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© Anatolii Stepanov / REUTERS
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Pourquoi Zohran Mamdani ? Et comment un homme encore inconnu l’année dernière, musulman et socialiste de surcroît, a-t-il pu remporter la mairie de la capitale de la finance et de l’immobilier américains, New York City ? Enfin : que signifie pour le Parti démocrate le triomphe électoral de ce trentenaire né en Ouganda qui deviendra, le 1er janvier prochain, le 111e et plus jeune maire de la ville depuis 1913 ?
A toutes ces questions, il existe une réponse simple : comme d’autres métropoles internationales, New York (de 8,5 millions d’habitants) est devenu une cité hors de prix où le coût de la vie atteint des niveaux absurdes, avec des loyers dépassant 4 500 dollars pour un deux-pièces à Manhattan ; des cafés facturés 6 dollars et des places en crèches à 25 000 dollars l’année. "It’s the economy, stupid !" (c’est l’économie, banane !), avait dit un conseiller de Bill Clinton dans les années 1990 pour expliquer qu’aux Etats-Unis, la question du pouvoir d’achat décide du résultat de toutes les élections.

Mais Zohran Mamdani, 34 ans, a aussi bénéficié d’un alignement des planètes favorable. D’une part, les New-Yorkais sont mécontents de leur maire démocrate sortant, Eric Adams. Ancien "flic" du New York Police Departement (NYPD) élu voilà quatre ans, il est mis en examen pour enrichissement personnel. Raison pour laquelle il a renoncé à se représenter. Restait en lice l’ex-démocrate Andrew Cuomo, vieux crocodile de la vie politique new-yorkaise qui tentait un come-back sous la bannière "indépendante" – il avait dû quitter ses fonctions de gouverneur de l’Etat de New York en 2021, à la suite d’accusations de harcèlement sexuel.
Trop old school, il a mené une campagne ennuyeuse, sans enthousiasme, essentiellement à l’ancienne, c’est-à-dire à la télévision, avec le soutien de la vieille garde démocrate. Pour cette dernière, tout valait mieux que le socialiste Mamdani aux prises de position pro-palestinienne et parfois irréaliste – voire carrément démagogique – comme celle de confier à la municipalité la gestion de magasins d’alimentation "low cost". Au surplus, Cuomo (41 % des suffrages) a souffert de la candidature du fantasque républicain Curtis Sliwa (7 %) dont les voix se seraient reportées sur lui au nom du "Tout sauf Zorhan" s’il s’était retiré de la course, comme l’espéraient certains.
A l’opposé de Cuomo, Mamdani (50,1 %) a mené sa campagne sur les réseaux sociaux où ses messages simples, concis et enthousiasmants, on fait mouche tout en bénéficiant du "dégagisme" ambiant. Archi majoritairement démocrate, la ville de New York n’est cependant pas représentative du pays. Depuis 1900, la ville a élu six fois plus souvent des maires de ce parti. Les républicains, eux, restent l’exception à l’instar de Rudy Giuliani ou Michael Bloomberg. A New York, la participation électorale est en outre habituellement faible (autour de 25 %) même si cette année, la polarisation autour de la figure du candidat "socialiste" et musulman a permis une surmobilisation qui s’est traduite par une participation de 45 %, avec environ 1 million de suffrages pour Mamdani et 850 000 pour Cuomo.
Même s’il ne faut pas exagérer la portée du succès de Mamdani, la victoire de ce candidat né dans un milieu d’intellectuels de gauche privilégiés (son père est un théoricien postcolonial ; sa mère, une productrice et réalisatrice de cinéma) est puissamment symbolique, avec un impact psychologique indéniable. "Cela va galvaniser l’aile gauche radicale du parti démocrate et la conforter dans l’idée qu’il faut se débarrasser de la vieille génération au sein même de son propre camp", estime l’homme d’affaires et commentateur politique Harley Lippmann, un "indépendant" qui espérait la victoire de Cuomo. "Cela va donner des ailes à Alexandria Ocasio-Cortez : elle va vouloir défier le sénateur Chuck Schumer, lui aussi de New York, qui est actuellement le démocrate le plus puissant du parti." Car ses ambitions sont plus grandes : à la différence de Mamdani, qui est né à l’étranger, elle peut prétendre, un jour, conquérir la Maison-Blanche.

