Fabien Mandon, nouveau chef d’état-major des armées : ces défis brûlants qui l'attendent
Les derniers jours d’août, il a multiplié les allers-retours entre l’Elysée et le siège des armées, afin d’être parfaitement au point au moment de prendre ses fonctions de chef d’état-major des armées (CEMA), ce lundi 1er septembre. Tout en assurant jusqu’au bout ses responsabilités de chef d’état-major particulier du président, le général Fabien Mandon a pris la mesure des responsabilités qui l’attendent en tant que premier militaire de France, auprès de celui qu’il va remplacer, Thierry Burkhard. Ce dernier lui a détaillé les sujets en cours et les décisions qu’il y aura prochainement à prendre.
Les premiers déplacements du nouveau CEMA devraient être consacrés aux troupes qu’il dirige, comme le veut l’usage – la France compte 200 000 militaires et 40 000 réservistes. En plus d’une visite aux soldats de l’opération Sentinelle, il devrait se rendre auprès d’unités à l’étranger. Passé cette première séquence, il va devoir faire avancer les nombreux dossiers empilés sur son bureau. Avec un avantage : il les connaît déjà très bien, pour avoir officié comme premier collaborateur militaire d’Emmanuel Macron les deux dernières années.
Sur le plan international, il va continuer à mener, avec son homologue britannique, les consultations régulières de la "coalition des volontaires" regroupant une trentaine de pays alliés de l’Ukraine. Si la France est prête à engager des troupes sur le terrain pour apporter des garanties de sécurité à l’Ukraine, d’autres se montrent frileux, ou n’envisagent qu’une aide à distance. Ces derniers jours, au siège de Balard, dans le XVe arrondissement de Paris, on se satisfaisait d’une bonne nouvelle : Donald Trump a déclaré que les Etats-Unis, tout en refusant d’envoyer des soldats, pourraient fournir un soutien, notamment aérien, à Kiev, en cas de cessez-le-feu et de présence militaire occidentale au sol. Pour certains alliés, c’est un préalable à toute participation.
Sur le plan national, ce n’est pas moins compliqué. Le CEMA risque de voir la question budgétaire se corser avec la chute possible du gouvernement, le 8 septembre – le Premier ministre, François Bayrou, a appelé un vote de confiance ce jour-là à l’Assemblée nationale. Lors de son discours aux armées du 13 juillet, Emmanuel Macron, en insistant sur le fait que "jamais, depuis 1945, la liberté n’avait été si menacée", a appelé à un effort financier supplémentaire de 3,5 milliards d’euros en 2026 au profit de la défense et de 3 milliards en 2027. L’instabilité politique pourrait remettre en cause cette exigence présidentielle à laquelle Matignon a souscrit.
"Le respect intégral de la loi de programmation militaire 2024-2030 et des augmentations annoncées par le président sont impératives pour passer les contrats avec les industriels et tenir ensuite les engagements annoncés, explique le général (2S) Jérôme Pellistrandi, rédacteur en chef de la Revue Défense nationale. Il en va de notre propre sécurité, les menaces ne cessent de croître, la guerre hybride menée par la Russie est une réalité et continue de s’amplifier." Ces augmentations doivent permettre d’accélérer la modernisation des outils militaires et de tenir la promesse collective, à l’Otan, d’une hausse de la part de PIB consacré à la défense à 3,5 % d’ici 2035.
Si le prochain projet de loi de finances passe sans encombre, le CEMA pourra plus aisément mettre en place un nouveau format d’engagement : le service militaire volontaire (SMV). Le président y tient particulièrement et devrait donner "[ses] orientations et [ses] réflexions en ce sens à l’automne", comme il l’a indiqué lors de son discours de juillet. "On ne peut plus se reposer sur le modèle décidé à la fin des années 1990, quand Jacques Chirac a mis un terme à la conscription au profit d’une armée de professionnels, estime Jérôme Pellistrandi. Plus largement, il y a un travail à mener autour du recrutement sous toutes ses formes."
Sur ce sujet, le défi consiste à trouver la meilleure utilisation possible des réservistes – l’objectif est de 80 000 en 2030 contre moins de 50 000 actuellement – et de ces volontaires qui s’engageraient pour une année. Selon nos informations, les forces terrestres envisagent l’accueil de 10 000 jeunes faisant leur SMV par an. Cette armée plus "mixte", dont le modèle reste à trouver, pourrait être l’un des legs importants du mandat qui s’ouvre pour le général Mandon.
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