Come get some
La Video Game History Foundation a mis en ligne une partie de ses archives dédiées à l’histoire du jeu vidéo. Son catalogue numérique couvre un pan très large de l’industrie, des CD promotionnels qui accompagnaient les magazines papiers dans les années 90 jusqu’à des contenus exclusifs qui témoignent des coulisses du développement de certains titres emblématiques.
En 1983, le champion d’échecs Deep Blue n’était pas encore sorti des laboratoires d’IBM. Et pourtant, d’aucuns se revendiquaient déjà d’une forme d’IA, à l’image d’Artificial Intelligence Design Systems, la société américaine fondée par Michael Toy et Jon Lan pour assurer la commercialisation de Rogue. Si ce jeu d’exploration de donjons – précurseur d’un genre à part entière, le rogue-like – a fini par se frayer un chemin vers les plateformes Atari, Commodore et Mac OS, sa jaquette de l’époque nous rappelle qu’il a d’abord vu le jour sous un environnement BSD Unix…
Conserver les coulisses de la production des jeux vidéo
Cette jaquette, numérisée sous toutes ses faces, fait partie des 30.000 trésors que la Video Game History Foundation (Fondation pour l’histoire du jeu vidéo) a mis en ligne le 30 janvier. Cette association dédiée à la conservation du jeu vidéo vient en effet de rendre accessible une part significative de ses archives, stockées à Oakland (Californie), au prix d’un important travail préalable. « Après des années de catalogage, de traitement et de numérisation de nos collections, nous sommes prêts à ouvrir nos portes (virtuelles) au public pour la première fois », annonce la fondation, créée en 2017.
Si cette collection a bien entendu de quoi chatouiller la nostalgie des joueurs, elle devrait tout particulièrement intéresser ceux qui étudient le patrimoine de l’industrie vidéoludique. La VGHF s’est en effet spécialisée dans la conservation de documents de travail issus des studios de développement (voir par exemple ces séquences annotées à la main préparant le déroulé de Spiderman & Venom : Maximum Carnage II, sorti en 1995 sur Megadrive), mais aussi dans l’archivage des médias spécialisés de l’époque, ainsi que des matériels promotionnels.
« VGHF travaille avec la communauté de développement de jeux pour préserver les documents de conception, les illustrations, les séquences vidéo, la correspondance et d’autres éléments uniques des coulisses de la production de jeux », résume la fondation.
Plateforme d’archivage standard et OCR maison
Entre autres pièces à caractère exceptionnel, elle dispose ainsi de plus de cent heures de vidéo relatant les coulisses et les secrets de fabrication du célèbre Myst (1993), développé par Cyan. Un matériel qui sera d’ailleurs valorisé très directement dans le futur documentaire dédié à Myst, réalisé par Philip Shane, après une campagne ayant permis de récolter 260 000 dollars en préventes sur Kickstarter.
Au détour des étagères numériques de la fondation, on peut aussi tomber sur des publicités originales de 1980 pour des game & watch, revisiter les halls d’exposition des douze premières éditions du salon E3 ou découvrir qu’en 1996, le magazine GamePro distribuait, sur des CD gravés, les artworks de Dragon Force. La bibliothèque donne par ailleurs accès à 1 500 magazines d’époque, spécialisés dans le jeu vidéo, avec possibilité de recherche textuelle, dont certains titres à faible tirage visant la cible des professionnels. On pourra enfin se plonger dans la collection dédiée à Tom Payne, l’un des responsables de la direction artistique de Sonic 2.
Pour la mise en ligne de ses archives, VGHF s’est appuyée sur deux plateformes logicielles spécialisées disponibles sur le marché, ArchivesSpace et Preservica. La structure affirme avoir en parallèle développé ses propres outils de reconnaissance de caractère pour rendre possible la recherche plein texte sur des plaquettes promotionnelles, des jaquettes ou des magazines à la mise en page parfois alambiquée.
Cette bibliothèque en ligne rejoint les nombreuses initiatives, souvent associatives, qui se dédient à la conservation du jeu vidéo, notamment en France : MO5 s’est fait une spécialité de la conservation des machines anciennes (jeu vidéo mais pas seulement), quand des plateformes comme Abandonware permettent d’exhumer vieux titres et magazines jeu vidéo d’époque.