L’incident est une nouvelle illustration des tensions croissantes entre les deux voisins ex-soviétiques. Le ministère estonien des Affaires étrangères a dénoncé, ce vendredi 19 septembre, la violation "d’une audace sans précédent" de l’espace aérien de ce pays balte, membre de l’UE et de l’Otan, par trois avions de combat russes.
Que s’est-il passé ?
"L’incursion a eu lieu au-dessus du golfe de Finlande, où trois avions de chasse MIG-31 de la Fédération de Russie sont entrés dans l’espace aérien estonien […] et y sont restés pendant un total de 12 minutes", a indiqué le ministère estonien dans un communiqué.
"La Russie a déjà violé l’espace aérien estonien à quatre reprises cette année, ce qui est en soi inacceptable. Mais l’incursion d’aujourd’hui, impliquant trois avions de chasse […] est d’une audace sans précédent", a déclaré le chef de la diplomatie estonienne Margus Tsahkna cité dans le communiqué. Selon un responsable de l'Otan ayant requis l'anonymat, des F-35 italiens, avions de combat de fabrication américaine participant à une mission de surveillance de la Baltique, sont intervenus pour intercepter les chasseurs russes.
Quelles sont les réactions ?
"De tels actes ne peuvent être tolérés et doivent être sanctionnés par des mesures politiques et économiques rapides", a encore déclaré le ministre estonien sur X. Le ministère des Affaires étrangères a indiqué dans la foulée avoir convoqué le chargé d’affaires de l’ambassade de Russie pour protester contre cette violation. Les incidents similaires précédents ont eu lieu le 13 mai, le 22 juin et le 7 septembre. Conséquence : le Premier ministre estonien Michal Kristen a annoncé que son pays allait demander à l'Otan d'activer l'Article 4 du traité Atlantique qui prévoit des consultations entre alliés en cas de menace sur l'un de ses membres. "Une telle violation est totalement inacceptable", a-t-il écrit sur X.
Via sa porte-parole Allison Hart, l’Otan a dénoncé un "nouvel exemple de comportement russe dangereux". La cheffe de la diplomatie européenne Kaja Kallas a dénoncé pour sa part, sur le réseau social X, une "provocation extrêmement dangereuse". Le président russe Vladimir "Poutine teste la détermination de l'Occident. Nous ne devons pas montrer de faiblesse", a encore dit l'ancienne Première ministre estonienne.
"Nous répondrons à chaque provocation avec détermination", a indiqué de son côté la présidente de la Commission européenne Ursula von der Leyen, peu après avoir proposé un nouveau "paquet" de sanctions contre la Russie, le 19e depuis l'invasion de l'Ukraine lancée en février 2022 par Moscou.
Le président ukrainien Volodymyr Zelensky a jugé l'incident "scandaleux", estimant que les "activités déstabilisatrices de la Russie s'étendaient à de nouveaux pays et dans de nouvelles directions". Paris a dénoncé "une nouvelle provocation" de Moscou qui a mené vendredi une "incursion dangereuse et irresponsable".
Comment est protégé le ciel des pays baltes ?
Les pays baltes, tous soutiens fermes de l’Ukraine, mais ne disposant pas de leurs propres avions de combat, ont confié la police de leur ciel à d’autres alliés de l’Otan qui assument cette tâche à tour de rôle. Depuis août, la mission est assurée par l’aviation italienne.
L’Otan a annoncé il y a une semaine le lancement de l’opération "sentinelle orientale" pour renforcer la défense de son flanc est après des incursions de drones en Pologne et en Roumanie, que les Européens ont attribués à la Russie.
Et de trois ! Après le Sri Lanka en 2022 et le Bangladesh en 2024, la jeunesse népalaise a renversé son gouvernement début septembre. L’heure des "printemps asiatiques" a-t-elle sonné ? En l’espace de trois ans à peine, la génération Z de trois pays d’Asie du Sud est parvenue à chasser du pouvoir une élite dirigeante corrompue, qui semblait jusque-là indétrônable.
48 heures ont suffi
Le soulèvement népalais fut fulgurant. Il n’aura fallu à la jeunesse de la nation himalayenne que 48 heures pour pousser le premier ministre KP Sharma Oli, 73 ans, vers la sortie. Lundi 8 septembre, des milliers de personnes étaient descendues dans les rues de Katmandou, sous la bannière "Gen Z", en référence aux jeunes de moins de 28 ans, pour protester contre l’interdiction de 26 réseaux sociaux, dont Facebook, TikTok ou encore Instagram. Face à la violente répression qui a fait 19 morts ce jour-là, la capitale s’embrase.
Dans un revirement spectaculaire, à la fin de cette même semaine, ce pays de 30 millions d’habitants avait dissous son Parlement et nommé une Première ministre de transition. Le vendredi 12 septembre, Sushila Karki, ancienne présidente de la Cour suprême et militante anti-corruption, prêtait serment et promettait d’organiser des élections d’ici à mars 2026.
L’exemple népalais
Le Népal semble incarner une tendance dans la région où des scénarios similaires se sont déroulés ces dernières années. Il y a d’abord eu le Sri Lanka. Alors que l’île de l’Océan indien subissait une grave crise économique en 2022, après des mois de privation, des dizaines de milliers de personnes, majoritairement jeunes, ont envahi le palais présidentiel de Gotabaya Rajapaksa, 76 ans. Le dirigeant honni, dont le clan a régné plus d’une décennie, a été forcé de prendre la fuite. Deux ans plus tard, l’histoire semble se répéter au Bangladesh, où une révolte étudiante s’étend à toute la population avant de contraindre la Première ministre Sheikh Hasina, 77 ans, à quitter le pays pour se réfugier en Inde. "Il est tentant de voir se dessiner un ’printemps sud-asiatique', semblable au ’printemps arabe’ du début des années 2010, indique Roman Gautam, rédacteur en chef de Himal Southasian, une publication régionale. Tous les ingrédients sont réunis : une classe politique pourrie, un peuple à bout, des révoltes qui se succèdent." Ces mouvements sans leader et sans idéologie politique claire sont ancrés dans des frustrations de longue date : un chômage de masse qui frappe des populations particulièrement jeunes, des élites dirigeantes âgées et indétrônables, la corruption et des perspectives d’avenir moroses. Lorsque le point de bascule est atteint, une seule étincelle suffit à mettre le feu aux poudres.
20 % de chômage chez les jeunes
Au Népal, où la moitié de la population a moins de 25 ans, la colère grondait depuis plusieurs semaines sur les réseaux sociaux. Une campagne en ligne avec les hashtags NepoBaby et NepoKids, en référence au népotisme et à la corruption de la classe dirigeante, prenait de l’ampleur sur TikTok, X, Facebook et Instagram. Des images virales montrant les enfants d’hommes politiques vivant une vie de faste au volant de voitures importées, en vacances en Europe, ont mis le feu aux poudres dans un pays où le chômage des jeunes s’élève à plus de20 %. Chaque année, des millions de Népalais ordinaires sont forcés à l’exil, notamment dans le Golfe où beaucoup travaillent dans des conditions inhumaines sur des chantiers de construction, au péril de leur vie.
Promesses sans lendemain
Alors quand le gouvernement a fait interdire 26 réseaux sociaux le 4 septembre, c’est l’étincelle. Inspirés par les soulèvements dans les pays voisins, les jeunes descendent dans la rue. "Les jeunes au Népal ont clairement vu ce qui se passait au Bangladesh et au Sri Lanka ou, plus récemment, en Indonésie ou aux Philippines [secouées par de violentes manifestations contre le train de vie des élites et la corruption]", estime Jeevan R. Sharma, professeur à l’école de science politique et sociale de l’université d’Edimbourg. Au Bangladesh aussi, les troubles ont commencé par de simples manifestations réclamant l’abolition d’un système de quotas dans l’accès à la fonction publique qui favorisait les membres du parti au pouvoir. Comme au Népal, la sanglante répression de la "révolution de juillet" - qui a fait 1 400 morts, a jeté de l’huile sur le feu et mené à la chute de l’autocratique Sheikh Hasina après plus de 15 années passées à la tête du pays.
Une fois ces régimes tombés, la route vers un avenir meilleur est plus qu’incertaine. "Si ces mouvements offrent des perspectives prometteuses et un regain d'intérêt pour la politique, la concrétisation de ces promesses par le biais de réformes politiques et institutionnelles est difficile et semée d’embûches", prévient Jeevan Sharma. Au Bangladesh par exemple, les élections promises n’ont toujours pas eu lieu. Et le retour de l’ancienne garde politique est tout sauf exclu.
Une jeune Népalaise photographiée le 14 septembre 2025 dans un village proche de Katmandou, capitale du Népal dont de nombreux jeunes s’exilent en Inde ou au Moyen-Orient pour trouver un emploi.
Cette décision marquerait un changement important dans la politique américaine à l’égard de Taïwan. Le président Donald Trump refuse pour l’instant d’approuver une aide militaire de 400 millions de dollars (339 millions d’euros) à l’île, en parallèle de négociations commerciales avec Pékin, a rapporté jeudi 18 septembre le journal The Washington Post.
Cet arbitrage n’est pas encore définitif, a précisé un responsable de la Maison-Blanche au Post. Les États-Unis ont cessé de reconnaître diplomatiquement Taïwan au profit de la Chine en 1970, mais sont le principal fournisseur d’armes de l’île au régime démocratique. De son côté, Pékin considère Taïwan l’une de ses provinces et n’exclut pas le recours à la force pour en prendre le contrôle.
Donald Trump s’entretient ce vendredi avec son homologue chinois Xi Jinping, pour leur deuxième conversation téléphonique depuis le retour du Républicain à la Maison-Blanche. Les deux parties cherchent un compromis sur les droits de douane et un accord sur le réseau social TikTok.
Sous la présidence de Joe Biden, prédécesseur de Donald Trump, Washington a approuvé plus de 2 milliards de dollars (1,7 milliard d’euros) d’aide militaire pour Taïwan. Mais Donald Trump "ne soutient pas l’envoi d’armes sans contrepartie financière, une préférence également affichée avec l’Ukraine", note le Post.
Pression militaire de la Chine
Des responsables de la Défense américains et taïwanais se sont réunis en août à Anchorage, en Alaska, indique le Washington Post. Selon le journal, ils ont discuté d’un accord de vente d’armes "qui pourrait atteindre plusieurs milliards de dollars au total", comprenant des drones, des missiles et des capteurs pour surveiller le littoral de l’île.
Depuis le retour de Donald Trump à la Maison-Blanche en janvier, Taipei s’inquiète de la solidité de sa relation avec les États-Unis et de la détermination de Washington à défendre l’île en cas d’attaque de la Chine. Lors d’une visite à Taïwan fin août, le président de la commission des forces armées du Sénat américain a déclaré être déterminé à ce que les États-Unis et Taïwan restent "les meilleurs amis". "Une partie du maintien de nos libertés réside dans un renforcement de la coopération militaire, un renforcement de la coopération avec notre industrie de défense, et dans le meilleur usage possible de ces fonds", avait affirmé le sénateur républicain Roger Wicker après s’être entretenu avec le président taïwanais Lai Ching-te.
Face à la pression militaire croissante de la Chine ces dernières années, Taïwan renforce ses dépenses de défense et les Etats-Unis poussent l’île à intensifier ses efforts. Le ministère de la Défense taïwanais prévoit de demander un budget exceptionnel pouvant atteindre 28 milliards d’euros, un montant record.
Accrocher un drapeau palestinien sur le fronton des bâtiments publics, pour célébrer la reconnaissance, lundi 22 septembre, de la Palestine par Paris, aux Nations Unies. En France, cette proposition du patron du Parti socialiste Olivier Faure fait grincer des dents au ministère de l’Intérieur.
Vendredi 19 septembre, les préfets ont reçu un télégramme, consulté par l’AFP, leur demandant de s’opposer à une telle initiative. "Le principe de neutralité du service public interdit de tels pavoisements", indique la place Beauvau, demandant à ses relais de saisir la justice administrative, contre les mairies qui ne respecteraient pas cette décision. Les hôtels de villes de Nantes et Saint-Denis avaient, par exemple, déjà annoncé vouloir afficher le drapeau palestinien sur leur fronton.
Mais de l’autre côté des Pyrénées, le ton est tout autre. Tandis que le gouvernement de la région de Madrid tente de faire retirer des symboles de solidarité avec Gaza des écoles, la communauté enseignante, ainsi que la gauche, s’opposent farouchement à cette décision. Pour rappel, l’Espagne, gouvernée par le socialiste Pedro Sánchez (proche du parti d’Olivier Faure, en France), est un important défenseur de la cause palestinienne en Europe. Dimanche 14 septembre, plus de 100 000 manifestants "contre le génocide à Gaza" et la participation de l’équipe israélienne à "la Vuelta" avaient mis fin prématurément à la compétition sportive à Madrid, avec le soutien du gouvernement.
Les écoles doivent rester "absolument apolitiques", selon la droite
L’opposition du Parti populaire (droite) n’a pas tardé à se faire entendre après cette polémique, qualifiée de "honte internationale", par son chef Alberto Nunez Feijoo. Dans la foulée, la communauté de Madrid, présidée par Isabel Díaz Ayuso (issue de cette formation), a demandé aux établissements scolaires publics et privés de retirer les symboles palestiniens de leurs bâtiments, avec l’argument que les écoles doivent rester "absolument apolitiques".
Pourtant "l’administration régionale avait autorisé et encouragé la solidarité avec l’Ukraine", promouvant des campagnes de recueil de dons, rappelle le premier journal d’Espagne, El País, pointant cette contradiction. Une mesure à laquelle le mouvement politique Marea Palestina et la communauté éducative ont réagi. "Alors que nous, les enseignants, expliquons à nos élèves qu’un génocide est en train d’être commis à Gaza et que tous les droits humains sont bafoués, le ministère régional nie ces faits et tente de nous empêcher d’en parler", dénonce un professeur dans le quotidien Público.
