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LIGNE ROUGE - La "transvestigation", ou la recherche permanente de personnalités transsexuelles par la complosphère

C’est un mensonge qui empoisonne la vie de Brigitte Macron, et celle de l’Elysée, depuis 4 ans. Une théorie complotiste selon laquelle la Première dame serait un homme. Plus précisément son frère, Jean-Michel Trogneux. Il s’agit désormais de l’une des fake news les plus virales au monde, partagées sur les réseaux sociaux par des millions de personnes. Comment a-t-elle pris une telle ampleur ? Qui se cache derrière ces attaques ? Et qui en est vraiment la cible, au-delà de la Première dame ? "Histoire d’une fausse information, l’affaire Brigitte Macron" : une enquête Ligne Rouge signée Régis Desconclois, Jérémy Müller et Alexandre Funel.

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Richard Werly : "Trump s’assure que les Européens deviennent des moutons, Vance s’occupe de les tondre"

D’ordinaire, Richard Werly sillonne les routes de France. Correspondant historique de la presse helvétique à Paris, journaliste pour le média Blick, ce Franco-Suisse est cette fois monté dans un camping-car américain pour un road trip de Chicago à Mar-a-Lago, le palais de Donald Trump en Floride, à la rencontre de ce qu’il nomme "l’Amérique des campings", le peuple du président milliardaire. Il en a tiré un livre, Cette Amérique qui nous déteste, qui sort le 29 octobre aux éditions Nevicata.

Un angle d’attaque que le journaliste n’avait pas anticipé mais qui, une fois sur place, lui a "sauté aux yeux" : sur les routes américaines, il n’a croisé que mépris et haine pour cette vieille Europe, coupable de faiblesse aux yeux de l’Amérique Maga ("Make America Great Again") et d’avoir "profité" des Etats-Unis pendant trop longtemps. Le livre de Richard Werly dépasse le cadre purement politique, car ce n’est pas seulement l’administration Trump qui attaque l’Europe, ses règles et son modèle de cohabitation pacifique, mais aussi tout un pan de la société américaine et sa puissante Silicon Valley qui veulent la changer. L’attitude des dirigeants européens, qui ont pris l’habitude de "se mettre à plat ventre" dans le bureau Ovale, n’arrange rien, selon le journaliste franco-suisse. Entretien.

L’Express : Vous êtes allé sur les routes américaines pour parler d’Europe, rencontrant parfois du mépris, souvent de la haine. Qui sont ces Américains qui nous détestent ?

Richard Werly : Il s’agit principalement de l’Amérique Maga, et cette détestation m’a frappé. Quand les gens voient le titre de mon livre, ils sont nombreux à me dire que c’est faux, que l’Amérique ne nous déteste pas… J’en suis désolé, mais il existe aujourd’hui une Amérique qui nous déteste et qui est complètement infusée par les thèses Maga.

Le succès de Donald Trump consiste à avoir implanté dans les esprits la détestation d’un certain nombre d’éléments : tout en haut, ce sont les migrants et Joe Biden. Mais très vite, il y a les Européens. L’année dernière, juste avant les élections, j’ai pris un camping-car pendant deux mois pour aller de Chicago à Mar-a-Lago, en Floride. Dans les campings, je suis tombé sur cette Amérique qui se retrouve le soir autour des barbecues et qui, spontanément, me disait : "Vous, les Européens, vous ne servez plus à rien".

C’est ça, la détestation : cette idée que l’on ne sert à rien, que nous n’avons pas de message convaincant pour cette population pourtant très largement blanche, d’origine européenne. Cette Amérique Maga valorise la force et nous voit comme trop faible, trop tolérante et trop floue : ils veulent une image nette, avec des Blancs chrétiens, mariés, etc.

"Cette Amérique qui nous déteste", de Richard Werly, sort le 29 octobre 2025 aux éditions Nevicata.

Cette Amérique voit-elle aussi l’Europe comme un contre-modèle de sa société, de ses valeurs ?

Ce qui nourrit vraiment la détestation, c’est que nous osons prétendre être une alternative. Les questions de défense et d’armée reviennent en permanence dans les discussions : "Les Européens, vous nous critiquez pour des guerres que nous avons faites et que nous regrettons, comme l’Irak, mais vous ne nous avez pas aidés." J’ai rencontré des Américains qui ont perdu leurs enfants à la guerre mais voilà, leurs "boys" sont partis et les Européens n’ont, selon eux, pas été dignes de confiance.

