La situation au Soudan est "très compliquée", mais les Etats-Unis restent "engagés pour parvenir à une solution pacifique", assure la porte-parole de la Maison Blanche
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Ces derniers jours, Donald Trump fait pression sur le ministère de la Justice. Selon The Washington Post, le président américain cherche à influencer l’institution pour qu’elle examine à nouveau les bulletins de vote de l’élection de 2020. Lors de récentes réunions privées, de déclarations publiques et de publications sur les réseaux sociaux, Donald Trump a réitéré ses exigences envers les membres de son administration, leur demandant de prouver l’existence de fraudes lors de sa défaite il y a cinq ans, rapporte le quotidien. Une défaite qu’il a toujours niée.
Obnubilé par cette question, le président américain a récemment embauché à la Maison-Blanche, Kurt Olsen, un avocat ayant travaillé sur la contestation des résultats de 2020. Tandis que, toujours selon le Washington Post, des responsables de son administration ont demandé à inspecter le matériel de vote au Colorado et au Missouri. D’autres cherchent par ailleurs à obtenir les bulletins de vote par correspondance d’Atlanta de 2020, année où Donald Trump est devenu le premier candidat républicain à la présidentielle à perdre la Géorgie depuis 1992. Donald Trump et certains de ses alliés, au sein et en dehors de son administration, persistent à dénoncer une fraude électorale massive en 2020, malgré les rejets répétés de leurs théories par les tribunaux. Ils affirment que la sécurité des élections futures ne pourra être garantie sans un bilan complet de celles de 2020.
Les enquêteurs ont innocenté le comté de Fulton (dont la capitale est Atlanta) de malveillance en 2020. Néanmoins, une majorité républicaine au conseil d’administration a voté pour rouvrir l’enquête l’année dernière, rappelle The Guardian. Cet été, le conseil d’administration a adopté une résolution demandant au ministère de la justice d’intervenir et de les aider à obtenir les documents, poursuit le journal britannique. Dans une lettre datée du jeudi 30 octobre, le procureur général adjoint du comté, Harmeet Dhillon, un allié de Donald Trump, a demandé une multitude de dossiers précédemment réclamés par la Commission électorale de l’Etat de Géorgie, les sommant de produire les dossiers dans les 15 jours, explique The Atlanta Journal Constitution. "La transparence semble avoir été frustrée à plusieurs reprises en Géorgie", a écrit Harmeet Dhillon, dans la lettre.
Pour justifier sa demande, le ministère de la justice a cité une disposition de la loi sur les droits civils qui exige que les fonctionnaires électoraux conservent les dossiers électoraux et donne au procureur général le droit de les demander, indique The Guardian. Cette loi exige que les dossiers soient conservés pendant 22 mois après une élection fédérale… Une période largement écoulée depuis la course électorale de 2020.
Ces dernières semaines, les tensions se sont accrues entre l’administration Trump et les représentants de la justice. Les seconds estimant qu’il serait plus judicieux de consacrer leur temps à l’examen des listes électorales pour les élections futures, notamment de mi-mandat dans un an. Certains responsables souhaitent tourner la page de 2020 et éviter d’être qualifiés de "négationnistes électoraux", terme désignant ceux qui ont affirmé sans preuve que Donald Trump avait battu Joe Biden lors de l’élection de 2020, raconte The Washington Post.
En outre, selon plusieurs observateurs cités dans la presse américaine, ce regain d’intérêt pour 2020 intervient alors que Donald Trump commence à constater les effets de ses demandes de poursuites contre ses détracteurs, notamment l’ancien directeur du FBI, James B. Comey, et la procureure générale de New York, Letitia James. La semaine dernière, le ministère de la Justice a également suspendu deux procureurs qui avaient fait référence aux émeutes du 6 janvier 2021 perpétrées par une foule pro-Trump au Capitole, dans un document judiciaire relatif à la condamnation d’un participant gracié par Donald Trump et désormais poursuivi pour des infractions liées aux armes.

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Les deux Français Cécile Kohler et Jacques Paris, détenus depuis trois ans et demi en Iran, accusés d'espionnage au profit des renseignements français et israélien et qui ont toujours clamé leur innocence, "sont sortis de la prison d'Evin et sont en route pour l'ambassade de France à Téhéran", a annoncé Emmanuel Macron sur X.
"Je me félicite de cette première étape. Le dialogue se poursuit pour permettre leur retour en France le plus rapidement possible. Nous y travaillons sans relâche et je tiens à remercier notre ambassade et tous les services de l’État pour leur mobilisation", indique encore le président évoquant un "soulagement immense".
Soulagement immense !
— Emmanuel Macron (@EmmanuelMacron) November 4, 2025
Cécile Kohler et Jacques Paris, détenus depuis trois ans en Iran, sont sortis de la prison d'Evin et sont en route pour l’Ambassade de France à Téhéran.