La polémique est telle que la formation d’opposition "Más Madrid" (gauche) a annoncé sur X que son groupe n’hésitera pas à poursuivre le gouvernement madrilène devant la justice, s’il persistait à vouloir faire taire "les gestes de solidarité" avec Gaza. Exacerbé par les mobilisations populaires, le débat a également eu des répercussions en Andalousie, où le lycée Columela, à Cadiz, s’est vu obligé de retirer les drapeaux palestinien et ukrainien accrochés depuis plusieurs mois sur son fronton. L’établissement s’est exécuté, mais les a remplacés par une banderole aux couleurs de la Palestine, sur laquelle on peut lire "Stop au génocide", avec des dessins issus du tableau "Guernica" de Picasso, dénonçant les bombardements indiscriminés contre les civils lors de la guerre espagnole, et repris régulièrement dans les manifestations.
La banderole n’a toujours pas été interdite, n’enfreignant officiellement aucun règlement : pour interdire les étendards, "le ministère régional de l’Éducation de l’Andalousie se réfère à la loi en vigueur sur l’utilisation des drapeaux dans les bâtiments publics […] et à la jurisprudence de la Cour suprême, qui stipulent qu’il n’est pas possible d’utiliser des drapeaux non officiels à l’extérieur des bâtiments publics. C’est précisément pour cette raison que le lycée a commandé une bâche", explique El País.
Une question d’autonomie
Dans le reste de l’Espagne, les communautés autonomes n’ont en revanche pas imposé de consignes spécifiques ni marqué d’opposition à ces expressions pro-palestiniennes. En Catalogne, où les syndicats enseignants ont appelé à des journées d’actions de solidarité avec Gaza jeudi, dont des manifestations de professeurs et d’élèves, le gouvernement a demandé aux directions de ne pas sortir du cadre pédagogique ou du calendrier scolaire, sans pour autant les interdire.
Pour le gouvernement des Canaries encore, évoquer le conflit en classe ne doit pas être un tabou : les enseignants adaptent leur travail en classe au contexte social, "c’est l’une des clés pour parvenir à un apprentissage significatif", de sorte "qu’il ne serait pas surprenant, bien au contraire", que l’on parle du conflit dans les salles de classe des Canaries, indique le ministère régional de l’Education, cité par El País. "Il est courant que les enseignants utilisent des sujets d’actualité mais cela reste à la discrétion de chaque professeur". In fine, dans plusieurs régions, "les gouvernements locaux insistent sur l’autonomie des écoles, et le fait que la participation à des activités de solidarité relève du libre choix des directions d’établissements", conclutle quotidien. Une réalité bien différente de la France, où l’Education nationale a un fonctionnement plus homogène et centralisé.
Les Américains ne sont pas en bonne santé, c’est un fait. Certaines maladies chroniques comme le diabète et l’obésité atteignent des niveaux records depuis le milieu des années 2000, et l’espérance de vie moyenne stagne autour de 78 ans, alors qu’elle continue de progresser dans la plupart des autres pays occidentaux. À titre d’exemple, en 2023, elle s’élevait à 81,7 ans au Canada, 83,1 ans en France, et dépassait 84 ans en Suisse et au Japon. Plus préoccupant encore, la mortalité infantile y demeure bien plus élevée que dans d’autres pays comparables : avec plus de 5 décès pour 1 000 naissances, les États-Unis restent loin derrière la moyenne de l’Union européenne (3,3 ‰) par exemple.
L’avocat antivax Robert F. Kennedy Jr, nommé par Donald Trump à la tête du département de la Santé de son administration, s’est donné pour mission de corriger cette trajectoire. "Maha" pour "Make America Healthy Again" : c’est le nom qu’il a donné à son programme, calqué sur Maga, le signe de ralliement des soutiens du président. En mai dernier, celui qu’on surnomme RFK Jr a annoncé la publication d’un premier rapport vertement critiqué par la presse internationale pour son mauvais usage des sources médicales. Il y pose un diagnostic sévère sur le développement des maladies chroniques dès l’enfance et met en cause, pêle-mêle, la consommation d’aliments ultra-transformés, le recours aux pesticides ou encore… la vaccination des jeunes Américains.
Une partie de son constat est partagée par l’élite médicale aux Etats-Unis, en particulier sur le volet nutritif. En revanche, le voile de défiance jeté sur la vaccination et une partie des propositions de la commission Maha suscitent beaucoup d’inquiétudes. Le 9 septembre, un second rapport a été dévoilé, déclinant la stratégie de l’administration actuelle en une série de mesures concrètes. Et là encore, il y a de quoi inquiéter les scientifiques. Les décisions politiques de RFK s’apparentent plus à une remise en cause systématique du consensus médical et des institutions, qu’à une réelle défense de la santé des Américains. Beaucoup craignent un affaiblissement structurel de la santé publique aux Etats-Unis. Rendre à l’Amérique sa bonne santé ? Rien n’est moins sûr…
La croisade contre la vaccination
Lors de son audition au Sénat en février dernier, RFK assurait qu’il n’était "ni contre les vaccins, ni contre l’industrie pharmaceutique". Ses décisions prouvent plutôt l’inverse. 20 mai 2025 : l’Agence américaine des produits alimentaires et médicamenteux (FDA), rattachée à son ministère, restreint l’accès à la vaccination contre le Covid-19. 9 juin : il limoge les 17 membres du comité consultatif sur la vaccination, prétextant des conflits d’intérêts entre ses membres et l’industrie. Une partie de leurs remplaçants se sont déjà illustrés pour leurs critiques à l’égard des vaccins et tout particulièrement ceux ayant recours à l’ARN messager. 5 août : il supprime un crédit de 500 millions destiné à la recherche sur cette même technologie. 28 août : il renvoie Susan Monarez, la directrice du Centre pour le contrôle des maladies (CDC) qu’il avait nommé un mois plus tôt. Son tort ? Avoir critiqué la politique vaccinale du gouvernement.
Cette offensive s’inscrit dans la continuité de son parcours politique, étroitement lié au mouvement antivax. Entre 2015 et 2023, il a ainsi dirigé une organisation à but non lucratif baptisée "Children’s Health Defense" [NDLR : "Défense de la santé des enfants" en français] qui établit un lien entre vaccination infantile et autisme. RFK avait notamment défendu des familles opposées à la généralisation de la vaccination imposée par Andrew Cuomo, le gouverneur de New York, à la fin des années 2010. La Cour suprême de l’Etat avait rejeté la requête de ces familles.
Qu’importe, puisque aujourd’hui, c’est à l’échelle nationale que Robert Kennedy peut déployer son agenda politique. Lors d’une nouvelle audition au Sénat début septembre, les sénateurs lui ont reproché d’avoir affaibli les institutions américaines chargées de la vaccination, alors même qu’il s’était engagé à les protéger. Peine perdue. Déjà, le gouvernement local de Floride a annoncé l’abrogation de toutes les obligations vaccinales, à commencer par celles imposées aux enfants scolarisés. Le département de la Santé, lui est en pleine révision de ses préconisations. Ce vendredi 19 septembre, il a notamment cessé de recommander la vaccination contre la rougeole pour les enfants de moins de quatre ans. L’immunisation contre l’hépatite B et le Covid-19 pourrait suivre.
Ces attaques interviennent alors que les Etats-Unis subissent leur plus importante épidémie de rougeole depuis le début des années 1990 : près de 1 500 cas ont été recensés par le CDC et trois enfants sont décédés. Le principal foyer épidémique se trouvait dans le comté de Gaines, à l’ouest du Texas, au sein d’une communauté évangéliste traditionaliste opposée à la vaccination.
Cette année, les cas de rougeole aux Etats-Unis ont atteint leur plus haut niveau en 30 ans.
Le rapport enterré contre l’alcoolisme
C’est un fait méconnu de la biographie du président américain : Donald Trump ne boit pas une goutte d’alcool. Robert Kennedy Jr., ancien héroïnomane, n’en consommerait pas non plus, selon le New York Times. Cette abstinence reflète une tendance nationale : les Américains consomment nettement moins d’alcool que les Européens. Un sondage récent de l’institut Gallup révèle qu’un peu plus de 50 % des habitants des Etats-Unis déclarent en consommer de manière occasionnelle ou régulière - 20 points de moins qu’à la fin des années 1970 et 13 points de moins qu’en 2022. Dans le même temps, la défiance à l’égard de l’alcool progresse vite : ainsi, 66 % des 18-34 ans estiment que boire un ou deux verres d’alcool par jour est mauvais pour leur santé, contre seulement 34 % en 2018.
Dans ce contexte, les principaux producteurs de boissons alcoolisées ont vu leur cours de Bourse dévisser. A la Bourse de New York (NYSE), la cotation de Diageo (Guinness, Captain Morgan, Smirnoff, J & B…) a été divisée par deux depuis le début de l’année 2022, tout comme celle de son principal concurrent, l’entreprise Brown-Forman (Jack Daniel’s). Et la désaffection des Américains pour ces entreprises risque de s’accentuer.
Les Américains boivent de moins en moins d'alcool, ce qui affaiblit les entreprises du secteur.
Début septembre, le magazine américain Vox a révélé que le département de la Santé avait reçu un rapport alarmant sur les risques liés à une consommation modérée d’alcool… sans le publier. Ce rapport, commandé sous Joe Biden, promettait de chiffrer l’augmentation du risque de mourir du fait d’une consommation modérée d’alcool. D’après ses auteurs, un "homme buvant un verre d’alcool par jour avait environ une chance sur 1 000 de mourir [directement ou indirectement] à cause de sa consommation" (maladie du foie, cancer, conduite en état d’ivresse). Ce chiffre augmentait à "une chance sur 25 pour un homme buvant deux verres par jour."
Selon Vox, l’étude aurait été enterrée sous la pression de représentants au Congrès provenant d’Etats où l’industrie de boissons alcoolisées est très puissante. Ceux-ci défendraient plutôt les recommandations d’une étude rivale - menée cette fois-ci par les Académies nationales des sciences, d’ingénierie et de médecine américaine - qui vanterait des "bénéfices modestes" à la consommation d’alcool en faible quantité. Les résultats controversés de cette étude ont, eux, déjà été dévoilés. Mais le magazine s’insurge : "Au moins un des auteurs de cette étude a déjà reçu des financements de la part de l’industrie [des spiritueux] pour soutenir ses recherches."
Tous les cinq ans, le gouvernement des Etats-Unis révise ses "directives diététiques pour les Américains." Au vu des résultats de cette seconde étude, l’administration actuelle envisagerait de retirer la limite conseillée d’un ou deux verres d’alcool par jour, en totale contradiction avec le consensus médical…
La dérégulation environnementale
Un défenseur de l’environnement au service de la pollution ? Voilà qui pourrait sembler incongru et pourtant… Avant de devenir une figure du mouvement antivax, Robert Kennedy Jr. avait notamment fondé Waterkeeper, une ONG chargée de protéger les plans d’eau et les rivières aux Etats-Unis, à la fin des années 1990. Ironie du sort : le voici membre d’une administration qui défend ardemment les énergies fossiles et s’oppose systématiquement au consensus scientifique en matière environnementale.
RFK est obligé de jouer les équilibristes : dans chacun des rapports publiés par la commission Maha en effet, ses équipes demandent des études approfondies sur "les effets sanitaires d’une eau et d’un air de mauvaise qualité". Un vœu pieux tant l’administration Trump s’active à déréguler le secteur. En mars, le gouvernement a annoncé couper deux tiers du budget de l’EPA et licencier plus de 1 150 scientifiques. Depuis, plusieurs rapports controversés ont été publiés afin de justifier l’action de l’administration Trump, malgré les levées de boucliers de scientifiques du monde entier.
Plus récemment, l’avocat Lee Zeldin, qui dirige cette agence, a promis de mettre au fin au système de déclaration obligatoire des émissions de gaz à effet de serre pour les entreprises qui émettent plus de 25 000 tonnes de CO₂ par an. Cette suppression concernerait environ 8 000 entreprises américaines et pourrait, selon lui, permettre de réaliser jusqu’à 2,4 milliards de dollars d’économie en coûts de mises en conformité.
Contrairement à ce qu'affirme le président américain, les citoyens sont majoritairement favorables au renforcement de la réglementation climatique.
Ces mesures sont alignées avec les positions défendues par Donald Trump depuis son premier mandat. A l’époque, le magnat de l’immobilier était parvenu à se faire élire en surfant sur le mécontentement de certains citoyens déclassés par la désindustrialisation d’une partie du pays. Elles vont cependant à rebours des opinions d’une majorité d’Américains qui, à l’inverse, se déclare favorable à des règles environnementales plus strictes - y compris dans une partie non négligeable du camp républicain.
Un recul sur le traitement des overdoses
San Francisco ne fait plus rêver beaucoup d’Américains. Après l’épidémie de Covid-19, les habitants et les commerces ont fui le centre-ville de la capitale de la Silicon Valley, investi par des centaines de toxicomanes accros aux opiacés. Le quartier autrefois animé semble aujourd’hui peuplé de zombies, ravagés par leur addiction au Fentanyl.
Initialement, la molécule a été massivement prescrite comme antidouleur, facilitant l’accoutumance d’Américains issus de toutes les classes sociales. C’est un véritable fléau puisque depuis 2015, cette drogue de synthèse provoque plus de 50 000 décès chaque année outre-Atlantique. Il aura fallu presque dix ans pour que la courbe de mortalité s’infléchisse. Evidemment, il est difficile d’attribuer une cause unique à ce changement de trajectoire. Les experts soulignent néanmoins l’efficacité d’une mesure adoptée par le gouvernement Biden en mars 2023 : l’accès libre au Narcan, un spray nasal à base de naloxone, une molécule qui permet d’arrêter une overdose. Aujourd’hui, tous les services de sécurité des Etats-Unis en sont dotés et dans les communautés les plus touchées, les habitants peuvent s’en procurer rapidement. Pour l’instant.
Frappés par une véritable épidémie d'addiction aux opiacés, les Etats-Unis semblent avoir trouvé un remède efficace.
Mais là encore, le département de la Santé des Etats-Unis semble agir contre la santé des Américains. Le département de la Santé vient d’annoncer 56 millions de dollars de coupes dans la distribution de kits de naloxone et dans la formation. Il y a quelques semaines encore, plusieurs figures de l’administration Trump à commencer par Robert Kennedy lui-même saluaient les mérites de cet "antidote". Ces propositions reflètent la primauté donnée à la réduction des dépenses fédérales sur des choix plébiscités les institutions médicales du pays et demandées avec insistance par les électeurs. Pour le moment, la courbe de décès liés aux opiacés continue de baisser… Mais pour combien de temps ?
