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Crise de la natalité en Italie : pourquoi Giorgia Meloni n’arrive pas à inverser la tendance

Même en pleines Première et Seconde Guerres mondiales, les Italiens faisaient plus d’enfants - deux fois plus qu’aujourd’hui même, souligne Massimiliano Valerii, chercheur du centre Censis, dans le Corriere della Sera. Selon les données de l’Institut national des statistiques italien (Istat), le nombre de naissances a continué de chuter en 2024 et la fécondité moyenne a atteint le niveau le plus bas historique, avec 1,18 enfant par femme. Un coup dur pour la politique nataliste de Giorgia Meloni, qui avait fait de la crise démographique italienne une priorité politique.

Concrètement, environ 370 000 naissances ont été enregistrées en 2024, contre 380 000 l’année précédente, soit une baisse de 2,6 %. Il y a un peu plus de quinze ans, en 2008, c’était 576 000 bébés qui avaient vu le jour de l’autre côté des Alpes. Et depuis, ce nombre n’a fait que diminuer.

"Ce déclin s’est accentué, car non seulement le nombre d’enfants par femme diminue, mais aussi le nombre de femmes potentiellement en âge d’avoir des enfants. Les Italiennes âgées de 18 à 50 ans sont nées alors que la natalité avait déjà commencé à baisser", explique le quotidien italien. En parallèle, la naissance du premier enfant se fait de plus en plus tard : 32 ans.

Un phénomène partagé en Europe

Mais l’Italie n’est pas un cas isolé : Malte a ainsi le taux de fécondité le plus bas de l’Union européenne (1,06 naissance par femme en 2023, ), suivi de l’Espagne (1,12) et de la Lituanie (1,18), selon Eurostat. En France, (pas si mal positionnée dans le classement européen avec 1,66 enfant par femme), le gouvernement parle, quant à lui, de "réarmement démographique".

L’UE a connu une baisse quasi continue de la natalité depuis 2010, tombant à 1,38 naissance par femme en moyenne en 2023. Au contraire, on estime "qu'un taux de fécondité total d’environ 2,1 naissances par femme est le niveau de remplacement dans les pays développés […] en l’absence de migration", et qu’au-dessous de 1,3 enfant par femme, la tendance s’approfondit dangereusement, explique l’office de statistique.

Problème, "le déclin démographique menace la pérennité du système de retraite, la croissance économique et les services publics essentiels", résume le Forum des associations familiales italiennes dans le Corriere. Le vieillissement de la population s’est parallèlement poursuivi en Italie, l’âge moyen de la population au 1er janvier 2025 étant de 46,8 ans, en hausse de 0,2 point sur un an. Le pays pourrait perdre 12 millions d’habitants, d’ici 2070, selon l’Istat.

"Priorité absolue"

Pourtant, inverser la balance faisait partie de la "priorité absolue" de la Première ministre italienne, Giorgia Meloni, qui rejette la solution migratoire. Et pour cause, son mouvement, Fratelli d'Italia, adhère à la théorie du "grand remplacement" des Européens par les immigrés, voyant les problèmes de natalité non plus seulement sous un prisme socio-économique, mais également comme un problème civilisationnel.

Mais alors que le gouvernement avait annoncé de grandes mesures de soutien aux familles, "le budget 2025 prévoit des dispositifs de portée limitée, dont une aide financière aux jeunes parents et une extension des congés parentaux", remarque Le Monde.

Problèmes structurels

Tandis que 260 000 places en crèche et en maternelle devaient ouvrir, le gouvernement a revu ces objectifs à 150 000. "Pas de quoi relancer la démographie dans un pays grevé par une dette publique abyssale (134,8 % du produit intérieur brut en 2023), limitant les marges de manœuvre", note le quotidien français. Le gouvernement multiplie donc les campagnes politiques en faveur de la procréation, avec un accent moralisateur concernant la famille et la maternité. "Sono una madre" répète en boucle Giorgia Meloni, mettant en avant son rôle de cheffe de famille.

Mais les causes sont plus profondes : économiques, d’abord, avec 10 % des Italiens qui vivent sous le seuil de pauvreté, selon l’Istat, mais aussi la difficulté pour les femmes à concilier vie professionnelle et vie familiale. Les infrastructures, comme les maternelles publiques, sont trop peu nombreuses, faisant grimper la facture pour les familles. En clair : "en Italie, soit tu veux gagner de l’argent, avoir une carrière, soit tu veux devenir mère. Mais les deux sont incompatibles", résume Francesca, mère d’une trentaine d’années, dans un article du Parisien consacré à la question.

© Eliano Imperato / Controluce via AFP

L'Italie connaît parmi les taux de fécondité les plus faibles de l'Union européenne (Photo d'illustration).
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L'armée française doit être "prête à un choc dans trois, quatre ans" face à la Russie

L'armée française doit être "prête à un choc dans trois, quatre ans" face à la Russie, qui "peut être tentée de poursuivre la guerre sur notre continent", a affirmé mercredi 22 octobre le chef d'état-major des Armées français, le général Fabien Mandon, pour justifier "l'effort de réarmement" du pays.

La Russie serait prête à "entrer en conflit militaire direct avec l'Otan", selon les services secrets allemands

"Le premier objectif que j'ai donné aux armées, c'est de se tenir prêtes à un choc dans trois, quatre ans qui serait une forme de test - peut-être le test existe déjà sous des formes hybrides - mais peut-être (quelque chose de) plus violent", a déclaré le plus haut gradé français devant les députés de la commission de la Défense. "La Russie est un pays qui peut être tenté de poursuivre la guerre sur notre continent et c'est l'élément déterminant dans ce que je prépare", a ajouté le général qui a pris la tête des armées françaises le 1er septembre.

Son analyse rejoint notamment celle des services secrets allemands qui ont mis en garde la semaine passée contre la Russie, prête selon eux à "entrer en conflit militaire direct avec l'Otan", une menace qui pourrait se concrétiser avant 2029.

Augmentation du budget militaire

Moscou a la "perception d'une Europe collectivement faible", selon le général Mandon, qui observe une "désinhibition du recours à la force" côté russe. Pourtant, "on a tout pour être sûrs de nous", a-t-il martelé, rappelant que du point de vue économique, démographique ou industriel, les Européens l'emportaient sur la Russie.

"La Russie ne peut pas nous faire peur si on a envie de se défendre", a-t-il lancé. L'augmentation du budget militaire est donc pour lui "fondamentale, déjà dans les perceptions". "Si nos rivaux potentiels, nos adversaires perçoivent que nous consacrons un effort pour nous défendre et que nous avons cette détermination, alors il peut renoncer. S'il a le sentiment qu'on n'est pas prêt à se défendre, je ne vois pas ce qui peut l'arrêter", a-t-il développé.

Le projet de budget de la défense prévoit de le porter à 57,1 milliards d'euros pour 2026, soit une hausse de 13 %, portant l'effort budgétaire pour les armées à 2,2 % du PIB, selon la ministre française des Armées Catherine Vautrin. Au-delà de la menace posée par la Russie, ce réarmement est selon le général Mandon rendu nécessaire par la superposition des crises et des menaces, du terrorisme au Moyen-Orient. Selon lui, "ça craque de partout".

© Ludovic MARIN / AFP

Le chef d'état-major des Armées français, le général Fabien Mandon (à droite), le 22 octobre 2025 à Paris.
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Allemagne : l'extrême droite accusée d'espionner au profit de la Russie

Le parti d'extrême droite Alternative pour l'Allemagne (AfD), en plein essor, s'est vu accusé mercredi 22 octobre d'espionnage au profit de la Russie et d'autres Etats autoritaires, des adversaires politiques pointant du doigt des questions parlementaires "problématiques". Ce parti prorusse et anti-migrants a rejeté ces accusations, mais plusieurs de ses personnalités entretiennent des liens étroits et parfois controversés avec la Russie ou la Chine.

Cette fois-ci, des élus de la région orientale de Thuringe, où l'AfD est la première force politique, sont suspectés d'utiliser leurs fonctions pour obtenir des informations sensibles sur la police, l'armée ou les infrastructures susceptibles d'intéresser des puissances étrangères.

La Russie est pour sa part accusée, malgré ses dénégations, d'une vaste campagne d'espionnage, de désinformation et de sabotage en Allemagne comme ailleurs en Europe. "L'AfD abuse du droit parlementaire de poser des questions pour enquêter manifestement sur nos infrastructures critiques", a accusé Georg Maier, le ministre de l'Intérieur du Land de Thuringe, partageant son "inquiétude croissante" avec le journal économique Handelsblatt. "L'impression qui se dégage est que l'AfD travaille, avec ses questions, à partir d'une liste commandée par le Kremlin", selon lui.

Un intérêt particulier pour la défense antidrones

Le président de la commission de contrôle des services secrets au Bundestag, le conservateur Marc Henrichmann, a lui appelé les services de renseignement allemands à enquêter plus précisément sur ces "menaces internes et externes". "Ce qui sera crucial, c'est de déterminer si, ou dans quelle mesure, l'AfD continuera à se faire mener en laisse par le Kremlin", a-t-il jugé. D'après Georg Maier, issu du parti social-démocrate (SPD), l'AfD en Thuringe a posé ces 12 derniers mois 47 questions sur les infrastructures critiques, avec "une intensité et une précision croissantes".

Infrastructures de transport ou numériques, approvisionnement énergétique ou en eau... Le parti montre notamment "un intérêt particulier pour les technologies et équipements de la police", en particulier pour la défense antidrones, mais aussi pour l'armée et la protection civile, selon lui.

Interrogé par l'AFP, Konstantin von Notz, député des Verts et vice-président de la commission de contrôle des services de renseignement, a relevé qu'en avril 2024, lors d'un débat au Bundestag, des "questions parlementaires problématiques" de l'AfD avaient déjà été signalées, avec le soupçon qu'elles soient posées au nom "d'États autoritaires".

Selon lui, la même tactique a été constatée dans d'autres pays européens, preuve d'une "démarche ciblée à l'échelle européenne". "Il semble se confirmer que des représentants de l'AfD participent délibérément à cette stratégie de déstabilisation de notre pays, orchestrée par plusieurs États autoritaires", a-t-il dit à l'AFP, appelant les autorités allemandes à agir "avec détermination".

Des accusations rejetées par l'AfD

Le premier secrétaire du groupe AfD au Bundestag, Bernd Baumann, interrogé par l'AFP, a rejeté ces accusations, visant selon lui à décrédibiliser l'AfD, arrivée 2e aux législatives en février et en plein essor dans les sondages depuis. Les questions des élus "sur l’architecture et les infrastructures de sécurité de notre pays (...) sont posées par l'AfD dans l’intérêt des citoyens", a-t-il affirmé. "Les faits révélés ne sont en rien secrets (...) Que les autres partis cherchent maintenant à en faire une activité d'espionnage est totalement ridicule et reflète leur désespoir face aux intentions de vote en faveur de l'AfD", a ajouté le député.

Contacté par l'AFP, le renseignement extérieur allemand n'a pas souhaité commenter. Le renseignement intérieur n'a pas immédiatement répondu. Un porte-parole de la chancellerie s'est lui borné à dire avoir pris connaissances des accusations pesant contre l'AfD. Le chancelier allemand Friedrich Merz a désigné lundi le parti d'extrême droite comme son "principal adversaire" à l'aube d'une année électorale chargée, avec cinq des 16 Länder allemands qui se rendront aux urnes. L'AfD espère au moins gagner dans deux d'entre eux, à l'Est, et atteindre des scores records dans les autres.

© afp.com/Tobias SCHWARZ

L'entrée d'un bâtiment abritant le siège du parti d'extrême droite allemand Alternative pour l'Allemagne (AfD) à Berlin, le 2 mai 2025
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Stress post-traumatique, alcoolisme, pensées suicidaires : la guerre en Ukraine ronge les soldats russes

"Depuis deux mois, je me réveille en sueur, à cause du même rêve. Je suis capturé, je vois des hommes autour de moi se faire tuer, et puis je suis tué aussi". Ce récit anonyme publié sur un réseau social russe, serait celui d’un militaire, déclaré inapte au combat après son passage par le front ukrainien.

En cette quatrième année d’invasion russe en Ukraine, de plus en plus de soldats russes se voient diagnostiquer des maladies psychiatriques : stress post-traumatique, alcoolisme, pensées suicidaires… Une étude menée par une quinzaine de psychiatres et médecins, et relayée par The Moscow Times, documente l’ampleur du problème.

On apprend ainsi que, sur près de 150 militaires admis dans un hôpital psychiatrique de Moscou, entre 2023 et 2024, environ la moitié présente un syndrome de stress post-traumatique (SSPT). Le symptôme le plus fréquent, rapporté par 70 % de ces patients, était des flash-backs intrusifs de combats.

Pensées suicidaires

Les autres malades, à qui il n’était pas directement diagnostiqué un SSPT, souffraient quant à eux "de troubles mentaux causés par des lésions cérébrales (26 %), de troubles affectifs (20 %), de troubles de type schizophrènes ou délirants (15 %) ou de dépendance à l’alcool (10 %)", liste The Moscow Times. 75 % souffraient d’anxiété, et la moitié de dépression et d’insomnie. Les psychiatres ont également noté des difficultés de communication avec leurs proches et des abus d’alcool.

L’âge moyen de ces soldats est de 34 ans. Certains avaient déjà combattu dans la région du Donbass, dans l’est de l’Ukraine, avant l’invasion russe de 2022.

"Comment puis-je être libéré pour raisons médicales ?", s’interroge un soldat sur un forum. "Plus précisément, comment prouver [à mes commandants] que je ne suis pas stable et que je perds la raison ? […] Trois ans sans repos ni famille, et parfois, au combat, on perd la boule. J’ai besoin d’un psychiatre ou d’un sanatorium", appelle-t-il à l’aide.

Sentiment de déconnexion

Une autre étude, réalisée entre 2022 et 2024 dans un hôpital psychiatrique de Novossibirsk (Sibérie), a établi que parmi 130 militaires internés, 24 % avaient été admis après une tentative de suicide. Chez les soldats présentant des symptômes de stress post-traumatique, "le risque de suicide était multiplié par cinq".

Selon les psychologues, un aspect qui revient souvent dans les discussions avec les patients est le sentiment de déconnexion du reste de la population russe, presque étrangère à la guerre. "Lorsque les militaires sont soignés à Moscou, les passants les remercient parfois pour leur rôle. Mais dans les villes plus petites, ils ont l’impression d’être délaissés, comme si leur contribution ne valait rien", a déclaré un psychologue russe qui travaille avec des vétérans.

Si de plus en plus de soldats revenant du front présentent ces symptômes, il reste difficile de quantifier le phénomène, les soldats cherchant rarement une aide psychologique par eux-mêmes. Cela s’explique par la pression "liée aux notions traditionnelles de masculinité", la méfiance envers le système de santé mentale russe et la crainte que cela n’impacte leur carrière militaire, explique le quotidien russe.