Je me félicite de cette première étape. Le dialogue se poursuit…
Condamnés mi-octobre à respectivement 20 et 17 ans d'emprisonnement, pour espionnage au profit des renseignements français et israélien, Cécile Kohler et Jacques Paris, ont toujours clamé leur innocence. Ils étaient les deux derniers Français officiellement détenus en Iran.
Ils sont désormais "en sécurité" à la résidence de l'ambassadeur de France, à Téhéran, "dans l'attente de leur libération définitive", a indiqué sur X le ministre français des Affaires étrangères, Jean-Noël Barrot. "J’ai échangé avec leur famille et dépêché sur place une équipe qui les accompagnera personnellement, aux côtés des agents de l’ambassade, que je félicite pour leur mobilisation sans faille au service de nos deux compatriotes", a-t-il précisé.
Les avocats des deux Français sortis de prison en Iran mardi ont salué un "jour nouveau" pour Cécile Kohler et Jacques Paris, "mettant fin à leur détention arbitraire qui a duré 1 277 jours".
"Nous veillerons à ce qu'un jour justice puisse être rendue" pour les deux Français "dont les droits ont été bafoués chaque jour depuis ce 7 mai 2022", ont déclaré maîtres Martin Pradel, Chirinne Ardakani, Emma Villard et Karine Rivoallan dans un communiqué transmis à l'AFP.
Professeure de lettres de 41 ans, et enseignant retraité de 72 ans, Cécile Kohler et Jacques Paris avaient été arrêtés le 7 mai 2022, au dernier jour d'un voyage touristique en Iran. Ils avaient été incarcérés dans la sinistre section 209, réservée aux prisonniers politiques, de la prison d'Evin de Téhéran, avant d'être transférés vers un autre centre de détention, en juin lors de la guerre des douze jours entre Israël et l'Iran. Mais leur nouvelle localisation n'avait jamais été rendue publique.
Lumière allumée 24 heures sur 24, 30 minutes de sortie deux ou trois fois par semaine, rares et courts appels sous haute surveillance à leurs proches, les deux Français, qui avaient été contraints à des "aveux forcés" diffusés sur la télévision d'Etat iranienne quelques mois après leur arrestation, n'ont reçu que quelques visites consulaires.
Le ministère français des Affaires étrangères n'avait eu de cesse de déplorer les conditions de détention "inhumaines", estimant qu'elles relevaient de "la torture" au point de déposer un recours contre la République islamique iranienne auprès de la Cour internationale de justice "pour violation du droit à la protection consulaire". Pendant plus de trois ans, le renseignement extérieur français (DGSE) a également oeuvré à leur libération.
Depuis une dizaine d'années, l'Iran multiplie les arrestations de ressortissants occidentaux, notamment français, les accusant le plus souvent d'espionnage, afin de les utiliser comme monnaie d'échange pour relâcher des Iraniens emprisonnés dans des pays occidentaux ou afin d'obtenir des gages politiques. Au moins une vingtaine d'Occidentaux seraient encore détenus, selon des sources diplomatiques.
Dans le cas de Cécile Kohler et Jacques Paris, Téhéran avait rendu publique le 11 septembre la possibilité d'un accord de libération des deux Français en échange de Mahdieh Esfandiari, une Iranienne arrêtée en France en février pour avoir fait la promotion du terrorisme sur les réseaux sociaux. Celle-ci avait été libérée sous contrôle judiciaire dans l'attente de son procès prévu en janvier.

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Depuis le depuis de la guerre, en avril 2023, octobre 2025 a été le mois le plus sanglant au Soudan, l’un des plus grands pays d’Afrique en superficie. Selon des données de l’ONG Acled, qui répertorie les victimes de conflits à travers le monde, près de 1 545 civils ont été tués en l’espace de quatre semaines. 3 000 en dénombrant les combattants de part et d’autre. Le Conseil de sécurité des Nations unies (ONU) a exprimé, jeudi 30 octobre, sa "profonde inquiétude" sur l’"escalade" dans le pays, indiquant détenir des "informations crédibles d’exécutions de masse".
Ce conflit, qui a déjà fait plus de 150 000 morts depuis 2023 est également devenu la plus grave crise humanitaire du monde selon les Nations unies, alors que près de 13 millions de personnes ont été déplacées par les combats et que la moitié des 44 millions de Soudanais sont au bord de la famine, raconte le correspondant du journal Le Monde en Egypte dans un suivi quotidien de cette guerre oubliée.