Tandis que la reconnaissance de l’Etat palestinien, portée par la France, sera au cœur du sommet annuel de l'ONU, la semaine prochaine à New York, les Etats-Unis ont de leur côté bloqué, jeudi 18 septembre, l'adoption par le Conseil de sécurité de l'ONU d'un texte réclamant un cessez-le-feu et l'accès humanitaire à Gaza.
Pendant ce temps, les bombardements se poursuivent dans le petit territoire assiégé. Plus d’une trentaine de personnes ont perdu la vie, jeudi, dans des frappes sur Gaza-ville, où l’armée israélienne a entamé une offensive terrestre très critiquée, mardi. Israël fait face à une pression internationale croissante pour mettre fin à cette guerre qui ravage Gaza, qualifiée pour la première fois de "génocide", mardi 16 septembre, par une commission d’enquête internationale mandatée par l'ONU.
Les infos à retenir
⇒ L'armée israélienne dit qu'elle va utiliser "une force sans précédent" à Gaza-ville et appelle la population à évacuer
⇒ Les Etats-Unis ont une nouvelle fois bloqué l’adoption par le Conseil de sécurité de l'ONU d’un texte réclamant un cessez-le-feu
⇒ Pour le Premier ministre luxembourgeois, reconnaître la Palestine sera "un moment clé"
"Une force sans précédent" utilisée à Gaza-ville
L'armée israélienne a dit vendredi 19 septembre qu'elle allait utiliser "une force sans précédent" à Gaza-ville, dans le nord du territoire palestinien, où elle mène une offensive majeure, appelant la population à évacuer.
"Les forces israéliennes vont continuer leurs opérations avec une force sans précédent contre le Hamas et d'autres organisations terroristes", a affirmé sur X le porte-parole arabophone, le colonel Avichay Adraee, appelant la population à évacuer et "rejoindre les centaines de milliers de résidents qui ont évacué vers la zone humanitaire dans le sud" de la bande de Gaza ravagée par la guerre.
L'armée israélienne, qui multiplie les appels à évacuer Gaza-ville, a dit évaluer à "environ 480 000" le nombre de Palestiniens ayant fui cette cité vers le sud depuis la fin du mois d'août.
Reconnaître la Palestine sera "un moment clé", dit le Premier ministre luxembourgeois
La reconnaissance de l'Etat de Palestine par des dizaines de pays lundi 22 septembre sera "un moment clé" sur le long chemin vers une paix au Proche-Orient, estime le Premier ministre luxembourgeois Luc Frieden, qui sera à New York pour apporter la voix de son pays.
En pleine guerre à Gaza, le Luxembourg, un des pays fondateurs de l'UE, s'associera à l'initiative franco-saoudienne visant à reconnaître la Palestine, lors d'un sommet en marge de l'assemblée générale de l'ONU. La "Déclaration de New York", qui entend redonner du souffle à une paix bâtie sur la solution à deux Etats, Israël et Palestine, est rejetée par une dizaine de pays - dont les Etats-Unis et Israël -, mais majoritairement soutenue par la communauté internationale.
Dans un entretien avec l'AFP à Luxembourg, Luc Frieden confirme qu'il sera à New York parmi les chefs d'Etat et de gouvernement apportant ce soutien aux Palestiniens. "Je voudrais que les peuples israélien et palestinien gardent l'espoir de pouvoir un jour vivre en paix", déclare ce dirigeant chrétien-social.
A ses yeux la Déclaration de New York sera "un moment clé dans ce processus, (...) un pas important dans une longue marche vers une paix et une stabilité dans la région". "Tout ce que nous faisons n'est pas contre la population israélienne, mais est destiné à faire cesser les atrocités que nous voyons à Gaza", insiste-t-il.
Après l'étape de New York, il restera à s'assurer que le plan de paix soit bien mis en oeuvre, ce qui passe, rappelle-t-il, par la fin de l'exercice du pouvoir sur la bande de Gaza par le mouvement islamiste Hamas, et l'organisation d'élections par l'Autorité palestinienne. "On va voir lundi ce que diront les pays arabes. Le fait qu'ils condamnent le Hamas est nouveau. Le Hamas doit partir et les pays arabes doivent nous aider à le réaliser", poursuit le chef du gouvernement luxembourgeois.
Le ministère de l'Intérieur demande aux préfets de s'y opposer à la pose de drapeaux palestiniens sur des mairies
Le ministère de l'Intérieur a demandé aux préfets de s'opposer à la pose de drapeaux palestiniens sur des mairies et autres édifices publics lundi, jour de reconnaissance par la France d'un Etat de Palestine, dans un télégramme consulté vendredi par l'AFP. "Le principe de neutralité du service public interdit de tels pavoisements", indique la place Beauvau, demandant aux préfets de saisir la justice administrative contre les décisions des maires qui ne renonceraient pas à pavoiser leur hôtel de ville aux couleurs palestiniennes.
Le premier secrétaire du Parti socialiste Olivier Faure avait appelé "à faire flotter" le drapeau palestinien sur les mairies le 22 septembre, jour de la reconnaissance par la France d'un Etat palestinien, qui sera officialisée à New York à l'assemblée générale des Nations unies par le président Emmanuel Macron. Cette date correspond aussi cette année à Roch Hachana, le Nouvel an juif.
Les Etats-Unis bloquent une demande de cessez-le-feu à Gaza à l'ONU
Les Etats-Unis ont une nouvelle fois bloqué jeudi l’adoption par le Conseil de sécurité de l'ONU d’un texte réclamant un cessez-le-feu et l’accès humanitaire à Gaza, provoquant la colère d’Etats membres. La majorité des membres du Conseil manifestent de plus en plus souvent leur frustration face à l’incapacité à faire pression sur Israël pour mettre un terme au calvaire des habitants de Gaza.
Les dix membres élus du Conseil avaient lancé des discussions sur ce projet de résolution fin août en réaction à la déclaration officielle par l'ONU de la famine dans le territoire palestinien ravagé par la guerre menée par Israël depuis près de deux ans. Une première version du texte exigeait principalement la levée immédiate de toutes les entraves à l’entrée de l’aide.
Le projet bloqué jeudi (14 voix pour, une contre) réclamait aussi "un cessez-le-feu immédiat, inconditionnel et permanent à Gaza", ainsi que la libération immédiate et inconditionnelle des otages. Un message que les Etats-Unis ont déjà rejeté à plusieurs reprises, la dernière fois en juin lorsqu’ils avaient une nouvelle fois utilisé leur véto pour protéger leur allié israélien.
Bombardements meurtriers sur Gaza-ville
Israël a mené jeudi d’intenses bombardements sur Gaza-ville, cible d’une offensive terrestre majeure, provoquant de nouveaux déplacements de la population. La route côtière longeant la bande de Gaza est saturée de personnes fuyant vers le sud, à pied, en voiture ou sur des charrettes tirées par des ânes, leurs affaires entassées à la hâte, rapportent des journalistes de l’AFP sur place.
"Il y a des tirs d’artillerie, des frappes aériennes, des tirs de quadricoptères et de drones. Les bombardements ne s’arrêtent jamais", décrit Aya Ahmad, une femme de 32 ans vivant avec 13 membres de sa famille dans le quartier Nasser, dans l’ouest de Gaza-ville. Le directeur de l’hôpital al-Chifa, Mohammed Abou Salmiya, a indiqué avoir reçu dans son établissement 33 personnes tuées jeudi par les bombardements israéliens.
L'ONU estimait fin août à environ un million le nombre d’habitants dans la ville de Gaza et ses environs. L’armée israélienne a affirmé que "plus de 350 000" personnes avaient fui la zone ces derniers jours.
Plus de trois ans et demi après le début de l’invasion russe de l’Ukraine, les pourparlers pour mettre fin au conflit sont dans l’impasse, tant les positions de Moscou, qui exige que l’Ukrainelui cède des territoires, et de Kiev semblent inconciliables. Le Premier ministre britannique Keir Starmer a estimé jeudi qu’il fallait "accentuer la pression" sur Vladimir Poutine. D’autant que la semaine dernière, l’intrusion d’une vingtaine de drones russes en Pologne a mis à l’épreuve la défense anti-aérienne du flanc Est de l’Otan. Les Etats-Unis ont annoncé jeudi 18 septembre avoir approuvé la vente de missiles antichars Javelin et leurs lance-missiles à la Pologne, un membre de l’Otan frontalier de l’Ukraine, pour un montant de 780 millions de dollars.
Les infos à retenir
⇒ L’Estonie dénonce une violation "sans précédent" de son espace aérien par trois avions de combat russes
⇒ La Commission européenne propose un 19e "paquet" de sanctions contre la Russie
⇒ Protéger les infrastructures énergétiques, le "plus gros défi", selon la ministre de l’Energie ukrainienne
L’Estonie dénonce une violation "sans précédent" de son espace aérien par trois avions de combat russes
Le ministère estonien des Affaires étrangères a dénoncé ce vendredi la violation de l’espace aérien de ce pays balte, membre de l’UE et de l’Otan, par trois avions de combat russes.
"L’incursion a eu lieu au-dessus du golfe de Finlande, où trois avions de chasse MIG-31 de la Fédération de Russie sont entrés dans l’espace aérien estonien […] et y sont restés pendant un total de 12 minutes", a indiqué le ministère dans un communiqué, en estimant qu’il s’agissait d’un acte d’une "audace sans précédent".
La cheffe de la diplomatie européenne Kaja Kallas a dénoncé sur X une "provocation extrêmement dangereuse".
Un 19e "paquet" de sanctions contre Moscou
La Commission européenne a proposé vendredi aux pays de l’UE d’adopter un 19e "paquet" de sanctions contre Moscou, ciblant notamment les hydrocarbures russes, a annoncé sa porte-parole, Paula Pinho. "Nous pouvons confirmer que la commission a adopté un nouveau paquet de sanctions contre la Russie, le 19e paquet", a-t-elle indiqué devant des journalistes, précisant que la présidente Ursula von der Leyen ferait une déclaration à ce sujet.
Après un entretien avec Donald Trump, la présidente de la commission européenne avait promis mardi des "mesures supplémentaires" contre la Russie, visant notamment son secteur énergétique.
Donald Trump s’est dit prêt à prendre de nouvelles sanctions contre la Russie, mais à la condition que les Européens arrêtent d’acheter des hydrocarbures russes, dont les ventes sont l’une des principales sources de financement de la machine de guerre russe contre l’Ukraine. En réponse, Ursula von der Leyen avait indiqué vouloir "accélérer" le sevrage européen des hydrocarbures russes, dans un "effort commun" avec les Etats-Unis.
Les Européens cherchent coûte que coûte à garder les Etats-Unis à leurs côtés dans leurs efforts pour soutenir l’Ukraine en guerre. Et en n’agissant pas rapidement sur les sanctions, ils redoutent aussi de donner à Donald Trump une bonne raison pour ne rien faire lui-même à l’encontre de la Russie, selon des diplomates.
L’Union européenne a déjà décidé, depuis décembre 2022, de cesser toute importation de pétrole russe. Deux pays européens ont toutefois obtenu une exemption, la Hongrie et la Slovaquie, en raison de leur dépendance au brut venant de Russie. L’UE a également fortement réduit sa dépendance au gaz russe depuis l’invasion russe de l’Ukraine déclenchée en février 2022, mais pas totalement. En 2024, la Russie assurait encore 19 % de l’approvisionnement en gaz de l’UE, dont près de la moitié sous forme de GNL, générant des centaines de millions d’euros de revenus pour la Russie.
En juin dernier, la Commission a proposé de mettre totalement fin à cette dépendance avant la fin 2027. Une des mesures envisagées serait d’accélérer le calendrier concernant le gaz naturel liquéfié (GNL), selon des diplomates à Bruxelles.
Ursula von der Leyen a également assuré cette semaine qu’elle proposerait des sanctions supplémentaires contre des entités (entreprises, banques, etc) de pays tiers, notamment la Chine ou l’Inde, qui aident la Russie à contourner les sanctions occidentales ou à vendre son pétrole. Donald Trump a aussi suggéré aux Européens d’envisager des hausses substantielles de droits de douane visant la Chine, pour qu’elle diminue son soutien à Moscou.
Washington approuve la vente de missiles antichars à la Pologne
Les Etats-Unis ont annoncé jeudi 18 septembre avoir approuvé la vente de missiles antichars Javelin et leurs lance-missiles à la Pologne, un membre de l’Otan frontalier de l’Ukraine, pour un montant de 780 millions de dollars. "Cette vente proposée soutiendra la politique étrangère et la sécurité nationale des Etats-Unis en améliorant la sécurité d’un allié de l’Otan qui constitue une force de stabilité politique et économique en Europe", a déclaré dans un communiqué l’Agence américaine de coopération pour la défense et la sécurité (DSCA).
Le département d’Etat américain a approuvé la vente et la DSCA a fourni la notification requise au Congrès, qui doit encore valider la transaction.
La Pologne est un partenaire clé de l’Ukraine depuis que la Russie a envahi ce pays en février 2022. Craignant la menace russe, la Pologne s’est lancée ces dernières années dans un programme de modernisation rapide de son armée, signant plusieurs contrats d’achat d’armement, principalement avec les Etats-Unis et la Corée du Sud. La Pologne consacrera l’année prochaine 4,8 % de son PIB à la défense, comparé à 4,7 % prévus cette année.
Donald Trump se dit déçu par Vladimir Poutine
Donald Trump a exprimé jeudi sa déception à l’égard de Vladimir Poutine sur la guerre en Ukraine, lors d’une conférence de presse avec le Premier ministre britannique Keir Starmer, qui a lui appelé à "accentuer la pression" sur le président russe.
Le président américain a quitté le Royaume-Uni en fin d’après-midi, après sa deuxième visite d’Etat dans le pays, marquée par un accueil fastueux du roi Charles III et des entretiens avec Keir Starmer. Elle s’achève sans annonce majeure au niveau politique ou diplomatique. Sur l’Ukraine, le dirigeant républicain a semblé admettre être dans l’impasse. Le conflit "que je pensais être le plus facile à résoudre était" la guerre en Ukraine, "en raison de mes relations avec le président Poutine, mais il m’a laissé tomber. Il m’a vraiment laissé tomber", a-t-il déclaré.
