proportionnel à la dose, et qu’il n’y a pas de seuil en dessous duquel ce risque est nul. Le second principe, qui découle du précédent, cherche à maintenir l’exposition des travailleurs et du public aussi faible que raisonnablement possible. Et c’est cette fameuse règle du As Low As Reasonnably Achievable (ALARA), qui se retrouve aujourd’hui dans le viseur de l’administration américaine.
"Concrètement, les limites de dose aux États-Unis sont de 50 millisieverts (mSv) par an pour les travailleurs du nucléaire et de 1 mSv pour le public. Le ministère de l’Énergie et la Commission de réglementation nucléaire n’ont pas encore publié leur projet, nous ne savons donc pas exactement quels seront les changements. Cependant, même si rien n’est encore officiel, les modifications envisagées pourraient augmenter les doses admissibles pour le public autour de 5 mSv par an. Il s’agirait également de supprimer ou d’affaiblir le principe de l’ALARA", détaille Emily Caffrey, physicienne certifiée en radioprotection, professeure à l’université d’Alabama-Birmingham.
Pourquoi remettre en question cette règle pleine de bon sens héritée des années 1950 ? "Il semblait prudent d’appliquer ce principe à l’époque, mais la notion de 'raisonnablement possible' a depuis lors été interprétée de manière très large, entraînant des conséquences indésirables", confie Craig Piercy, dirigeant de l’American Nuclear Society, une société savante regroupant plusieurs milliers de scientifiques. Le strict respect de cette règle entraîne par exemple des travaux de construction supplémentaires sur les sites de traitement des déchets radioactifs. Il se traduit parfois par un refus de radiothérapie pour un patient ou des décès inutiles comme lors de l’évacuation de la région de Fukushima.
"Après la catastrophe, les autorités ont décidé d’évacuer 78 200 personnes vivant dans des zones définies en fonction de ces limites très basses. Or plusieurs études ont attribué ensuite entre 1 600 et 2 200 décès à cette opération (morts de personnes âgées faute de soin, décès dans les transports, suicides…). Dès lors, il faut s’interroger sur le bilan sanitaire global de type de gestion post-accidentelle basé sur les normes trop restrictives", détaille Dominique Greneche.
Des marges confortables
D’autant qu’un rapport récent confirme qu’en matière de radioactivité, il existe une marge importante de sécurité permettant de relever les seuils d’exposition sans mettre la population en danger. Selon ce document, rédigé par les scientifiques du laboratoire national de l’Idaho, les études épidémiologiques n’ont jamais réussi à démontrer des effets statistiquement significatifs sur la santé à des doses inférieures à 100 mSv. Conclusion des experts : pour le grand public, "la limite actuelle de 1 mSv par an semble trop restrictive. Une révision à 5 mSv par an pour le grand public permettrait de maintenir une marge de sécurité substantielle tout en en permettant une mise en œuvre plus rentable des technologies nucléaires bénéfiques pour les secteurs de l’énergie, de la santé et de l’industrie".
Craig Piercy acquiesce : "Oui, les rayonnements causent la mort à fortes doses. Ils provoquent le cancer de manière relativement linéaire sur le plan statistique. Mais à environ 50 mSv par an, le signal épidémiologique des effets néfastes sur la santé disparaît au milieu d’autres facteurs (alimentation, forme physique…). Sans preuve directe chez les populations humaines, les scientifiques ne peuvent que théoriser sur les effets de l’exposition aux rayonnements à ces niveaux proches du fond".
Mais comment rassurer la population sur un sujet aussi sensible ? "La question de savoir si ce changement de norme est acceptable relève de la politique et de valeurs comme la tolérance au risque. Elle ne peut être tranchée par une simple réponse scientifique. Bien que je ne qualifierais pas personnellement ce changement potentiel de dangereux, il comporte des implications méritant d’être débattues", souligne Emily Caffrey.