© afp.com/Kirill KUDRYAVTSEV

Des soldats russes se préparent à la répétition générale du défilé du Jour de la Victoire, le 7 mai 2025 à Moscou
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Syrie : les forces pro-gouvernementales encerclent un camp de djihadistes français

Un camp de djihadistes français encerclé par les forces gouvernementales en Syrie. Les autorités du régime d’Ahmed al-Charaa mènent ce mercredi 22 octobre une opération visant le groupe emmené par Oumar Diaby, alias Omar Omsen, djihadiste franco-sénégalais. Ce dernier est accusé d’avoir enlevé une fillette des mains de sa mère, dans le nord-ouest de la Syrie. Depuis, il s’est retranché avec plusieurs autres djihadistes et leurs familles dans un camp, situé proche de la frontière avec la Turquie.

Un groupe de djihadistes français

Le général Ghassan Bakir, commandant des forces de la sécurité intérieure de la province d’Idleb, a indiqué que les autorités avaient demandé à Oumar Diaby de se livrer, mais qu’il avait refusé. Les forces gouvernementales l’accusent aussi de leur tirer dessus et "d’utiliser les civils comme boucliers humains". Le fils d’Oumar Diaby, un djihadiste qui se fait appeler Jibril al-Mouhajer, a déclaré à l’AFP que "les affrontements ont commencé après minuit et se poursuivent". Toujours auprès de l’agence de presse, un habitant de la région a par ailleurs assuré entendre des explosions et avoir vu les forces gouvernementales acheminer des renforts vers le camp depuis mardi.

Oumar Diaby, ancien délinquant, est devenu prêcheur en Syrie. Qualifié en septembre 2016 par les États-Unis de "terroriste international", il est soupçonné d’avoir convaincu de nombreux Français de rejoindre la Syrie. Dans le pays, les djihadistes originaires de l’Hexagone se font appeler "Firqat al Ghouraba" (le groupe des étrangers). Beaucoup ont afflué durant la guerre civile, qui a éclaté après la répression par l’ex-président Bachar el-Assad d’un soulèvement populaire en 2011. Le conflit a pris fin après le renversement du dictateur par Ahmad al-Charaa et les rebelles qui lui étaient affiliés, en décembre 2024.

Passif entre Oumar Diaby et l’ex-groupe d’Ahmed al-Charaa

Le nouveau président syrien est lui-même un ancien djihadiste. Avant son accession au pouvoir, il se trouvait à la tête du groupe Hayat Tahrir al-Cham (HTC), issu d’une ancienne branche d’Al-Qaïda. Comme d’autres groupes extrémistes, le groupe d’Oumar Diaby semble être tombé en disgrâce depuis l’accession au pouvoir d’Ahmad al-Charaa, qui tente aujourd’hui de faire oublier son passé djihadiste. Le terroriste français avait eu des déboires avec cette organisation, qui contrôlait l’enclave rebelle d’Idleb. HTC a été dissoute au moment de l’accession au pouvoir à Damas du chef rebelle, autrefois connu sous le nom d’Abou Mohammed al-Joulani.

Selon les chiffres transmis par des sources sécuritaires françaises en décembre 2024 à l’AFP, une "petite cinquantaine" de personnes feraient partie du groupe d’Oumar Diaby. Celui-ci fait par ailleurs l’objet d’un mandat d’arrêt émis par la justice française. "Sur les 1 500 Français qui sont partis faire le djihad dans les années 2000, on compte 390 revenants en France, 500 décédés, une grosse centaine dans la poche d’Idleb, environ 150 détenus ou retenus dans le nord-est syrien et en Irak, mais aussi 300 disparus", avait détaillé le procureur antiterroriste français, Olivier Christen, dans un entretien au Figaro publié peu après la chute de Bachar el-Assad.

© AFP

Des forces gouvernementales syriennes dans le sud du pays, le 21 juillet 2025. (Photo d'illustration)
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Renseignement : les Pays-Bas "ne partagent plus certaines choses" avec les États-Unis

Des craintes qui se renforcent. Les Pays-Bas restreignent désormais l’accès des États-Unis aux informations collectées par leurs agences de renseignement. "Parfois, nous ne partageons plus certaines choses", a souligné Peter Reesink, chef du renseignement militaire néerlandais, dans une interview accordée samedi 18 octobre au journal De Volkskrant. Un entretien réalisé de manière conjointe avec son homologue de la sécurité intérieure, Erik Akerboom. "Nous ne pouvons pas dire ce que nous partageons ou non" avec les États-Unis, a complété ce dernier. "Mais nous pouvons dire que nous sommes plus critiques [qu’il y a un an]."

Méfiance assumée

Ces propos constituent pour la première fois un signe d’une méfiance assumée de la part de services de renseignement européens vis-à-vis de leurs partenaires américains. Depuis le retour de Donald Trump à la Maison-Blanche, les liens des 27 membres de l’Union européenne avec Washington se sont étiolés. Le discours virulent tenu en février dernier à Munich (Allemagne) par le vice-président américain J.D. Vance à l’égard de ses alliés du Vieux continent incarne ce climat de suspicion grandissant.

L’étrange contexte lié à cette relation transatlantique dégradée se répercute ainsi sur les rapports entre agences de renseignement. Certes, Peter Reesink explique avoir été rassuré par une visite réalisée "il y a quelques mois" à la NSA et à la CIA américaines. "Nos liens sont bons et le resteront", assure-t-il. Avant d’immédiatement contrebalancer : "Cela ne change rien au fait que nous évaluons régulièrement notre collaboration". Le limogeage au printemps dernier de l’ex-patron de la NSA, Timothy Haugh, sur ordre de l’administration Trump, paraît avoir échaudé le responsable du renseignement militaire néerlandais, qui fait part de sa "grande tristesse" à ce propos.

"Politisation" du renseignement

Questionné au sujet du partage avec les États-Unis de renseignements néerlandais liés à la Russie, Peter Reesink explique aussi que la pertinence de celui-ci "sera pesée" avant tout envoi. Son collègue du renseignement intérieur constate de façon plus générale un changement de méthode du côté américain ces derniers mois, contraignant les autorités néerlandaises à réévaluer leurs pratiques vis-à-vis de Washington. "Nous ne jugeons pas politiquement ce que nous voyons, mais nous analysons nos expériences avec les services", précise Erik Akerboom. Et nous sommes très attentifs à la politisation de nos services de renseignement et aux violations des droits humains."

Les Pays-Bas sont traditionnellement de proches alliés des États-Unis. Mais la reconfiguration des relations diplomatiques de part et d’autre de l’Atlantique conduit Amsterdam, comme beaucoup d’autres nations du continent, à adopter de nouvelles tactiques en matière de renseignement. Ce mercredi, Politico rapporte ainsi que la mise à distance américaine de l’Europe a poussé les agences spécialisées des 27 à réinventer leur façon de travailler ensemble, en particulier via différents nouveaux groupes de partage, réunissant chacun une poignée de pays.

Vers une CIA européenne ?

Mais le rôle de Bruxelles dans cette transmission de données sensibles demeure aujourd’hui limité. Comme relevé par le média américain, l’ex-président finlandais Sauli Niinistö avait rendu l’an dernier à la Commission européenne un rapport promouvant la création d’une agence de renseignement à l’échelle européenne, sur le modèle d’une structure de type CIA. L’objectif ? Mettre en place un "service de coopération en matière de renseignement à part entière au niveau de l’UE, qui peut répondre à la fois aux besoins stratégiques et opérationnels".

"Nous devons nous faire confiance", exhortait Sauli Niinistö au moment de la remise de son travail, préconisant cette solution notamment face aux risques liés à la menace russe à l’est du continent. Preuve du caractère inflammable d’un tel projet, le Premier ministre tchèque Petr Fiala avait à l’époque d’emblée rejeté la proposition, la jugeant "pas réaliste".

© Robin van Lonkhuijsen / ANP / AFP

Erik Akerboom, directeur des services de renseignement intérieur néerlandais, ici lors d'une prise de parole à Zoetermeer (Pays-Bas), le 17 avril 2023
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Gaza : J.D. Vance dit que la tâche sera "très difficile" pour désarmer le Hamas

En visite en Israël, le vice-président américain J.D. Vance, qui doit rencontrer ce mercredi 22 octobre Benyamin Netanyahou, s’est dit mardi "très optimiste" sur le maintien du cessez-le-feu à Gaza, sur fond de pressions maximales sur le Hamas, que les Etats-Unis et Israël ont accusé de violer l’accord de paix, ce que le mouvement palestinien a démenti. "Chaque fois qu’il y a un acte de violence, il y a cette tendance à dire : 'oh, c’est la fin du cessez-le-feu, c’est la fin du plan de paix'. Ce n’est pas la fin", a déclaré J.D. Vance. Celui-ci a aussi affirmé que Washington n’avait pas fixé de date butoir pour le désarmement du groupe islamiste, prévu par le plan du président américain Donald Trump, et que les Etats-Unis n’enverraient pas de troupes sur le terrain.

Les infos à retenir

⇒ J.D. Vance dit que la tâche sera "très difficile" pour désarmer le Hamas

⇒ Israël a identifié les corps de deux nouveaux otages restitués par le Hamas

⇒ La Knesset vote pour l'examen de projets de loi visant à annexer la Cisjordanie

Le plan de trêve à Gaza est insuffisant face au "génocide", selon l'experte de l'ONU Francesca Albanese

L'experte des droits de l'homme de l'ONU, Francesca Albanese, a critiqué mercredi le plan de cessez-le-feu négocié par les Etats-Unis à Gaza comme étant insuffisant pour répondre à ce qu'elle a qualifié de "génocide" du peuple palestinien par les Etats-Unis et Israël.

Une trêve fragile est actuellement en vigueur dans le cadre d'un accord visant à mettre fin à deux ans de guerre entre Israël et le Hamas, qui implique aussi la récupération des otages, la livraison de davantage d'aide à Gaza et la reconstruction à terme du territoire palestinien dévasté.

Le plan est "absolument inadéquat et il n'est pas conforme au droit international", a déclaré Francesca Albanese, la rapporteuse spéciale de l'ONU sur les droits de l'homme dans les territoires palestiniens occupés. Il faudrait un engagement à "mettre fin à l'occupation, mettre fin à l'exploitation des ressources palestiniennes, mettre fin à la colonisation", a-t-elle dit à des journalistes.

Les troupes israéliennes contrôlent actuellement près de la moitié du territoire palestinien. "Ce n'est pas une guerre, c'est un génocide où il y a une détermination à détruire un peuple en tant que tel", a souligné Mme Albanese, qui est mandatée par les Nations Unies mais ne parle pas en leur nom.

La Knesset vote pour l'examen de projets de loi visant à annexer la Cisjordanie

Le Parlement israélien (Knesset) s'est prononcé mercredi pour l'examen de deux projets de loi visant à étendre la souveraineté israélienne en Cisjordanie occupée, en pleine visite du vice-président américain J.D. Vance en Israël.

Le président américain Donald Trump, allié d'Israël dans sa guerre contre le mouvement islamiste Hamas, s'est prononcé contre toute annexion de la Cisjordanie par Israël, que soutient l'extrême droite israélienne. "Je ne permettrai pas à Israël d'annexer la Cisjordanie", a déclaré Trump aux journalistes à la Maison-Blanche le 26 septembre. "Non, je ne le permettrai pas. Cela n'arrivera pas."

Les députés israéliens se sont prononcés sur deux projets de loi en lecture préliminaire, un vote destiné à autoriser l'examen en première lecture des projets de loi. Le premier texte, proposé par le chef du parti nationaliste Israël Beiteinou (opposition), Avigdor Lieberman, visant à étendre la souveraineté israélienne à Maalé Adumim, une colonie de plus de 40.000 habitants située juste à l'est de Jérusalem, a été adopté par 32 députés contre 9.

Le deuxième projet de loi, proposé par le député d'extrême-droite Avi Maoz, lui aussi dans l'opposition, visant à appliquer la souveraineté israélienne sur l'ensemble de la Cisjordanie, a été adopté en lecture préliminaire par 25 députés pour et 24 contre. Selon les médias, le Premier ministre israélien Benyamin Netanyahou avait ordonné aux députés de son parti de s'abstenir pendant les votes.

Marco Rubio est attendu jeudi en Israël

Le secrétaire d'Etat américain Marco Rubio est attendu jeudi en Israël, dans la foulée de la visite du vice-président américain J.D. Vance, a annoncé mercredi le gouvernement israélien. "Le secrétaire d'Etat Marco Rubio est de retour en Israël cette semaine", a indiqué Shosh Bedrosian, la porte-parole du bureau du Premier ministre, lors d'un point presse.

"Il va arriver jeudi" et une rencontre avec le Premier ministre israélien, Benyamin Netanyahou est prévue vendredi, selon la même source, alors que le vice-président J.D. Vance et l'envoyé spécial Steve Witkoff sont en Israël pour promouvoir le plan proposé par l'administration de Donald Trump censé apporter une paix durable à Gaza.

J.D. Vance dit que la tâche sera "très difficile" pour désarmer le Hamas

Le vice-président américain, J.D. Vance, a affirmé mercredi depuis Jérusalem que la tâche sera "très difficile" pour désarmer le Hamas dans la bande de Gaza, ainsi que pour reconstruire le territoire palestinien. "Nous avons une tâche très, très difficile devant nous, qui est de désarmer le Hamas et de reconstruire Gaza, de rendre la vie meilleure pour les gens de Gaza, mais aussi de s'assurer que le Hamas ne soit plus une menace pour nos amis en Israël", a déclaré J.D. Vance à l'issue d'une rencontre avec le Premier ministre israélien, Benyamin Netanyahou.

De nombreux points du plan censé apporter la paix à Gaza, présenté par Donald Trump en septembre restent en suspens, dont la question du désarmement du mouvement islamiste. J.D. Vance a néanmoins affirmé que l'accord de cessez-le-feu représentait "une opportunité" pour Israël de renforcer ses liens avec des pays du Moyen-Orient. Cela pourrait permettre, selon lui, "une structure d'alliance au Moyen-Orient qui perdure, qui résiste, et qui permet aux bonnes personnes de cette région, du monde, de prendre les choses en main".

"Nous sommes en train de créer un lendemain incroyable avec une vision complètement nouvelle" sur "comment avoir un gouvernement civil, sur la manière d'assurer la sécurité là-bas", a déclaré à ses côtés Benyamin Netanyahou. "Ce ne va pas être facile" et cela "va nécessiter beaucoup de travail", mais je pense que c'est possible", a-t-il ajouté.

Le Hamas est en train de "reprendre le contrôle" de Gaza, juge le gouvernement français

Le mouvement islamiste palestinien Hamas est en train de "reprendre le contrôle de Gaza", a déclaré mercredi la porte-parole du gouvernement français, en appelant dans ce contexte à une mise en oeuvre "urgente" des mesures de sécurisation et gouvernance du territoire.

"Le Hamas reprend le contrôle du territoire, des administrations et mène une campagne de répression contre ses opposants après que les Américains lui ont laissé entendre qu'il aurait un peu de temps pour stabiliser la bande de Gaza", a relevé Maud Bregeon à l'issue du Conseil des ministres. "Dans ce contexte, il est urgent de mettre en œuvre la seconde phase du cessez-le-feu, avec donc les trois priorités (...) humanitaire, sécurité et enfin gouvernance", a-t-elle ajouté.

Mardi, Emmanuel Macron avait estimé que le cessez-le-feu restait "très fragile" et appelé à la réouverture des points d'entrée vers le territoire, "une urgence absolue", pour faire entrer l'aide humanitaire.