Nous devons "accentuer la pression" sur Vladimir Poutine, a redit Keir Starmer, qui se positionne depuis des mois comme un intermédiaire entre Donald Trump et les Européens sur ce sujet. "Ce n’est que lorsque le président (Trump) a exercé une pression sur Poutine que celui-ci a réellement montré une certaine volonté d’agir", a affirmé le chef du gouvernement britannique.
Protéger les infrastructures énergétiques, le "plus gros défi" de Kiev
"La protection" des infrastructures face aux attaques russes "quotidiennes" est le "plus gros défi" du secteur de l’énergie en Ukraine qui s’achemine vers un 4e hiver de guerre, a déclaré la nouvelle ministre ukrainienne de l’Energie, Svitlana Gryntchouk, en visite à Paris.
"Chaque saison de chauffage, chaque hiver durant la guerre pour l’Ukraine, est un grand défi", a souligné Svitlana Gryntchouk rencontrée par l’AFP en marge d’une réunion de l’Agence pour l’énergie nucléaire de l’OCDE. "Le plus grand défi est de protéger et de sauvegarder les installations énergétiques contre les attaques quotidiennes, avec des centaines de drones et de missiles", a indiqué la ministre qui a récupéré ce portefeuille stratégique en juillet. "Nous avons réparé beaucoup de nos équipements énergétiques après les attaques, mais nous constatons que la Russie continue d’attaquer", souligne Svitlana Gryntchouk.
L’Ukraine protège ses installations énergétiques, en recourant à de la protection "physique" (par exemple, des gabions), "avec différentes défenses techniques contre les drones et les missiles, et bien sûr, nous cherchons à renforcer notre défense aérienne". "L’ennemi a changé de tactiques et nous devons aussi changer notre protection", ajoute-t-elle.
Malgré les mesures, l’année a été "extrêmement difficile pour les infrastructures gazières". "C’est un défi supplémentaire de (savoir) comment réparer rapidement avant la période froide", dit-elle. Même si l’Ukraine espère avoir dans ces stockages au moins 13,2 bcm (milliards de m3 de gaz) pour passer l’hiver, elle aura besoin d’importer plus de 4,5 bcm supplémentaires, selon la ministre. L’Ukraine prévoit par ailleurs d'"avoir tous ses réacteurs en opération", soit les 9 unités qui sont encore en activité depuis l’occupation par les Russes de la plus grande centrale nucléaire d’Europe, Zaporijjia, composée de six réacteurs tous mis à l’arrêt.
En cas de besoin, le pays peut importer pour 2,1 GW d’électricité à travers ses lignes à haute tension connectées au réseau européen. "Notre tâche n’est pas seulement de résister, nous construisons également les bases d’un avenir énergétique plus solide, plus propre et plus sûr", avait déclaré un peu plus tôt la ministre devant des représentants d’Etats et de l’industrie nucléaire.
Avec la guerre, le pays s’est tourné à marche forcée vers la transition énergétique en installant éoliennes et panneaux solaires, de petites unités de production électrique, offrant plus de "stabilité" au système électrique car elles sont "plus difficiles" à cibler, a indiqué la ministre. L’Ukraine veut étendre ses capacités nucléaires, y compris avec de mini-réacteurs, tout en développant les renouvelables et le stockage par batterie ou en barrages.
Dans une guerre, pour faire la paix, il faut que les deux parties le souhaitent. Or toute la séquence estivale est venue rappeler le refus catégorique de Vladimir Poutine, à ce stade, de faire ce choix. Dimitri Minic, chercheur au Centre Russie/Eurasie de l’Institut français des relations internationales (IFRI), explique les raisons de cette intransigeance dans le nouvel épisode qui ouvre la deuxième saison de l’État-Major, le podcast de L’Express consacré aux questions de défense.
"Les objectifs de la Russie en Ukraine sont très clairs, c’est la soumission politique de ce pays", explique ce spécialiste de la pensée stratégique russe, ajoutant qu’elle "ne conçoit le règlement de la situation en Ukraine que par une capitulation totale". Pendant la campagne présidentielle américaine, Donald Trump se vantait de régler le conflit en 24 heures. Huit mois plus tard, les combats continuent. "Le président américain a nourri des illusions sur sa capacité à infléchir la politique de Poutine en Ukraine, […] contre vents et marées et malgré le louvoiement visible" de la Russie, constate-t-il également.
Le paroxysme du malentendu s’est déroulé à Anchorage, en terre américaine d’Alaska, mi-août. Donald Trump y a accueilli Vladimir Poutine pour un sommet ne débouchant sur rien de concret, si ce n’est la réhabilitation de l’autocrate sur la scène internationale. Si les Russes ne négociaient pas sérieusement, que faisaient-ils alors ? "L’idée centrale, c’est de gérer Trump […] pour pouvoir continuer les opérations de combat", résume Dimitri Minic.
Pour cela, ils ont utilisé une arme terriblement efficace sur Donald Trump : la flatterie, pour "cultiver l’idée centrale chez Trump qu’il faut abandonner l’Ukraine", en reprenant sa propre analyse du conflit. "Même Poutine a répété l’argument de Trump selon lequel la guerre n’aurait jamais eu lieu si [l’homme d’affaires] avait été au pouvoir", fait valoir l’auteur de Pensée et culture stratégiques russes : du contournement de la lutte armée à la guerre en Ukraine" (Editions Maison des sciences de l’homme). Tout en choisissant habilement quand rester silencieux, pour éviter de le braquer : "quand Trump dit que l’économie russe est censée s’effondrer, ça ne dérange pas [les Russes], ils ne répondront pas, ou pas de façon sérieuse".
La façon dont le président Volodymyr Zelensky a été vertement repris, devant les caméras, à la Maison-Blanche, a confirmé tout le dédain que le milliardaire porte pour ce pays auquel les Etats-Unis livrent pourtant des armes. "Trump est plutôt indifférent en vérité à l’Ukraine et l’Occident", pointe Dimitri Minic. "Son sujet, c’est d’arrêter la guerre car il veut le prix Nobel et en tout cas être sacré faiseur de paix, […] peu importe les conditions, plus ou moins justes".
Le Kremlin a parfaitement su jouer de ce cocktail grotesque de recherche des honneurs et de morgue dont Trump fait preuve dans ce dossier. Mais il n’est pas parvenu, jusqu’à présent, à obtenir qu’il abandonne l’Ukraine. "Les Russes ont surestimé le pouvoir des Etats-Unis, mais ça, c’est dû à leur croyance paranoïaque que Kiev était en fait téléguidée par Washington, poursuit Dimitri Minic. Ils ont déchanté, parce que Trump s’est trouvé incapable de tordre le bras de l’Ukraine et des Européens, et n’était pas désireux de le faire dans ces conditions."
Les exigences de la Russie restent inacceptables, même pour un Donald Trump enclin à faire des concessions au Kremlin. "Elle considère qu’historiquement, elle a un rôle à jouer dans l’influence des destinées européennes", rappelle Dimitri Minic. Déjà, en 1999, le président russe Boris Eltsine avait invité son homologue américain Bill Clinton à se retirer d’Europe. "Vous n’avez qu’à donner l’Europe à la Russie, l’avait-il enjoint. Les Etats-Unis ne sont pas en Europe."
Le chercheur salue enfin le travail de la "coalition des volontaires", animé par Paris et Londres et regroupant 32 pays, pour préparer un déploiement militaire européen en mesure d’apporter des garanties de sécurité à l’Ukraine. Mais il ajoute que "l’Europe gagnerait à être moins sensible aux menaces de la Russie et d’assumer une politique plus audacieuse, tout en restant calibrée". L’un de ses confrères de l’Ifri, Elie Tenenbaum, a ainsi plaidé, dans une récente tribune publiée dans Le Monde, pour que de telles forces soient déployées avant un cessez-le-feu. Ce qui permettrait de pousser le Kremlin à un accord de paix. Dimitri Minic ne cesse de le clamer : avec la Russie, seul le rapport de force compte.
Le président ukrainien Volodymyr Zelensky (à droite) et le président américain Donald Trump (à gauche) après leur rencontre à Washington D.C., aux États-Unis, le 19 août 2025.
Les images des manifestants pro-palestiniens qui envahissent le parcours de la Vuelta ont fait le tour du monde : des milliers d’Espagnols qui protestaient contre la présence d’une équipe israélienne sur la course cycliste.
Dans le même temps, l’Etat hébreu a intensifié ses frappes sur la bande de Gaza, donnant de nouveaux ordres d’évacuation, et lançant une nouvelle opération militaire dans l’enclave.
Quelques jours plus tôt, Israël frappait une villa de Doha au Qatar, ciblant des responsables du Hamas en pleines négociations…
Sur tous les fronts, la tension s’accentue, mettant un péril une éventuelle sortie de crise.
De l’autre côté des Alpes, le débat concernant les jours fériés est tout autre. Contrairement à la France qui cherchait à en supprimer deux il y a encore quelques jours, jusqu’à ce que le nouveau Premier ministre Sébastien Lecornu ne recule, l’Italie s’apprête, elle, à débattre de la création d’un jour férié supplémentaire.
En l’honneur de Saint-François d’Assise
L’Italie propose en effet de créer un nouveau jour férié en l’honneur de saint François d’Assise et du pape argentin du même nom. Le pape François, décédé en avril à 88 ans, a été le premier à prendre le nom de saint François d’Assise, un religieux du XIIIe siècle qui a renoncé à ses richesses et consacré sa vie aux pauvres. Un jour férié en l’honneur du saint, fondateur de l’ordre des Franciscains, existait il y a plusieurs décennies mais avait été supprimé en 1977 dans le cadre de mesures d’austérité.
Ses partisans souhaitent rétablir la fête de saint François le 4 octobre à partir de 2026, pour le 800e anniversaire de la mort du saint, malgré les craintes d’un alourdissement des finances publiques. Le projet, qui prévoit de décréter le 4 octobre férié dès 2026, bénéficie du soutien de tous les partis de la coalition gouvernementale de la Première ministre italienne Giorgia Meloni. Le vote devait avoir lieu ce jeudi 18 septembre à la chambre des députés, mais le débat a été reporté au début de la semaine prochaine.
"Appel à la paix"
Ce rétablissement "est un appel à la paix, à la cohésion, à la valeur de la nature et à sa leçon de foi et de spiritualité", a déclaré Maurizio Lupi, chef du parti Noi Moderati (centre) à l’origine du projet, dans un communiqué à l’AFP. Dans le même temps, certains législateurs italiens réclament un nouveau jour férié le 19 mars pour célébrer la Saint-Joseph, jour de la fête des pères, sans succès jusqu’ici. L’Italie compte déjà 12 jours fériés, contre 11 en France, en Grèce et en Suède. Le calendrier en comporte 15 à Chypre ou encore 14 en Croatie et en Espagne.
La mesure semble à contre-courant de ce qui avait été proposé en France cet été par Premier ministre récemment évincé, François Bayrou a suscité l’indignation en proposant de supprimer deux jours fériés pour renflouer les caisses de l’Etat de "plusieurs milliards d’euros".
Entre deux hommes flanqués d’une kalachnikov, Mohammed* fait un salut de la main en entendant l'auteur de ces lignes parler français. Le quarantenaire, en tenue de combat, se tient au pied d’une rangée de tanks échoués sur la place des Omeyyades. Le foulard sur son visage peine à dissimuler son sourire. Cela fait bien longtemps qu’il n’a pas vu de visiteurs venus de son pays natal. Ce 9 décembre 2024, le soleil matinal rayonne dans l’air glacial qui enveloppe Damas. "Bonjour la France et vive la chute du régime", lâche d’un ton jovial cet homme qui vient pour la première fois d'entrer dans la capitale syrienne. La veille, à l’aube, des milliers de rebelles islamistes rassemblés sous la bannière du Hayyat Tahrir el-Cham (HTC) sont parvenus à faire chuter le régime de Bachar el-Assad, mettant un point final à cinq décennies de dictature. Parmi eux se trouvaient des combattants étrangers, dont quelques dizaines de Français.
Huit mois se sont écoulés depuis cette scène. Ahmed al-Charaa est devenu le président de facto d’un pays en ruine, qui se relève difficilement de treize années de guerre civile. Quant à Mohammed, il est depuis longtemps retourné dans la région d’Idlib, où il vit avec sa famille. C’est dans cette zone du nord-ouest du territoire, devenue pendant la guerre un bastion de l’opposition au régime de Bachar, que résident la plupart des 120 djihadistes français qui vivent encore librement en Syrie. Après la fuite du dictateur, notre interlocuteur dit avoir rangé sa tenue de combat au placard et trouvé un emploi qui lui permet de gagner un maigre salaire.
C’est en juillet 2017 qu’il rejoint le nord-ouest de la Syrie, pour "sauver la population" musulmane massacrée par le régime. Un motif régulièrement invoqué par les quelque 2 000 djihadistes français qui ont tenté (avec succès ou non) de rejoindre la zone irako-syrienne. Il prend part aux combats au sein de différentes factions dont certaines sont placées sur la liste des Nations unies des organisations liées à Al-Qaida et au groupe Etat islamique - sans qu’il n’ait activement été membre de Daech.
Des centaines de djihadistes français partis en Syrie
Très vite, il est gagné par la désillusion. "J’ai vu tellement de choses qui m’ont dégoûté dans le comportement des autres combattants". Le vol, le mensonge…: il dit retrouver en Syrie ce qu’il a fui en France. La guerre désormais terminée, Mohammed redouble de critiques envers son pays d’adoption. "Nous avons tout donné pour les Syriens, mais nous n’avons rien eu en retour. C’est un peuple de radins, mal éduqué", se plaint-il.
Le président syrien Ahmed al-Charaa.
En décembre 2024, quelques jours après son arrivée au pouvoir, Ahmed al-Charaa annonce vouloir accorder la nationalité à tous les combattants étrangers qui ont participé à l’assaut contre le régime. Mohammed, qui n’a plus de documents valides, considère cette nationalité comme un "droit", mais affirme ne pas en vouloir. "S’ils nous la donnent, c’est lié à une pression de l’extérieur, notamment de la France, qui ne veut pas que l’on rentre", croit-il savoir. Plusieurs djihadistes étrangers, dont au moins un Français, ont soumis au ministère de l’Intérieur syrien une pétition réclamant leur naturalisation, selon l’agence Reuters.