Les effets économiques d’une telle décision, en revanche, sont parfaitement clairs. Par exemple, les normes drastiques augmentent considérablement les coûts pour la filière de retraitement des déchets. Elles réduisent aussi les perspectives de recyclage. "C’est vrai pour les Etats-Unis, mais aussi pour la France, estime Dominique Greneche. Nous avons chez nous une règle spécifique, un seuil de radioactivité en dessous duquel les déchets issus d’une installation nucléaire ne peuvent être gérés comme des matériaux conventionnels. Nous sommes le seul pays au monde à nous payer le luxe d’un tel fardeau réglementaire". Même l’ancien directeur général de l’Institut de radioprotection et de sûreté nucléaire (IRSN), Jacques Repussard, s’en inquiète dans une interview donnée à la Société française d’énergie nucléaire (Sfen). "Ce mécanisme comporte deux inconvénients. Le premier : c’est un système luxueux. Tout ce qui sort de la zone contrôlée est réputé radioactif, même s’il n’y a pas du tout de contamination. Mais l’inconvénient le plus sérieux est que cela conduit, paradoxalement, à fausser la représentation qu’a le public des déchets radioactifs. Il peut en effet légitimement penser que si l’on prend tant de précautions, c’est que ceux-ci sont très dangereux dès le premier becquerel… Ce qui est évidemment faux".
"A force d’empiler des normes, on atteint une limite difficile à franchir en matière de sûreté ; c’est comme si on avait mis en place un nœud coulant", prévient Dominique Greneche. La France devrait donc mener elle aussi son introspection ? Le scientifique en est persuadé. "Qu’on l’aime ou qu’on le déteste, Donald Trump a sans doute raison de mettre un coup de pied dans la fourmilière."
Depuis quelques mois, les soldats ukrainiens sur le front observent un comportement nouveau des drones Shahed. Ces engins, utilisés en quantité par les Russes pour viser des cibles situées derrière les lignes de front, réalisent des manœuvres pour échapper aux drones intercepteurs ukrainiens. "Les Russes ont installé des caméras à l’arrière des Shahed, et grâce à ça, ils ont appris à nous éviter", indique Hadrien Canter. Pour ce Français, fondateur de l’entreprise Alta Ares, spécialisée dans le développement d’IA de défense pour les drones, il n’y a pas de doute possible. "Ces Shahed font des manœuvres et du ciblage qu’ils ne pourraient pas faire sans intelligence artificielle. Heureusement, nous arrivons toujours à les intercepter, même si c’est plus dur", raconte celui qui était encore il y a peu en Ukraine.
L’intelligence artificielle est de plus en plus présente en Ukraine, avec une "robotisation progressive du champ de bataille", comme le résume Hadrien Canter. Très tôt, l’armée de Volodymyr Zelensky a mis en place des outils pour piloter des essaims de drones, faire de la navigation autonome, et analyser des informations récoltées sur le champ de bataille. La coopération entre les forces ukrainiennes et le secteur privé, aussi bien local qu'international, a été documentée en Europe. Du côté de l’armée russe, "l’IA est largement employée par les pilotes, et par les opérateurs de drones", a récemment déclaré à la presse russe l’ancien colonel et observateur militaire Anatoly Matviychuk. L’IA est "également intégrée dans des systèmes de raisonnement logique, ce qui aide à la prise de décision sur le champ de bataille".
Il est cependant plus difficile de cerner avec précision les avancées russes dans le domaine. "L’accès à l’information est compliqué, déjà à cause du secret de l’armée, mais aussi parce qu’il y a beaucoup de propagande étatique", explique Anna Nadibaidze, chercheuse au centre des études militaires de l’université du Danemark du Sud, spécialiste des applications militaires de l’intelligence artificielle. Outre les déclarations politiques invérifiables qui peuvent exagérer les capacités réelles, les questions de performance en IA sur le terrain militaire sont considérées en Russie comme un symbole de pouvoir sur la scène internationale, ce qui alimente la désinformation. Un fait demeure certain : alors que la guerre s’éternise, la maîtrise de cette nouvelle technologie est une question de plus en plus importante pour Moscou.
Une vieille ambition
Les ambitions russes dans le secteur de l’IA militaire ne datent pas d’hier. Dès 2017, Vladimir Poutine avait désigné l’intelligence artificielle comme un secteur d’importance critique, allant jusqu’à déclarer que celui qui maîtriserait cette technologie "maîtriserait le monde". Le président avait notamment dévoilé à ce moment-là une stratégie nationale pour faire de la Russie la puissance majeure de l’IA, rappelle Yannick Harrel, chercheur en cyberstratégie et expert du monde russe. "Dès le départ, le plan avait prévu des milliards de roubles d’investissement, soit près de 400 millions de dollars." Une somme qui peut aujourd’hui sembler dérisoire à l’échelle des Etats-Unis, mais qui était conséquente en Russie, à une époque où le coût du matériel et de l’énergie était bien moindre.