Depuis le 15 avril 2023, le Soudan, frontalier du Tchad et de l’Egypte, est déchiré par une guerre opposant l’armée, qui contrôle l’est et le nord du pays, et un groupe de paramilitaires, les Forces de soutien rapides (FSR), désormais maîtres de l’ensemble du Darfour, vaste région de l’ouest du pays, grande comme la France. Les deux factions militaires rivales, avec à leur tête le général Abdel Fattah Abdelrahman Al-Bourhane, commandant de l’armée et dirigeant de facto du Soudan depuis le coup d’Etat de 2021, et le général Mohammed Hamdan Daglo, à la tête des FSR, se déchirent depuis 2023, "pour savoir qui dirigera le Soudan", explique dans une interview à l’Institut français de relations internationales Thierry Vircoulon, chercheur associé au Centre Afrique subsaharienne de l’Ifri. Les FSR sont issues des milices arabes Janjawid, initialement créées pour combattre les groupes rebelles.
A ces deux principaux belligérants s’ajoutent de nombreuses milices. "Depuis le début du conflit, chaque camp mène une politique d’alliances avec des milices locales et a créé sa coalition guerrière afin de contrôler le maximum d’Etats", explique Thierry Vircoulon auprès de l’Ifri. Un phénomène qui contribue à fragmenter davantage le pays et exacerbe les tensions intercommunautaires.
Après 18 mois de siège, les FSR ont pris le 26 octobre dernier la localité d’El-Fasher, dernière grande ville du Darfour qui échappait encore à leur contrôle. Depuis, c’est une situation apocalyptique qui est décrite par de rares images satellites et témoignages d’humanitaires. La ville a subi des dizaines de bombardements pendant plusieurs semaines. Le Haut-Commissariat de l'ONU aux droits de l’homme dit avoir reçu "des témoignages effroyables faisant état d’exécutions sommaires, de massacres, de viols, d’attaques contre des travailleurs humanitaires, de pillages, d’enlèvements et de déplacements forcés" perpétrés par les paramilitaires entrés dans la ville. Des habitants survivants ont également raconté à l’ONG Médecins Sans Frontières que les habitants d’El-Fasher avaient été séparés en fonction de leur âge, de leur sexe et de leur identité ethnique présumée, rapporte France 24. Quelques heures après la prise de la ville le 26 octobre, 460 personnes ont été tuées alors qu’elles avaient trouvé refuge dans une maternité de la ville, dont les patients, les médecins et infirmières, rapporte John Ochaibi, le coordinateur humanitaire de l’ONG Alima au Soudan, après du Monde. Lundi 3 novembre, le bureau du procureur de la Cour pénale internationale a averti que les atrocités commises à El-Fasher "pourraient constituer des crimes de guerre et des crimes contre l’humanité".
A El-Fasher et les localités environnantes, l’ONG Acled recense 2 176 morts pour le seul mois d’octobre, dont 1 385 civils. L’ONG prévient que ce bilan pourrait évoluer dans les semaines à venir en raison des difficultés de communication liées à la situation. Selon d’autres sources liées au pouvoir pro armée, plus de 2 000 civils ont été tués dans la ville fin octobre. De son côté, le Haut-Commissariat de l'ONU aux droits de l’homme a alerté sur le "risque croissant d’atrocités motivées par des considérations ethniques" en rappelant le passé du Darfour, ensanglanté au début des années 2000 par les massacres et les viols des milices arabes Janjawid, dont sont issues les FSR, contre les tribus locales Massalit, Four ou Zaghawa.
Très tôt dans le conflit, l’armée régulière du général Abdel Fattah Abdelrahman Al-Bourhane a accusé les Emirats arabes unis de soutenir les FSR avec l’envoi d’armes et de mercenaires via le Tchad, la Libye, le Kenya ou la Somalie, par voie terrestre ou aérienne. Abou Dhabi a toujours nié toute ingérence, néanmoins il existe des preuves fournies par des rapports internationaux et enquêtes OSINT fondées sur l’analyse de données accessibles à tous en ligne. Selon plusieurs observateurs, ce soutien des Emiratis aux paramilitaires des FSR s’expliquerait en partie en raison de la production d’or qui se trouve dans la région du Darfour, où les FSR sont majoritaires. "Les FSR exploitent cet or, pour être ensuite exporté illégalement vers Dubaï, qui est un centre mondial de transformation de l’or, avant qu’il soit expédié", expliquait ainsi en avril dernier Marc Lavergne, directeur de recherche émérite au CNRS, au laboratoire CITERS de l’Université de Tours auprès de France Culture.