Mohammed assure ne pas envisager de retour dans l’Hexagone, où il sait qu’il sera jugé. Depuis 2014, plusieurs centaines de Français partis en Syrie ont été condamnés pour des faits liés au djihadisme. Les peines encourues vont jusqu’à trente ans de rétention. En fin d’année dernière, Olivier Christen, procureur national antiterroriste, a affirmé dans une interview à France 2que si les djihadistes français "venaient à sortir de la Syrie", des dispositifs permettraient de les appréhender.
Pour ne rien arranger, Mohammed est connu pour avoir été impliqué dans le financement de tentatives de libération de femmes de l’Etat islamique incarcérées dans les camps du nord-est syrien, selon une source sécuritaire française. "En tant que musulman, je préfère vivre dans un pays musulman. Le système français est contre les musulmans. Ils ne peuvent pas vivre comme ils veulent. Tu dis 'Allah Akbar' et ça y est, tu es un terroriste. Même les pédophiles prennent moins de prison que nous", veut croire le combattant vétéran, loin d’être déradicalisé.
Omar Omsen, considéré comme l’un des principaux recruteurs
Dans une impasse, il ne cache pas son amertume. "Nous sommes des clandestins, des 'clodos'. Je n’ai pas de papiers, pas de compte bancaire, pas de carte vitale. Voilà ma vie : je n’ai rien. Même les’clodos’ont une carte de séjour", se lamente Mohammed, avec une nette tendance à jouer les victimes. A Idlib, il côtoie d’autres djihadistes français, qui forment un groupe à part. Mais leurs positions divergent et les tensions sont nombreuses.
Un Français, en particulier, ne fait pas consensus : Omar Diaby. Plus connu sous le nom d’Omar "Omsen" - contraction d’Omar et de Sénégal, son pays d’origine qu’il a quitté pour la France à 7 ans. Il est à la tête de la Firqat al-Ghouraba ("Brigade des étrangers"), un groupe de plusieurs dizaines de combattants francophones, dans un camp situé dans la ville de Harim, à l’extrême nord-ouest de la Syrie, tout près de la Turquie. L’homme est considéré par les services de renseignement comme l’un des principaux recruteurs de djihadistes français. Il a fait de la cité de l’Ariane à Nice, dont il est originaire, l’une des principales plates-formes de départ vers la Syrie dans les années 2010.
Omar Diaby connu aussi sous le nom d'Omar Omsen, quelque part en Syrie
Pour Omar Omsen, le départ de Bachar el-Assad ne signifie pas pour autant la fin de la lutte armée. "Quand nous sommes venus ici, nous avions en tête un projet islamique mondial, explique-t-il au téléphone à L’Express. Je ne suis pas là pour ne délivrer que la Syrie, mais le monde entier, dont la France, et je compte bien mourir pour ce projet". Toujours aussi extrémiste, le Niçois veut imposer le "vrai islam" afin de mettre un terme à l’expansion d’une "pourriture" promue par l’Occident. Il ne se déclare pas français mais de "nationalité musulmane". Charismatique et autoritaire, Omar Omsen, qui affirme s’être radicalisé après le 11 septembre, devient à l’époque une figure de la djihadosphère grâce à sa série de vidéos d’embrigadement intitulée 19HH, dont le titre fait référence à l’attentat des tours jumelles.
Toujours offensif, il confie préparer une nouvelle série de vidéos nommée Le Chemin des Justes. "Je repars du début pour qu’on puisse comprendre ce qu’est le djihad, pourquoi il a été instauré dans notre religion", détaille celui qui affirme toujours jouir d’une certaine aura en Europe. Il en veut pour preuve qu’au moins quatre Européens "francophones" ont selon lui rejoint son camp depuis la chute du régime. "Omar Omsen a retrouvé un pouvoir d’attraction et il recommence à faire du prosélytisme en France, note un observateur français. Son groupe a de nouveau attiré l’attention en fin d’année dernière car la moitié de ses membres ont participé à l’opération rebelle lancée vers Damas". "Nous avons participé à l’offensive à partir du 1er décembre et de la bataille de Hama, puis d’Homs, et nous sommes ensuite allés à Lattaquié", raconte le Niçois.
Omar Omsen ne cache pour autant pas son hostilité envers le nouveau maître de la Syrie. "Tout d’un coup, on a vu le dirigeant du bateau sauter sur un autre bateau et commencer à tirer sur le nôtre", fulmine-t-il. Durant la guerre civile, Ahmed al-Charaa a été à la tête de la branche syrienne du groupe Al-Qaida, avant de se distancier de l’organisation terroriste et de mettre en place en janvier 2017 un gouvernement dans la région d’Idlib, qu’il dirigeait. En parallèle, il a cherché à écarter tout groupe jugé trop radical, faisant taire toute voix dissidente - Omar Omsen a été emprisonné par le HTC entre août 2020 et janvier 2022.
"Ils restent des gens très dangereux"
Désormais, la priorité de l’ex-djihadiste à la tête du pays est de redorer son image aux yeux de la communauté internationale. La question des combattants étrangers est brûlante, car les chancelleries craignent qu’ils soient intégrés au nouvel appareil sécuritaire syrien. L’administration américaine a d’ailleurs fixé comme condition à la levée des sanctions leur mise hors d’état de nuire. Après avoir d’abord déclaré vouloir leur accorder la nationalité syrienne et les accepter dans l’armée, le président syrien par intérim est revenu sur sa position. "Les membres du groupe d’Omsen restent des gens très radicaux, considérés comme dangereux. Ils nous ont apporté plus de problèmes qu’autre chose et depuis 2020, ils sont sous surveillance permanente par la Sécurité générale", glisse à L’Express une source sécuritaire syrienne. Ce groupe bénéficie aujourd’hui d’une certaine autonomie, tout en étant dans les radars du nouveau pouvoir. Omar Omsen ne sort jamais de son camp, même s’il prétend en avoir le droit.
Comme d’autres djihadistes français en Syrie, il dénonce la politique d’ouverture du nouveau pouvoir promouvant les minorités, les femmes, et les libertés individuelles. "Joulani (NDLR : nom de guerre d’Ahmed al-Charaa) a fait une soupe, il a pensé qu’en mettant des légumes amers, sucrés, sans saveur, il allait faire un bon ragoût. Il s’est trompé. Il a mélangé les ennemis, les partisans et les victimes", tance Omar Omsen. Ce dernier cite comme premier "ennemi" la minorité alaouite - dont est issu Bachar el-Assad - et les Druzes. "Ce sont des traîtres, des poisons, on le voit bien aujourd’hui", assène-t-il. A la mi-juillet, la communauté druze - environ 3 % de la population - a été victime de massacres lors de violents combats avec des combattants sunnites dans la région de Soueïda, dans le sud du pays. Ces affrontements ont fait au moins 2014 morts en quelques jours, selon l’Observatoire syrien des droits de l’Homme.
Lors de cet épisode, la Firqat al-Ghouraba s’est déployée sur le terrain. "Nous avons voulu intervenir mais le gouvernement a refusé, mes hommes se sont arrêtés à Hama", relate Omar Omsen. Le recruteur affirme aussi avoir envoyé ses hommes lors de la tuerie visant la minorité alaouite sur la côte syrienne, en mars dernier. Ils ont finalement été stoppés par les check-points du gouvernement. A l’avenir, le djihadiste n’exclut pas de jouer un rôle sécuritaire dans la nouvelle Syrie. "Si un ennemi se lève et que l’Etat peut régler le problème, alors il le règle lui-même. Mais si on voit qu’il n’y parvient pas, alors nous allons le faire clandestinement, prévient-il. C’est une obligation religieuse d’aller secourir ceux qui en ont besoin".
Le statut des djihadistes français, comme leur futur, reste flou. De leur côté, les autorités françaises restent discrètes sur cet épineux dossier politique. En plus de ces ex-combattants en liberté, 131 adultes du groupe Etat islamique et 130 enfants sont encore détenus dans les prisons et camps du nord-est syrien.
Londres et Washington viennent de signer des milliards de dollars d’investissement de part et d’autre de l’Atlantique. En visite dans la capitale britannique, Donald Trump a tenu ce jeudi 18 septembre une conférence de presse conjointe avec son homologue britannique Keir Starmer. Les deux chefs d’Etat ont ainsi annoncé l’engagement de fonds et des promesses d’investissement sur plusieurs années.
Londres a d’ores et déjà évoqué un total de 150 milliards de livres (173 milliards d’euros). Des chiffres impressionnants pour le gouvernement britannique de Keir Starmer, fragilisé sur le plan économique et en pleine crise politique.
Un accord technologique
Donald Trump a signé jeudi avec le Premier ministre britannique un accord de coopération technologique. Cet accord permettra à "l’Amérique et nos alliés britanniques de dominer l’avenir de l’intelligence artificielle", a promis le président américain, soulignant le "lien indéfectible" de son pays avec le Royaume-Uni. La veille, le dirigeant américain a passé la journée à la résidence de campagne du Premier ministre à Chequers, à 70 kilomètres de Londres, entourés de représentants de géants de la tech Microsoft, Nvidia ou Alphabet (Google).
C’est à ce moment que Microsoft, le géant historique de l’informatique, a annoncé vouloir injecter 30 milliards de dollars (25 milliards d’euros) sur quatre ans au Royaume-Uni, dont la moitié dans le cloud (informatique à distance) et l’intelligence artificielle, ce qui inclut la construction du "plus grand supercalculateur du pays". Google a pour sa part annoncé cinq milliards de livres (5,8 milliards d’euros) sur deux ans, notamment dans un centre de données et pour sa recherche et développement dans le pays, dont Google DeepMind, son laboratoire d’IA. Autre annonce phare, celle d’un partenariat entre le britannique Nscale, le pionnier américain de l’IA générative OpenAI et son compatriote Nvidia, champion des semi-conducteurs, pour développer dans le nord-est de l’Angleterre des infrastructures et des capacités de grande envergure liées à l’IA. Le travailliste Keir Starmer s’est félicité du "plus grand programme d’investissement de ce type de toute l’histoire britannique".
30 milliards de dollars de GSK aux Etats-Unis
Principale annonce d’investissement d’une entreprise britannique vers les Etats-Unis, le laboratoire pharmaceutique GSK a promis 30 milliards de dollars (environ 25 milliards d’euros) sur cinq ans outre-Atlantique. Une annonce qui intervient au moment où les entreprises pharmaceutiques font face aux pressions du président américain, qui veut les pousser à investir et produire dans son pays. GSK rejoint ainsi les autres géants du secteur, dont son compatriote AstraZeneca, qui ont amorcé ces derniers mois un mouvement d’investissement et de relocalisation de la production aux Etats-Unis. Une dynamique qui nourrit aussi, en parallèle, les craintes d’une perte d’attractivité du Royaume-Uni.
Londres et Washington ont par ailleurs évoqué l’accélération des délais d’autorisation et de validation des projets nucléaires entre les deux pays et le renforcement des programmes expérimentaux sur la prometteuse technologie de la fusion. Sur les droits de douane, en revanche, Keir Starmer devrait rester sur sa faim. Il espérait conclure de longues négociations pour obtenir une exemption des 25 % appliqués sur l’acier britannique, promise début mai, mais cela ne devrait pas être le cas.
Le président américain Donald Trump et le Premier ministre britannique Keir Starmer lors de la signature de l'accord de coopération technologique à Chequers, en Angleterre, lors de la visite d'Etat de Trump le 18 septembre 2025
À la recherche d’un substitut à l’énergie russe, l’Europe se serait-elle trouvé un nouveau fournisseur de gaz ? Passé sous les radars de l’actualité de ce côté-ci de la Méditerranée, un projet pharaonique a été mis en route en Afrique cet été : la construction d’un gazoduc long de 6 000 kilomètres, reliant le Nigeria au Maroc en passant par onze pays du continent. Fort d’une capacité de transport de 30 milliards de mètres cubes de gaz par an, ce pipeline pourrait alimenter jusqu’à 400 millions de personnes en gaz d’ici à 2030, année qui devrait voir les premières livraisons de gaz nigérian sur le Vieux Continent.
Au-delà d’offrir à l’Afrique une opportunité de s’ouvrir sur un marché nouveau, ce gazoduc promet de muscler la sécurité énergétique du continent tout en renforçant la coopération entre les différentes nations africaines. Mais si le projet est le fruit d’une coopération transnationale, c’est bien le Maroc et son Roi, Mohammed VI, qui en furent les principaux instigateurs. Au Royaume, le pilotage du projet a été confié à l’Office national des hydrocarbures et des mines (Ohnym). L’Express a interrogé sa présidente, Amina Benkhadra, ancienne ministre de l’Energie du Maroc, qui interviendra aux rencontres géopolitiques de Trouville-sur-Mer organisées chaque année depuis dix ans par le géopolitologue Frédéric Encel.
L’Express : Vous pilotez la construction d’un chantier titanesque ; un gazoduc de 5 600 kilomètres reliant le Maroc au Nigeria, et traversant plus de dix pays. Où en est concrètement le chantier aujourd’hui ?
Amina Benkhadra : Le projet a déjà franchi des étapes clés sur le plan technique, environnemental, économique et de coopération régionale. Grâce à la collaboration d’experts mondiaux (Worley, Intecsea, Doris, ILF), diverses études de faisabilité et d’ingénierie détaillées ont été menées et achevées en 2024, confirmant la viabilité du projet qui est désormais prêt à lancer les appels à manifestation d’intérêt pour ses premières phases. La construction est prévue de manière progressive par phases autour de différents tronçons afin de répondre aux contraintes techniques et aux synergies avec des infrastructures existantes.
Ce projet est souvent présenté comme un levier d’intégration régionale. Peut-il vraiment transformer les relations entre l’Afrique de l’Ouest et le Maghreb ? Quelles retombées économiques espérez-vous ?
L’Afrique est le continent le moins intégré économiquement et représente moins de 4 % des échanges mondiaux. Ce projet offre une opportunité de créer un corridor structurant au service du développement partagé. Sur le plan énergétique, le gazoduc permettra de sécuriser l’approvisionnement en gaz naturel, d’accompagner la transition énergétique et de répondre à la demande croissante en électricité dans la région. Sur les plans économique et social, il favorisera la mise en place de nouvelles chaînes de valeur, renforcera l’industrialisation locale et contribuera à la création d’emplois durables. Enfin, sur le plan politique et géostratégique, il incarne une dynamique de coopération Sud – Sud, rapprochant plusieurs pays africains autour d’un projet commun d’intégration et de souveraineté énergétique, favorisant une logique d’intégration Sud – Sud.