Israël annonce avoir identifié les corps des otages Tamir Adar et Aryeh Zalmanovich

L’armée israélienne a annoncé mercredi matin avoir identifié deux corps d’otages récupérés à Gaza comme étant ceux de Tamir Adar et Aryeh Zalmanovich.

Tamir Adar, 38 ans, est mort lors de l’attaque en Israël du mouvement islamiste palestinien Hamas le 7 octobre 2023. Aryeh Zalmanovich (également orthographié Arye Zalmanovitz), 85 ans au moment de sa mort selon l’armée israélienne, était agriculteur de profession et un des fondateurs du kibboutz Nir Oz. Il était apparu en 2023 dans une vidéo du Hamas annonçant qu’il avait fait une crise cardiaque, sans que cela puisse être vérifié. Sa mort avait été confirmée en décembre 2023 par le kibboutz Nir Oz.

Aux termes de l’accord qui a instauré le cessez-le-feu, le Hamas a libéré au 13 octobre les 20 otages vivants qu’il détenait depuis son attaque du 7-Octobre. Il devait aussi rendre à cette date tous les corps d’otages, mais il n’en a restitué jusque-là que 15 sur les 28 qu’il retient. En échange des deux nouveaux corps rendus, Israël a restitué ce mercredi 30 corps de Palestiniens, pour un total de 195.

Des militaires britanniques participent à la mission de surveillance du cessez-le-feu

Un "petit nombre" de militaires britanniques participent en Israël à la mission menée par les Etats-Unis de surveillance du cessez-le-feu à Gaza, a indiqué mardi le ministère britannique de la Défense. "Un petit nombre d’officiers britanniques chargés de la planification ont été intégrés au Centre de coordination militaro-civile (CMCC) dirigé par les Etats-Unis", a indiqué le ministère de la Défense dans un communiqué envoyé à l’AFP.

Le ministre britannique de la Défense, John Healey, avait déclaré lundi que la Grande-Bretagne jouerait un "rôle central" dans les efforts déployés à la demande de Washington. "Nous pouvons contribuer à la surveillance du cessez-le-feu", avait-il dit lors d’un événement organisé dans le centre de Londres. "Nous avons également, en réponse à la demande américaine, affecté un officier deux étoiles au commandement civil et militaire en tant que commandant-adjoint".

Aide humanitaire à Gaza : la CIJ statue sur les obligations d’Israël

La plus haute juridiction de l'ONU va statuer mercredi sur les obligations d’Israël envers les organismes fournissant une aide aux Palestiniens à Gaza, où les organisations humanitaires s’efforcent d’intensifier leur assistance après le cessez-le-feu.

L'ONU a demandé à la Cour internationale de justice (CIJ) de La Haye de clarifier les obligations d’Israël, en tant que puissance occupante, envers les Nations unies et d’autres organismes, "y compris s’agissant d’assurer et de faciliter la fourniture sans entrave d’articles de première nécessité essentiels à la survie" des Palestiniens. Un avis de la CIJ n’est pas juridiquement contraignant, mais la cour estime qu’elle a "un grand poids juridique et une grande autorité morale".

En avril, les juges ont entendu pendant une semaine des témoignages de dizaines de pays et d’organisations, dont une grande partie concernait le statut de l’UNRWA, l’agence des Nations Unies pour les réfugiés palestiniens. Israël n’a pas participé aux audiences. Son ministre des Affaires étrangères, Gideon Saar, les a qualifiées de "partie intégrante d’une persécution et d’une délégitimation systématiques d’Israël".

Israël a interdit à l’UNRWA d’opérer sur son sol après avoir accusé certains de ses employés de participation à l’attaque du Hamas du 7 octobre 2023, qui a déclenché la guerre.

© afp.com/Nathan HOWARD

Le vice-président américain J.D. Vance arrive à l'aéroport Ben Gourion de Tel-Aviv, le 21 octobre 2025
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Gaza : vouloir désarmer le Hamas, c’est se bercer d’illusions, par Arié Bensemhoun

Alors que la première phase du "Plan Trump" a permis un cessez-le-feu dans la bande de Gaza ainsi que la libération des derniers otages israéliens vivants contre celle de milliers de prisonniers palestiniens, un point demeure inextricable pour la suite du processus : l’avenir du Hamas, son désarmement et son exclusion de toute future gouvernance palestinienne – ce que l’organisation terroriste refuse catégoriquement.

La question du démantèlement du Hamas, plus qu’un impératif sécuritaire pour Israël ou un préalable technique indispensable à la reconstruction de Gaza, est d’abord un enjeu ontologique, qui touche à la nature même du mouvement islamiste. Lui demander de déposer les armes revient à lui demander de cesser d’être ce qu’il est.

Un acte de guerre sainte

Fondé en 1987, au cœur de la première Intifada, le Hamas n’a jamais été un mouvement politique au sens classique du terme. Il ne résulte pas d’un projet de gestion ou d’émancipation nationale, mais d’un acte de guerre sainte — une extension armée des Frères musulmans, portée par la conviction que la violence est la seule voie légitime vers la "libération de la Palestine" et, plus encore, vers la restauration d’un califat islamique mondial.

Dans cet imaginaire, les armes ne sont pas un outil, elles sont un credo. Elles incarnent la foi, la résistance et l’identité collective. Elles structurent la société gazaouie, façonnent son économie et imprègnent sa culture politique. Chaque roquette, chaque tunnel, chaque uniforme participent d’un récit quasi mystique d’un peuple élu pour combattre les juifs jusqu’à la fin des temps, tel que le proclame la charte du Hamas de 1988 – jamais abrogée.

Renoncer à cet arsenal reviendrait donc pour le Hamas à se renier lui-même, à briser le lien entre sa légitimité religieuse et sa survie politique. Cette connexion est d’autant plus vitale que son pouvoir repose non sur la représentativité démocratique, mais sur la coercition et la peur.

Un État mafia

Au fil des années, le Hamas s’est mué en véritable État mafia, contrôlant les flux d’aide humanitaire, les importations de carburant et les matériaux de construction, tout en prélevant des taxes sur chaque transaction à Gaza pour financer ses ambitions génocidaires contre Israël. Les tunnels, présentés comme des instruments de résistance, sont aussi des circuits de contrebande hautement lucratifs qui enrichissent sa nomenklatura. Et chaque cessez-le-feu, chaque trêve, chaque phase de reconstruction n’est pour le Hamas qu’une pause stratégique — une opportunité de reconstituer son arsenal et de reconsolider son emprise sur la population qui l’a élu.

Le fusil est le ciment du pouvoir, le Hamas le sait. Sans armes, il cesse d’être craint ; sans crainte, il cesse d’être obéi. Les armes ne servent pas seulement à combattre Israël : elles protègent un système d’exploitation totalitaire, garantissent l’impunité de ses dirigeants, et maintiennent la population sous un régime de terreur et de dépendance, en contrôlant les rues, les mosquées, les écoles et les médias tout en réduisant au silence toute opposition. Cette dynamique est flagrante depuis le cessez-le-feu, alors que les exécutions publiques et les affrontements avec des clans rivaux cherchant à renverser son autorité se multiplient.

La confrontation permanente

Le "prestige" du Hamas s’est construit sur la confrontation permanente, sur sa prétention à incarner la seule "résistance authentique" face à un Fatah jugé corrompu et domestiqué par les accords d’Oslo. Dans cette logique, le désarmement n’est pas une concession, mais une capitulation idéologique. Il signifierait reconnaître la légitimité d’Israël, renoncer à la lutte armée, admettre la faillite de quarante ans de djihad ; et donc se dissoudre dans un processus politique contraire à son ADN.

Or, les terroristes palestiniens ne raisonnent pas en victoire ou défaite militaire, mais en termes de martyre et de continuité eschatologique. Ils s’inscrivent dans une temporalité religieuse où la destruction terrestre n’est qu’une étape vers la victoire spirituelle finale — d’où leur capacité à absorber des pertes colossales sans jamais infléchir leur stratégie.

C’est pourquoi le désarmement serait pour le Hamas une honte éternelle, un renoncement à la mission sacrée confiée par Dieu. Mieux vaut mourir debout que vivre sans djihad. Cette mentalité sacrificielle rend tout compromis sincère impossible. Le Hamas n’est pas un acteur rationnel au sens diplomatique occidental du terme, mais un mouvement millénariste pour qui la paix avec les "mécréants" n’est pas un objectif mais une hérésie.

Exiger du Hamas qu’il se désarme, c’est espérer la conversion d’un fanatisme en pragmatisme. C’est ignorer que son existence repose sur la perpétuation du conflit, sur l’entretien d’une guerre infinie qui seule justifie sa domination. Tant qu’il conservera ses armes, il restera maître de Gaza et du récit de la "résistance". Mais s’il les perd, il s’effondrera — non seulement militairement, mais spirituellement.

Cette impasse existentielle rend tout processus de paix illusoire tant que le Hamas subsiste : il ne peut ni gagner, ni disparaître. Il ne peut qu’entretenir la guerre comme condition de sa survie. Et tant que cette logique perdurera, aucune solution durable à Gaza ne pourra émerger, quelle que soit la pression des acteurs extérieurs. Le retour de la guerre n’est donc qu’une question de temps.

*Arié Bensemhoun est le directeur général d’ELNET France (European Leadership Network), une association vouée au renforcement des liens entre l’Europe et l’État d’Israël. Docteur en chirurgie dentaire, il a mené sa carrière dans le secteur privé en tant que conseil en communication stratégique, en affaires publiques et en relations internationales.

© afp.com/Eyad BABA

Un membre des forces de sécurité intérieure loyales au groupe palestinien Hamas salue de s enfants dans le camp de réfugiés de Nousseirat, dans le centre de la bande de Gaza, le 12 octobre 2025
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Ukraine : Moscou affirme que les préparatifs en vue du sommet Trump-Poutine "se poursuivent"

Alors que Donald Trump avait annoncé récemment qu’il rencontrerait Vladimir Poutine au cours des deux prochaines semaines, leur sommet a été reporté sine die. "Je ne veux pas d’une rencontre pour rien. Je ne veux pas de perte de temps, donc on verra ce qu’il va se passer", a dit le président américain mardi, après qu’un responsable de son gouvernement avait fait savoir qu’aucune entrevue entre les deux dirigeants n’était finalement prévue "dans un avenir proche". Moscou a toutefois assuré ce mercredi 22 octobre que les préparatifs se poursuivaient, entretenant la confusion.

Le locataire de la Maison-Blanche, qui a échangé par téléphone avec son homologue russe jeudi dernier, avant de recevoir Volodymyr Zelensky le lendemain, semblait ces derniers jours être revenu du côté de Moscou : il a tenté de persuader le président ukrainien de céder la province disputée du Donbass, dans l’est de l’Ukraine, lors de discussions "tendues", a déclaré un haut responsable ukrainien à l’AFP, selon qui les efforts diplomatiques visant à mettre fin à la guerre entre la Russie et l’Ukraine semblent "tourner en rond".

Les infos à retenir

⇒ Moscou affirme que les préparatifs en vue du sommet Trump-Poutine "se poursuivent"

⇒ L'Ukraine signe avec la Suède pour jusqu'à 150 avions de chasse Gripen

⇒ Le chef de l’Otan Mark Rutte à Washington

L'Ukraine signe avec la Suède pour l'achat de jusqu'à 150 avions de chasse Gripen

Le président ukrainien Volodymyr Zelensky a signé mercredi en Suède une lettre d'intention pour l'achat de jusqu'à 150 avions de chasse Gripen, lors d'une tournée européenne visant à obtenir plus d'aide face à Moscou qui continue de bombarder le pays.

Sur le plan diplomatique et alors que les négociations semblent dans l'impasse pour mettre fin au conflit, Moscou a assuré mercredi que le sommet entre le président russe Vladimir Poutine et son homologue américain Donald Trump était toujours d'actualité.

Volodymyr Zelensky se rend en Europe juste après une attaque ayant touché une école maternelle à Kharkiv (nord-est), faisant un mort, sept blessés, et semant la terreur parmi les enfants. Six personnes ont par ailleurs été tuées par une vague de frappes russes nocturnes sur le secteur énergétique ukrainien.

Le président ukrainien a rencontré en fin de matinée à Oslo le Premier ministre norvégien, Jonas Gahr Støre. Il s'est ensuite rendu en Suède avec le Premier ministre Ulf Kristersson dans la ville de Linköping, siège du groupe de défense Saab, qui produit l'avion de chasse Gripen.

Volodymyr Zelensky a signé une lettre d'intention avec pour objectif l'achat par Kiev de 100 à 150 avions de chasse Gripen du dernier modèle afin de "constituer une nouvelle armée de l'air ukrainienne puissante", a annoncé Ulf Kristersson. Il sera ensuite jeudi au sommet des dirigeants de l'Union européenne à Bruxelles, au cours duquel les pays membres espèrent se mettre d'accord sur un soutien financier pérenne à l'Ukraine, puis à Londres, où se tient vendredi une réunion de la "coalition des volontaires".

Moscou affirme que les préparatifs en vue du sommet Trump-Poutine "se poursuivent"

La Russie a affirmé ce mercredi que les préparatifs en vue de la rencontre entre les présidents Vladimir Poutine et Donald Trump "se poursuivent", malgré l'annonce apparente la veille par le dirigeant américain d'un report sine die de cette réunion. "Nous affirmons que les préparatifs du sommet se poursuivent", a déclaré le vice-ministre des Affaires étrangères Sergueï Riabkov, cité par l'agence de presse étatique TASS. Le porte-parole du Kremlin, Dmitri Peskov, a lui répété mercredi que "les délais n'ont pas été fixés".

Donald Trump a expliqué mardi le report de sa rencontre avec son homologue russe en disant qu’il ne voulait pas de discussions "pour rien", alors que les deux dirigeants envisageaient de se réunir à Budapest d'ici début novembre pour évoquer une fin à la guerre en Ukraine. "Je ne veux pas de perte de temps, donc on verra ce qu’il va se passer", a-t-il déclaré face à la presse à la Maison-Blanche.

Le secrétaire d’Etat américain Marco Rubio et le ministre russe des Affaires étrangères Sergueï Lavrov ont également annulé une réunion prévue pour organiser la rencontre de Budapest, dont ils avaient pourtant parlé la veille au téléphone.

Au moins six morts et des coupures de courant en Ukraine après des frappes russes

Au moins six personnes ont été tuées ce mercredi dans une nouvelle vague de frappes russes sur des infrastructures énergétiques qui ont provoqué des coupures de courant à travers l'Ukraine et touché notamment Kiev.

Après les bombardements de la nuit, le ministère ukrainien de l'Energie a annoncé des coupures d'urgence dans "la plupart des régions". "Les travaux de réparation d'urgence ont commencé là où la situation sécuritaire le permet", a-t-il ajouté.

Selon Volodymyr Zelensky, au moins six personnes ont été tuées dans ces frappes qui ont touché une dizaine de régions, dont une jeune mère et ses deux enfants. Les services de secours ont fait état d'au moins 22 blessés. "Une nouvelle nuit qui prouve que la Russie ne ressent pas suffisamment de pression pour mettre fin à la guerre", a dénoncé le président ukrainien, appelant les Européens et Washington à prendre "des sanctions sévères".