Depuis la prise sanglante d’El-Fasher, les Emirats arabes unis se retrouvent pointés du doigt pour leur soutien aux FSR et des appels au boycott visant l’état du Golfe se multiplient sur les réseaux sociaux, note Radio France Internationale. Mardi 4 novembre, l’ambassadeur du gouvernement soudanais pro armé auprès de l'ONU a appelé la communauté internationale à faire pression sur les Emirats arabes unis. Le fournisseur d’armes est "bien connu. Il s’agit des Emirats arabes unis. Le Soudan appelle la communauté internationale à agir sans délai […] par une décision ferme et concrète". En outre, le silence de la communauté internationale et notamment des pays occidentaux est de plus en plus pointé du doigt. "Un silence gêné, alors même que des armes européennes ont été livrées par les Emiratis aux paramilitaires FSR", explique Le Monde. Selon Amnesty International, des équipements militaires français fabriqués par les groupes KNDS France et Lacroix, censés équiper des véhicules blindés émiratis sont actuellement utilisés au Soudan, ainsi que des armes de fabrication britannique, selon The Guardian, canadiennes d’après The Globe and Mail et bulgares indique France 24.

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Moins que d’être une technocratie, selon la thèse consacrée de Dan Wang, autrement dit un système où le pouvoir de décider est confié en priorité à des experts techniques, le trait principal de l’économie chinoise est d’être productiviste. Une économie productiviste est un système où l’objectif central est d’augmenter en permanence les volumes produits et le produit intérieur brut, en privilégiant la productivité, les économies d’échelle et la baisse des coûts unitaires par l’innovation.
Traverser la Chine côtière en train, en voiture ou la survoler en avion, c’est s’exposer à une succession continue de paysages urbains, bâtiments résidentiels de 20 étages, usines, entrepôts, routes, se répétant sur plusieurs milliers de kilomètres. Cette réalité physique traduit l’ampleur, tant du point de vue géographique que démographique, et la vitesse d’un décollage économique absolument inédit. Elever les masses : l’ambition idéologique marxiste revêt d’abord un caractère matériel.
La construction du barrage des Trois-Gorges a déplacé l’axe de rotation de la Terre de deux centimètres et ralenti son mouvement de 0,060 microseconde. Anecdotique, ce levier sur notre planète n’en est pas moins unique. La Chine produit 2 milliards de tonnes de ciment par an quand les Etats-Unis en ont consommé 4,5 milliards tout au long du XXe siècle. Elle fabrique 1 milliard de tonnes d’acier par an quand l’Europe en a sorti 15 milliards depuis la mise au point de la fonte au coke en 1709.
Ce décollage ne débute pas en 1978, avec la réforme économique engagée par Deng Xiaoping. Il est l’héritage des trois décennies précédentes. La Chine est un pays productiviste depuis longtemps. Si dans la phase maoïste, la lutte entre gardes rouges et experts a provoqué certains reculs de la technocratie au profit de l’idéologie, avec le Grand Bond en avant et la révolution culturelle, il serait absurde de négliger les hauts-fourneaux, les cimenteries, l’alphabétisation, les chemins de fer ou le réseau électrique qu’elle a laissés en héritage. Une étude du National Bureau of Economic Research de 2015 concluait que l’abolition du secteur privé en Chine et le retour à une économie dirigée entraîneraient un taux de croissance annuel moyen du PIB de 4 à 5 % d’ici 2050. Ce chiffre est seulement inférieur d’un point au taux de croissance moyen avec les réformes de marché.
Pourquoi cette société est-elle productiviste ? Parce qu’elle a connu la rareté et la privation. La prospérité actuelle ne doit pas faire oublier les affres de la misère durant les trois quarts du XXe siècle, où la faiblesse de la production se conjuguait à une population en forte augmentation. En 1990, la Chine présentait un PIB par habitant de 319 dollars contre 728 pour l’Afrique subsaharienne. Selon la FAO, l’agence des Nations Unies pour l’alimentation et l’agriculture, 289 millions de personnes, soit un quart de la population, souffraient encore de malnutrition à l’époque. La fin des coupons de rationnement alimentaire n’est intervenue qu’en 1993, après quatre décennies d’usage.
La Chine est profondément imprégnée des théories économiques marxistes : les instruments de travail - outils, usines, infrastructures… - et les sujets du travail - les ressources naturelles et les matériaux bruts - se conjuguent avec la main-d’œuvre à des fins de production.
Si la Chine est désormais le septième pays qui consomme le plus de protéines par jour et par habitant - 128 grammes contre 121 grammes aux Etats-Unis -, c’est grâce à une utilisation maximale des terres agricoles pour nourrir sa population. Entre 1949 et 2024, l’agriculture chinoise a connu une transformation spectaculaire. La production céréalière est passée de 113 millions de tonnes à 700 millions. Cette augmentation s’est réalisée alors que la superficie cultivable par habitant chutait de 0,18 hectare dans les années 1950 à moins de 0,1 hectare aujourd’hui. La Chine affiche désormais un taux d’autosuffisance alimentaire de 95 %, malgré une population qui représente 18,3 % de l’humanité sur seulement 8,5 % des terres arables mondiales.
