Attention, chute de tension
LâEspagne revient sur le black-out du 28 avril qui a privĂ© la pĂ©ninsule ibĂ©rique de courant pendant de trĂšs longues heures. Les causes sont multiples, mais le cĆur du problĂšme viendrait dâune capacitĂ© insuffisante de contrĂŽle de la tension. LâenquĂȘte officielle au niveau europĂ©en suit son cours.
AprÚs le conseil des ministres de ce 17 juin en Espagne, Sara Aagesen (ministre espagnole de la Transition écologique) a pris la parole devant la presse pour revenir sur le black-out du 28 avril en Espagne et au Portugal.
Elle dirige pour rappel la commission dâenquĂȘte sur cet Ă©vĂ©nement et sâĂ©tait dĂ©jĂ exprimĂ©e sur le sujet mi-mai. Elle expliquait notamment que le rĂ©seau avait enregistrĂ© deux « oscillations » Ă 12h03 et 12h19 le jour du black-out, puis trois incidents Ă 12h32 et 12h33.
Dix centrales thermiques prévues en renfort⊠aucune à la hauteur
Premier point, comme on pouvait sâen douter, la ministre affirme que le black-out a une « origine multifactorielle, câest-Ă -dire quâune combinaison de facteurs a jouĂ© un rĂŽle ». Des « phĂ©nomĂšnes de surtensions » se sont propagĂ©s sur le rĂ©seau Ă©lectrique, donnant vie Ă une « rĂ©action en chaĂźne » avec les dĂ©connexions des sites de productions dâĂ©lectricitĂ©. La suite, on la connait : black-out Ă©lectrique.
La ministre explique que, la veille de lâincident, le gestionnaire du rĂ©seau Ă©lectrique Red ElĂ©ctrica (REE) avait prĂ©vu « dix centrales thermiques [au gaz, au charbon, nuclĂ©airesâŠ, ndlr] pour contrĂŽler dynamiquement la tension ». Les centrales Ă©taient rĂ©parties un peu partout sur le territoire afin dâalimenter le rĂ©seau ibĂ©rique qui est, toujours selon la ministre, fortement maillĂ©.
Le but de ces centrales est « uniquement de contrĂŽler la tension, en absorbant ou gĂ©nĂ©rant de lâĂ©nergie rĂ©active » en fonction des besoins du moment (les centrales ne devaient pas apporter de puissance, seulement du contrĂŽle de tension). LâĂ©nergie rĂ©active, rappelle EDF, est « un facteur important pour la stabilitĂ© des rĂ©seaux de transport ou de distribution dâĂ©lectricitĂ© ».
Premier problĂšme le 27 avril Ă 20 h : une des dix centrales sâest dĂ©clarĂ©e indisponible pour la journĂ©e du 28 avril. Durant la session de questions rĂ©ponses Ă la fin de la confĂ©rence, la ministre explique que, selon les calculs de lâopĂ©rateur de rĂ©seau Red ElĂ©ctrica, il « nâĂ©tait pas nĂ©cessaire » dâajouter du renfort aux neuf centrales programmĂ©es pour la journĂ©e du 28 avril.
La ministre ajoute que, sur les neuf centrales restantes, toutes prĂ©sentaient « un certain degrĂ© de non-conformitĂ© », et nâont donc pas pu jouer leur rĂŽle comme prĂ©vu durant la journĂ©e du black-out. Sara Aagesen ne donne aucun nom et ne dĂ©taille pas le niveau de responsabilitĂ© de chacun.
Bref, le rĂ©seau Ă©lectrique espagnol « ne disposait pas dâune capacitĂ© suffisante de contrĂŽle de la tension » le jour du black-out, reconnait la ministre, avec les consĂ©quences que lâon connait. Elle ajoute que ce 28 avril 2025, « la capacitĂ© de contrĂŽle de la tension programmĂ©e Ă©tait la plus basse sur lâannĂ©e 2025 ».
Pas de cyberincident, mais des vulnérabilités identifiées
Sara Aagesen rĂ©affirme une nouvelle fois « quâil nây a aucune preuve dâun cyberincident ou dâune cyberattaque » comme Ă©tant une des causes de la panne gĂ©ante. « Cependant, ce que je peux dire et souligner aujourdâhui, câest que des vulnĂ©rabilitĂ©s et des lacunes ont Ă©tĂ© identifiĂ©es », ajoute-t-elle.
Des mesures seront Ă©videmment prises pour Ă©viter de laisser les rĂ©seaux Ă©lectriques face Ă ces risques, mais lĂ encore, nous nâavons aucun dĂ©tail. Un rapport doit ĂȘtre publiĂ© aujourdâhui (caviardĂ© de certaines donnĂ©es, prĂ©vient la ministre), ce sera peut-ĂȘtre lâoccasion dâen apprendre davantage.
LâenquĂȘte officielle europĂ©enne encore loin dâĂȘtre terminĂ©e
De son cĂŽtĂ©, ENTSO-E (le rĂ©seau europĂ©en des gestionnaires de rĂ©seau(x) de transport dâĂ©lectricitĂ©) a Ă©galement ouvert une enquĂȘte officielle. Il dispose de six mois pour rendre son rapport, avec des Ă©tapes intermĂ©diaires. Le rapport comprendra aussi des recommandations pour Ă©viter que cela ne se reproduise.
LâEspagne et le Portugal ont trois mois pour transmettre leurs donnĂ©es, avant et pendant lâincident. Il reste encore du temps puisque le black-out sâest produit il y a moins de deux moins pour lâinstant. Lors de son dernier point dâĂ©tape, le 6 juin, ENTSO-E Ă©tait encore en train de « recueillir toutes les donnĂ©es nĂ©cessaires pour Ă©tablir les faits ».
LâenquĂȘte se penche sur les causes de lâincident, mais cherche aussi Ă savoir « pourquoi les plans de dĂ©fense espagnols et portugais nâont pas pu arrĂȘter le processus qui a conduit au black-out total des deux pays ». Une page dĂ©diĂ©e a Ă©tĂ© mise en ligne pour suivre lâavancement de lâenquĂȘte.
Le groupe dâexperts doit se rĂ©unir les 23 juin et 15 juillet prochain.