L’Europe cherche à diversifier ses approvisionnements en gaz depuis la guerre en Ukraine. Le gazoduc Nigeria–Maroc peut-il répondre à cette demande et renforcer le rôle du Maroc comme hub énergétique ?
Effectivement ce projet peut contribuer à la sécurité énergétique de l’Europe en ce qu’il présente une solution économique avantageuse : c’est un moyen rentable d’apporter du gaz ouest-africain aux consommateurs européens, désireux de diversifier leurs sources d’approvisionnement en gaz. Par ailleurs, dans un contexte où l’Europe cherche à limiter son impact environnemental (Green Deal), ce projet offrirait une source supplémentaire de gaz naturel conventionnel, moins polluante.
Le Maroc est un partenaire idéal pour l’Union européenne de par sa position géographique unique, ses interconnexions électriques fortes (2 lignes électriques Maroc - Espagne - une interconnexion gazière via le gazoduc Maghreb Europe), une stratégie énergétique claire et une coopération Sud - Sud développée. Mais ce projet renforcera encore davantage le rôle du Maroc en tant que plaque tournante de l’énergie entre l’Afrique et l’Europe.
Certains observateurs pointent la compétition avec l’Algérie, déjà fournisseur de gaz à l’Europe. Ce projet ne risque-t-il pas, in fine, d’alimenter les tensions régionales ?
Il ne s’agit pas de substituer des partenariats existants, mais plutôt d’élargir les voies de coopération et de diversification des approvisionnements, dans un esprit de complémentarité. Ce type d’initiative peut favoriser l’émergence de nouveaux espaces de coopération, en créant des synergies autour des infrastructures, de la transition énergétique et du développement durable. Dans un contexte où la sécurité énergétique est un enjeu partagé, chaque projet contribue à renforcer la place de l’Afrique comme acteur clef des équilibres énergétiques mondiaux.
Ces dernières années, le Maroc est parvenu à attirer sur son sol de grands groupes internationaux, comme le coréen Posco, les français Engie, Renault ou encore le franco-italo-américain Stellantis. Quelle est sa recette secrète ?
Le Maroc dispose de plusieurs atouts. Tout d’abord, une position géostratégique unique, au carrefour de l’Europe, de l’Afrique subsaharienne, du Moyen-Orient et de l’Amérique. Peuvent être ensuite cités son cadre commercial attractif, renforcé par des accords de libre-échange avec les États-Unis et l’Union européenne, ainsi qu’un statut avancé avec cette dernière depuis 2008 ; un environnement favorable aux affaires, fondé sur une stabilité politique et macro-économique reconnue ; des interconnexions énergétiques solides, avec deux lignes électriques vers l’Espagne (une troisième en projet), une future connexion avec le Portugal, un projet d’interconnexion avec la Mauritanie, et le gazoduc Maghreb – Europe ; une coopération Sud - Sud affirmée, traduite par des partenariats diversifiés avec de nombreux pays africains dans les domaines de l’énergie, de l’agriculture, de la banque et des infrastructures. Enfin, le royaume s’est doté d’une stratégie énergétique nationale ambitieuse, reposant sur des partenariats public-privé et faisant du pays un acteur reconnu en matière d’énergies renouvelables et de transition énergétique.
De façon plus générale, cet engouement reflète la transformation en profondeur qu’a connue le pays. Grâce à une stratégie volontariste d’investissements publics et privés, de vastes chantiers structurants ont été lancés dans des secteurs clés : les énergies renouvelables, la mobilisation des ressources en eau, l’agriculture à travers le Plan Maroc Vert, le tourisme, l’habitat, mais aussi l’industrie, avec l’implantation de géants comme Renault et Peugeot. Les infrastructures de transport – Tanger Med, le train à grande vitesse Al Boraq, ou encore le réseau autoroutier – illustrent cette dynamique d’ouverture et de modernisation. Sur le plan industriel, le Maroc s’est hissé au rang de plateforme compétitive, l’automobile devenant le premier secteur exportateur du pays, tandis que l’aéronautique s’intègre désormais aux chaînes mondiales de valeur. Cette diversification fait du Royaume un partenaire naturel et idéal pour l’UE.
L’Onhym travaillerait sur plusieurs projets d’exploitation de minerais stratégiques comme le lithium, essentiel pour les batteries électriques...
Nous misons sur les filières d’avenir liées à la transition énergétique, et l’électrique en constitue l’un des axes stratégiques. L’Onhym a considérablement renforcé ces dernières années ses activités sur un large éventail de substances stratégiques et critiques – terres rares, niobium, tantale, thorium, uranium, cuivre, cobalt, lithium ou encore manganèse – essentielles au développement des batteries, des énergies renouvelables et de la transformation numérique. S’agissant spécifiquement du lithium, les travaux d’exploration ont permis de mettre en évidence plusieurs cibles prometteuses.
Etant le premier producteur et exportateur de véhicules en Afrique, le royaume prépare activement l’intégration de la voiture électrique et de ses composantes dans son tissu industriel. Plusieurs projets d’usines de batteries et de gigafactories sont en cours de développement ou en cours de discussion avec des partenaires internationaux, afin de valoriser localement les minerais stratégiques comme le lithium et le cobalt et de créer une chaîne de valeur complète allant de l’extraction à l’assemblage. Cette dynamique s’inscrit dans une stratégie plus large visant à positionner le Maroc comme un hub de production et d’exportation de batteries électriques et de véhicules zéro émission vers l’Europe et l’Afrique, en capitalisant sur ses atouts logistiques, sa proximité géographique et ses accords commerciaux préférentiels.
La directrice générale de l'Office national des hydrocarbures et des mines (ONHYM) du Maroc, Amina Benkhadra, s'exprime après la signature d'un protocole d'accord (MoU) pour la construction du gazoduc Maroc-Nigéria à Rabat, au Maroc, le 15 septembre 2022.
A la tête du gouvernement italien depuis bientôt trois ans, avec une coalition allant du centre droit à l’extrême droite, Giorgia Meloni, issue d’une formation post-fasciste, est devenue une source d’inspiration pour des dirigeants plus ou moins proches de ses idées politiques. Jordan Bardella, le président du RN, la présente comme un modèle de réussite électorale ; Keir Starmer, le Premier ministre travailliste britannique est venu chercher auprès d’elle des conseils en matière de lutte contre l’immigration. Sa coopération avec l’Europe sur ce sujet ainsi que sa position pro-Ukraine l’ont, en outre, rapprochée d’Ursula von der Leyen, la présidente de la Commission européenne. Professeur émérite de science politique et de relations internationales à la prestigieuse université Luiss, à Rome, Sergio Fabbrini est l’un des plus fins connaisseurs des rouages du pouvoir en Italie et de ses relations avec l’UE et les Etats-Unis. Pour L’Express, il analyse la mue d’un animal politique lorgné par ses pairs.
L'Express : Comment Giorgia Meloni, est-elle devenue la figure emblématique d’une partie de la droite et de l’extrême droite européenne ?
Sergio Fabbrini : Je ne sais pas si elle représente un modèle, mais elle est au pouvoir et elle a franchi des étapes, si on la compare, par exemple, à Marine Le Pen, qui reste très critique envers l’Union européenne et surfe sur les faiblesses de cette institution pour augmenter sa popularité.
Giorgia Meloni reconnaît, quant à elle, que certaines politiques, comme l’immigration illégale, ne peuvent être gérées uniquement par les gouvernements nationaux. De fait, l’Italie n’a cessé de demander l’aide de la Commission dans ce domaine depuis qu’elle est au gouvernement. Dans le même temps, elle ne montre aucune ambiguïté à l’égard de Vladimir Poutine et de la Russie et affiche clairement une position pro-occidentale.
Le fait de diriger un gouvernement de droite dure, avec un passé et des racines d’extrême droite, tout en étant pleinement engagé dans une politique étrangère favorable à l’UE, à l’Occident et à l’Otan, est une nouveauté dans cette famille politique.
Des leaders comme le hongrois Viktor Orbán, le slovaque Robert Fico, l’allemande Alice Weidel (AfD), ou Marine Le Pen (qui juge que la Russie ne représente pas une vraie menace pour la France et s’oppose à la livraison d’armes à l’Ukraine) ont tous des relations ambiguës avec le président russe, voire sont carrément pro-Poutine. Et adoptent une position anti-UE et souvent anti-occidentale. Cela peut payer électoralement, mais on ne peut gouverner un pays comme l’Italie ou la France avec cette ligne. Meloni l'a bien compris et cela lui ouvre des espaces en Europe.
Comment a-t-elle évolué depuis qu’elle est au pouvoir ?
Meloni est issue de l'extrême droite post-fasciste italienne. Âgée de 48 ans, elle n'a pas connu le fascisme et n'éprouve pas de nostalgie pour cette période. Cependant, elle a grandi dans cette culture autoritaire et, lorsqu’elle était dans l’opposition, elle adoptait des positions assez radicales. Elle a d’abord eu une approche antieuropéenne, puis s’est montrée très critique à l’égard de l’avortement, opposée au mariage homosexuel et aux rave parties, et en faveur d’un renforcement des prérogatives de la police.
Une fois au gouvernement, bloquée à l’extrême droite par la Ligue de Matteo Salvini, son partenaire de coalition, elle s’est en partie assouplie pour étendre son assiette électorale. Surtout, elle a choisi de s'adapter à la réalité, en particulier en politique étrangère.
Pourquoi ?
Meloni ne voulait pas répéter la mésaventure du premier gouvernement de Giuseppe Conte (2018-2019) avec le Mouvement 5 étoiles et la Ligue. Ces deux partis considéraient l'UE comme une contrainte inacceptable. Ils ont découvert à leurs dépens qu'un pays aussi endetté que l'Italie ne pouvait pas ignorer Bruxelles et les marchés financiers, et ils se sont effondrés. Meloni ne voulait pas non plus connaître le sort de la leader conservatrice britannique Liz Truss, qui n'a tenu que quelques semaines au pouvoir en 2022 pour n'avoir pas pris au sérieux ces mêmes marchés financiers.
Elle a adopté une approche plus réaliste vis-à-vis de l'UE, sans pour autant adhérer pleinement à ses valeurs. Elle est dans une sorte d'ambiguïté et il est difficile de prévoir si, sur le plan politique, elle repartira vers la droite ou poursuivra son cheminement vers le centre. Pour l'heure, c'est une politicienne d’extrême droite qui évolue vers un nouveau conservatisme. Je ne sais pas si elle y parviendra. En Italie, c'est possible, car le parti conservateur, Forza Italia, fondé par Sergio Berlusconi, s'est beaucoup affaibli. Il y a donc un énorme vide à combler.
Meloni a réussi à maintenir depuis près de trois ans une coalition entre la droite et l'extrême droite. Quelle est sa recette ?
Elle y est parvenue grâce à ses résultats électoraux. Son parti représente environ 27 à 30 % de l'électorat. Ni la Ligue ni Forza Italia ne peuvent la défier. Et c’est une politicienne habile. Elle a notamment su mettre à profit sa réputation internationale grandissante pour garder le contrôle de sa coalition. Aujourd'hui, elle dispose toujours d'un bon capital sympathie. Elle se présente comme une femme simple, une politicienne normale, une "outsider", qui parle avec un accent populaire romain. L'opposé de son prédécesseur Mario Draghi, qui possède une éducation et une expérience internationales. Meloni n'a pas de diplôme, ce sont ses qualités personnelles et son tempérament, affirmé et direct, qui ont séduit le public italien.
En cela, elle s'inscrit dans une culture populiste bien ancrée en Italie, qui a conduit le Mouvement 5 étoiles à gouverner, à partir de 2018, en tant que premier parti du pays. Ici, le malaise populiste se traduit plus facilement politiquement, alors qu'en France, il se manifeste surtout dans la rue.
Comment définiriez-vous sa ligne politique ?
Sur le plan économique, elle est pro-business, libérale sur certains sujets (impôts, simplification), mais peut être aussi favorable à l'intervention de l'État, par exemple pour réguler le secteur bancaire. Pour les questions sociétales, elle est très conservatrice en ce qui concerne l'ordre, la distinction claire entre les hommes et les femmes, et son opposition à toute forme de wokisme.
Son attention à la politique étrangère induit aussi une attention stricte aux dépenses. Du point de vue budgétaire, l'Italie est l'un des pays les plus stables d'Europe, beaucoup plus que la France. Elle bénéficie certes du "sale boulot" fait par Mario Monti (à la tête du gouvernement entre 2011 et 2013), puis par Mario Draghi (2021-2022) pour assainir les finances publiques et réformer le pays. Mais l'actuel ministre des Finances, Giancarlo Giorgetti, essaie d'en préserver les acquis. Résultat, l'écart entre l'Italie et l'Allemagne en matière de financement de la dette publique (le spread) se réduit.
A noter que nous n’avons pas le type de réactions hostiles que l’on observe dans votre pays, mais aussi ailleurs en Europe, par rapport aux tentatives de réduire les dépenses publiques. Il faut dire que l'opposition italienne est actuellement extrêmement faible.
Diriez-vous que Meloni est l'anti-Macron ?
Dans une certaine mesure, ils évoluent tous deux dans la même direction sur la scène européenne. Ils sont favorables à la Coalition des volontaires pour soutenir l'Ukraine, même si la France joue un rôle prédominant, en tant que puissance nucléaire membre du Conseil de sécurité de l'ONU, et si l'Italie s'oppose à l'idée d'envoyer des troupes italiennes sur le terrain.
Il n’en demeure pas moins que leurs personnalités sont opposées. Macron est un intellectuel sophistiqué, avec un solide ego issu de son passé d'élite technocratique. Meloni est plus flexible, plus rusée, dans la tradition italienne.
Pensez-vous qu'elle pourrait réaliser à l'échelle européenne ce qu'elle a réalisé en Italie : rassembler la droite et l'extrême droite dans une grande coalition ?