Dénonçant des "frappes brutales", le chef de la diplomatie ukrainienne Andriï Sybiga a appelé les alliés de Kiev à lui fournir des fonds, des systèmes de défense antiaérienne et des équipements pour réparer les dégâts. "Il est temps d'abandonner les vœux pieux et de faire preuve de fermeté", a-t-il indiqué sur X, insistant lui aussi sur des "sanctions sévères" et la saisie des avoirs russes gelés en Europe.

Le chef de l’Otan Mark Rutte à Washington pour rencontrer Donald Trump

Le Secrétaire général de l’Otan Mark Rutte est parti mardi à Washington pour une réunion avec le président américain Donald Trump, a annoncé son équipe. Les deux hommes échangeront sur "plusieurs questions liées au soutien de l’Otan à l’Ukraine et aux efforts menés par les Etats-Unis en vue d’une paix durable", a indiqué un responsable de l’Alliance à l’AFP.

La visite de Mark Rutte à Washington doit se prolonger jusqu’à ce mercredi. Le chef de l’Alliance atlantique cultive depuis longtemps sa relation avec Donald Trump, avec pour objectif qu’elle puisse peser sur des dossiers brûlants, comme la guerre en Ukraine. Les dirigeants européens redoutent un accord conclu au détriment de l’Ukraine et de la sécurité de l’Europe tout entière. Et d’autant plus depuis la réunion du président américain avec son homologue Volodymyr Zelensky vendredi à la Maison-Blanche. Lors de cette rencontre, Donald Trump a fait pression sur le président ukrainien pour que Kiev cède la région orientale du Donbass, selon un haut responsable ukrainien.

© afp.com/ANDREW CABALLERO-REYNOLDS

Donald Trump et Vladimir Poutine, à Anchorage, en Alaska, le 15 août 2025
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Ukraine : pourquoi Donald Trump ne rencontrera finalement pas Vladimir Poutine prochainement

Une stratégie difficilement lisible. Le président américain Donald Trump a opéré un énième revirement sur sa position vis-à-vis de la guerre en Ukraine, mardi 21 octobre. Après un long appel avec son homologue russe Vladimir Poutine la semaine dernière, les deux hommes avaient convenu, selon Washington, de se rencontrer "dans les deux prochaines semaines" à Budapest, plus de deux mois après leur précédent sommet d’Anchorage, en Alaska. Mais ce nouveau tête-à-tête en Hongrie, pourtant confirmé par Donald Trump lui-même, paraît désormais s’éloigner.

Face aux journalistes, le milliardaire républicain a simplement indiqué qu’il ne souhaitait pas participer à "une rencontre pour rien" avec le président russe. "Je ne veux pas de perte de temps, donc on verra ce qu’il va se passer" a-t-il ajouté, depuis la Maison-Blanche. Plus tôt dans la journée, le porte-parole du Kremlin, Dmitri Peskov, avait douché les espoirs d’une rencontre rapide. "On ne peut pas reporter quelque chose qui n’a pas été convenu", a-t-il dit lors d’un point presse, indiquant qu’"aucun calendrier précis n’avait été initialement fixé".

Chaud-froid entre Washington et Moscou

En l’espace de quelques jours, que s’est-il passé entre les parties américaine et russe ? D’après une source proche du dossier interrogée par CNN, l’intransigeance de Moscou, qui n’a pas évolué sur ses demandes pour mettre un terme à la guerre en Ukraine, a pu jouer en défaveur de la tenue de ce nouvel entretien bilatéral. Mardi, le ministre russe des Affaires étrangères a par exemple souligné que la Russie refuserait la solution d’un conflit gelé en Ukraine. Sergueï Lavrov s’était entretenu avec le secrétaire d’État Marco Rubio lundi, sans qu’une nouvelle réunion entre les deux hommes ne soit de nouveau fixée.

Ce retournement de situation intervient quelques jours après la réception, vendredi, de Volodymyr Zelensky à la Maison-Blanche. Après un réchauffement des relations avec Donald Trump ces derniers mois, le président ukrainien a cette fois été refroidi par l’accueil réservé par son hôte américain. Un haut responsable du camp du dirigeant européen a précisé auprès de l’AFP que les échanges lors de cette conversation avaient été "tendus". D’après la même source, le président américain aurait tenté de persuader Volodymyr Zelensky de céder le Donbass à la Russie afin d’obtenir la paix.

Un choix laissant entendre que Donald Trump se montrait de nouveau plus attentif aux arguments de Moscou qu’à ceux de Kiev. Avant cet entretien, il avait également dit envisager l’envoi de missiles américains longue portée Tomahawk à l’Ukraine. "Je pourrais dire [à Vladimir Poutine] : regarde, si cette guerre n’est pas réglée, je vais leur livrer des Tomahawk", avait-il développé en début de semaine dernière. "On pourrait le faire, ou pas, mais je crois que c’est important de mettre ça sur la table." Volodymyr Zelensky espérait achever de le convaincre sur le sujet. Sans succès.

"Faire pression sur Poutine"

Mardi, le président ukrainien a expliqué ne pas abandonner sa volonté de trouver de nouvelles armes pour contenir les offensives russes à l’est du pays. Mais aussi dissuader le Kremlin d’autres actions militaires contre son pays. "Dès que la question des capacités à long terme s’est éloignée de nous – pour l’Ukraine –, la Russie s’est presque automatiquement désintéressée de la diplomatie. C’est un signe que cette question – celle des capacités à long terme – pourrait être la clé indispensable de la paix", a-t-il détaillé lors de son discours quotidien.

Plusieurs experts en relations internationales partagent peu ou prou la même opinion. "Poutine s’inquiétait des Tomahawk, il a demandé un appel téléphonique [aux Américains] et a au moins retardé leur arrivée", signale William B. Taylor, ancien ambassadeur des États-Unis en Ukraine, auprès du New York Times. "La question est de savoir si Trump comprendra, et quand, que pour obtenir les résultats escomptés, il doit faire pression sur Poutine", observe pour sa part l’ex-diplomate américain Daniel Fried, également interrogé par le quotidien de la côte est. "Poutine continue de se jouer de lui."

Galvanisé par son récent succès au Proche-Orient et la signature d’un cessez-le-feu entre Israël et le Hamas, Donald Trump espère toujours trouver la solution pour conclure un accord entre Kiev et Moscou. Mardi, lors d’un discours devant les sénateurs républicains, il a paru faire allusion à la guerre en Ukraine. Tout en assurant, dans son style caractéristique, demeurer l’homme de la situation pour trouver la paix : "Ils disent : 'tu es le troisième meilleur président' – c’était à la télévision. Et ils ont demandé : 'Qui sont les 2 premiers ? Washington et Lincoln'. […] Ça va être très difficile de [les] battre. Mais on va essayer, non ? Ils n’ont pas éteint huit guerres… Et la neuvième arrive, que vous le croyiez ou non !".

© afp.com/ANDREW CABALLERO-REYNOLDS

Vladimir Poutine et Donald Trump lors de leur rencontre du 15 août 2025 à Anchorage (Alaska, Etats-Unis)
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"Zelensky représente aujourd’hui l’anti-Munich" : le spectre de la lâcheté européenne sur l’Ukraine

L’Ukraine devra-t-elle céder un cinquième de son territoire à Vladimir Poutine, comme Donald Trump le préconise pour stopper le carnage et la dévastation perpétrés par les armées russes ? Au contraire, un tel renoncement ne risquerait-il pas d’inciter l’autocrate du Kremlin à préparer de futures agressions ? Journaliste du Figaro spécialiste de géopolitique, Isabelle Lasserre explore ce dilemme dans son dernier livre, Les Fantômes de Munich (Éditions de l’Observatoire, 224 pages, 22 €). La réponse apportée à cette grave question déterminera le destin du continent pour les décennies à venir.

Penser naïvement qu’on peut rétablir la paix en cédant à un agresseur dictatorial, c’est le faux pas tragique que commirent les dirigeants britanniques et français à la conférence de Munich, en septembre 1938. En laissant Adolf Hitler s’emparer de régions de Tchécoslovaquie peuplées d’Allemands de souche, Chamberlain et Daladier cherchaient à apaiser le tyran nazi. Ils n’ont fait qu’attiser sa soif de conquête, ouvrant la voie à la Seconde Guerre mondiale. Ils choisirent le déshonneur dans l’espoir d’éviter le conflit : ils eurent et l’un, et l’autre, constata Churchill.

Céder le Donbass

Quatre-vingt-sept ans plus tard, le président américain vient d’exiger de Volodymyr Zelensky qu’il accepte de céder à Poutine la plus grande partie du Donbass - y compris certaines zones de l’oblast de Donetsk encore sous contrôle ukrainien - ainsi que la Crimée. Tel un nouveau Chamberlain, Trump tente de forcer un "deal" à ce sujet avec Poutine par-dessus la tête des Ukrainiens. Zelensky n’a pas été convié à leur dernier sommet le 15 août en Alaska, de même que Benes, le président de la Tchécoslovaquie, ne fut pas invité à participer aux pourparlers de Munich en 1938.

Cependant, l’histoire ne se répète pas. "Volodymyr Zelensky représente aujourd’hui l’anti-Munich, écrit Isabelle Lasserre. Alors que les Tchèques n’avaient pas résisté à Hitler, lui a fait le pari de la résistance armée. Il a cassé la logique selon laquelle un petit pays, surtout s’il n’est pas soutenu par ses amis, doit forcément s’écraser devant le grand. Il a réhabilité la légende de David contre Goliath et prouvé que les faibles pouvaient être forts. C’est ce courage et cette énorme prise de risques qui ont forcé les Occidentaux à se positionner différemment et à venir en soutien de l’Ukraine."

Les Européens ont pourtant longtemps parié sur l’apaisement face à Poutine. Ce fut le cas en 2008, sur la Géorgie. Ce fut encore le cas avec les accords de Minsk sur l’Ukraine, en 2014 et en 2015, qui furent un jeu de dupes. Ce fut toujours le cas après l’invasion russe de 2022, lorsque Emmanuel Macron plaidait pour "ne pas humilier la Russie" et projetait de construire une "architecture de sécurité" européenne incluant l’agresseur. "La principale erreur des démocraties libérales européennes est de ne pas avoir saisi le basculement du monde, son glissement vers une nouvelle organisation dominée par la force", observe Isabelle Lasserre.

Trop longtemps les Européens se sont laissés bercer par l’illusion des "dividendes de la paix" post-guerre froide, par le confort de leur État-providence et le refus de voir leur mode de vie remis en cause. Le retour du fracas des armes sur le continent en 2022 aurait bien pu passer inaperçu, nonobstant la résistance acharnée des Ukrainiens. Il a fallu que Vladimir Poutine lance une série d’agressions hybrides contre les démocraties du continent pour que les Européens émergent de leur torpeur et commencent à se réarmer, quoique toujours trop peu, trop tard. L’esprit de Munich, ce mélange de lâcheté et d’aveuglement face à la tyrannie, est toujours bien présent.

En s’en prenant de manière répétée aux intérêts des démocraties européennes depuis qu’il est revenu à la Maison-Blanche en janvier 2025, Donald Trump parviendra-t-il, enfin, à les réveiller vraiment, à les pousser à prendre enfin leur destin en mains ? Isabelle Lasserre résume l’objectif : "Assumer le réarmement industriel et militaire du continent, mais aussi son réarmement moral". A ce jour, ce n’est pas gagné.

© afp.com/Ludovic MARIN

Le président ukrainien Volodymyr Zelensky et le président français Emmanuel Macron, à l'Elysée, à Paris, le 3 septembre 2025
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Les purges dans l’armée chinoise, un aveu de faiblesse de Xi Jinping ?

Jamais, depuis la mort de Mao Zedong en 1976, la Chine n’avait connu de purges aussi massives à la tête de son Armée populaire de libération (APL). Quelques jours avant un plénum du comité central du Parti communiste chinois devant officialiser (du 20 au 23 octobre) les grandes orientations économiques du pays pour 2026-2030 ainsi que des remaniements politiques, neuf responsables militaires ont été expulsés du parti pour de "sérieuses violations" de sa discipline. Ils sont "soupçonnés d’avoir commis des crimes graves dans l’exercice de leurs fonctions, impliquant des sommes d’argent exceptionnellement importantes" - en clair, de corruption.

Le président Xi Jinping, adepte de la "stratégie de la décapitation", n’a pas hésité à frapper très haut. Parmi les déchus, He Weidong, qui siégeait au Politburo (24 personnes), était l’un des deux vice-présidents de la très puissante Commission militaire centrale (CMC, dirigée aussi par le n°1 chinois), qui supervise l’ensemble des forces armées chinoises. Trois membres de cet organe stratégique sur sept ont été débarqués ces dernières années. Le second est l’ex-amiral Miao Hua, ancien directeur du Département du travail politique, dont la mission - cruciale - consiste à s’assurer de la loyauté des militaires envers le parti.

Etre prêt à envahir Taïwan en 2027

La purge s’est accélérée en 2023, lorsque plusieurs responsables de la Force des missiles ont été licenciés pour corruption - mais aussi sans doute pour des problèmes de qualité des engins (la presse étrangère avait révélé que certains missiles avaient été remplis avec de l’eau plutôt qu’avec du carburant). Depuis, un ministre de la Défense, Li Shangfu, lui aussi membre de la CMC, et son prédécesseur ont également été écartés.

Alors que "l’empereur rouge" a demandé à son armée d’être prête à envahir Taïwan en 2027, les experts s’interrogent sur ce coup de balai. Pour une partie d’entre eux, Xi perdait le contrôle sur l’APL et craindrait même d’être renversé. Autre constat critique : ce grand ménage prouverait son manque de discernement dans le choix de ses collaborateurs.

Selon d’autres spécialistes, et cela semble plus fondamental, ce mouvement illustrerait surtout le mécontentement du leader chinois, qui jugerait que son armée n’est pas encore suffisamment en ordre de bataille pour se mesurer aux Etats-Unis. La séquence démontre aussi, et surtout, sa domination sur les hauts gradés, y compris ceux qu’il nomme. "Xi peut les élever et les détruire. Cela renforce son autorité plutôt que la diminuer", argumente dans le podcast China Talk l’ancien analyste de la CIA Jon Czin, aujourd’hui chercheur à la Brookings Institution, qui estime que, depuis l’arrivée au pouvoir du dirigeant chinois, "la moitié des membres en uniforme de l’APL ont été démis de leurs fonctions ou sont portés disparus". De quoi, plus généralement, ôter l’envie à tout candidat à la succession de l’autocrate (72 ans) de le défier.

© Xinhua via AFP

Le président chinois Xi Jinping, également secrétaire général du Comité central du Parti communiste chinois et président de la Commission militaire centrale, passe en revue les troupes lors de son inspection de la garnison de l'Armée populaire de libération de la Chine stationnée dans la Région administrative spéciale de Macao, dans le sud de la Chine, le 20 décembre 2024. (Xinhua/Li Gang)
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Contrats d’armement : une agence de l’Otan empêtrée dans un scandale de corruption

C’est une vaste investigation qui attire l’attention sur les risques de corruption, dans un secteur aussi opaque que la défense. En mai dernier, plusieurs personnes ont été arrêtées dans le cadre d’une enquête portant sur des soupçons d’irrégularités dans l’attribution, par une agence de l’Otan, de contrats d’armement. A l’époque les justices belge, luxembourgeoise ainsi que l’Alliance atlantique elle-même, avaient diffusé l’information. En ce début de semaine, le quotidien belge Le Soir révèle des détails supplémentaires sur cette opération internationale, baptisée "mains propres", et initiée par la NSPA (l’Agence de soutien et d’acquisition de l’Otan), en collaboration avec le FBI et Eurojust, l’agence judiciaire européenne.

