« La chute de Bachar Al-Assad en Syrie fin 2024 est le point d’arrivée, incertain, d’un cycle de soulèvements et de répressions parti de Tunisie, il y a quinze ans »

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L’ex-cheffe de la diplomatie de l’Union européenne, Federica Mogherini, a été inculpée ce mercredi 3 décembre en Belgique, au cœur d’un scandale de corruption. Elle est inculpée pour usage frauduleux de fonds européens, dans le cadre d’une enquête sur l’attribution par l’UE d’un contrat de formation de futurs diplomates au Collège d’Europe, une école de Bruges qu’elle dirige actuellement. Ce contrat représenterait quelque 654 000 euros, selon une source européenne de l’AFP.
Selon le parquet européen, qui supervise les investigations, deux autres suspects ont été interpellés mardi à Bruxelles, comme elle : un haut responsable de la Commission européenne, Stefano Sannino, ainsi que le directeur adjoint du Collège d’Europe. Tous deux ont également été inculpés après une journée d’interrogatoire par la police belge. Les trois suspects ont été remis en liberté sous conditions dans la nuit, a précisé à l’AFP une porte-parole du parquet européen, qui ajoute que "ces accusations concernent des faits de fraude et de corruption dans le cadre de marchés publics, de conflit d’intérêts et de violation du secret professionnel".
Le Collège d’Europe à Bruges est un établissement réputé qui forme de nombreux fonctionnaires européens, et Federica Mogherini en est la rectrice depuis septembre 2020. La responsable italienne de 52 ans dirige également depuis août 2022 l’Académie diplomatique de l’UE, le programme qui se retrouve au cœur de l’enquête du parquet européen.
L’enquête porte sur des soupçons de favoritisme et de concurrence déloyale dans l’attribution en 2021-2022 à cet établissement, par le service diplomatique de l’UE (EEAS) — dont Federica Mogherini fut la cheffe de 2014 à 2019 — d’un programme de formation pour futurs diplomates. Les enquêteurs cherchent à déterminer si l’appel d’offres pour ce contrat a été faussé et si le Collège d’Europe a été averti à l’avance des critères de sélection nécessaires pour le décrocher.
Une série de perquisitions a été menée mardi par la police belge au siège de l’EEAS à Bruxelles, dans plusieurs bâtiments du Collège d’Europe à Bruges, ainsi qu’aux domiciles des suspects, conduisant à ces trois interpellations. Avant cette opération, le parquet européen avait réclamé la levée de l’immunité dont bénéficiaient plusieurs suspects, ce qui lui a été accordé, a souligné le parquet européen, sans citer de noms ni de fonctions.
Officiellement institué en 2021, le parquet européen est un organe indépendant de l’UE chargé de lutter contre la fraude aux fonds de l’Union et toute autre infraction portant atteinte à ses intérêts financiers (corruption, blanchiment de capitaux, fraude transfrontalière à la TVA). Cette instance supranationale est compétente pour enquêter, poursuivre et traduire en justice les auteurs de telles infractions, un pouvoir inédit que ne possédait pas notamment l’Office européen de lutte antifraude (Olaf). L’enquête a été confiée par le parquet à un juge d’instruction d’Ypres, en Flandre-Occidentale, la province belge où se situe Bruges.

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Il avait été condamné à 45 ans de prison ferme pour trafic de drogue aux Etats-Unis… Et a finalement été gracié par Donald Trump lundi 1er décembre. À la surprise générale, l’ex-président du Honduras Juan Orlando Hernandez est sorti de sa prison de Virginie-Occidentale alors que son pays traverse des élections tendues. "Après presque quatre années de douleur, d’attente et d’épreuves difficiles, mon mari est à nouveau un homme libre, en vertu de la grâce présidentielle", a annoncé son épouse mardi.
L’homme était pourtant accusé d’être responsable d’avoir inondé les Etats-Unis de drogue lorsqu’il était au pouvoir, jugé coupable d’avoir aidé à expédier des centaines de tonnes de cocaïne sur le sol américain. Cette libération tranche avec la rhétorique antidrogue qui constitue l’un des fers de lance de Donald Trump. Le président s’est justifié de son choix lors d’un échange avec la presse mardi. "C’était une horrible chasse aux sorcières orchestrée par Biden. Beaucoup de gens au Honduras m’ont demandé de le faire. Et je l’ai fait". "S’il y a des trafiquants de drogue dans votre pays […], on n’envoie pas forcément le président en prison pour 45 ans" a ajouté Donald Trump, qui a fait de la lutte contre le narcotrafic son leitmotiv dans ses relations avec l’Amérique latine.