La seule façon pour elle de devenir une leader européenne est de s'intégrer dans le courant dominant, sans en faire non plus complètement partie. Si elle rejoint le Parti populaire européen [NDLR : PPE, l’alliance de droite et de centre droit à l’échelle du continent], elle essaiera de le changer de l’intérieur. Or, il se trouve qu’elle entretient des relations très positives avec Manfred Weber, son président au Parlement européen. A mon sens, la droitisation récente du PPE est déjà due à l’effet Meloni.
Si elle remporte les prochaines élections législatives de 2027 en Italie, Meloni deviendra une femme politique très influente. Il sera alors inévitable qu’elle transforme le PPE d’une manière ou d’une autre. La question est de savoir comment réagira sa faction "Merkel", plus centriste, si ce grand parti continue de se déplacer vers la droite.
Comment évaluez-vous son bilan en matière d’immigration ?
En Italie comme en France, l’immigration a été un sujet porteur pour bon nombre de politiciens. Une chose est de dire "Nous ne voulons pas de migrants" quand on est dans l’opposition, mais une fois au gouvernement, elle s’est focalisée sur l’immigration illégale et a ouvert la porte à une immigration choisie, dans une approche moins centrée surla sécurité. Ce changement sera-t-il durable ? Il est trop tôt pour le dire.
Moscou poursuit depuis des mois des actions offensives et gagne du terrain dans certaines régions de l’Ukraine, sous le regard impuissant de l'Occident. Plus de 700 000 militaires russes sont déployés sur "la ligne de contact", a affirmé ce jeudi 18 septembre Vladimir Poutine, tandis que Donald Trump a estimé que le président russe l’avait "vraiment laissé tomber".
Les infos à retenir
⇒ Donald Trump dit que Vladimir Poutine l’a "vraiment laissé tomber"
⇒ Vladimir Poutine affirme que plus de 700 000 militaires russes sont déployés sur le front
⇒ Le président Zelensky revendique une contre-offensive réussie dans l'est
Donald Trump dit que Vladimir Poutine l’a "vraiment laissé tomber"
Donald Trump a estimé ce jeudi que le président russe Vladimir Poutine, qui poursuit sa guerre en Ukraine malgré les efforts du président américain pour tenter de mettre fin au conflit, l’avait "vraiment laissé tomber". Le conflit "que je pensais être le plus facile à résoudre était" la guerre en Ukraine, "en raison de mes relations avec le président Poutine, mais il m’a laissé tomber. Il m’a vraiment laissé tomber", a déclaré Donald Trump lors d’une conférence de presse avec le Premier ministre britannique Keir Starmer.
Donald Trump est arrivé à la Maison-Blanche en promettant de mettre fin à la guerre en une journée, rejetant la responsabilité de l’invasion russe sur son prédécesseur Joe Biden et fustigeant les milliards de dollars d’aide américaine à l’Ukraine.
Vladimir Poutine affirme que plus de 700 000 militaires russes sont déployés sur le front
Plus de 700 000 militaires russes sont déployés sur "la ligne de contact" en Ukraine, où Moscou poursuit depuis des mois des actions offensives et gagne du terrain dans certains secteurs, a affirmé ce jeudi le président Vladimir Poutine lors d’une réunion avec des responsables parlementaires.
Depuis le lancement de son offensive à grande échelle contre l’Ukraine, il y a plus de trois ans et demi, Moscou a mobilisé d’énormes moyens humains et matériels, tout en subissant de lourdes pertes militaires, selon les estimations de médias indépendants.
Le président Zelensky revendique une contre-offensive réussie dans l'est
Le président ukrainien Volodymyr Zelensky a annoncé ce jeudi avoir rendu visite à des soldats dans la région de Donetsk (est), épicentre des combats contre les troupes de la Russie. La Russie, qui a lancé en 2022 une invasion à grande échelle de l’Ukraine, cherche à occuper l’ensemble de la région de Donetsk où ses troupes ne cessent d’avancer lentement, au prix de lourdes pertes selon les estimations de médias indépendants.
"J’ai rencontré nos soldats participant à la contre-offensive de Dobropillia", zone d’une récente percée russe, a-t-il annoncé sur les réseaux sociaux en assurant que l’armée ukrainienne avait "libéré 160 km2" dans cette zone. L'armée russe avait réalisé en août une rare percée des défenses ukrainiennes en direction de cette ville qui comptait 28 000 habitants avant la guerre. L'Ukraine avait alors dépêché des renforts pour combler la brèche.
La police ukrainienne a de son côté indiqué que cinq civils ont été tués jeudi matin dans une frappe russe dans la ville de Kostiantynivka, située elle aussi dans la région de Donetsk, à une quarantaine de kilomètres à vol d’oiseau de Dobropillia. Selon la police, deux femmes et trois hommes, âgés de 62 à 74 ans, ont été tués par un bombardement ayant touché la zone résidentielle de Kostiantynivka, pilonnée quotidiennement.
L’Ukraine frappe une nouvelle raffinerie en profondeur
Des drones ukrainiens ont attaqué jeudi une importante raffinerie située en Russie à environ 1 400 km du front dans la région du Bachkorstastan, causant un incendie, ont rapporté les autorités des deux pays. Une vague d’attaques ukrainiennes contre des sites similaires cet été a affecté la capacité industrielle de plusieurs d’entre eux, dont certaines raffineries parmi les plus importantes du pays, et fait fortement grimper en Russie les prix du carburant à la pompe.
Les services de sécurité ukrainiens (SBU) ont affirmé que leurs drones avaient touché le "coeur" d’une raffinerie de pétrole au Bachkortastan appartenant au grand groupe russe Gazprom. Des images présumées de l’incident, publiées sur les réseaux sociaux et non-autenthifiées par l’AFP, montrent un incendie et de la fumée noire s’élevant au-dessus d’un site industriel. Le responsable de cette région russe, Radiï Khabirov, a confirmé sur son compte Telegram que "deux drones" ukrainiens avaient attaqué cette raffinerie et entraîné un incendie.
Kiev dit avoir récupéré 1 000 nouveaux corps venant de Russie
L’Ukraine a annoncé jeudi avoir récupéré 1 000 nouveaux corps remis par la Russie, qui les présente comme ceux de soldats ukrainiens tués au combat, après plusieurs autres échanges du même type ces derniers mois. "Un millier de corps, qui selon la partie russe appartiennent à des militaires ukrainiens, ont été rapatriés en Ukraine", a indiqué sur Telegram le Centre gouvernemental ukrainien pour les prisonniers de guerre. Les autorités ukrainiennes restent généralement prudentes sur l’identité des dépouilles rapatriées, avant leur identification formelle.
Selon le correspondant de guerre russe Alexandre Kots sur Telegram, la Russie a récupéré de son côté 24 corps de ses soldats tués remis par l’Ukraine.
La mise en pratique du programme surnommé "one in, one out" (une entrée, une sortie) semble plus périlleuse que prévu. Depuis son entrée en vigueur en août dernier, l’accord migratoire entre la France et le Royaume-Uni, pour lutter contre les traversées de la Manche à bord de canots pneumatiques de fortune, est au point mort.
Concrètement, le texte prévoit le retour en France de migrants arrivés à bord de petites embarcations au Royaume-Uni, en échange de l’envoi outre-Manche de migrants se trouvant en France, et qui auraient déposé une demande en ligne pour s’installer au Royaume-Uni. Mais dans les faits, l’accord a du mal à se concrétiser.
"Sans succès"
Selon plusieurs médias britanniques, deux avions qui devaient acheminer des migrants vers la France, dont l’un partant de l’aéroport londonien de Heathrow mardi 16 septembre à 9 heures, ont décollé sans aucun migrant à leur bord. "Les premiers migrants identifiés ont reçu des avis d’expulsion du territoire la semaine dernière, assortis d’un préavis de cinq jours, rapporte The Daily Telegraph. Le ministère de l’Intérieur avait prévu le renvoi de ces personnes arrivées par la Manche sur des vols commerciaux de la compagnie Air France tous les jours de cette semaine, pour le moment sans succès", poursuit le journal.
Un premier migrant a toutefois fini par être expulsé du Royaume-Uni vers la France ce jeudi 18 septembre, dans le cadre de l’accord migratoire a annoncé le ministère britannique de l’Intérieur. L’homme, d’origine indienne selon une source gouvernementale française, est arrivé en France dans la matinée à bord d’un vol commercial. Il était entré au Royaume-Uni en août en traversant la Manche à bord d’un petit bateau.
Blocage de la Haute Cour de Londres
Selon un bilan de l’Agence France Presse réalisé à partir de chiffres officiels, près de 31 000 personnes sont arrivées sur les côtes britanniques après avoir traversé la Manche depuis début janvier, un chiffre record. En outre, depuis début août, le Royaume-Uni a commencé à placer en détention des migrants dans le cadre de l’accord avec la France, très critiqué par les ONG. Selon le journal The Guardian, 92 personnes sont détenues en attendant leur renvoi en France.
Le gouvernement britannique a assuré mercredi que l’accord permettant au Royaume-Uni de renvoyer des migrants vers la France irait "de l’avant", assurant que les premiers renvois interviendraient cette semaine. Le gouvernement britannique a par ailleurs annoncé son intention de faire appel d’une décision de justice bloquant l’expulsion d’un Erythréen. La Haute Cour de Londres a en effet temporairement bloqué mardi l’expulsion en France d’un migrant érythréen, qui devait être renvoyé en France par avion mercredi matin. Cet homme de 25 ans, victime selon son avocate de trafic d’êtres humains, est le premier à contester en justice son expulsion. "Cette décision est un coup dur pour le gouvernement, car de nombreuses personnes concernées par le programme pilote risquent d’être des victimes de trafic", observe The Gardian.
"Tentatives de dernière minute"
"Il va y avoir toutes sortes de recours pour mettre à l’épreuve le nouvel accord et ses fondements", a déclaré de son côté Pierre Makhlouf, de l’association Bail for Immigration Detainees (BID), à l’AFP. Et d’ajouter : "Il est sans doute prématuré de penser que les expulsions auront lieu cette semaine." The Daily Telegraph, journal conservateur, juge ainsi que les recours déposés en justice par les avocats des demandeurs d’asile provoquent des lenteurs dans la mise en œuvre du programme. "Ces procédures rappellent celles entreprises à l’époque du ‘plan Rwanda’ imaginé par la précédente majorité conservatrice, souligne le quotidien londonien. Mais cette fois-ci, les contestations portent sur des cas individuels plutôt que sur la politique dans son entièreté."
La ministre de l’Intérieur Shabana Mahmood a ainsi promis de lutter contre les "tentatives de dernière minute destinées à empêcher un renvoi", qu’elle a qualifiées d'"intolérables". Dans la matinée, la ministre de la Technologie, Liz Kendall, s’exprimant au nom du gouvernement, avait affirmé que la décision de la Haute Cour n’allait pas "compromettre les fondements de cet accord". Dans un contexte de montée du parti d’extrême droite Reform UK dans les sondages, le gouvernement travailliste de Keir Starmer est sous pression pour endiguer le phénomène migratoire. "Alors que 100 000 personnes ont défilé à Londres le 13 septembre (à l’appel de l’extrême droite), ce retard à l’allumage risque fort d’alimenter les tensions au sujet de l’immigration", prévient l’hebdomadaire The Spectator.
Des migrants à bord d'un bateau de passeurs pour tenter de traverser la Manche jusqu'au Royaume-Uni, sur la plage de Gravelines, près de Dunkerque, dans le nord de la France, le 26 avril 2024
Jusque-là relativement épargnée par les répercussions de la guerre en Ukraine, la Chine commence à sentir les effets du conflit. Mardi 9 septembre, Varsovie a annoncé la fermeture de sa frontière avec la Biélorussie, en réponse aux manœuvres militaires communes russo-bélarusses prévues du 12 au 16 septembre. Cette fermeture totale a interrompu tout trafic ferroviaire et routier, affectant directement une portion cruciale du fret chinois terrestre destiné à l’Union européenne (UE). Le grand nœud ferroviaire de Małaszewicze, à l’est de la Pologne, est notamment concerné.
Ce corridor représente 90 % du fret ferroviaire entre la Chine et l’UE, soit une valeur de 25 milliards d’euros par an. "Sur cette route, le volume de fret a augmenté de 10,6 % en 2024, tandis que la valeur des marchandises a bondi de près de 85 % pour atteindre 25,07 milliards d’euros", expliquent nos confrères de Politico. Ce passage stratégique est devenu un pilier pour les géants du e-commerce tels que Temu et Shein, tout en servant les intérêts des entreprises polonaises. Son avantage ? Les marchandises qui empruntent cette voie ferrée mettent environ deux semaines à rallier l’Europe depuis la Chine, contre plus d’un mois par voie maritime, rapportent Les Echos.
A noter que la compagnie publique PKP Cargo a assuré pouvoir absorber de courts retards, tout en avertissant qu’une fermeture prolongée obligerait à détourner le commerce vers le sud, via le Kazakhstan, la mer Caspienne et la mer Noire, avant de rallier l’Europe du Sud ou la Turquie. Une perspective d’autant plus embarrassante que la décision polonaise intervient à peine une semaine après le lancement très symbolique du premier train Varsovie-Chine, censé consacrer la Pologne comme plaque tournante du fret en Europe.
"La circulation sera rétablie une fois la frontière totalement sécurisée"
Mais cet élan a été brutalement stoppé. Car si les exercices militaires russo-bélarusses ont pris fin, Varsovie maintient sa frontière close, au nom de la sécurité nationale. "La circulation sera rétablie une fois la frontière totalement sécurisée", a prévenu Pawel Wronski, porte-parole du ministère polonais des Affaires étrangères, tout en insistant : cette mesure n’a pas vocation à frapper les partenaires commerciaux.
"La partie chinoise a reçu toutes les informations à ce sujet", a indiqué, lundi 15 septembre, à la presse, le porte-parole du ministère polonais des Affaires étrangères, à l’issue d’une rencontre des chefs de diplomatie chinois et polonais, Wang Yi et Radoslaw Sikorski. "Ce n’est pas une décision visant à frapper quiconque parmi les partenaires qui transportent des marchandises", mais "des manœuvres avec un scénario très agressif se déroulent actuellement au Bélarus", a renchéri le porte-parole polonais Pawel Wronski.