On apprend ainsi que parmi les personnes arrêtées en mai figure Scott Willason, un ancien militaire américain de 53 ans, qui a également été employé de l’agence d’acquisition de l’Otan (implantée au Luxembourg) avant de devenir consultant en défense.

Soupçons de corruption

Ce spécialiste en explosifs a été interpellé en Suisse par la police cantonale le 13 mai. Il est soupçonné, comme plusieurs actuels et anciens employés de la NSPA, d’avoir transmis des informations confidentielles à des entreprises, afin de leur faciliter l’obtention de contrats pour des munitions ou des drones. Son avocat, cité par Le Soir, évoque des "accusations injustifiées et infondées", à l’encontre d’un homme dont la carrière à l’Otan a été "honorable, irréprochable et distinguée".

La veille, la police fédérale belge interpellait à l’aéroport de Bruxelles National, "M", un ancien employé du service munitions de la NSPA, devenu consultant indépendant depuis 2021. Toujours incarcéré, il est suspecté de corruption, blanchiment et participation à une organisation criminelle. "En clair, la justice belge le suspecte d’avoir reçu des informations confidentielles de complices encore en poste à la NSPA, informations qui auraient donné un avantage concurrentiel à ses clients", explique le quotidien.

A la clé : 1,9 million d’euros, peut-être blanchi via des sociétés de consultant - ce que "M" conteste. Deux de ses complices présumés, actuellement en poste dans l’agence atlantique, ont également été arrêtés. Une série d’autres perquisitions et arrestations ont été menées entre février et juin dans sept pays, impliquant notamment les autorités belges, néerlandaises, italiennes, espagnoles et américaines.

Enquête internationale

Soupçonnant des fraudes et malversations en interne, l’agence atlantique a saisi les autorités américaines, qui ont mobilisé le FBI, le Service d’enquêtes criminelles de la Défense (DCIS), ainsi que le Service d’enquêtes criminelles de la marine (NCIS). Outre-atlantique, les investigations ont ainsi débouché sur l’inculpation, en février puis en avril 2025 de Manousos Bailakis et Ioannis Gelasakis, par deux tribunaux américains.

Ces deux entrepreneurs grecs avaient des responsabilités chez une entreprise de services en défense navale - Global Defense Logistics. Les autorités ont également arrêté Ismail Terlemez, le patron du fleuron turc de l’armement Arca. "Appréhendés – pour trois d’entre eux – et incarcérés, ils ont depuis lors été relaxés, la justice américaine ayant levé toutes les charges qui pesaient contre eux", indique Le Soir. Trois ressortissants néerlandais ont également été écroués, suspectés de corruption, cette fois-ci dans le cadre de marchés publics passés en 2023, au détriment de l’armée néerlandaise.

Industrie opaque

L’affaire intervient alors que les budgets militaires explosent en Europe et en Occident, face à la menace russe. La commission européenne a, par exemple, récemment annoncé un plan visant à utiliser la notation de crédit de l’UE pour emprunter 150 milliards d’euros (168 milliards de dollars), afin d’aider les 27 membres de l’Union européenne à investir 800 milliards d’euros supplémentaires dans la défense dans les prochaines années.

Cette course à l’armement soumet les institutions publiques à une pression pour gérer les risques de fraudes potentielles, le secteur de la défense étant, dans le monde, particulièrement associé à la corruption. Et ce, en raison de son caractère secret et des sommes importantes en jeu. "Au niveau national et européen, de nombreux mécanismes de transparence concernant les marchés publics ne s’appliquent pas à ce secteur", rappelle le media DW, qui a contribué à l’enquête.

"L’enquête en cours de l’OTAN, quelle que soit son issue, constitue un précieux rappel de l’importance d’un contrôle rigoureux de la manière dont les fonds publics sont dépensés pour la défense", indique ainsi Francesca Grandi, de l’organisation de surveillance Transparency International, cité par le média allemand.

© afp.com/Nicolas TUCAT

Soupçonnant des malversations en interne, l’OTAN a ouvert une enquête, débouchant sur l'interpellation d'une dizaine de suspects. Illustration
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Ukraine : Donald Trump veut que Kiev cède des territoires, le sommet avec Vladimir Poutine s'éloigne

Après leur rencontre en Alaska en août, qui n'avait débouché sur rien de concret, Donald Trump et Vladimir Poutine doivent se rencontrer prochainement pour parler de la guerre en Ukraine. Leur sommet, qui serait le deuxième destiné à trouver une issue au conflit déclenché par Moscou, devrait avoir lieu avant le mois de novembre, d'après le président américain. Mais la perspective semble désormais s'éloigner, alors qu'aucune date n'a encore été fixée. "Aucun délai précis" n'a été déterminé, a rappelé ce mardi 21 octobre la Russie, insistant sur la nécessité de "préparatifs sérieux". Alors que les dirigeants européens redoutent un accord qui se ferait au détriment de l'Ukraine et des intérêts de sécurité en Europe, plusieurs d'entre eux ont affirmé mardi avec Volodymyr Zelensky que la ligne de front actuelle devait servir de "base" aux discussions avec la Russie.

Les infos à retenir

⇒ Des concessions territoriales ne peuvent être "négociées que par le président Zelensky", selon Emmanuel Macron

⇒ Donald Trump a fait pression sur Volodymyr Zelensky pour qu'il renonce au Donbass

⇒ Sommet Poutine-Trump : la Russie éloigne la perspective d'une concrétisation rapide

Donald Trump ne rencontrera pas Poutine dans un "avenir proche"

Le président américain Donald Trump n'a pas l'intention de rencontrer son homologue russe Vladimir Poutine dans l'immédiat, a déclaré mardi un responsable américain, quelques jours après que Donald Trump a dit qu'ils se rencontreraient dans les deux semaines à venir à Budapest.

"Il n'est pas prévu que le président Trump rencontre le président Poutine dans un avenir proche", a déclaré ce responsable sous le couvert de l'anonymat.

Donald Trump a fait pression sur Volodymyr Zelensky pour qu'il renonce au Donbass

Donald Trump a fait pression sur Volodymyr Zelensky pour que l'Ukraine cède la région orientale du Donbass afin de mettre fin à la guerre déclenchée par la Russie, lors de leur rencontre vendredi à Washington, a déclaré mardi à l'AFP un haut responsable ukrainien.

Ce responsable, s'exprimant sous couvert de l'anonymat, a expliqué que le président américain avait exhorté son homologue ukrainien à retirer ses troupes des territoires qu'elles contrôlent encore, l'une des principales exigences du président russe Vladimir Poutine. La rencontre vendredi a été "tendue et difficile", a-t-il ajouté, soulignant que la diplomatie de Donald Trump sur ce dossier donnaient à Kiev l'impression de "tourner en rond".

Des concessions territoriales ne peuvent être "négociées que par le président Zelensky", selon Emmanuel Macron

Des concessions territoriales en Ukraine "ne peuvent être négociées" que par son président Volodymyr Zelensky, a affirmé ce mardi le chef de l'Etat français Emmanuel Macron à Ljubljana en Slovénie. "Nul autre ne saurait le faire et donc c'est à l'Ukraine de décider pour elle-même et son territoire et aux Européens de décider pour eux-mêmes et leur sécurité", a-t-il ajouté en référence à une rencontre envisagée à Budapest entre le président russe Vladimir Poutine et son homologue américain Donald Trump.

Parallèlement à ces déclarations, les dirigeants européens ont affirmé aujourd'hui avec Volodymyr Zelensky que la ligne de front actuelle devait servir de "base" aux discussions avec la Russie. "Nous soutenons fermement la position du président Trump selon laquelle les combats doivent cesser immédiatement, et que la ligne de contact actuelle doit servir de base pour les négociations", plaide un communiqué signé par la France, la Grande-Bretagne ou encore l'Allemagne. "Nous restons attachés au principe selon lequel les frontières internationales ne doivent pas être modifiées par la force", ajoute toutefois le texte, les dirigeants s'engageant également à maintenir leur soutien pour que l'Ukraine reste "dans la position la plus forte possible".

Sommet Poutine-Trump : la Russie éloigne la perspective d'une concrétisation rapide

La Russie a minimisé ce mardi les chances qu'un sommet entre Vladimir Poutine et Donald Trump intervienne rapidement, en soulignant qu'"aucun délai précis" n'a été fixé pour cette rencontre qui doit être précédée d'un travail préparatoire entre Moscou et Washington. "Ni le président (russe Vladimir) Poutine, ni le président (américain Donald) Trump n'ont annoncé de délai précis", a déclaré à la presse le porte-parole du Kremlin, Dmitri Peskov, lors d'un briefing auquel participe l'AFP. "La partie américaine, comme la partie russe ont déclaré que cela pourrait demander du temps", a-t-il rappelé, en insistant sur la nécessité des "préparatifs sérieux".

Moscou a également jugé mardi "prématuré" d'envisager un calendrier pour la rencontre entre les chefs de la diplomatie russe Sergueï Lavrov et américain Marco Rubio, censée ouvrir la voie au prochain sommet Poutine-Trump envisagé à Budapest sur la guerre en Ukraine. Pour l'heure, "nous nous sommes mis d'accord pour poursuivre les contacts téléphoniques", a annoncé mardi Sergueï Lavrov, lors d'une conférence de presse.

Pologne : une cinquantaine de suspects accusés d'agir pour Moscou arrêtés depuis 2022

Cinquante-cinq personnes soupçonnées d'agir pour le compte de Moscou ont été interpellées en Pologne depuis le début de l'invasion russe de l'Ukraine en février 2022, a déclaré ce mardi à l'AFP le porte-parole des services spéciaux polonais. "Ces personnes qui agissaient au détriment de la Pologne ont toutes été accusées en vertu de l'article 130 du code pénal qui parle d'espionnage et de sabotage", a dit ce porte-parole, Jacek Dobrzynski.

Le Premier ministre polonais Donald Tusk a évoqué plus tôt dans la journée sur X huit interpellations récentes de personnes "soupçonnées de préparer des actes de sabotages". Selon Jacek Dobrzynski, parmi ces huit interpellés figurent trois ressortissants ukrainiens ayant "créé une sorte de filière pour acheminer des explosifs à travers la Pologne et la Roumanie vers l'Ukraine".

Depuis le début de l'invasion russe en février 2022, la Pologne a accusé la Russie d'être derrière plusieurs actes et tentatives de sabotage, dont plusieurs incendies à travers le pays y compris à Varsovie, des accusations régulièrement rejetées par Moscou. En représailles, la Pologne a imposé des restrictions aux déplacements de diplomates russes sur son sol et ordonné la fermeture de deux consulats russes, à Poznan (ouest) et à Cracovie (sud).

© Andrew Harnik / GETTY IMAGES NORTH AMERICA / Getty Images via AFP

Washington, États-Unis | AFP | vendredi 17/10/2025 - 19:33 UTC+2 | 52 mots

Le président ukrainien Volodymyr Zelensky est arrivé vendredi 17 octobre 2025 à la Maison Blanche pour rencontrer son homologue américain Donald Trump qu'il veut convaincre de livrer des missiles Tomahawk à l'Ukraine.
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Takaichi Sanae, Première ministre du Japon : un espoir (déjà décu) pour les femmes

La dernière femme qui avait dirigé le Japon s’appelait Go-Sakuramachi. C'était en 1762. Autant dire que la nomination de Sanae Takaichi, ce 21 octobre, constitue un choc dans ce pays conservateur, où les femmes occupent rarement des postes à responsabilités. Le Japon n’arrive qu’à la 141e place (sur 183) en proportion de femmes élues au sein du Parlement, selon l’organisation IPU. Dans le business, ce n'est pas mieux. Seul un conseil d'administration sur dix compte une femme dans ses rangs. Et plus d’une entreprise sur deux n'a aucune femme dans son équipe de direction.

Traditionaliste, Sanae Takaichi va-t-elle s'attaquer à ce plafond de verre ? Certains, à Tokyo, en doutent, arguant qu’elle s’est, par le passé, opposée à la révision d’une loi centenaire qui contraint la plupart des épouses à abandonner leur nom de famille. Elle a également refusé de changer une loi de 1947 qui interdit aux femmes d’hériter du trône impérial. A peine nommée, cette admiratrice de Margaret Thatcher a douché certains espoirs en ne nommant que deux femmes ministres, loin de ses promesses de former un gouvernement "à la scandinave", proche de la parité. Un signal qui aurait pourtant pu faire bouger une société japonaise très corsetée, où les jeunes mères sont souvent cantonnées à des rôles domestiques.

Pour les aider à faire carrière, la nouvelle cheffe du parti conservateur (PLD) devra s’attaquer au problème des garderies, peu nombreuses. Et lutter ainsi contre le déclin démographique. Une mesure d'autant plus urgente que cette nationaliste s'oppose à toute politique d'immigration.

© afp.com/Kazuhiro NOGI

La présidente du Parti libéral démocrate (PLD) au pouvoir au Japon, Sanae Takaichi (au centre), marche avant de signer un accord à la Diète à Tokyo, le 20 octobre 2025
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Terres rares : la Chine compromet le réarmement de l’Europe... et fait le jeu de Poutine

Le Parti communiste chinois tire le tapis sous les pieds de l’Europe au moment où elle tente de se réarmer. A compter du 1er décembre, les fabricants d’armes européens devront composer avec une série de nouvelles restrictions imposées par Pékin au reste du monde sur ses ventes de métaux rares et technologies connexes. Or, la Chine domine presque totalement l’extraction et le raffinage des terres rares, indispensables pour une foule de produits électroniques : instruments médicaux, automobiles, ordinateurs, mais aussi drones, missiles, avions de combat, radars… Une stratégie qu'elle a peaufinée de longue date.

Officiellement, c’est l’Amérique qui est visée, mais dans la pratique, l’Europe est touchée de plein fouet. Outre les licences qu’il impose désormais à l’exportation, le PCC a décrété qu’aucune autorisation ne serait donnée pour les ventes ayant des implications militaires. Le ciblage de ses fabricants d’armes n’est sans doute pas une coïncidence au moment où l’Europe est de plus en plus seule à soutenir l’Ukraine après la défection de l’administration Trump, qui a pratiquement cessé toute fourniture d’aide à Kiev en armes et munitions. En freinant le réarmement européen, la Chine renforce, indirectement, son appui à Moscou.

La coordination croissante des deux grandes puissances révisionnistes inquiète au plus haut point les dirigeants européens, qui y voient l’amorce d’un scénario cauchemardesque. Le secrétaire général de l’Otan, le néerlandais Mark Rutte, a prévenu le 14 octobre : "Si, par exemple, la Chine décidait de s’en prendre à Taïwan, il est hautement probable qu’elle contraindrait son partenaire junior, la Russie de Vladimir Poutine, à s’en prendre simultanément à l’Otan, pour que nous soyons occupés". En clair : l’engrenage de la troisième guerre mondiale serait enclenché.