Mais la médaille a son revers. "Si la fraction la plus radicale du Parti démocrate va trop loin, cela poussera les plus modérés et centristes à s’abstenir, voire à voter républicain, comme cela s’est produit à la dernière présidentielle lorsque de nombreux électeurs ont renoncé à donner leur voix à Kamala Harris", poursuit-il. Au reste, la génération Z du camp démocrate n’a pas encore gagné la partie : en Virginie et dans le New Jersey, ce sont deux démocrates centristes qui ont été élus gouverneurs en même temps que Zohran Mamdani devenait maire de New York.
Démocrate affilié aux Socialistes démocrates d’Amérique (DSA), ce dernier pourrait d’ailleurs devenir le "meilleur ennemi" de Donald Trump, qui a tout intérêt à en faire un épouvantail. Pendant la campagne, les républicains ont rappelé, dans le contexte de la mort de l’Afro-américain George Floyd (étouffé au sol par un policier de Minneapolis en 2020), Mamdani soutenait le mouvement Defund the police ("Supprimer le financement de la police"). Trump et son entourage mettent l’accent sur son incapacité à condamner le slogan "Globalisons l’intifada." Et ils observent que Mamdani reste évasif sur le désarmement du Hamas. "Lors du dernier débat électoral, fin octobre, il a préféré charger Israël, qu’il accuse de génocide : "Le problème, ce sont les racines : le blocus, l’occupation, l’apartheid."
Durant la campagne, Zohran Mamdani a placé la barre des espérances très haut : augmentation du pouvoir d’achat, gel des loyers, transports gratuits, magasins d’alimentation subventionnés, etc. Mais après sa prise de fonctions en janvier 2026, il sera confronté au réel. "Si sa politique consiste à augmenter les impôts, bloquer les loyers et définancer la police de New York, alors attention au retour de bâton", prévient Lippmann. "On pourrait assister, comme au moment du Covid, à un nouvel exode des New-Yorkais vers la Floride, où les impôts sont plus faibles. Non seulement les plus riches pourraient quitter la ville mais, de plus, les entrepreneurs pourraient emporter leurs entreprises sous leurs bras, ce qui se traduirait par des emplois perdus. Je me demande avec quel argent Mamdani mettra alors en œuvre son programme socialiste", ajoute le commentateur.
"Accessoirement, poursuit-il, les juifs de New York – première ville juive au monde devant Tel-Aviv – ne sont guère rassurés par ses prises de position sur la police, surtout dans le contexte d’un antisémitisme en augmentation depuis le pogrom du 7-Octobre et la guerre à Gaza. Plus d’une fois, Mamdani a expliqué à son électorat de la génération Z que la criminalité pouvait se résoudre grâce à l’augmentation des travailleurs sociaux. C’est sympathique mais pas du tout réaliste…", soupire notre interlocuteur.
Seule certitude : l’expérience Mamdani – celle d’un trentenaire musulman anticapitaliste élu dans la capitale de la finance – sera scrutée à la loupe. S’il échoue (comme ses deux prédécesseurs Bill de Blasio et Eric Adams), ce sera pain bénit pour Donald Trump et les républicains qui pourront faire d’une pierre deux coups : à travers le maire de New York, ils pourront atteindre l’étoile montante démocrate Alexandria Ocasio-Cortez qui est son proche allié. Le jeu est toutefois risqué. Si le président américain met des bâtons dans les roues de New York City, par exemple en supprimant des financements fédéraux et en envoyant l’armée dans les rues de la ville, alors le nouvel élu pourrait se présenter en victime. Et surfer sur la dynamique gagnante qu’à la surprise générale, il a créée en quelques mois.

© afp.com/Angelina Katsanis
Tests de nouvelles armes par la Russie, annonce de potentielles reprises des essais nucléaires par Donald Trump : le plus haut gradé français, le général Fabien Mandon, a jugé mercredi 5 novembre "l’atmosphère sur le nucléaire préoccupante", pointant "un niveau de discours et d’agressivité […] assez exceptionnel".
Devant les sénateurs de la commission des Affaires étrangères et de la Défense, le chef d’état-major des Armées a évoqué les tirs d’essai fin octobre par la Russie de la torpille Poséidon, "qui serait capable d’emporter une charge nucléaire" et du missile de croisière à propulsion nucléaire Bourevestnik.
"C’est un missile qui a volé plus d’une dizaine d’heures de manière continue […] ça permet d’atteindre des distances extraordinaires. Et c’est quelque chose qui met en œuvre des technologies, notamment nucléaires […] des raisons de préoccuper la planète, puisqu’un cœur nucléaire qui vole dans une arme c’est absolument pas anodin", a estimé le général Mandon. "D’ailleurs, le président américain l’a bien noté puisque dans la foulée, il a annoncé la reprise, en tout cas, il a eu une expression qui laissait entendre que les Etats-Unis pourraient reprendre des essais nucléaires", a-t-il affirmé.
"Donc, il y a quand même une atmosphère sur le nucléaire qui est préoccupante", selon lui, "on est dans un niveau de discours et d’agressivité dans les actes et les paroles qui est assez exceptionnel".
L’Iran a de son côté annoncé la reconstruction de ses installations nucléaires, détruites par les frappes israéliennes et américaines en juin, a-t-il également rappelé.
Devant les sénateurs, le plus haut gradé français a par ailleurs réaffirmé la nécessité pour l’armée française de se "préparer à un choc d’ici trois ou quatre ans" face à la Russie. Face à l’absence de "signe de la part de Moscou de volonté de négocier ou de s’arrêter", "le devoir pour un responsable militaire qui doit anticiper les choses, (est) de dire le scénario d’un nouvel épisode d’attaque russe sur notre continent ne peut pas être écarté et il faut s’y préparer", a expliqué le général Mandon.