Ce sentiment anti-européen est-il plus fort qu’auparavant ou Donald Trump a-t-il simplement su trouver les mots pour l’exprimer ?

La grande différence dans l’Amérique d’aujourd’hui, telle que je l’ai vue, est que les pro-Européens se taisent. La peur a fait son chemin. Là, les grandes manifestations "No King" et ses millions de protestataires peuvent donner l’impression d’un réveil mais la réalité reste que, sur les campus américains, les professeurs, y compris ceux d’études européennes, font attention à ce qu’ils disent. Une espèce d’omerta s’est installée dans tout le camp de l’élite pro-européenne et, d’autre part, les pays européens ont fait le choix de se mettre à plat ventre devant Trump. Il y a beaucoup moins de manifestations culturelles européennes qu’avant, moins de concerts européens, etc. L’Europe a baissé le ton, ce qui laisse la place aux thèses trumpistes.

Il existe aussi le syndrome de la troisième ou quatrième génération : les petits-enfants d’immigrants (ce qui est le cas de Trump), même s’ils n’aiment pas l’Europe, y restent irrémédiablement attachés. Ensuite, le cordon se coupe, c’est un effet générationnel. Nous sommes face à cette Amérique qui n’a plus le respect de ses ancêtres ou de ses aïeuls, qui se trouve dans la rébellion et la révolte.

Avez-vous trouvé, sur ces routes américaines, la réponse à cette question : pourquoi Donald Trump déteste-t-il personnellement l’Europe ?

Nous sommes dans le domaine de la psychologie, sur lequel je ne suis pas vraiment qualifié, mais il est clair que Donald Trump a un problème avec ses origines. Son père, Fred, a prétendu pendant des années qu’il était suédois pour pouvoir travailler avec des juifs [NDLR : alors qu’il est d’origine allemande]. Adolescent, Trump a grandi avec cette usurpation d’identité paternelle pour le business et son père avait, par ailleurs, un penchant pour les thèses semi-fascistes de Charles Lindbergh dans les années trente.

Ensuite, fondamentalement, Trump n’aime pas l’Allemagne. Déjà, c’est un pays fort économiquement, avec, notamment, le succès de ses voitures, ce que Trump déteste. Il y a 40 ans, il détestait le Japon pour les mêmes raisons. Il ne supporte pas l’offense faite à l’industrie américaine.

Le troisième élément est le fruit de son inculture : il est ébahi quand il vient à Notre-Dame mais, globalement, l’Europe lui apporte un complexe. L’Europe le renvoie à son image de ploutocrate américain, comme il en existe beaucoup dans son électorat, c’est-à-dire des gens pour qui l’argent et le profit constituent les seules variables. Pour eux, le monde se résume à la richesse et à l’ambition de devenir riche, et l’Europe leur apparaît comme une offense permanente. C’est pour cette raison que, lorsque Trump vient en Europe, c’est surtout pour aller dans ses golfs.

Avec le discours de J.D. Vance à Munich, les attaques personnelles d’Elon Musk contre des dirigeants européens et les humiliations infligées à Volodymyr Zelensky, cette administration américaine semble passer à un autre stade d’animosité vis-à-vis de l’Europe. Qu’est-ce qui a changé par rapport au premier mandat de Donald Trump ?

Il a tiré les leçons de Trump 1 : d’abord, il a compris qu’il fallait attaquer très vite, que la réussite d’un mandat se joue sur la première et la deuxième année. Il a, de plus, la contrainte des élections de mi-mandat. Or quand Trump accélère, il a besoin d’un bouc émissaire : la victime à laquelle il est le plus facile de mettre la tête sous l’eau, c’est l’Europe, pas la Chine !

Ensuite, Trump sait, comme toute sa clientèle électorale Maga "supérieure" et contrairement à nous, que l’Europe est un continent riche. J.D. Vance, qui est le porte-parole de Peter Thiel [NDLR : milliardaire de la tech, propriétaire de Palantir], sait qu’il y a de l’argent à prendre dans nos pays. Nous, Européens, restons focalisés sur notre patrimoine culturel, mais nous sommes le continent sur lequel les Gafam [NDLR : Google, Amazon, Facebook, Apple, Microsoft] réalisent leurs profits. Trump a pour objectif l’obéissance de l’Europe. Les autres veulent récolter notre argent, et ils ont raison : nos consommateurs sont accros aux produits électroniques américains et, contrairement à la Chine ou à la Russie, n’ont pas d’alternatives. Trump voulait s’assurer que les Européens deviennent des moutons, Vance s’occupe de les tondre.