On comprend, dès lors, pourquoi le PCC a intérêt à freiner autant que possible le réarmement de l’Europe, dont tous les dirigeants (à l’exception de l’Espagnol Pedro Sanchez) ont souscrit au sommet de l’Otan, en juin à La Haye, à l’objectif de porter leurs dépenses de défense à 3,5 % du produit intérieur brut à l’horizon 2035 (contre 2 % aujourd’hui). L’UE a pris conscience de sa dépendance excessive en matière de terres rares. L’an dernier, elle a pris un règlement pour accroître sa production propre, diversifier ses importations et promouvoir le recyclage. Mais il faudra du temps pour y parvenir, alors que les besoins sont urgents.

© afp.com/Handout

Photo fournie par le service de presse de la présidence kazakhe de Xi Jinping à Astana, la capitale kazakhe, le 17 juin 2025
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Les Etats-Unis n'enverront pas de troupes à Gaza, déclare J.D. Vance en Israël

Une trêve à consolider. Dans la bande de Gaza, le cessez-le-feu signé par Israël et le Hamas demeure précaire. Ce week-end, la reprise temporaire de frappes menées par l’État hébreu sur l’enclave palestinienne, justifiées par les autorités comme une réponse à des actions hostiles du mouvement islamiste, témoigne de la fragilité des équilibres dans la région.

Lundi, le président américain Donald Trump a assuré que le cessez-le-feu restait en vigueur à Gaza, malgré cette série d’incidents. Ce mardi 21 octobre, le Hamas a lui aussi affirmer vouloir "respecter" l’accord. Après la libération des derniers otages, Israël attend du mouvement islamiste qu’il lui rende l’ensemble des dépouilles des personnes décédées lors de leur captivité à Gaza, enlevées lors des attaques terroristes du 7 octobre 2023.

Les infos à retenir

⇒ Les Etats-Unis n'enverront pas de troupes à Gaza, déclare J.D. Vance en Israël

⇒ Le conseiller à la sécurité nationale annonce avoir été limogé par Benyamin Netanyahou

⇒ Le Hamas dit avoir infligé "un coup sévère" à un groupe qui menace la sécurité de Gaza

Le Hamas dit avoir infligé "un coup sévère" à un groupe qui menace la sécurité de Gaza

Une force de sécurité du mouvement islamiste Hamas affirme avoir infligé "un coup sévère" dans le sud de la bande de Gaza à un groupe armé qui menace la sécurité du territoire palestinien.

La "Force dissuasive", entité sécuritaire récemment créée par Hamas, écrit dans un communiqué avoir visé "tôt mardi matin dans la bande de Gaza" la milice de Yasser Abou Chabab, qui "cherchait à déstabiliser la sécurité intérieure et à mener des activités suspectes, hors de la loi". Elle précise en outre que "l'opération a conduit à l'arrestation de plusieurs membres de la milice et à la confiscation de matériel militaire et d'outils utilisés dans leurs activités subversives, après une surveillance attentive de leurs mouvements au cours des derniers jours".

Le conseiller à la sécurité nationale annonce avoir été limogé par Benyamin Netanyahou

Le conseiller à la sécurité nationale israélien, Tzachi Hanegbi, a annoncé mardi avoir été limogé par le Premier ministre Benyamin Netanyahou. "Le Premier ministre Netanyahou m'a informé aujourd'hui de son intention de nommer un nouveau chef du Conseil national de sécurité", déclare Tzachi Hanegbi dans un communiqué transmis à l'AFP, ajoutant que son mandat prenait fin par conséquent "aujourd'hui".

"La terrible défaillance du 7-Octobre, à laquelle je suis partie prenante, doit faire l'objet d'une enquête approfondie afin de s'assurer que les leçons nécessaires seront Tzachi Hanegbi.

Les Etats-Unis n'enverront pas de troupes à Gaza, déclare J.D. Vance en Israël

Les Etats-Unis n'enverront pas de troupes à Gaza pour surveiller l'application du cessez-le-feu entre Israël et le Hamas, a affirmé mardi le vice-président américain J.D. Vance en visite en Israël. "Il n'y aura pas de troupes américaines sur le terrain à Gaza", a-t-il affirmé, lors d'une conférence de presse tenue en présence de l'émissaire américain Steve Witkoff et du gendre du président américain Jared Kushner.

Washington n'a pas fixé de date butoir pour le désarmement du Hamas

Washington n'a pas fixé de date butoir pour le désarmement du Hamas dans le cadre du cessez-le-feu parrainé par les Etats-Unis à Gaza et n'a pas l'intention de lancer un ultimatum sur ce point pour l'instant, a déclaré mardi le vice-président J.D. Vance en visite en Israël.

"Le Hamas doit se conformer à l'accord et si le Hamas ne se conforme pas à l'accord, de très mauvaises choses vont se produire, mais je ne vais pas faire ce que le président des Etats-Unis a refusé de faire jusqu'à présent, c'est-à-dire fixer une date butoir explicite, car [...] ces choses-là sont difficiles", a commenté J.D. Vance lors d'une conférence de presse à Kiryat Gat, dans le sud-ouest d'Israël.

J.D. Vance "très optimiste" sur le maintien du cessez-le-feu à Gaza

Le vice-président américain J.D. Vance, en visite en Israël, s'est dit mardi "très optimiste" sur le maintien du cessez-le-feu dans la bande de Gaza, le troisième après plus de deux ans de guerre. "Ce qu'on a vu durant la semaine écoulée me rend très optimiste sur le fait que le cessez-le-feu" en vigueur depuis le 10 octobre entre Israël et le Hamas "va durer", a déclaré J.D. Vance depuis Kiryat Gat dans le sud d'Israël.

"Nous nous en sortons très bien", a-t-il ajouté. "Chaque fois qu'il y a un acte de violence, il y a cette tendance à dire: 'oh, c'est la fin du cessez-le-feu, c'est la fin du plan de paix'", a déclaré lors d'une conférence de presse J.D. Vance, deux jours après des violences et des bombardements meurtriers à Gaza qui ont illustré la fragilité du cessez-le-feu entré en vigueur à Gaza le 10 octobre. "Ce n'est pas la fin. C'est en fait exactement comme cela doit se passer lorsque vous avez des personnes qui se détestent, qui se sont combattues pendant très longtemps. Nous nous en sortons très bien", a ajouté le dirigeant américain.

Donald Trump dit que ses alliés au Moyen-Orient sont prêts à envoyer des troupes pour "redresser" le Hamas

Donald Trump a assuré mardi que ses alliés au Moyen-Orient et autour étaient prêts à envoyer, à sa demande, des troupes dans la bande de Gaza pour "redresser" le Hamas si le mouvement palestinien ne mettait pas fin à ses violations de l'accord de cessez-le-feu.

"Nombre de nos désormais grands alliés au Moyen-Orient, et dans les zones alentour, m'ont explicitement et fermement (...) informé qu'ils accueilleraient favorablement l'occasion, à ma demande, d'entrer à Gaza en force et +redresser+ le Hamas s'il continuait à mal se conduire, en violation de leur accord avec nous", a indiqué le président américain sur sa plateforme Truth Social.

Le Hamas dit qu'il rendra deux dépouilles d'otages à Israël mardi

La branche armée du Hamas a annoncé qu'elle rendrait mardi à 18h00 GMT les dépouilles de deux otages sur les 15 qui sont encore détenus dans la bande de Gaza, selon un communiqué.

Dans le cadre de l'échange entre otages et prisonniers convenu dans l'accord de cessez-le-feu en vigueur depuis le 10 octobre, "les Brigades Ezzedine al-Qassam remettront les corps de deux prisonniers israéliens qui ont été exhumés aujourd'hui (mardi, ndlr) dans la bande de Gaza", dit le communiqué.

Une situation "très fragile" à Gaza, reconnaît Emmanuel Macron

Le président français Emmanuel Macron, en déplacement en Slovénie, a qualifié la situation à Gaza de "très fragile". "Il importe que le Hamas respecte pleinement les engagements qu'il a pris (...) et que la pression demeure pour que le cessez-le-feu soit pleinement observé", a-t-il dit lors d'une conférence de presse à Ljubljana.

Pour le dirigeant français, il faut "passer tout de suite, et c'est l'urgence absolue, à la réouverture des ponts humanitaires et des différentes routes humanitaires pour que l'aide, l'alimentation et les soins de première nécessité puissent être apportés à la population". Et que l'"on puisse venir en aide aux blessés, à toutes les personnes, les familles les plus vulnérables qui doivent être sorties du territoire de Gaza pour être prises en charge dans les hôpitaux de la région", a-t-il poursuivi.

Emmanuel Macron a aussi insisté sur la nécessité qu'une résolution soit prise "dans les meilleurs délais" au Conseil de sécurité de l'Onu afin d'avoir un "cadre international à la fois (pour) la gouvernance et la sécurité" future de Gaza.

J.D. Vance est arrivé en Israël

Le vice-président américain, J.D. Vance, est arrivé mardi en Israël, a annoncé le ministère des Affaires étrangères israélien. La visite du responsable intervient alors que Washington intensifie ses efforts diplomatiques en vue de rendre durable le fragile cessez-le-feu en vigueur entre Israël et le Hamas à Gaza depuis le 10 octobre.

"Bienvenue en Israël, Monsieur le vice-président", a écrit le ministère dans un message publié sur X et accompagné d'une photo de J.D. Vance et de son épouse, Usha Vance, accueillis à leur arrivée à l'aéroport international de Tel-Aviv par le vice-Premier ministre israélien Yariv Levin. Lundi, l’envoyé spécial de Donald Trump pour le Moyen-Orient, Steve Witkoff, et le gendre du président américain, Jared Kushner, ont avant lui rencontré le Premier ministre israélien Benyamin Netanyahou.

Dimanche, J.D. Vance avait indiqué que la trêve connaîtrait des "hauts et des bas". "Le Hamas va tirer sur Israël. Israël va devoir répondre", avait-il exposé. "Nous pensons donc que le cessez-le-feu a toutes les chances d’offrir une paix durable. Mais même s’il y parvient, il y aura des hauts et des bas, et nous devrons surveiller la situation."

Israël a rendu quinze dépouilles de Palestiniens

Le Comité international de la Croix-Rouge (CICR) a déclaré mardi avoir mené à bien le transfert dans la bande de Gaza de dépouilles de Palestiniens retenues en Israël, dans le cadre de l'accord de cessez-le-feu entre Israël et le Hamas.

"Le Comité international de la Croix-Rouge (CICR) a effectué aujourd'hui le transfert de corps de Palestiniens décédés aux autorités de Gaza, en tant qu'intermédiaire neutre (...) les autorités sanitaires locales de Gaza ont confirmé que le nombre de dépouilles reçues aujourd'hui s'élève à 15", a-t-il indiqué dans un communiqué.

En vertu de l'accord de cessez-le-feu à Gaza, Israël doit remettre les corps de 15 Palestiniens pour chaque otage israélien décédé restitué. Israël a indiqué mardi avoir identifié la treizième dépouille d'otage rendue par le Hamas la veille au soir, comme étant celle du soldat Tal Haïmi, commandant de la milice de défense du kibboutz Nir Yitzhak, où plusieurs personnes ont été tuées ou kidnappées lors des attaques terroristes du 7 octobre 2023

Le chef des renseignements égyptiens va rencontrer Steve Witkoff

Le chef des renseignements égyptiens, Hassan Rachad, se rend ce mardi en Israël pour rencontrer des officiels israéliens et l'émissaire américain Steve Witkoff, a rapporté Extra News, une télévision égyptienne liée à l'Etat.

Le rôle de ce responsable égyptien, très actif dans les négociations ayant conduit au cessez-le feu entré en vigueur depuis le 10 octobre entre Israël et le Hamas, avait été publiquement loué par le président américain Donald Trump, lors du sommet de Charm el-Cheikh (Egypte) sur Gaza la semaine dernière.

L'émir du Qatar condamne la "poursuite des violations" du cessez-le-feu à Gaza

L'émir du Qatar, dont le pays est un médiateur clé pour la trêve en cours à Gaza, a accusé ce mardi Israël de continuer à violer le cessez-le-feu après une série de frappes meurtrières israéliennes visant le Hamas dans le territoire palestinien. "Nous réaffirmons notre condamnation de toutes les violations et pratiques israéliennes en Palestine, en particulier la transformation de la bande de Gaza en une zone impropre à la vie humaine, (et) la poursuite des violations du cessez-le-feu", a déclaré Cheikh Tamim ben Hamad al-Thani dans son discours annuel devant le Conseil législatif à Doha.

Malgré le cessez-le-feu en vigueur, Israël a repris temporairement les frappes sur la bande de Gaza le week-end dernier. Une opération justifiée par les autorités du pays comme une riposte à des violences commises, selon l’État hébreu, par le Hamas. Le mouvement islamiste aurait notamment visé des troupes israéliennes au sud de l’enclave.

Un responsable du groupe armé a redit mardi de son côté sa volonté de "respecter" le cessez-le-feu à Gaza. "Nous avons beaucoup de difficultés à extraire les corps, mais nous sommes déterminés et nous travaillons dur pour y parvenir", a ainsi assuré le négociateur en chef du Hamas, Khalil al-Hayya, interrogé sur la chaîne égyptienne Al-Qahera News. "L’accord pour Gaza tiendra, car nous le voulons et que notre volonté de le respecter est forte." Lundi, Donald Trump avait menacé d'"éradiquer" le Hamas s’il ne respectait pas cet accord, qui prévoit dans un second temps son désarmement.

Le maintien du cessez-le-feu est "vital" pour acheminer de l'aide, affirme l'ONU

Le maintien du cessez-le-feu à Gaza est "vital" pour apporter de l'aide "et sauver des vies" à Gaza, a exhorté ce mardi le Programme alimentaire mondial (PAM) de l'ONU, appelant de nouveau à l'ouverture de tous les points de passage vers le territoire palestinien. "Le maintien du cessez-le-feu est vital. C'est vraiment le seul moyen de sauver des vies et de lutter contre la famine dans le nord de Gaza.", a annoncé devant la presse à Genève Abeer Etefa, porte-parole du PAM, après les violences de dimanche dans le territoire palestinien, les plus importantes depuis l'entrée en vigueur d'un accord de cessez-le-feu le 10 octobre.

© afp.com/Nathan HOWARD

Le vice-président américain JD Vance se prépare à l'embarquement dans Air Force Two pour se rendre en Israël, le 20 octobre 2025 à la base Andrews, dans le Maryland.
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Japon : nationaliste, inspirée par Thatcher… Qui est Sanae Takaichi, la nouvelle Première ministre ?

Une femme pour la première fois à la tête du Japon. La nationaliste Sanae Takaichi a été nommée ce mardi 21 octobre Première ministre du pays asiatique, après un vote à la chambre basse du Parlement. Il n’a fallu qu’un tour à cette responsable de 64 ans pour accéder à sa nouvelle fonction. Sa nomination deviendra officielle quand elle aura rencontré l’empereur Naruhito plus tard dans la journée. Sanae Takaichi s’est engagée à "renforcer l’économie japonaise et à refondre le Japon pour en faire un pays capable d’assumer ses responsabilités envers les générations futures".