Le pays a la conviction qu’il faut maîtriser les matières premières industrielles et les intrants. L’exemple le plus connu est celui des terres rares. Le monopole chinois en la matière, avec 71 % de l’extraction mondiale, 90 % du raffinage et 93 % du frittage des aimants - le traitement thermique -, est total. Beaucoup de commentateurs retiennent la formule de Deng Xiaoping qui, en visite à l’usine Volkswagen de Shanghai le 6 février 1991, confia : "Un ami américain m’a dit : Vous avez ce trésor, comme le Moyen-Orient a le pétrole." En réalité, la production a débuté dès 1957, dans la mine de fer de Bayan Obo en Mongolie intérieure, devenue la plus grande mine de terres rares au monde. Les autres matériaux, au-delà des terres rares, où la Chine a des positions dominantes sont le gallium (94 %), le magnésium (91 %), le tungstène (86 %), le germanium (83 %), le phosphore (79 %), le bismuth (70 %), le graphite (67 %), le vanadium (62 %), l’antimoine (56 %) et la fluorine (56 %). A l’exception du gallium et du tungstène, cette supériorité est principalement liée à l’efficacité de l’outil de raffinage et à l’acceptation de la pollution qu’il génère.

Cette attention aux intrants explique aussi la folle croissance de la production d’électricité. Et, parce que les ressources en pétrole et gaz sont limitées, avec seulement 1,5 % et 2,7 % des réserves mondiales, la folle croissance de l’extraction du charbon. La Chine produit actuellement 4,8 milliards de tonnes de charbon par an, soit 54 % de l’offre mondiale. Les Chinois sont parfaitement conscients des externalités négatives liées aux centrales à charbon, comme les émissions de gaz à effet de serre et de particules fines. Néanmoins, l’électrification du pays est prioritaire. La production électrique par habitant est de 7 100 kilowattheures (kWh) par an contre 6 000 dans l’Union européenne. L’électricité est considérée comme un intrant essentiel pour l’outil industriel, mais aussi pour les ménages qui paient l’équivalent de 7 centimes d’euros le kWh contre 29 centimes dans l’UE.
Les choses changent mais le charbon restera présent. L’an dernier, la Chine a ajouté un record de 429 gigawatts (GW) de nouvelle capacité nette à son réseau, dont les énergies éolienne et solaire combinées représentaient 83 %. La base totale des énergies renouvelables est de 1 966 GW, dont 1 482 GW d’éolien et de photovoltaïque, soit davantage que la base des centrales thermiques estimée à 1 451 GW. Le parc nucléaire croît mais il demeure minoritaire avec une capacité de 110 GW d’ici 2030.
En 2023, la valeur des importations chinoises de matières premières a atteint 810 milliards de dollars, dont environ 45 % correspondaient à des achats de pétrole brut et de gaz naturel et un peu plus de 30 % à des métaux industriels. La diversification des importations a d’abord obéi à une logique économique. Ainsi, au milieu des années 2000, pour faire face à l’explosion des coûts du nickel de qualité venu de la Russie ou du Canada, les sidérurgistes chinois ont mis au point la fonte au nickel produit à partir de latérites pauvres importées d’Indonésie. Cette volonté de se prémunir des chocs d’offre explique la stratégie de stockage stratégique, dans tous les domaines. La réserve nationale de porc, par exemple, est déstockée dès que le ratio entre le prix de la viande et celui des céréales dépasse six.
Au fil des années, l’importance accordée aux ressources naturelles a pris une dimension de souveraineté. L’objectif est clairement de réduire la dépendance du pays à des importations essentielles dans les chaînes de valeur. L’hélium, le quartz et le néon sont emblématiques à cet égard. La Chine a réalisé une percée dans l’hélium ultra-pur à partir de gaz naturel, lui permettant d’être autosuffisante à plus de 50 % d’ici 2028, alors qu’elle dépendait des Etats-Unis. Sur le quartz, le seul gisement de très haute pureté connu jusqu’ici était situé en Caroline du Nord. Mais, en avril 2025, la Chine a découvert deux gisements domestiques. Enfin, alors qu’une pénurie de néon inquiétait l’industrie des semi-conducteurs après l’invasion de l’Ukraine, qui pesait la moitié du marché mondial, la Chine a augmenté sa production de 150 % en trois ans.
La politique américaine de contrôle des exportations dans la filière des semi-conducteurs a conduit à une remontée extrêmement rapide de la chaîne de valeur. La réaction de la Chine à la privation de puces a été extrêmement rapide, et presque viscérale. Les entreprises comme OpenAI louent des serveurs à des gestionnaires de data centers, Amazon ou Microsoft, qui achètent des puces conçues par Nvidia. Ces puces contiennent des cartes mémoires fournies par les sud-coréens Samsung Electronics et SK Hynix. Lesdites puces sont fabriquées par le fondeur taïwanais TSMC à l’aide de machines de lithographie dont le principal fournisseur est le néerlandais ASML.
