Virtual Game Station, l'émulateur de PlayStation pour Mac qui a légalisé l'émulation
Connaissez-vous Virtual Game Station, de chez Connectix ? Si vous utilisez des Mac depuis longtemps, peut-ĂȘtre : le programme a Ă©tĂ© montrĂ© dans un keynote en 1998 par Steve Jobs et Connectix est une sociĂ©tĂ© connue notamment pour une application trĂšs employĂ©e Ă une Ă©poque, Virtual PC. Pourtant, Virtual Game Station n'Ă©mule pas un PC, mais une console : la premiĂšre PlayStation.

Cet Ă©mulateur commercial date de 1998 et est une vĂ©ritable tour de force pour l'Ă©poque : il permet de jouer aux nombreux titres de la premiĂšre PlayStation sur n'importe quel Mac Ă©quipĂ© d'une puce G31, Ă pleine vitesse et sans devoir chercher le BIOS ou un fichier ISO. Il suffit en effet d'insĂ©rer un disque de PlayStation dans votre Mac2 â la couleur noire des disques n'est qu'un artifice commercial â et de jouer. La compatibilitĂ© est trĂšs bonne pour l'Ă©poque, et (surtout) l'Ă©mulateur permet d'excellentes performances. Un iMac Ă©quipĂ© d'un G3 Ă 233 MHz et de sa carte graphique ATi exĂ©cute la majoritĂ© des jeux Ă pleine vitesse.

C'est notamment grĂące Ă Eric Traut, un ingĂ©nieur qui a travaillĂ© chez Apple sur l'Ă©mulateur qui permettait de lancer les applications pensĂ©es pour les 68000 de Motorola sur les PowerPC. Chez Connectix, il a dĂ©veloppĂ© un Ă©mulateur capable d'exĂ©cuter le code MIPS du CPU de la PlayStation sur un PowerPC G3. En 1998, c'est assez incroyable : la console est en vente seulement depuis quelques annĂ©es, et la PlayStation 2 n'est encore qu'un rĂȘve. Pour se donner une idĂ©e, il faut par exemple imaginer un Ă©mulateur de PlayStation 5 capable de faire tourner n'importe quel jeu sur un Mac Apple Silicon standard Ă pleine vitesse.

Un problÚme légal
Aaron Giles, un des dĂ©veloppeurs, explique bien le problĂšme. Ă l'origine, Connectix avait approchĂ© Sony pour tenter de proposer son Ă©mulateur en partenariat avec eux, pour obtenir une licence sur le BIOS de la console. C'Ă©tait une idĂ©e un peu idiote, et Sony a menacĂ© directement la sociĂ©tĂ©. Connectix a donc fait de la rĂ©tro-ingĂ©nierie sur le BIOS pour proposer son Ă©quivalent de façon lĂ©gal, ce qui n'a pas empĂȘchĂ© Sony d'attaquer. Pour Connectix, le procĂšs a Ă©tĂ© un dĂ©sastre : il a empĂȘchĂ© la commercialisation en masse de l'Ă©mulateur pendant un temps. Mais pour le monde de l'Ă©mulation en gĂ©nĂ©ral, ce procĂšs â avec celui contre Bleem, un autre Ă©mulateur de PlayStation â a permis de poser des bases lĂ©gales aux Ătats-Unis. Connectix a en effet gagnĂ© et le procĂšs a surtout permis de clarifier un point : un Ă©mulateur est lĂ©gal tant qu'il ne contient pas de code protĂ©gĂ© par des droits d'auteur. Dans le cas de la PlayStation, proposer un Ă©mulateur livrĂ© avec le BIOS de la console (qui appartient Ă Sony) est illĂ©gal, mais dĂ©velopper un BIOS compatible3 ne l'est pas.

Ă la fin, c'est tout de mĂȘme Sony qui gagne : les ventes ont Ă©tĂ© bloquĂ©es pendant un moment, et Sony a ensuite proposĂ© la PlayStation 2 et achetĂ© Virtual Game Station en 20014.
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Ă l'exception des cartes d'accĂ©lĂ©ration, du PowerBook G3 Kanga et du PowerBook G3 WallStreet dotĂ© d'un CPU Ă 233 MHz sans cache, une sorte de Celeron G3. â©ïž
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Le programme empĂȘche en thĂ©orie l'utilisation de copies de jeux. Il n'intĂšgre pas les mĂȘmes protections que la console originale, mais tente tout de mĂȘme de dĂ©tecter les copies sur CD-R, probablement pour Ă©viter les procĂšs de la part de Sony. â©ïž
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La technique classique porte le nom de clean room : une Ă©quipe analyse le fonctionnement du BIOS et explique exactement ce qu'il fait, quand une autre Ă©quipe (totalement sĂ©parĂ©e) part des explications et code un BIOS Ă©quivalent, sans avoir accĂšs Ă celui d'origine. â©ïž
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Et il a peut-ĂȘtre Ă©tĂ© intĂ©grĂ© dans les derniĂšres PlayStation 2, qui intĂšgrent un processeur PowerPC pour l'Ă©mulation de la premiĂšre PlayStation, plutĂŽt que de reposer sur un CPU MIPS pour une rĂ©trocompatibilitĂ© directe. â©ïž