La Russie dispose alors de nombreux avantages dans la course à l’IA. "Il y a toujours eu une excellente formation en mathématiques là-bas", indique Yannick Harrel, ce qui a permis de former de très bons ingénieurs. Preuve de cette excellence, lors des Olympiades scientifiques, ces compétitions mondiales rassemblant les meilleurs cerveaux, les chercheurs russes arrivent régulièrement sur le podium, comme de nombreux compétiteurs des pays de l’ex-URSS. "Les chercheurs soviétiques avaient posé les bases de modélisations très avancées, notamment en mathématiques fondamentales et avec les premiers supercalculateurs", reprend Yannick Harrel. Les universités russes ont ainsi profité de ces savoirs.
Si le plan concerne au début l’IA civile, "il est prévu d’intégrer la technologie dans les secteurs stratégiques — et cela inclut évidemment le militaire", pointe le chercheur. Il est également écrit que le secteur militaro-industriel doit contribuer à supporter l’IA et les nouvelles technologies.
Ainsi, dès le début, Rostec, l’immense conglomérat rassemblant les entreprises de défense russes, dont Kalachnikov, se joint aux efforts de recherche en IA, avec le développement de logiciels et de systèmes autonomes. Le constructeur de missile Kronstadt participe également au programme, notamment pour les drones autonomes. Des instituts de recherche, dont le Advanced Research Foundation (ARF), équivalent russe de la DARPA américaine, ont pour objectif de développer les armes du futur, dont des véhicules sans pilote, des engins hypersoniques et des cyberarmes. On peut aussi compter ERA, "une sorte de mini-ville dédiée aux recherches en technologies militaires, installée en 2018 dans le sud de la Russie, près de Sotchi", ajoute Anna Nadibaidze.
A ces programmes pilotés par l’Etat russe s’ajoutent les efforts venant du secteur privé, menés par Sberbank, plus grande banque russe et investisseur massif dans les nouvelles technologies, et Yandex, équivalent russe de Google. Les deux groupes travaillent depuis le début des années 2010 sur les technologies de machine learning et de réseaux neuronaux, et bénéficient alors de partenariats technologiques prestigieux. Sberbank et Microsoft lancent en 2019 un programme de recherche conjoint en IA et en robotique et Yandex, en partenariat avec l’université de Tel-Aviv, crée un centre de recherche dédié à l’IA en 2018. L’entreprise fait même rouler, dès 2019, ses taxis autonomes dans les rues de Tel-Aviv.
La guerre en Ukraine, un frein majeur pour l’IA civile…
L’année 2022 marque un tournant dans le développement de l’IA russe. Après l’invasion de l’Ukraine, le pays se voit frappé de nombreux embargos. La collaboration scientifique s’arrête brutalement et les entreprises occidentales ont interdiction de vendre leurs puces et certains logiciels à la Russie. Or, le retard que le pays accuse dans ce domaine est criant : alors que les puces les plus puissantes, celles nécessaires pour entraîner les IA, sont gravées en nœud de 2nm, les fonderies russes ne prévoient de produire qu’à partir de 2030 celles en 28nm, d’après les données du Wall Street Journal.
Le pays fait également face à une pénurie de cerveaux, de nombreux chercheurs ayant quitté le pays peu après le début de la guerre. D’après les propres chiffres du ministère du Travail, d’ici 2030, la Russie manquera de plus de 400 000 experts en informatique. Les fonds viennent aussi à manquer : l’ensemble des entreprises russes d’IA n’a reçu que 30 millions de dollars d’investissement en 2025, à des années-lumière des sommes levées aux Etats-Unis, en Chine ou même en Europe.
