Donald Trump supprime l’indépendance des agences de régulation FTC, FCC et SEC
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Les agences FTC, FCC et SEC régulent les marchés américains et surveillent notamment les entreprises américaines du numérique. Elles opéraient jusque ici de manière indépendante du pouvoir exécutif fédéral américain. Un décret de Donald Trump publié le 18 février dernier veut leur imposer une supervision présidentielle.
La FTC, la FCC et la SEC sont des agences américaines importantes dans la régulation du monde économique puisqu’elles ont un pouvoir de contrôle sur les entreprises américaines. C’est au président des États-Unis qu’il revient de nommer le ou la responsable de chacune d’entre elles. Donald Trump a, par exemple, nommé à la FTC Andrew Ferguson, Brendan Carr à la tête de la FCC et Mark Uyeda à celle de la SEC. Mais ces agences avaient, jusque-là, une certaine indépendance dans leurs décisions et pouvaient être en désaccord avec le président des États-Unis.
Trois agences importantes dans l’écosystème du numérique
La FTC (Federal Trade Commission), qui a plus de 110 ans, fait appliquer le droit de la consommation américain et contrôle notamment les pratiques anticoncurrentielles. Encore récemment, cette agence ouvrait une enquête sur les pratiques de Microsoft sur le cloud. Elle est aussi intervenue en décembre pour interdire à trois entreprises de vendre des données de localisation sensibles. En 2020, elle accusait Facebook de « maintenir illégalement son monopole », sans pour autant aller jusqu’à imposer à Meta la cession d’actifs comme Instagram et WhatsApp, comme on pouvait l’imaginer.
La FCC (Federal Communications Commission) régule les télécoms américains et a, par exemple, rétabli la réglementation sur la neutralité du net aux États-Unis en avril 2024. Elle travaille sur la sécurité des réseaux mobiles. C’est aussi elle qui régule le lancement des satellites de communication comme ceux de Starlink.
Enfin, la SEC (Securities and Exchange Commission) est l’autorité américaine des marchés financiers. En 2018, celle-ci avait par exemple décidé de deux amendes contre Tesla et Elon Musk d’un montant total de 40 millions de dollars après avoir accusé le dirigeant de l’entreprise de fraude. Avant de s’accorder avec Elon Musk et l’entreprise sur ces montants, l’autorité avait demandé qu’il soit interdit de fonctions dirigeantes dans une société cotée. Finalement, Elon Musk avait accepté de quitter la présidence de l’entreprise tout en gardant les fonctions de DG.
Supervisé et contrôlé par le président
Mais comme le rapporte ArsTechnica, Donald Trump a donc publié un décret qui affirme que « les fonctionnaires qui exercent de vastes pouvoirs exécutifs doivent être supervisés et contrôlés par le président élu par le peuple ». La Maison-Blanche a accompagné ce décret d’un texte d’explication dans lequel elle affirme qu’il s’applique aux « agences dites indépendantes comme la Federal Trade Commission (FTC), la Federal Communications Commission (FCC) et la Securities and Exchange Commission (SEC) ».
Elle ajoute que « toutes les agences doivent (1) soumettre leurs projets de régulation à l’examen de la Maison-Blanche – sans aucune exception pour les agences dites indépendantes, à l’exception des fonctions de politique monétaire de la Réserve fédérale ; et (2) consulter la Maison-Blanche sur leurs priorités et leurs plans stratégiques, et la Maison-Blanche fixera leurs normes de performance ».
Pas d’interprétation légale différente de celles du Président ou du procureur général
Le décret de Donald Trump interdit aussi à tout employé d’une agence fédérale quelle qu’elle soit (l’une des trois citées plus haut, mais aussi les autres agences fédérales) de donner un avis différent de Donald Trump : « aucun employé de la branche exécutive agissant à titre officiel ne peut avancer une interprétation de la loi comme étant la position des États-Unis allant à l’encontre de l’avis du président ou du procureur général sur une question de droit, y compris, mais sans s’y limiter, l’émission de règlements, d’orientations et de positions avancées dans le cadre d’un litige, à moins d’y être autorisé par le président ou par écrit par le procureur général ».
« Dans ce dernier décret, le régime Trump prétend s’approprier le pouvoir que le Congrès a délégué aux agences de régulation indépendantes et, tel qu’il est rédigé, déclare que l’interprétation de la loi par la Maison-Blanche fait « autorité », sans aucune mention des tribunaux », explique à ArsTechnica, John Bergmayer responsable juridique de l’ONG Public Knowledge. Il ajoute que, « bien entendu, le président n’est pas, et n’a jamais été, l’arbitre final de ce qui est légal. Les avocats qui travaillent pour le gouvernement doivent leur allégeance au peuple américain, et non au président Donald J. Trump ».
Nos confrères pointent que l’entourage de Donald Trump affichait déjà une vision différente du sujet avant son investiture. Le tout juste nommé responsable du Bureau de la gestion et du budget américain, Russ Vought, affirmait, dans une interview donnée à Tucker Carlson, « il n’existe pas d’agences indépendantes. Le Congrès a pu les considérer comme telles – la SEC ou la FCC, la CFPB, toute la soupe à l’alphabet – mais ce n’est pas quelque chose que la Constitution comprend. Il peut donc y avoir des stratégies différentes avec chacune d’entre elles sur la manière de les démanteler, mais en tant qu’administration, la notion même d’agence indépendante devrait être rejetée ».
Selon le Wall Street Journal, ce décret touche aussi l’agence, jusque-là indépendante, chargée d’administrer et de faire appliquer la loi sur le financement des élections fédérales dans ce pays.