Longue ascension politique

Cette nomination marque l’apogée de la longue ascension politique de cette figure conservatrice au Japon. Début octobre, Sanae Takaichi avait ainsi été élue à la tête du Parti libéral-démocrate (PLD), formation conservatrice au pouvoir presque sans discontinuer depuis 1955. Néanmoins, ce dernier est de plus en plus critiqué. Un scandale financier a terni sa crédibilité, tandis que son allié traditionnel centriste, le parti Komeito, a quitté la coalition gouvernementale qu’ils formaient ensemble depuis un demi-siècle. Un bouleversement de plus pour le monde politique japonais, déjà remué par d’incessants changements gouvernementaux ces cinq dernières années.

Face à cette équation politique délicate, Sanae Takaichi va devoir composer avec ses nouveaux partenaires d’Ishin, formation réformatrice de centre-droit, sans renoncer à ses idées nationalistes. Si la Première ministre avait promis un équilibre entre les genres "à la scandinave" dans son équipe, elle a déjà déçu certaines attentes, en ne nommant mardi que deux femmes ministres dans son gouvernement. Sanae Takaichi compte ainsi défendre une ligne traditionaliste sur le plan sociétal. Elle s’oppose par exemple à la révision d’une loi obligeant les couples mariés à porter le même nom de famille et soutient une succession impériale réservée aux hommes.

Positions révisionnistes

Sanae Takaichi est également coutumière de positions révisionnistes, en particulier sur la question du rôle du Japon durant la Seconde Guerre mondiale. Elle nie les crimes commis à cette époque par l’armée impériale. Lors de sa carrière politique, elle s’est rendue à plusieurs reprises au sanctuaire de Yasukuni, considéré comme un symbole du passé militariste du Japon. Le lieu est associé aux exactions commises par les militaires japonais dans la première moitié du XXe siècle, notamment en Chine et dans la péninsule coréenne. Pressentie pour devenir Première ministre, Sanae Takaichi a renoncé ces derniers jours à visiter de nouveau le site, se contentant d’y envoyer une offrande.

Très offensive dans son discours contre la Chine, la nouvelle Première ministre japonaise s’affiche en revanche comme prête à renforcer les liens entre son pays et les États-Unis. Début octobre, Donald Trump avait d’ailleurs salué son accession à la tête du PLD. "Le Japon vient d’élire sa première femme Première ministre, une personne très respectée, d’une grande sagesse et force. C’est une formidable nouvelle", avait-il écrit, sur son réseau Truth Social. Donald Trump se déplacera d’ailleurs au Japon la semaine prochaine, pour une visite de deux jours dans l’archipel.

Thatcher et Abe, ses deux modèles

Plus que le président américain, Sanae Takaichi revendique avant tout s’inspirer d’une autre Première ministre : la Britannique Margaret Thatcher, au pouvoir au Royaume-Uni entre 1979 et 1990. Mais son véritable mentor reste l’ex-Premier ministre Shinzo Abe, longtemps à la tête du gouvernement japonais (2012-2020) et assassiné par balles en 2022, lors d’un discours dans la ville de Nara… dont est originaire Sanae Takaichi, qui a été élue à plusieurs reprises députée de cette région.

Outre un paysage politique fragmenté et une situation internationale instable, la nouvelle cheffe du gouvernement devra surtout faire face aux grands défis actuels du Japon sur le plan économique. Le déclin démographique inquiète de longue date dans le pays. Par ailleurs, si le produit intérieur du brut japonais a légèrement rebondi (+ 0,3 %) au second trimestre 2025 après une chute (-0,2 %) sur les trois premiers mois de l’année, le dynamisme commercial nippon préoccupe toujours. Sanae Takaichi s’est exprimée par le passé en faveur de l’augmentation des dépenses publiques pour relancer l’économie, mais a depuis tempéré son discours.

© afp.com/Philip FONG

La présidente du Parti libéral démocrate (PLD) Sanae Takaichi a été nommée Première ministre du Japon lors d'une session extraordinaire de la chambre basse du Parlement à Tokyo, le 21 octobre 2025
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La Colombie dénonce une "menace d'invasion" américaine après les propos de Donald Trump

La Colombie a dénoncé lundi une "menace d'invasion" de la part des Etats-Unis et rappelé son ambassadeur à Washington pour consultations, après la mise en garde la veille de Donald Trump qui a évoqué une possible intervention de son pays si Bogota n'arrêtait pas "immédiatement" la production de drogue. Le président américain a en outre annoncé la suspension du versement des aides financières accordées à la Colombie, sans préciser lesquelles.

Les relations entre les deux pays au plus bas

Les relations entre les deux pays, historiquement alliés, ont atteint leur point le plus bas avec l'arrivée de Donald Trump à la Maison-Blanche et l'élection en 2022 du premier chef de l'Etat colombien de gauche, Gustavo Petro. Washington a ainsi révoqué en septembre le statut de la Colombie qui était considérée comme un de ses 20 partenaires dans la lutte antidrogue. Celle-ci a répliqué en suspendant ses achats d'armes aux Etats-Unis, son principal partenaire dans le domaine militaire.

Le président américain a affirmé dimanche sur son réseau Truth Social que son homologue colombien était un "baron de la drogue qui encourage fortement la production massive de stupéfiants" dans son pays. "Petro, un dirigeant peu apprécié et très impopulaire (...) ferait mieux de fermer ces champs de la mort immédiatement, sinon les Etats-Unis les fermeront pour lui et cela ne se fera pas gentiment", a encore écrit Donald Trump.

Echange d'accusations

S'exprimant lundi sur Blu Radio, le ministre colombien de l'Intérieur, Armando Benedetti, a en conséquence assuré que la Colombie faisait face à une "menace d'invasion ou d'action terrestre ou militaire contre la Colombie". Il a suggéré qu'une solution alternative pour les Etats-Unis serait de pulvériser du glyphosate, un pesticide, sur les cultures de drogue, ce qui constituerait également une atteinte à la "souveraineté" de son pays.

Le président américain a par ailleurs dit vouloir annoncer de nouveaux droits de douane sur les produits colombiens, déjà soumis à une taxe de 10 %. En réponse, Gustavo Petro a proposé lundi sur X aux Etats-Unis de "supprimer les droits de douane sur la production agricole et agroindustrielle" de son pays "afin de renforcer la production légale". Considérant que Donald Trump était "trompé" par ses "conseillers", Gustavo Petro a assuré que la politique antidrogue américaine avait "causé un million de morts en Amérique latine" et n'était qu'"un prétexte pour contrôler cette région", notamment afin d'"obtenir le pétrole bon marché du Venezuela".

Peu auparavant, la Colombie avait fait savoir qu'elle avait rappelé son ambassadeur aux États-Unis, Daniel Garcia Peña, pour consultations après l'annonce par le président américain d'une interruption de son aide financière à Bogota.

Une frappe sur un bateau

Washington a par ailleurs fait état dimanche d'une nouvelle frappe - qui a fait trois morts -, le 17 octobre, contre un navire dans les Caraïbes, un bateau affilié à la guérilla colombienne de l'Armée de libération nationale (ELN) soupçonné de transporter de la drogue. Cette attaque s'est inscrite dans le cadre d'une extension de l'opération militaire des Etats-Unis dans la mer des Caraïbes, où ils déploient des bâtiments de guerre, au large du Venezuela, depuis le mois d'août.

Au total, au moins sept bateaux ont été ciblés par les forces américaines, avec un bilan d'au moins 30 morts. Les experts s'interrogent sur la légalité de ces frappes contre des suspects qui n'ont été ni interceptés ni interrogés.

La Colombie est le pays d'Amérique du Sud recevant la plus importante aide financière de Washington, selon les données américaines, avec plus de 740 millions de dollars versés en 2023, la dernière année dont les données sont disponibles. La moitié de cette somme est consacrée à la lutte contre la drogue. Le reste sert notamment à financer des programmes humanitaires et alimentaires.

La Colombie est le premier producteur mondial de cocaïne, avec un record de 2.600 tonnes en 2023, soit 53 % de plus que l'année précédente, selon l'ONU. Des chiffres contestés par Gustavo Petro qui dénonce des problèmes méthodologiques. Depuis son arrivée au pouvoir, il préfère miser sur la lutte contre les problèmes sociaux qui alimentent les trafics et sur des négociations avec les groupes armés, pour l'instant infructueuses.

© Mandel NGAN, JOAQUIN SARMIENTO / AFP

Les relations entre les deux pays, historiquement alliés, ont atteint leur point le plus bas avec l'arrivée de Donald Trump à la Maison-Blanche et l'élection en 2022 du premier chef de l'État colombien de gauche, Gustavo Petro.
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Une étude met en doute la pertinence de la politique de cohésion européenne

C’est une nouvelle étude qui risque de faire réagir au sein de l’Union européenne (UE). Selon Zareh Astryan, professeur d’économie à l’université de Münster, le budget de 392 milliards d’euros destiné à soutenir les régions les plus pauvres de la zone produit un rendement très faible, chaque euro dépensé par l’UE dans le cadre de sa "politique de cohésion" ne générant qu’environ un euro de croissance supplémentaire du PIB, révèle le Financial Times, ce lundi 20 octobre. D’après les travaux de l’économiste, bien que ces aides, qui peuvent parfois représenter l’essentiel des investissements publics dans certains pays, contribuent à attirer entre deux et trois euros d’investissements privés pour chaque euro dépensé, ces derniers ont tendance à s’effondrer dès lors que les régions perdent l’accès à ces fonds.

Une analyse qui rejoint celle d’autres spécialistes, pour lesquels cet argent peut certes permettre de moderniser les infrastructures et soutenir l’emploi dans toute la périphérie de l’UE, mais dont l’impact sur la productivité et l’innovation reste inégal. "En moyenne, la politique de cohésion semble avoir été efficace pour stimuler la croissance des régions européennes, mais ce n’est pas le cas partout", appuie auprès du Financial Times Ugo Fratesi, professeur d’économie régionale à l’Ecole polytechnique de Milan.

Des inquiétudes

Du côté des Etats, certains s’inquiètent déjà. "Sans politique de cohésion, nous ne serions pas en mesure de réparer un grand nombre de routes, de ponts, d’écoles, d’équipements sociaux, d’hôpitaux et de transports en commun", a illustré Milan Majerský, gouverneur régional de Prešov, la région la plus pauvre de Slovaquie orientale, où les fonds de cohésion représentent environ 80 % des investissements publics. "La Slovaquie ne pourrait pas fonctionner sans les fonds européens", a-t-il résumé. A Murcie, une région sèche du sud de l’Espagne, on affirme également que les nets progrès dans les domaines agricoles et de gestion de l’eau auraient été impossibles sans ces aides, qui ont fait du territoire "l’une des économies régionales espagnoles à la croissance la plus rapide", soutient Fernando López Miras, son président.

A l’inverse, les responsables des pays les plus riches du nord et de l’ouest de l’UE, principaux contributeurs au budget de l’Union, affirment que les dépenses de cohésion ont déjà permis aux régions de rattraper leur retard économique, et que ces ressources doivent désormais être réorientées vers d’autres priorités, comme la défense ou la relance industrielle.

Un contexte tendu

Ces critiques à l’encontre des fonds de cohésion s’inscrivent dans un contexte déjà tendu. Le 15 octobre dernier, le Comité européen des régions (Cdr) a rejeté, par une résolution adoptée à l’unanimité, le projet de la Commission européenne visant à fusionner les fonds destinés au développement régional et à l’agriculture dans le budget 2028-2034. Outre l’absence de garanties d’accès à la politique de cohésion pour toutes les régions, le Cdr alerte contre le regroupement de ces aides en "un seul paquet nationalisé sans critères d’allocation clairs", ce qui pourrait engendrer une concurrence entre les agriculteurs et les collectivités locales, assure l’organe consultatif.

Les régions en appellent désormais aux institutions compétentes pour bloquer le projet : "Le Parlement européen et le Conseil de l’UE doivent désormais prendre leurs responsabilités pour stopper ces projets et éviter une aggravation des conflits institutionnels et du chaos", a déclaré Kata Tüttő, la présidente du Cdr, qui a mené une mobilisation éclair sur la place située devant le Parlement européen. Melonian Fitto, le vice-président exécutif de la Commission européenne en charge de la cohésion, a de son côté échangé avec les régions italiennes le 14 octobre dernier, assurant que "la cohésion sans les régions [était] impossible".

© afp.com/FREDERICK FLORIN

La présidente de la Commission européenne Ursula von der Leyen au parlement européen à Strasbourg, le 8 octobre 2025
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Procès libyen : Nicolas Sarkozy lourdement condamné pour "association de malfaiteurs"

Après cinq ans d'enquête, l'ancien chef de l'Etat a été mis en examen pour "corruption passive", "recel de fonds libyens" et "financement illégal de campagne". Les juges mènent des investigations sur des accusations de financement de sa campagne présidentielle victorieuse de 2007 avec de l'argent libyen, lancées par d'anciens dignitaires du régime de Mouammar Kadhafi. L'affaire avait rebondi en novembre 2016, avec les déclarations explosives de Ziad Takieddine quand il avait affirmé avoir lui-même remis 5 millions d'euros d'argent libyen au camp Sarkozy quelques mois avant son élection à la présidence.

© afp.com/Alain JOCARD

L'ancien président Nicolas Sarkozy s'adresse à la presse, à la sortie de la salle d'audience au tribunal de Paris, le 25 septembre 2025
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Donald Trump, le rêve d’un changement de régime au Venezuela : "Maduro est terrifié à l’idée d’être assassiné"

A 62 ans, dont douze au pouvoir, Nicolas Maduro traverse une mauvaise passe. Crise de la soixantaine ? Grosse fatigue ? Insomnies ? Bien pire : depuis un an, le dirigeant vénézuélien fait face à une de ces accumulations de mauvaises nouvelles qui faisait dire à Jacques Chirac : "Les emmerdes, ça vole toujours en escadrilles". Tout commence à l’été 2024 lorsque l’opposition, pour une fois unie sous la houlette de María Corina Machado, fait la démonstration que son candidat a remporté l’élection présidentielle. Avant la proclamation officielle du résultat à l’échelle nationale par le gouvernement, ses très nombreux partisans recueillent et documentent les résultats de chaque bureau de vote du pays, puis les rendent publics. Contre l’évidence, et contre l’avis de la communauté internationale, Maduro se déclare vainqueur. Selon le décompte – crédible – de l’opposition, il a au contraire perdu par 30 % des suffrages contre 67 % à son adversaire Edmundo Gonzalez qui remplace "Maria Corina", celle-ci ayant été empêchée par Maduro de se présenter, sous un motif fallacieux.

Quelques semaines plus tard, nouvelle tuile : Donald Trump, qui, durant son premier mandat, avait lancé une politique de "pression maximum" contre Caracas, est réélu a la Maison-Blanche. Il nomme Marco Rubio, qui est d’origine cubaine, au ministère des Affaires étrangères et au poste-clé de Conseiller à la sécurité nationale. Pas de chance, celui qui est le premier Latino de l’histoire à occuper cette fonction s’intéresse de près au Venezuela ! Plaque tournante du trafic de drogue, le pays pétrolier est désormais considéré par Washington comme un narco-Etat qui menace la sécurité nationale des Etats-Unis.