Malgré tout, le secteur survit. Sberbank a ainsi développé GigaChat, un chatbot conversationnel concurrent de ChatGPT, sorti en avril 2023. Yandex a rendu public quelques semaines plus tard son propre agent conversationnel, YandexGPT, et propose des services de cloud pour entraîner des intelligences artificielles. L’approvisionnement en puces américaines étant impossible, la Russie s’est tournée vers le marché noir, à travers des entreprises écrans au Kazakhstan et utilise des composants et des puces chinoises.
… mais un accélérateur pour l’IA militaire
Si l’IA civile est en difficulté, les recherches en IA militaire sont, elles, plus actives que jamais. Dès septembre 2022, le ministère de la Défense lance le "Département de l’intégration de l’intelligence artificielle dans le développement des armements", dont le rôle consiste à rassembler les efforts des entreprises privées en IA et les recherches de l’armée, tout en intégrant les retours des soldats sur le terrain pour créer les armes et les outils les plus appropriés.
Des initiatives civiles par des citoyens russes ont même été lancées pour aider les forces armées. Le "Projet Archangel", l’un des plus grands groupes de volontaires civils russes, dont la mission est de former des pilotes de drones pour l’armée, a ainsi lancé le 11 décembre un appel à contribution pour entraîner des IA. Dans un message Telegram que L’Express a pu consulter, le groupe demande à ses membres de lui fournir des vidéos de drones FPV, quadricoptères ou à voilure fixe dans différentes conditions. Les participants sont appelés à filmer ces engins volant à une distance comprise entre 100 et 500 m, dans un cadre forestier, lors de certains types de manœuvres. Des vidéos filmées de nuit, dans des conditions météorologiques difficiles, ou en vision thermique seraient "particulièrement précieuses" et "chaque vidéo contribue à améliorer la précision du système", encouragent les responsables du projet.
Tous ces efforts portent leurs fruits. Les récents succès de Rubicon, l’unité d’élite de drones, sont "très probablement liés aux efforts du ministère de la Défense, ainsi qu’aux données collectées sur le terrain et aux outils IA certainement utilisés pour les analyser", estime Sam Bendett. Le chercheur, spécialiste des programmes militaires russes et auteur de nombreux rapports sur le sujet, notait dès 2023 qu’un drone "Admiral", capable de transporter deux drones FPV, était prétendument équipé d’un système de contrôle et de vision basé sur de l’IA. Toujours en 2023, la presse russe se vantait du lancement des munitions autonomes Lancet-3, qui utilisaient des réseaux neuronaux pour analyser les images enregistrées en vol afin de détecter les cibles et de réaliser des frappes plus précises.
Plus récemment, un nouveau type de drone a été identifié par les troupes ukrainiennes, le V2U. Bien que l’armée russe n’ait pas officiellement reconnu le drone comme faisant partie de son arsenal, ce dernier "volerait en essaims et aurait des capacités d’intelligence plus développées que les autres drones", ajoute Sam Bendett. Des efforts sont également faits au niveau des drones terrestres. Un des exemples notables est le projet de véhicule autonome Marker, potentiellement capable de traiter en temps réel du langage naturel et de naviguer de manière indépendante dans des zones de combat. Bien que des tests aient été conduits en mars 2023 dans le Donbass, "il n’est pas sûr" que le véhicule soit prêt pour une mise en service, notait Sam Bendett dans un rapport.
Si la progression de Moscou en matière d’équipement se base toujours sur des composants étrangers, le pays brille dans d'autres catégories. "Les Russes ont toujours mis en avant leurs talents et leurs capacités à développer des logiciels plutôt que leur capacité à déployer du matériel, domaine dans lequel la Chine et l’Occident ont jusqu’ici eu beaucoup plus de succès", rappelle Sam Bendett. Grâce aux données qu’ils récupèrent sur le champ de bataille, les ingénieurs militaires russes ont une mine d’or à leur disposition. Les forces de Poutine sont sans doute parmi les mieux préparées à la guerre à l’âge de l’intelligence artificielle, confirment plusieurs experts interrogés. Leur capacité à viser de manière de plus en plus précise des troupes ukrainiennes en est un exemple terrible.