Chacun de ces acteurs se trouvait jusqu’à maintenant dans une situation de monopole ou de duopole. Mais ChangXin Memory Technologies (CXMT), créé en 2016, est en passe de combler le retard que la Chine accusait sur les leaders de la carte mémoire. La puce Ascent de Huawei, sur laquelle Deepseek fait tourner ses modèles d’IA, est fabriquée par le fondeur SMIC en utilisant un processeur de 7 nanomètres. Shanghai Micro Electronics Equipment (SMEE) et Shenzhen Xinkailai Technology (SiCarrier), une filiale de Huawei, développent leur propre équipement lithographique.
Le mouvement traditionnel des économies développées est de remonter les chaînes de valeur, en relevant le positionnement de leurs gammes et en abandonnant certaines productions, délocalisées dans d’autres pays. Avec la Chine, les théories classiques de Ricardo sont devenues inopérantes : le pays produit encore 65 % des clous et 47 % des textiles mondiaux, tout en s’affirmant comme le champion des semi-conducteurs, des drones ou des véhicules électriques. Le meilleur indicateur de cette montée en puissance des chaînes locales est le recul du commerce dit de perfectionnement, qui permet d’importer des biens (matières premières, composants…), avec suspension ou exonération des droits de douane, pour les transformer, puis de réexporter les produits finis. Ce régime est tombé à 18 % des échanges en 2023, contre 53 % en 1998.
Jusqu’à la fin des années 2000, la Chine importait une large part du polysilicium en provenance des Etats-Unis et d’Europe, et se contentait d’assembler les modules de panneaux solaires dans lesquels il est utilisé, la valeur ajoutée restant limitée. A partir de 2006, la stratégie change du tout au tout. Des groupes locaux comme GCL investissent massivement pour intégrer l’amont de la chaîne et des droits de douane de 57 % sont imposés sur les importations de polysilicium américain. Résultat : alors qu’en 2004, la Chine pesait trois fois rien dans la production mondiale de ce composé chimique, les Etats-Unis dominant avec 54 %, elle en assure aujourd’hui 95 %, de même que 80 % des panneaux solaires et 98 % des plaquettes solaires.
Chez les industriels, une logique d’intégration verticale complète prévaut. BYD en est l’illustration la plus nette. Née en 1995 comme fabricant de batteries pour téléphones mobiles, l’entreprise rachète en 2003 le fabricant automobile Qinchuan et crée BYD Auto. En 2020, elle lance sa plateforme qui intègre un pack de batteries et un groupe motopropulseur bardé d’électronique. BYD internalise aussi les semi-conducteurs de puissance. En amont, le groupe sécurise ses approvisionnements de lithium avec des droits miniers au Brésil. Il a même fait construire des navires cargo pour exporter ses voitures dans le monde entier. Son concurrent Geely compte pas moins de 41 satellites en orbite basse, qui doivent permettre la fourniture de services de connectivité, de navigation et de loisirs.
Le cœur du productivisme repose sur les effets d’échelle qui permettent la baisse des coûts unitaires : la loi de Wright. L’effet d’échelle est d’abord fourni par la taille du marché national. A ce titre, la Chine montre ce qu’est un marché vraiment unifié, une leçon pour l’Union européenne mais aussi pour les Etats-Unis. Cette unification est considérée comme un acquis essentiel de la politique économique chinoise, comme l’a rappelé Xi Jinping lors de son discours du 1er juillet 2025 intitulé "Approfondir la construction d’un marché national unifié". Les cinq piliers de cette politique concernent les institutions fondamentales, notamment la protection des droits de propriété, la concurrence loyale et les normes de qualité ; les infrastructures de marché, au travers de la logistique, des flux de capitaux et d’information ; les capacités d’intervention des collectivités locales ; la régulation et l’application de la loi ; et les facteurs de production, au prisme de leur libre circulation et de leur allocation efficace.
Dans ce marché, tout est pensé pour la standardisation. L’organisme national de normalisation (SAC), rattaché à l’administration d’Etat pour la régulation des marchés (SAMR), programme, consulte puis publie le standard national, le GB, ou GuoBiao, l’équivalent de notre NF. L’objectif est simple et industriel : rendre compatibles les composants partout en Chine, fluidifier l’homologation et permettre des séries longues qui abaissent les coûts unitaires. C’est cette standardisation qui permet la production d’infrastructures à un coût très compétitif. Le réseau de train à grande vitesse obéit à ces principes. Le système est bâti à plus de 80 % sur des viaducs en béton, sans ballast. Les gares se ressemblent toutes parce que la norme nationale (TB 10100) et le guide de station-ville 2024 imposent la même grammaire : flux séparés avec entrée des voyageurs en haut, sortie en bas, en sous-sol, vers les connexions urbaines, et bâtiments modulaires réplicables.