Le vice-président américain JD Vance parle lors d'une réunion à la Conférence sur la sécurité à Munich (Allemagne), le 14 février 2025
Le vice-président américain JD Vance parle lors d'une réunion à la Conférence sur la sécurité à Munich (Allemagne), le 14 février 2025

Pour ce second mandat de Donald Trump, la stratégie européenne semble avoir aussi évolué, avec davantage de révérences et de tentatives de l’amadouer. Est-ce une bonne méthode et nos dirigeants ont-ils le choix ?

J’ai été surpris par l’absence de riposte culturelle de l’Europe. Les Européens, depuis un an, sont assommés. Ils avaient sous-estimé le coup de marteau politique, le fait que Trump leur taperait autant sur la tête. Et d’autre part, ils sont stupéfaits de découvrir que ce n’est pas seulement Trump, mais toute une Amérique qui déteste l’Europe. De nombreux dirigeants, diplomates et ambassadeurs européens ne l’avaient pas du tout anticipé. Peut-être vont-ils maintenant se mettre en ordre de marche…

Nous, citoyens européens, quelle est notre réponse ? Les chiffres sont là, nous n’allons plus aux Etats-Unis. Ce n’est pas un boycott, mais nous avons l’impression que c’est un pays de fou, donc nous arrêtons d’y voyager. Le problème de cette stratégie est qu’elle ne fait qu’alimenter les clichés : nous nous installons non pas dans une haine de l’Amérique mais dans une indifférence vis-à-vis d’elle. Peut-être une forme de mépris aussi. Dans tous les cas, le fossé s’agrandit.

Vous écrivez que Donald Trump suit le mantra de Roy Cohn, son mentor : "Attaque, attaque, attaque." Jusqu’à quel point les dirigeants européens vont-ils le supporter ? Est-ce que, à un moment, l’Europe peut se lever et dire "ça suffit" ?

Au moment où l’on se parle, je pense malheureusement qu’une majorité d’Européens et donc de dirigeants politiques se dit : OK, ils nous détestent, mais nous avons trop besoin d’eux. C’est ce que Le Grand Continent a nommé "la vassalisation heureuse". Je dirais plus exactement qu’il s’agit d’une vassalisation malheureuse, ce qui est pire, parce qu’il n’y a plus de bonheur. Nous savons que les Américains nous détestent, mais aussi qu’ils sont trop forts et trop riches.

Même si Donald Trump rencontrait Vladimir Poutine à Budapest, en Europe, ou qu’il nous imposait des tarifs douaniers démentiels ?

Aujourd’hui, à tous les niveaux européens, domine le sentiment que les Américains sont trop forts et trop riches. Dans le rapport Draghi de 2024, il apparaît clairement que le décalage d’innovation est bien trop grand et ne sera pas rattrapé. C’est ce que dit aussi le Prix Nobel d’économie Philippe Aghion. Les Américains nous détestent, on le sait, mais essayons de leur faire des câlins pour qu’ils nous détestent moins. C’est ce qui m’inquiète profondément, car je pense que la majorité des gouvernements européens sont sur cette ligne, à deux exceptions près : l’Espagne et la France.

Pour l’Espagne, la question de la Palestine joue un rôle, mais c’est surtout l’aspect latino-américain, ce lien historique avec ce continent où les Espagnols étaient "les premiers". Il y a là un choc culturel entre l’Espagne et les Etats-Unis, souvent négligé. Pour la France, ce sont des raisons différentes, puisque nous sommes ceux qui ont créé les Etats-Unis et nous en gardons un sentiment de supériorité. Mais à part l’Espagne et la France, aucun pays européen ne semble vouloir tirer les conséquences de la politique de Donald Trump : les Polonais préfèrent être détestés mais défendus ; les Hongrois pensent que la détestation, c’est de l’amour ; les Italiens restent atlantistes par définition ; les Allemands sont presque fiers de la détestation…

Dans les témoignages que vous avez recueillis, aucune personnalité politique européenne ou française ne ressort. Les Américains Maga ne mentionnent ni Emmanuel Macron ni Marine Le Pen devant vous ?

Deux éléments venaient automatiquement aux Américains que j’ai rencontrés : l’Union européenne et l’Allemagne. Bizarrement, l’Union européenne existe bien davantage pour eux que pour nous : comme Trump, ils pensent que c’est un bloc. Ils créditent l’UE de bien davantage de cohésion et de moyens qu’elle n’en a. Et l’Allemagne revient pour des raisons économiques : la voiture, l’industrie pharmaceutique… L’économie allemande est installée de manière très tangible aux Etats-Unis, ce qui marque les esprits.