Le retard de l’armée russe dans les équipements robotiques est de plus atténué par l’aide de la Chine. "Au début de l’année 2024, les armées russe et chinoise ont conclu des accords sur l’IA militaire, avec notamment un échange de savoir", explique Sam Bendett. La Chine, qui lorgne sur Taïwan et a déjà menacé d’une opération militaire, a en effet beaucoup de leçons à tirer des opérations russes en Ukraine, "en particulier pour l’analyse de grandes quantités de données provenant du champ de bataille et pour le pilotage de drones en essaim", note le chercheur. Les avancées russes en IA militaire risquent de se décliner demain sur d’autres champs de bataille.
Photo prise lors d'une visite guidée avec l'armée russe montrant le général russe Igor Konachenkov qui présente à la presse des drones artisanaux utilisés selon lui par les rebelles pour lancer des attaques sur la base militaire de russe de Hmeimim, le 26 septembre 2019.
Huit heures, c’est la durée des discussions qui ont permis de donner une "chance réelle" au processus de paix, selon les mots du chancelier allemand Friedrich Merz, qui accueillait ses homologues européens et les émissaires américains Steve Witkoff et Jared Kushner à Berlin, le 15 décembre. Si le sujet territorial n’a guère progressé, Européens et Américains se sont en revanche accordés sur le principe d’offrir à Kiev des garanties de sécurité comparables à l’article 5 de l’Otan. "Un premier pas", tempère, à juste titre, Volodymyr Zelensky, qui connaît mieux que personne la versatilité du président américain.
Peut-il – encore - faire confiance à l’homme qui, en début d’année, l’humiliait dans le bureau Ovale, refusait, durant un G7, de qualifier la Russie d’agresseur, affirmait six mois plus tard que l’Ukraine avait les moyens de "revenir à ses frontières d’origine" et, trois mois plus tard, que Moscou a "toujours eu l’avantage" sur le plan militaire ?
Quelle sécurité peut accorder un président qui déclarait en juin dernier que l’article 5 de l’Otan pouvait "s’interpréter de plusieurs façons" et, ce 11 décembre, lâchait du bout des lèvres : "Ouais, ouais, nous pourrions apporter notre aide, notamment en matière de sécurité…"
Syndrome du jokari
Cette diplomatie au conditionnel pose une vraie question : comment bâtir une architecture de sécurité européenne durable sur un terrain aussi meuble ? Emmanuel Macron et ses pairs le savent bien, eux qui, selon le Spiegel, s’inquiètent du possible lâchage de leur "allié" américain qui, tel une balle de jokari, finir toujours par revenir aux thèses du Vladimir Poutine.
Car le président américain a beau assurer avoir eu une discussion "longue" et "très bonne" avec plusieurs dirigeants européens après la rencontre de Berlin, il ne serait prêt, si l’on en croit les informations qui ont filtré sur ces négociations, qu’à coordonner un système de surveillance qui donnerait l’alerte en cas de violation de l’accord de paix. Voire.
Que se passera-t-il si la Russie lance des opérations hybrides en Ukraine ou dans une zone tampon qui serait établie entre les deux pays ? Ou que la Russie, après avoir reconstitué ses forces, recommence à masser des troupes derrière la frontière ukrainienne ?
Poutine ne s’arrêtera pas
Scénario probable, si l’on en croit l’interview accordée par le président russe à India Today, avant sa rencontre avec le Premier ministre indien, Narendra Modi, début décembre. La Russie, a-t-il déclaré, libérera "le Donbass et la Novorossiya" (soit le sud de l’Ukraine jusqu’à la mer Noire) – par des moyens militaires ou autres. Poutine ne s’arrêtera pas aux oblasts de Loughansk et de Donetsk. En face, Trump, l’homme des volte-faces, ne rassure personne.
La question est : peut-on le contraindre à respecter ses engagements ? En exigeant par exemple que le Sénat américain ratifie le texte ? Ce serait déjà un net progrès par rapport au mémorandum de Budapest qui, en 1994, donnait juste à Kiev des "assurances" de la part de la Russie, des États-Unis et du Royaume-Uni pour sa sécurité si elle renonçait à son arsenal nucléaire. On a vu le résultat. En 2014, personne n’a volé au secours des Ukrainiens quand les "petits hommes verts" de Poutine ont annexé la Crimée. Nul doute que les juristes ukrainiens seront cette fois plus attentifs au choix des mots.