Le modèle de développement économique de la Chine comporte beaucoup d’autres facettes. Une concurrence exacerbée entre les entreprises, les individus et les villes. Une myriade de sous-traitants manufacturiers ultra-flexibles. Un protectionnisme à géométrie variable. Une méfiance pour la finance. Un crédit et un investissement fléchés. Mais toutes ces caractéristiques ne sont orientées que vers un seul but : le productivisme.

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En dépit des appels lancés à la Russie pour qu'elle mette fin à la guerre, et des sanctions occidentales, Moscou poursuit ses attaques terrestres sur le front et a relancé ces dernières semaines une campagne de bombardements ciblés sur le système énergétique ukrainien. En riposte, Kiev mène des frappes de drones en Russie, en visant en particulier les infrastructures pétrolières et gazières pour tenter d'affaiblir ce secteur qui finance l'effort de guerre du Kremlin. Pendant ce temps, le président ukrainien Volodymyr Zelensky a appelé mardi 4 novembre Viktor Orban à "ne pas bloquer" le processus d'adhésion de son pays à l'Union européenne, que Bruxelles considère en bonne voie, au contraire de la Géorgie, jugée désormais plus éloignée des 27.
Les infos à retenir
⇒ L'Ukraine appelle Viktor Orban à ne pas bloquer son adhésion à l'Union européenne
⇒ L'Allemagne prévoit d'augmenter de 3 milliards d'euros son aide à l'Ukraine en 2026
⇒ Vladimir Poutine autorise l'envoi de réservistes pour défendre les raffineries
Le président Vladimir Poutine a promulgué mardi 4 novembre une loi autorisant le recours à des réservistes pour protéger les raffineries de pétrole et autres infrastructures énergétiques en Russie, sur fond de frappes ukrainiennes contre de telles installations quasiment chaque semaine.
Ces attaques de drones ukrainiennes provoquent régulièrement des dégâts dans des usines des secteurs pétrolier et gazier et sur des conduites destinées au transport des hydrocarbures, conduisant à une hausse des prix du carburant. Le texte promulgué mardi par Vladimir Poutine ouvre la possibilité d'envoyer des réservistes "pour assurer la protection d'installations essentielles" à la demande du gouvernement et en échange d'une compensation financière.
Les réservistes sont des personnes ayant servi par le passé dans l'armée ou dans d'autres structures chargées de la sécurité et qui ont conclu un contrat pour être ensuite incorporées dans la réserve. La Russie avait mobilisé en septembre 2022 environ 300 000 réservistes pour combattre en Ukraine, quelques mois après le début de son assaut contre ce pays et à un moment où ses troupes étaient en difficulté.
Aucune mobilisation générale n'a toutefois été décrétée depuis le début de la guerre, l'armée russe attirant des volontaires en leur promettant des rémunérations élevées et des avantages sociaux.
Ces derniers mois, les Ukrainiens ont multiplié les attaques sur les dépôts et les raffineries de pétrole russes pour tenter de tarir la rente des hydrocarbures qui finance l'effort de guerre du Kremlin. La Russie a de son côté procédé à plusieurs vagues de frappes sur les installations électriques et gazières en Ukraine, y causant des coupures de courant, à l'approche de l'hiver.
Les Européens doivent poursuivre leur soutien à l'Ukraine et muscler le rapport de force avec Moscou en réduisant leurs vulnérabilités, recommande un long rapport de l'Institut français des relations internationales (IFRI) publié mardi, qui voit en la Russie une "menace durable" ayant "choisi la guerre".
"Les pays européens disposent du potentiel nécessaire, c'est-à-dire des moyens économiques, des compétences militaires et du savoir-faire technologique pour faire face à la Russie d'ici 2030, à condition de faire preuve de volonté politique", souligne à l'AFP le directeur de l'IFRI, Thomas Gomart, qui a supervisé cette étude intitulée "Europe-Russie : évaluation des rapports de force".
L'Allemagne compte augmenter de 3 milliards d'euros son aide militaire à l'Ukraine en 2026, la portant à quelque 11,5 milliards, a appris mardi l'AFP auprès du ministère allemand des Finances, qui évoque notamment le "remplacement" de systèmes Patriot.
Le ministre des Finances, Lars Klingbeil, en accord avec son homologue de la Défense, Boris Pistorius "proposera dans le cadre du projet de loi de finances rectificative une aide supplémentaire de 3 milliards d'euros pour l'Ukraine" en 2026, a indiqué un porte-parole du ministère. Selon lui, l'assistance concernera "de l'artillerie, des drones, des véhicules blindés, ainsi que le remplacement de deux systèmes de défense aérienne Patriot".