La France, ils m’en parlent relativement peu. Sauf - et je ne le mentionne pas dans le livre, bien que ce soit un élément de la détestation - pour me parler de Brigitte Macron et des théories du complot qui disent qu’elle est un homme… C’est affreux comme cette affaire circule dans tous les milieux abonnés aux comptes d’informations de l’univers Maga. Ils regardent Fox News, Joe Rogan, les blogs. Et pour eux, la France c’est ça.

Vous parcourez la France depuis des années pour la raconter à votre lectorat suisse. Voyez-vous le même type de discours - anti-américain - monter dans l’Hexagone ?

Ici, il n’y a pas de détestation des Etats-Unis. Bien que perdure un antiaméricanisme traditionnel, Donald Trump n’est, de ce que je vois, pas détesté en France. Il est parfois méprisé, il est surtout redouté. C’est quelqu’un que l’on considère comme dangereux pour nos intérêts, mais que beaucoup de gens admirent malgré tout. La force de Trump, y compris en France, est d’avoir créé un personnage qui parle à tout le monde : ce milliardaire qui se fout des politiciens classiques, un "vrai mec". En France, le personnage Trump est jugé caricatural, grossier, mais il n’est pas détesté. Jusqu’au point où certains se disent : "On aurait besoin d’un Trump à la française".

Pourtant, Marine Le Pen semble hésiter à assumer le modèle Trump, tout comme la plupart des partis politiques en France…

Je vais faire une parenthèse suisse car nous connaissons bien le modèle Trump : nous avons eu notre Donald Trump, version suisse, qui se nomme Christophe Blocher. Il est le fondateur de l’UDC, le parti d’extrême droite ou de droite radicale qui, depuis trente ans, est au pouvoir en Suisse. Lui-même a été conseiller fédéral. S’il n’y avait pas eu le système suisse de concordance obligée, où le pouvoir est partagé entre les principaux partis du Parlement, il aurait eu la majorité. Blocher, c’est l’alliance entre plusieurs caractéristiques : "l’homme fort", c’est-à-dire macho et viriliste ; le discours grossier, notamment sur les immigrants ; le culte de la richesse ; la détestation de l’Etat ; et l’éloge des frontières.

Ce modèle-là est extrêmement exportable. Quand on gratte un peu, c’est ce que veulent beaucoup de gens : un homme riche, donc qu’ils imaginent incorruptible puisqu’il n’aurait pas besoin d’argent, ce qui est faux bien sûr ; il veut des frontières, ce qui rassure tout le monde ; il aime la force, qui reste un élément important de la société. L’Europe est détestée parce qu’elle a essayé d’être une réponse à tout ça, de ne pas être seulement guidée par le profit et par la force, de ne pas s’enfermer dans des frontières et de nous prémunir contre un pouvoir autoritaire.

Dans votre livre, un professeur allemand vous parle du "poison américain" qui se répand dans nos démocraties européennes. L’administration Trump peut-elle sonner la fin de l’Europe actuelle ?

Je suis seulement journaliste, je ne peux pas prévoir les événements, mais si Donald Trump remporte les élections de mi-mandat dans un an… Aujourd’hui, il publie une vidéo dans laquelle il balance des excréments sur des manifestants américains depuis son avion : s’il gagne les midterms, il n’aura plus de limite et j’ai bien peur que l’Europe soit celle qui reçoit ces excréments. S’il garde le contrôle des deux chambres du Parlement, nous devons préparer nos parapluies : lui peut devenir fou, et les gens qui le suivent encore plus.

Quoi qu’il arrive, nous sommes mal barrés car, malheureusement, l’Europe institutionnelle a renoncé au profit. C’est ce que dit Mario Draghi dans son rapport de 2024, c’est la raison pour laquelle nous n’avons pas de Gafam : nous ne supportons pas le profit, en France mais pas seulement. Or, l’argent reste un moteur de l’innovation. Nous avons aussi renoncé aux frontières, nous avons renoncé à la force et, fondamentalement, nous n’avons pas trouvé d’alternative à l’autoritarisme, puisque la démocratie reste structurellement fragile et inefficace.

Je ne suis pas d’un naturel inquiet mais, là, je le suis. Eux, les Américains de Trump, rien ne les arrêtera.

© AFP

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© Jehad Alshrafi / AP

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