Le Honduras, dont Juan Orlando Hernandez a été le chef d’Etat de 2014 à 2022, est l’un des pays les plus violents de la région, du fait principalement des gangs qui contrôlent le trafic de drogue et le crime organisé. Le procès fédéral de l’ancien président à New York avait mis en lumière la manière dont il aurait "maintenu le Honduras comme un bastion du commerce mondial de la drogue", rappelle le New York Times, et "orchestré une vaste conspiration en matière de trafic qui, selon les procureurs, a permis aux cartels de récolter des millions de dollars". Selon les procureurs américains, sous "JOH", le Honduras était devenu un "narco-État", une "super autoroute" par laquelle passait une grande partie du trafic de drogue de la Colombie vers les États-Unis. Durant son procès, l’ex-président s’était vanté de "bourrer de drogue le nez des gringos".
En dépit de cette condamnation historique et de l’absence totale de preuves pour appuyer les affirmations de Donald Trump, selon qui l’ancien président a été victime d’un complot politique, un élément semble avoir débloqué la situation de Juan Orlando Hernandez. Comme l’écrit le journal espagnol El Pais,"une lettre pleine d’éloges adressée à Donald Trump semble être la clé qui a ouvert la porte de sa prison". "Comme vous, président Trump, j’ai subi des persécutions politiques", écrit Hernandez dans ce courrier de quatre pages, publié par le média américain Axios. L’ex-chef d’Etat y affirme qu’il n’y a pas de preuves suffisantes contre lui et accuse l’administration Biden-Harris de l’avoir emprisonné "pour des motifs politiques". Il soutient que sa condamnation est "injuste" et basée sur "des témoignages de trafiquants violents et de menteurs professionnels".
Dans sa missive, Juan Orlando Hernandez fait surtout appel à l’ego du président américain. "Je trouve de la force en vous, Monsieur, dans votre résilience qui vous a permis de revenir à cette grande fonction malgré la persécution et les poursuites auxquelles vous avez fait face — parce que vous vouliez rendre sa grandeur à votre pays. Ce que vous avez accompli est sans précédent et véritablement historique […] Votre résilience face à une persécution politique incessante m’a profondément inspiré".
La Maison-Blanche assure que Trump n’a pas lu ce message flatteur avant d’annoncer la grâce. Dans un éditorial, le Wall Street Journal met toutefois en garde contre les implications d’une telle décision : "Quelle étrange tournure des événements. Peut-être que Donald Trump pense jouer aux échecs géopolitiques, mais il a une longue histoire de forte sensibilité à la flatterie, et sa grâce non expliquée sape l’État de droit et les procureurs qui ont fait condamner M. Hernandez".
Plus largement, la volonté de Donald Trump de s’immiscer dans la présidentielle au Honduras pourrait aussi avoir été bénéfique à l’ancien président sud-américain. Le milliardaire républicain, qui multiplie les faits d’ingérence dans les affaires intérieures de pays alliés ou non, a pesé de tout son poids ces dernières semaines pour faire élire le candidat du Parti national (PN) de Juan Orlando Hernandez : l’homme d’affaires Nasry Asfura, 67 ans. "Cela ne peut pas être permis, surtout maintenant que, avec la victoire électorale de Tito Asfura, le Honduras se dirige vers un grand succès politique et financier", a ajouté Donald Trump concernant l’emprisonnement de Hernandez. Cette grâce intervient alors que le pays retient son souffle pour savoir qui a gagné la présidentielle de dimanche.
Le président américain juge que l’Amérique latine fait partie de la sphère d’influence américaine et a adopté une posture interventionniste dans la région, invoquant notamment la lutte contre le narcotrafic contre les pays dirigés par la gauche, à commencer par le Venezuela. Il n’hésite pas à conditionner l’aide américaine à la bonne volonté des gouvernements, à ses affinités avec leurs dirigeants voire aux résultats des consultations électorales. Mais il exerce aussi une forte pression militaire. Les Etats-Unis ont déployé leur plus grand porte-avions ainsi qu’une flottille de navires de guerre et d’avions de chasse dans les Caraïbes, dans le cadre d’opérations antidrogue visant particulièrement le Venezuela, ennemi de Washington.

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C’est sa quatrième visite d’État en Chine : Emmanuel Macron entame ce mercredi 3 décembre un voyage de trois jours à Pékin afin de défendre les intérêts français et européens, de l’Ukraine aux échanges commerciaux, sur fond de contentieux croissants avec le géant asiatique.
Le président français, attendu vers 17h00 locales (10h00 heure française) dans la capitale chinoise, entrera dans le vif du sujet jeudi avec son homologue Xi Jinping, après une séquence privée, la visite des jardins de Qianlong à la Cité interdite, à son arrivée. Les deux dirigeants se retrouveront aussi vendredi à Chengdu, dans la province du Sichuan (centre), berceau des pandas géants devenus des ambassadeurs de la Chine à travers le monde, pour une rencontre plus informelle.