© AFP
"Une ascension spectaculaire", titre le Los Angeles Times. Mardi 4 novembre, Zohran Mamdani a été élu maire de New York. A 34 ans, le démocrate a devancé l’ancien gouverneur Andrew Cuomo et le républicain Curtis Sliwa, s’imposant grâce à une campagne centrée sur l’accessibilité financière et les services publics. Le Los Angeles Times le souligne : le socialiste laissera son empreinte dans l’histoire "comme le premier maire musulman de la ville, le premier d’origine sud asiatique et le premier né en Afrique", mais aussi "le plus jeune maire de la ville depuis plus d’un siècle".
Dès janvier prochain, le futur maire de New York sera confronté à un défi de taille : concrétiser ses promesses ambitieuses, jugées parfois irréalistes par ses détracteurs. Parmi celles-ci, la gratuité des transports en commun, celle de la garde d’enfants, ou encore la création de magasins alimentaires gérés par la ville.
La victoire de Zohran Mamdani s’inscrit dans une série de succès démocrates. Dans la soirée, d’autres candidats de son bord politique ont remporté des postes clés sur la côte Est et au-delà. Les électeurs ont ainsi porté Abigail Spanberger à la gouvernance de Virginie et Mikie Sherrill à celle du New Jersey. En Californie, un référendum approuvé redessine les circonscriptions électorales, ce qui pourrait "coûter leurs sièges à cinq républicains " et améliorer les chances démocrates lors des élections de mi-mandat de 2026, note USA Today.
Le quotidien national qualifie ainsi la soirée de "preuve de vie" donnée par le parti, soulignant que "même sans base de pouvoir national, sans candidat en tête pour la prochaine présidentielle, sans stratégie cohérente contre Trump et avec des classements historiquement bas auprès des électeurs, le Parti démocrate n’est pas vaincu".
Le Wall Street Journal voit dans ces résultats un avertissement pour les républicains : "Les démocrates inversent la donne sur la question du pouvoir d’achat, surtout lorsqu’ils évitent les pièges culturels de l’aile gauche." Les candidats démocrates ont en effet centré leurs campagnes sur des préoccupations concrètes et quotidiennes : l’augmentation des coûts du logement, des soins de santé et de l’énergie, ainsi que l’accès aux services publics essentiels. Comme le souligne USA Today, c’est cette stratégie qui a permis à des candidats comme Abigail Spanberger et Mikie Sherrill de s’imposer dans leurs Etats respectifs.
Les analystes du Wall Street Journal expliquent également ces victoires par la désaffection croissante envers l’actuel président : sa cote de popularité, à 44 % dans le New Jersey et 42 % en Virginie selon les sondages à la sortie des urnes, illustre le coût de ses positions politiques controversées, dont la récente fermeture partielle du gouvernement. CNN résume la situation : ces élections étaient "une première opportunité pour les électeurs de se prononcer sur Trump depuis l’élection présidentielle".
L’issue reste toutefois incertaine pour les élections de mi-mandat de 2026. Comme le note le Wall Street Journal, "les élections de Virginie et du New Jersey ont toujours été des courses difficiles (à remporter, NDLR) pour le parti au pouvoir à la Maison-Blanche". Une question posée par USA Today reste donc sur toutes les lèvres : "Les démocrates pourront-ils le refaire l’année prochaine ?". Pour le New York Times, il ne reste plus qu’à patienter pour connaître la réponse : "La question de savoir si les dirigeants démocrates sont prêts à faire de la place à un large éventail d’idéologies au sein du parti […] est une question ouverte sur laquelle les mi-mandats de 2026 feront la lumière."

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