Une récompense pour la capture de Maduro

Quelques mois passent et la pression s’accentue. Washington ajoute le cartel des Soleils - en référence à l’astre figurant sur les épaulettes des généraux -, une organisation criminelle liée à des membres du gouvernement vénézuélien et des hauts gradés, à la liste du Département d’Etat des organisations terroristes, où figurent aussi le Hezbollah, Al-Qaïda, des cartels mexicains ou Boko Haram (Nigeria). Enfin en août, la justice américaine double, jusqu’à 50 millions de dollars, la récompense promise à quiconque permettra l’arrestation de Nicolas Maduro, tenu pour le grand chef mafieux au sommet de l’Etat.

"Nicolas Maduro et sa femme Cilla Flores, sont terrifiés à l’idée d’être assassinés", témoigne un consultant occidental (désireux de rester anonyme) qui les a rencontrés plusieurs fois ces dernières années. Selon lui, le couple dort habituellement en sous-sol dans des lieux bunkerisés. La semaine dernière, leur inquiétude a dû augmenter d’un cran : Donald Trump a laissé fuiter l’information selon laquelle il autorisait la CIA à mener des actions clandestines au Venezuela… En outre, depuis un mois, une impressionnante flotte américaine est déployée dans la mer des Caraïbes : un porte-avions, un sous-marin, un croiseur, un porte-hélicoptères, cinq destroyers, etc. Ce n’est pas tout. 10 000 soldats sont sur le pied de guerre sur l’île de Porto Rico, à 500 kilomètres au nord de Caracas.

"Après ses déclarations de début d’année sur la reprise de contrôle du canal de Panama, un parfum de guerre froide plane incontestablement sur la région", estime le spécialiste de l’Amérique latine Gaspard Estrada en évoquant ce qui constitue la plus importante présence navale américaine dans les Caraïbes depuis 1965. Depuis deux mois, le Pentagone multiplie en effet les démonstrations de force au large du Venezuela. Dans le cadre de la lutte contre le narcotrafic, l’US Navy a détruit et coulé au moins cinq hors-bords vénézuéliens transportant, selon elle, de la cocaïne, tuant 27 personnes. Pas vraiment légal mais, face à des mafieux, Trump, on le sait, ne s’encombre guère d’états d’âme.

Enfin, le 15 octobre, une escadrille de l’US Air Force – semblable à celle qui a bombardé l’Iran en juin – s’est envolée vers le Venezuela : après avoir décollé de Louisiane, trois bombardiers B-52 ont volé pendant deux heures près des eaux territoriales du pays latino. Les forteresses volantes étaient escortées par des chasseurs F-18, des F-35 et des avions ravitailleurs. A l’évidence, l’on assiste à une guerre psychologique. Car, persuadé que le pays de Simon Bolivar peut tomber comme un fruit mûr, Trump n’a nulle intention d’envahir le Venezuela, façon Débarquement de Normandie.

"La popularité de 'Maria Corina' dont le prix Nobel de la paix a renforcé la stature morale, mais aussi l’appui international et les fractures à l’intérieur du régime sont autant d’éléments qui laissent à penser que le règne de Nicolas Maduro touche à sa fin", veut croire Carlos Blanco, un ex-dirigeant de gauche qui conseille María Corina Machado. Depuis Washington, Virginia Contreras, une ex-diplomate nommée par Hugo Chavez aujourd’hui en délicatesse avec Maduro est, elle, sans illusion : "La situation se dégrade depuis très longtemps sans que rien ne change. Régulièrement, on croit à la fin du régime, puis les espoirs s’effondrent."

Il rêve d'un changement de régime à Caracas

La vraie question est : que veut Trump ? Pendant qu’il est accaparé par ses "deals" au Moyen Orient et les tractations avec Vladimir Poutine au sujet de l’Ukraine, il laisse la bride sur le cou du secrétaire d’Etat Marco Rubio. A la manœuvre, celui-ci rêve d’un changement de régime à Caracas. Il sait que par ricochet, cela fragiliserait les deux autres dictatures rouge-brunes de la région, Cuba et le Nicaragua. Reste à savoir comment faire tomber le "bolivarien" Maduro. L’assassiner au moyen de frappes ciblées ? Par sûr que l’idée, mise en œuvre contre le Hamas et le Hezbollah, soit géniale. "Cela ne résoudrait rien, reprend notre connaisseur occidental du pouvoir vénézuélien. Maduro serait aussitôt remplacé par pire que lui, par exemple Diosdado Cabello, le ministre de la Sécurité et de la Justice, ou Vladimir Padrino, le ministre de la Défense, tous deux recherchés par la justice américaine." Autre scénario envisagé, se débarrasser d’abord de l’entourage de Maduro, puis négocier avec ce dernier son départ. Pour Marco Rubio, l’élimination de Diosdado Cabello aurait en tout cas un goût de revanche : en 2017, selon le Miami Herald, cet impitoyable pilier du régime projetait en effet de faire assassiner le sénateur de Floride (Rubio) par des tueurs mexicains.

Obtenir le consentement de Maduro pour qu’il soit exfiltré vers, par exemple, Moscou, le Qatar ou Istanbul (en échange de la vie sauve) serait une autre option. "C’est plus facile à dire qu’à faire car le Vénézuélien est lui-même prisonnier de forces qui le dépassent, explique encore notre témoin. Sa sécurité personnelle est, en effet, assurée par des soldats cubains et des mercenaires russes de l’ex-groupe Wagner." Or ni La Havane ni Moscou n’ont intérêt à céder quoi que ce soit à Washington. Le fait est que depuis un quart de siècle, les Cubains et les Russes – mais aussi les Chinois et les Iraniens – ont tous avancé leurs pions au Venezuela… et ils ne comptent pas les retirer. Pour Donald Trump, à l’inverse, la chute de Maduro et le retour de la démocratie à Caracas seraient une victoire politique majeure, sachant que les électorats cubano-américain et américano-vénézuélien pèsent lourd, non seulement en Floride mais aussi à Washington – au Sénat et à la Chambre des représentants.

Du pétrole lourd

Derrière tous ces calculs se cache un autre enjeu : l’or noir. Autrefois surnommé "Venezuela saoudite", le pays pétrolier abrite toujours d’extraordinaires réserves de pétrole lourd. Cependant, un quart de siècle d’incompétence, de corruption et de clientélisme a ruiné le pays. A peine arrivé au pouvoir en 1999, Hugo Chavez s’est mis en tête de chasser les compagnies pétrolières occidentales, notamment américaines, et d’utiliser l’entreprise nationale Petroleos de Venezuela (PDVSA) comme sa tirelire personnelle pour financer sa "révolution bolivarienne" et arroser ses amis, à commencer par Fidel Castro mais aussi de nombreux dirigeants de la gauche latino-américaine. "Officiellement, il s’agissait de remplacer les 'impérialistes' américains par des Russes, des Chinois et des Iraniens", raconte Humberto Calderón Berti, ancien patron de PDVSA, ex-président de l’OPEP et aujourd’hui conseiller de María Corina Machado. "Le problème, c’est que nous n’avons aucune affinité, ni culture ou langue en commun, avec ces trois peuples. Finalement, les Russes n’ont pas exploité le pétrole, les Chinois se sont focalisés sur nos minerais, et les Iraniens ont participé au narcotrafic afin, notamment, de financer le Hezbollah."

Résultat ? La production a plongé, passant de 3,7 millions à 800 000 barils par jour, dès les années 2010. Parallèlement, le nombre d’employés est passé de 40 000 à 100 000, tous supporters de feu Chavez. A l’inverse, ce dernier a un jour licencié d’un seul coup (en direct à la télévision !) 20 000 cadres, ingénieurs et ouvriers qui dénonçaient ce clientélisme. Sans personnel compétent et sans investissements, la compagnie PDVSA, autrefois une fierté nationale, a périclité. Les puits et raffineries ont été abandonnés, pillés et… revendus en pièces détachées à des ferrailleurs ! Si elle arrive un jour au pouvoir, María Corina Machado promet de faire revenir des investisseurs étrangers, dont Total, en s’appuyant sur des privatisations. Dans ce pays qui possède d’immenses réserves inexploitées, il y a matière à un bon "deal" avec Trump. Lequel n’entend pas laisser les Chinois prendre racine dans cet eldorado pétrolier en puissance.

© AFP

Le président vénézuélien Nicolas Maduro (à gauche) à Caracas le 10 janvier 2025, et le président américain Donald Trump (à droite) à Pittsburgh, en Pennsylvanie, le 15 juillet 2025.
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Un tunnel pour relier l’Alaska à la Russie, ce projet fou que Moscou fait miroiter à Donald Trump

C’est un projet datant de plus d’un siècle, sur lequel Moscou tente de capitaliser pour se rapprocher encore plus de son rival américain. Alors que Donald Trump a annoncé un sommet avec Vladimir Poutine "dans les deux prochaines semaines" pour évoquer la situation en Ukraine, la Russie a ressorti de ses cartons l’idée de construire un tunnel sous le détroit de Béring, permettant de relier les deux pays de l’Alaska à la Tchoukotka.

Jeudi 16 octobre, dans la foulée d’une conversation téléphonique entre les présidents russe et américain, Kirill Dmitriev, le patron du Fonds souverain d’investissements directs (RDIF) en charge de réchauffer les relations économiques avec les Etats-Unis, a en effet évoqué sur X la possibilité d’un "tunnel Poutine-Trump", un "lien de 112 km symbolisant l’unité". Selon lui, cette infrastructure, unique au monde, pourrait être réalisée en moins de huit ans et coûterait "seulement" 8 milliards de dollars (environ 6,9 milliards d’euros), bien loin des estimations traditionnelles qui tablaient sur un montant de 65 milliards de dollars pour un projet d’une telle ampleur. Le négociateur russe a également proposé que le maître d’œuvre soit The Boring Company, une société spécialisée dans le creusement de tunnels via des foreuses à haut rendement fondée par… Elon Musk, en 2016.

"N’est-il pas préférable de relier (nos continents) par un tunnel Alaska-Russie, plutôt que d’augmenter les risques d’une Troisième guerre mondiale", a-t-il écrit vendredi, dans une deuxième salve de messages sur X. "Cela transformerait une des dernières frontières du monde en une success-story partagée – prouvant ainsi que les rivaux peuvent collaborer quand les enjeux sont à la hauteur", a-t-il encore affirmé.

Un projet ancien

Ce projet fou n’est néanmoins pas nouveau. Kirill Dmitriev a d’ailleurs expliqué que l’idée lui était venue en consultant des archives soviétiques récemment déclassifiées sur l’assassinat de John F. Kennedy. Le patron de la RDIF a publié une lettre d’un Américain adressée au dirigeant soviétique de l’époque Nikita Khrouchtchev, montrant une carte dessinée à la main matérialisant ledit ouvrage, sur laquelle était indiqué : "Le pont Kennedy-Khrouchtchev pour la paix mondiale pourrait et devrait être construit entre l’Alaska et la Russie".

Plusieurs années auparavant, en 1890, le gouverneur de l’Etat du Colorado de l’époque, William Gilpin, avait également eu l’idée d’une liaison ferroviaire entre les deux continents, prévoyant que du côté de l’Alaska, des "wagons soient chargés sur des ferrys brise-glace et transportés vers la Tchoukotka, où l’on souhaitait également construire une voie ferrée", indique le tabloïd proche du Kremlin Komsomolskaïa Pravda. Le projet, finalement repoussé par le gouvernement russe qui craignait le développement de l’influence étrangère, sera suivi par d’autres propositions de ponts ou tunnels, sans pour autant convaincre les investisseurs et les pays concernés. Le dernier en date, porté par un certain Fiodor Soloviev, immigré russe en Alaska, est resté dans les tiroirs, celui-ci admettait en 2013 que les tensions politiques entre Washington et Moscou, mais aussi l’absence de fonds publics, rendaient difficile un tel chantier.

Interrogé par RFI, Frédéric Lasserre, professeur de géographie à l’Université de Laval au Québec, pointe d’autres raisons : l’isolement géographique du détroit de Béring, représentant un véritable défi technique et logistique, mais aussi une absence de rentabilité, les ressources extraites en Alaska ou en Sibérie étant orientées vers les ports les plus proches pour être exportées par voie maritime sur les marchés mondiaux. "Certes, le passage par la voie ferrée serait plus rapide que par bateau, mais il coûterait beaucoup plus cher. Si on demande aux expéditeurs de payer trois fois plus pour gagner quelques jours, je ne suis pas sûr qu’ils décident de mettre leurs conteneurs sur une voie ferrée", illustre-t-il.

© AFP

Le président américain Donald Trump et le président russe Vladimir Poutine arrivent pour tenir une conférence de presse conjointe après avoir participé à un sommet américano-russe sur l'Ukraine à la base commune Elmendorf-Richardson à Anchorage, en Alaska, le 15 août 2025.
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Le chancelier allemand déclare la guerre à l’extrême droite avant une année électorale chargée

Distancée dans certaines enquêtes d’opinion par l’Alternative pour l’Allemagne (AfD), arrivée deuxième aux législatives de février dernier, l'Union chrétienne-démocrate (CDU) de Friedrich Merz veut enrayer cette progression particulièrement forte dans l’est du pays, mais aussi l’essor que le parti connaît à l’ouest. "Ce parti veut ouvertement détruire la CDU, il veut un autre pays", a accusé le chancelier allemand, lors d’une conférence de presse à Berlin après une réunion de deux jours de son parti.

"Ce ne sont pas seulement des détails qui nous séparent. Ce sont des questions fondamentales et des convictions politiques fondamentales qui nous séparent de l’AfD", a-t-il ajouté, accusant ce parti antimigrants, eurosceptique et aux positions pro russes de remettre en cause "les décisions fondamentales" de l’Allemagne démocratique née en 1949, après la Seconde Guerre mondiale. Contacté par l’AFP, le parti d’extrême droite n’a pas commenté ces propos dans l’immédiat.

Une main tendue "qui veut nous détruire"

Le président de la CDU a clairement rejeté les appels émis la semaine dernière par certains au sein de sa formation et du parti frère bavarois, la CSU, qui s’étaient dits favorables à une coopération avec l’extrême droite. Ces derniers estimaient que la stratégie du cordon sanitaire, décidée en congrès en 2018, n’avait pas réussi à stopper la progression de l’AfD. "Nous allons nous en démarquer très clairement et sans ambiguïté", a insisté Friedrich Merz.

"La main tendue que l’AfD ne cesse de nous offrir est en réalité une main qui veut nous détruire", a-t-il déclaré en référence aux propositions de coopération de l’AfD. L’an prochain, sont prévues cinq élections régionales, dont deux à l’est, en Saxe-Anhalt et dans le Mecklenbourg-Poméranie occidental, où l’AfD est attendue largement à la première place, selon les sondages actuels.

A l’ouest, l’AfD est en progression constante, et elle peut espérer une deuxième place ou troisième place dans le Bade-Wurtemberg, en Rhénanie-Palatinat et à Berlin, derrière la CDU mais au coude-à-coude avec les sociaux-démocrates ou les Verts.

© afp.com/RALF HIRSCHBERGER

Le chancelier allemand Friedrich Merz lors d'une conférence de presse à Berlin, le 3 septembre 2025
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