Emmanuel Macron est accompagné de son épouse Brigitte, de six ministres (Affaires étrangères, Economie, Agriculture, Environnement, Enseignement supérieur, Culture) et 35 patrons de grands groupes (Airbus, EDF, Danone..) ou d’entreprises plus familiales, du luxe à l’agroalimentaire.
"Nous voulons, et ce sera l’objet de la conversation stratégique avec le président Xi Jinping, que l’Europe soit respectée comme un grand partenaire de la Chine", a insisté l’Elysée à la veille de la visite.
Sujet prioritaire, la guerre en Ukraine et par ricochet la sécurité du Vieux continent, alors que les discussions s’intensifient pour tenter de mettre fin aux hostilités. Emmanuel Macron va appeler une nouvelle fois Xi Jinping à "peser" sur la Russie, partenaire stratégique de la Chine, pour la "convaincre" d’accepter un cessez-le-feu.
Si elle appelle régulièrement à des pourparlers de paix, la Chine n’a toutefois jamais condamné Moscou pour l’invasion de l’Ukraine et revendique une neutralité dans ce dossier. Elle est aussi accusée par les Occidentaux de soutenir l’effort de guerre de la Russie en lui livrant notamment des composants pour son industrie de défense.
"Nous comptons sur la Chine, membre permanent comme nous, du Conseil de sécurité (..) pour peser sur la Russie, pour que la Russie et Vladimir Poutine, en particulier, puissent enfin se résoudre à un cessez-le-feu", a déclaré lundi le chef de la diplomatie française, Jean-Noël Barrot, alors que les négociations s’intensifient vers une sortie de crise. "La Chine peut exercer un rôle essentiel pour amener la Russie de Vladimir Poutine à prendre la bonne décision", a-t-il insisté sur la radio France Culture.
Autre enjeu clé de la visite, le déficit commercial abyssal entre la France et la Chine, qui a doublé en dix ans pour atteindre 47 milliards d’euros en 2024. La Chine compense des "surcapacités" de production par une hausse de ses exportations, ce qui emporte un certain nombre de "risques géopolitiques", de la "fermeture de marchés" à la "récession", a averti mardi un conseiller du président Macron.
Dans ce contexte, Paris souhaite que les entreprises chinoises investissent plus en France et partagent les innovations qu’elles maîtrisent dans les "mobilités durables, les batteries ou le photovoltaïque". Le géant français du combustible nucléaire Orano s’est ainsi associé au chinois XTC New Energy pour la production de matériaux critiques à Dunkerque, dans le nord de la France. De la même manière, une filiale du chinois Envision fabrique des batteries de voitures électriques pour le groupe Renault à Douai (nord).
La Chine est aussi accusée de "concurrence déloyale" vis-à-vis de l’Europe en subventionnant massivement son industrie. La France se retrouve ainsi dans le viseur de Pékin, avec une série d’enquêtes visant ses exportations (cognac, produits laitiers, viande porcine etc..) et des surtaxes potentielles à la clé, pour avoir soutenu une hausse des droits de douane européens sur les voitures électriques en provenance de Chine. "Ces questions-là feront l’objet de discussions au plus haut niveau" durant la visite, promet la présidence française, jugeant ces enquêtes "inacceptables".
Le sujet des terres rares sera aussi "certainement abordé" par les deux présidents, ajoute-t-elle alors que la Chine, qui domine la production mondiale en la matière, encadre sévèrement ses exportations. Les terres rares sont des métaux et minerais essentiels pour des pans entiers de l’économie, en particulier l’industrie automobile, les énergies renouvelables ou la défense.
A l’inverse, le géant du e-commerce chinois Shein est dans le collimateur de la France - et de l’UE - après la vente de produits illégaux dont des poupées pédopornographiques. Paris réclame la suspension pour trois mois minimum du site en France.
Signe toutefois que la relation économique reste fluide, plusieurs accords seront signés durant la visite, relève l’Élysée qui rappelle, sans plus de précisions, la "profondeur des échanges en matière aéronautique, énergétique ou agroalimentaire".
Emmanuel Macron abordera aussi la question des droits humains en Chine, assure la présidence. "Toutes les questions seront traitées dans le cadre du dialogue entre les deux présidents", promet-on à Paris. L’organisation International Campaign for Tibet (ICT) l’exhorte à "demander la libération immédiate et inconditionnelle" de Zhang Yadi, une défenseuse des droits des Tibétains arrêtée en Chine en juillet et qui risque jusqu’à 15 ans de prison pour "incitation au séparatisme".

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