Précédemment, le journal allemand Handelsblatt avait évoqué un tel projet, citant des sources gouvernementales non-identifiées. Cette rallonge porterait donc à 11,5 milliards d'euros le budget d'aide à l'Ukraine prévu l'an prochain. Berlin avait indiqué en août consacrer neuf milliards d'euros au soutien à Kiev en 2025, et prévoir de débloquer 8,5 milliards d'euros en 2026 et 2027.
Le président ukrainien Volodymyr Zelensky a appelé mardi le chef du gouvernement hongrois Viktor Orban à ne "pas bloquer" l'adhésion de son pays à l'Union européenne (UE). "Nous aimerions vraiment que le Premier ministre hongrois nous soutienne ou du moins qu'il ne nous bloque pas", a-t-il déclaré au cours d'un forum sur l'élargissement de l'UE organisé par Euronews à Bruxelles.
Entamée tambour battant au lendemain de l'invasion russe, la procédure en vue de l'entrée de l'Ukraine dans l'Union européenne est à l'arrêt depuis plusieurs mois. Ce processus d'adhésion, long et complexe, exige l'unanimité des 27 Etats membres à chaque nouvelle étape. Or le chef du gouvernement hongrois a décidé de geler de facto le processus d'adhésion en usant de son droit de veto.
Viktor Orban, qui cultive sa proximité avec le président russe Vladimir Poutine, affirme qu'une entrée de l'Ukraine dans l'UE "ruinerait" cette dernière. Sans feu vert du dirigeant hongrois, aucun progrès possible. "Je ne pense pas que j'aie quoi que ce soit à offrir à Viktor Orban", a affirmé Volodymyr Zelensky mardi, évoquant ce blocage. "Je pense que Viktor Orban a quelque chose à offrir à l'Ukraine, qui protège actuellement toute l'Europe de la Russie".
Viktor Orban n'a jamais caché son opposition à cette candidature, estimant, pour une multitude de raisons, que l'Ukraine — un pays frontalier du sien — n'était pas prête à rejoindre l'UE. Pendant plusieurs années, cette opposition est restée feutrée. Dans un numéro diplomatique désormais célèbre remontant à décembre 2023, il avait même accepté de s'éclipser du sommet des dirigeants des Vingt-Sept, le temps que ses homologues décident d'ouvrir les pourparlers avec Kiev.
Ces négociations ont officiellement débuté le 25 juin 2024. Mais, à quelques mois des élections législatives hongroises, le dossier ukrainien, déjà sensible, est devenu explosif. Et l'adhésion de l'Ukraine à l'UE patine.
Le président Volodymyr Zelensky a annoncé mardi s'être rendu auprès des troupes ukrainiennes combattant dans la zone de Pokrovsk, ville stratégique du Donbass en difficulté face aux attaques de l'armée russe. "J'ai rencontré nos soldats au poste de commandement du 1er corps de la Garde nationale d'Ukraine Azov (...), qui mène la défense dans la zone de Dobropillia", près de Pokrovsk, a indiqué Volodymyr Zelensky sur les réseaux sociaux.
La Russie a fortement accru sa pression ces derniers jours sur le bastion de Pokrovsk, situé dans la région industrielle du Donbass que le Kremlin cherche à conquérir en priorité.
L'armée ukrainienne a affirmé samedi qu'une opération "complexe" impliquant des forces spéciales était en cours pour chasser les soldats russes infiltrés dans cette ville minière. "Merci pour la défense de l'Ukraine, de notre intégrité territoriale", a déclaré Volodymyr Zelensky en décorant des militaires, selon une vidéo publiée par la présidence. "Vous servez dans un secteur si important. C'est notre Etat, c'est notre Est", a-t-il poursuivi en souhaitant à ses soldats "la victoire sur l'ennemi chaque jour".
Volodymyr Zelensky a notamment rencontré le commandant du Corps Azov, Denys Prokopenko, figure emblématique en Ukraine, selon les images publiées par la présidence. Le colonel Prokopenko avait été l'un des commandants de la défense de l'aciérie Azovstal, symbole de la résistance ukrainienne dans la ville assiégée de Marioupol en 2022. Le président Zelensky, qui se rend assez régulièrement dans les zones de combat avec la Russie, était accompagné par son commandant en chef des armées Oleksandre Syrsky, selon les images de la présidence.
Des observateurs militaires craignent que l'agglomération de Pokrovsk-Myrnograd, qui comptait 100 000 habitants avant le début de l'invasion en 2022, ne soit prochainement encerclée et tombe sous le contrôle de la Russie. Une député ukrainienne, Mariana Bezougla, connue pour ses déclarations fracassantes sur les problèmes de l'armée, a décrit lundi la situation à Pokrovsk comme une "horreur", mettant en cause le général Syrsky.

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