"Un projet phare"
De son côté, Pékin avait déjà rappelé, avant même la rencontre des ministres, que le train express Chine-Europe constituait un "projet phare" de sa coopération avec la Pologne et l’UE. A noter qu'une fermeture prolongée inquiète particulièrement les provinces occidentales et enclavées de Chine, très dépendantes des liaisons ferroviaires faute d’accès direct aux ports maritimes. "La fermeture est plus importante pour ces régions, mais la situation n’est pas critique pour autant", nuance toutefois Konrad Popławski, économiste au Centre d’études orientales de Varsovie, cité par Politico.
Mais la portée de cette décision dépasse largement le seul cadre sino-polonais. Elle s’inscrit aussi dans une rivalité stratégique plus vaste, où d’autres acteurs trouvent leur compte. "Il y a les Etats-Unis, qui, selon moi, se réjouissent au moins temporairement de cette fermeture, car elle accentue la pression sur la Chine en matière de commerce de pétrole et de gaz russes", analyse Piotr Krawczyk, ancien directeur de l’Agence polonaise de renseignement extérieur, cité également par Politico.
Reste à savoir ce que va faire Pékin sur la scène diplomatique. Jusqu’ici, la Chine s’est contentée d’appels au respect de l’intégrité territoriale et à l’ouverture de pourparlers de paix, sans jamais condamner Moscou, renforçant même ses liens économiques et militaires avec la Russie. Mais face à l’impact économique direct de la fermeture polonaise sur ses chaînes d’approvisionnement européennes, Pékin sera-t-il contraint d’adopter une position plus affirmée dans le conflit ukrainien ?
La fermeture de la frontière entre la Pologne et la Biélorussie interrompt tout trafic ferroviaire et routier, affectant directement une portion cruciale du fret chinois terrestre destiné à l’Union européenne.
Des scientifiques de renom tirent la sonnette d’alarme : les gaz à effet de serre ne sont plus une hypothèse, mais une menace avérée pour la santé humaine et le bien-être public. Mercredi 17 septembre, les Académies nationales des sciences, de l’ingénierie et de la médecine ont publié un rapport majeur, compilant les preuves les plus solides à ce jour sur les effets délétères du dioxyde de carbone, du méthane et d’autres gaz responsables du réchauffement climatique. Ce document de 136 pages, rédigé par une vingtaine d’experts, confirme que la constatation de danger initiale de 2009, connue sous le nom d’"Endangerment Finding", reste exacte et "a résisté à l’épreuve du temps".
Le rapport souligne que de multiples sources de données montrent désormais que les activités humaines, telles que la combustion de combustibles fossiles et la déforestation, produisent des gaz à effet de serre qui réchauffent la planète, et que le changement climatique exacerbe divers risques sanitaires, tels que les vagues de chaleur intenses et l'augmentation de la fumée des feux de forêt. "Nous espérons que les éléments résumés ici démontrent la solidité des données scientifiques disponibles pour éclairer une prise de décision éclairée", a déclaré dans un communiqué Shirley Tilghman, professeure émérite de biologie moléculaire et d'affaires publiques et ancienne présidente de l'Université de Princeton.
Mais cette publication intervient dans un contexte politique particulièrement tendu. Sous l’administration Trump,l’Agence de protection de l’environnement (EPA) a été largement dépouillée. Sous les conseils d'Elon Musk et de sa commission pour l’efficacité gouvernementale (Doge), l’Etat a retiré plus de 20 milliards de dollars à l’agence. Plusieurs projets jugés trop "inclusifs", conçus pour protéger les populations les plus exposées aux effets du réchauffement climatique, ont été brutalement interrompus. Parmi eux, la National Nature Assessment, vaste évaluation de la biodiversité américaine lancée en 2022, a été stoppée sur ordre présidentiel, alors que plus de 180 chercheurs et une quinzaine d’agences y contribuaient.
"Raisonnements erronés"
Aujourd’hui présidée par Lee Zeldin, fidèle de la cause trumpiste, avocat de formation et ancien représentant républicain, l’EPA cherche à annuler la décision de 2009, arguant que les régulations sur les gaz à effet de serre freinent l’économie américaine et que les recherches ultérieures auraient "jeté un doute important" sur sa validité. Lee Zeldin l'affirme : ces normes reposeraient sur des "raisonnements erronés" et entraveraient le développement industriel.
Pourtant, depuis 2009, cette constatation de danger constitue le socle de nombreuses régulations fédérales, fixant des limites aux émissions des voitures, des centrales électriques et d’autres industries polluantes. Elle demeure un outil essentiel pour que les Etats-Unis, deuxième plus gros émetteur mondial, puissent agir contre le dérèglement climatique. Pour les scientifiques, toute tentative de démanteler ces règles irait directement à l’encontre de la science et de l’intérêt public.
Plus de 1 000 scientifiques et experts ont riposté, mardi 16 septembre, dans une lettre publique, dénonçant une tentative flagrante de discréditer la science et d’affaiblir des régulations essentielles. "Nous pouvons attester des preuves scientifiques incontestables du changement climatique causé par l’homme, de ses effets néfastes sur la santé et le bien-être des populations, et des coûts dévastateurs qu’il engendre", écrivent-ils. Ils s’en prennent également à un rapport récent du ministère de l’Energie, qu’ils jugent "inexact et contradictoire", et qui viserait à justifier les actions de l’administration Trump.
Le débat se joue également au Congrès. Certains républicains, comme le représentant James Comer du Kentucky, critiquent le rapport des Académies nationales, accusant les scientifiques de partialité et de précipitation, et affirmant que la décision s’inscrit dans un "acte partisan flagrant visant à affaiblir l’administration Trump". A noter que les Académies nationales des sciences, de l'ingénierie et de la médecine (NASMC) sont un organisme non gouvernemental fondé en 1863 par Abraham Lincoln pour conseiller la nation sur les questions scientifiques et médicales. "Cet organisme influent publie environ 200 rapports par an sur des sujets variés, de la physique des particules à la neurobiologie, et ses membres sont élus chaque année", souligne leNew York Times. En espérant que cela continue.
Mercredi 18 septembre, les Académies nationales des sciences, de l’ingénierie et de la médecine ont publié un rapport qui confirme es effets délétères du dioxyde de carbone, du méthane et d’autres gaz responsables du réchauffement climatique.
Donald Trump a annoncé mercredi 17 septembre la désignation du mouvement "Antifa", un terme générique qui désigne des groupes d'extrême gauche se réclamant de l'antifascisme, comme organisation "terroriste", une semaine après l'assassinat de l'influenceur ultraconservateur Charlie Kirk.
"J'ai le plaisir d'informer nos nombreux patriotes américains que je désigne 'ANTIFA', UNE CATASTROPHE DE LA GAUCHE RADICALE, MALADE ET DANGEREUSE, COMME ORGANISATION TERRORISTE", a déclaré le président américain sur son réseau Truth Social, usant de majuscules à son habitude. "Je recommanderai également avec force que les personnes finançant 'ANTIFA' fassent l'objet d'une enquête approfondie, conformément aux normes et pratiques juridiques les plus strictes", a également déclaré Donald Trump, qui se trouve actuellement au Royaume-Uni pour une visite d'Etat.
Une possibilité déjà évoquée en 2020
En 2020, au cours de son premier mandat, Donald Trump avait déjà évoqué la possibilité de désigner le mouvement comme organisation "terroriste". Les Etats-Unis étaient alors secoués par des manifestations parfois violentes, à la suite de la mort de George Floyd, un Afro-Américain étouffé par un policier blanc à Minneapolis. La Maison-Blanche n'a pas immédiatement détaillé la mise en place de cette désignation. Les Etats-Unis n'ont à ce jour aucune liste d'"organisations terroristes nationales".
Le mouvement Antifa s'apparente davantage à une mouvance qu'à un groupe organisé. Dépourvu de dirigeants, comme d'une structure formelle, il désigne plutôt des groupes informels fonctionnant de façon indépendante, selon l'historien américain Mark Bray, auteur d'un livre de référence sur le sujet.
"Pas un groupe mais une idéologie", selon l'ancien directeur du FBI
Tout en reconnaissant que la mouvance représentait un sujet de préoccupation pour l'ordre public, l'ancien directeur du FBI, Chris Wray estimait en 2020 qu'elle n'était "pas un groupe ou une organisation, mais une idéologie".
Ses membres, souvent entièrement vêtus de noir, dénoncent le racisme, les valeurs d'extrême droite et ce qu'ils considèrent comme du fascisme, et estiment que des actions violentes sont parfois justifiées.
Le mouvement Antifa est apparu aux Etats-Unis après l'élection de Donald Trump en 2016, notamment après une manifestation d'extrême droite à Charlottesville (Virginie), en août 2017. Une voiture avait percuté un groupe de militants antiracistes venus tenir tête aux groupsucules d'extrême droite. Une personne avait été tuée et une vingtaine d'autres blessées.
Tyler Robinson présenté par une large partie de la droite comme un tueur d'"extrême gauche"
La Maison-Blanche avait annoncé en début de semaine son intention de réprimer ce qu'elle qualifie de "terrorisme intérieur" de gauche après l'assassinat de Charlie Kirk. Tyler Robinson, le suspect de cet assassinat, est présenté par une large partie de la droite comme un tueur d'"extrême gauche", car il avait dénoncé auprès de ses proches la "haine" véhiculée selon lui par Charlie Kirk et a utilisé des munitions gravées d'inscription à tonalité antifasciste. Il a été formellement inculpé mardi par les autorités qui ont requis la peine capitale contre lui.
Figure de la droite américaine âgée de 31 ans, Charlie Kirk utilisait ses millions d'abonnés sur les réseaux sociaux et ses interventions dans les universités pour défendre Donald Trump auprès de la jeunesse et diffuser ses idées nationalistes, chrétiennes et traditionalistes sur la famille.
Le président américain Donald Trump répond aux questions des journalistes dans le bureau ovale de la Maison Blanche, à Washington, le 15 septembre 2025
La Réserve fédérale américaine (Fed) a abaissé, mercredi 17 septembre, ses taux d’intérêt pour la première fois de l’année. La réduction, limitée à un quart de point de pourcentage, place les taux directeurs entre 4 % et 4,25 %. Un geste jugé trop timide par Stephan Miran, nouveau gouverneur de l’institution, nommé par Donald Trump. Une courte majorité des responsables de la Fed envisage néanmoins deux nouvelles baisses d’ici la fin de l’année.
Depuis plusieurs mois, la banque centrale subit la pression du président américain, qui réclame des taux plus bas afin de soutenir l’économie. Donald Trump reproche à la Fed d’avoir tardé à assouplir sa politique monétaire et a récemment placé l’un de ses fidèles au conseil des gouverneurs. Il tente par ailleurs de démettre une gouverneure, une procédure actuellement devant la justice. Face à ces attaques, le président de la Fed, Jerome Powell, s’est efforcé de recentrer le débat sur l’économie. "La Réserve fédérale a eu raison d’attendre", a-t-il martelé lors de sa conférence de presse, alors même que Donald Trump le surnomme désormais "Trop tard".
Le tournant est survenu en août, lors du symposium de Jackson Hole, dans le Wyoming où Jerome Powell avait évoqué un marché du travail en "étrange équilibre", annonçant implicitement une baisse à venir. Selon lui, une détérioration rapide de l’emploi pourrait provoquer une vague de licenciements et un rebond du chômage. Cette prise de position intervenait dans un climat tendu : Donald Trump avait publiquement envisagé de le révoquer et une gouverneur avait démissionné de façon inattendue. Mais Jerome Powell tente en apparence de rester hermétique à ces turbulences, préférant dérouler les raisons économiques plutôt que politiques lors de sa conférence de presse :"Les indicateurs récents suggèrent que la croissance de l’activité économique s’est modérée."
La Fed joue les équilibristes
En effet, plusieurs indicateurs ont jeté un voile noir sur l’économie américaine : en août dernier, le taux de chômage est remonté à 4,3 % sur fond de stagnation des embauches, tandis qu’une révision statistique a révélé que les créations d’emplois des derniers mois avaient été largement surestimées. Le marché immobilier, affaibli par des taux d’emprunt élevés, accentue encore la pression.
Cette baisse de taux illustre l’équilibre précaire que la Fed doit maintenir. Depuis 1977, son mandat est double : garantir la stabilité des prix et favoriser le plein-emploi. Or, les politiques commerciales et migratoires de l’administration Trump compliquent la donne. D’un côté, l’inflation reste élevée, alimentée par la flambée post-pandémie et les droits de douane imposés sur de nombreuses importations. De l’autre, le marché du travail s’affaiblit. "La Fed se retrouve dans une position délicate : réduire trop vite les taux risquerait de relancer l’inflation, mais ne rien faire pourrait aggraver le chômage", analyse Bloomberg.
Jerome Powell s’est gardé d’évoquer l’indépendance de la Fed, alors que Donald Trump n’a jamais caché sa volonté de contrôler l’institution. "Nous affirmons toujours que nous ne suivons pas une trajectoire prédéfinie, et nous le pensons vraiment", a insisté Jerome Powell. Une prudence stratégique, selon le New York Times, destinée à éviter un affrontement frontal avec un président coutumier des attaques publiques. "Il est difficile de remettre en question leur stratégie, car Donald Trump est un champion incontesté de la confrontation publique ouverte", a déclaré dans le quotidien américain Peter Conti-Brown, professeur à la Wharton School de l’Université de Pennsylvanie. Mais "nous sommes sur le fil du rasoir et beaucoup dépend de la pertinence de leur stratégie", a-t-il ajouté.
Une nouvelle détente à venir ?
Professeur d’économie à l’université Cornell, Ryan Chahrour trouve "surprenant" que la banque centrale ait baissé ses taux maintenant, tant l’inflation résiste. Il s’attendait à ce que des responsables préfèrent laisser les taux inchangés mais pense que l’unité affichée au bout du compte (à l’exception de Stephen Miran) envoie un message à l’extérieur. "Ils ne veulent pas rendre la situation encore plus confuse en paraissant divisés. Se montrer unis devrait leur permettre de moins sentir la pression politique à l’avenir", a-t-il estimé auprès de l’AFP. L’abaissement des taux de la Fed s’imposait "pour essayer d’éviter de nouveaux licenciements dans cette économie" en perte de vitesse, considère de son côté Heather Long, de la banque Navy Federal Credit Union.
"De nombreux Américains des classes moyennes et populaires attendent avec impatience de pouvoir emprunter moins cher", relève aussi l’économiste dans une note, citant les coûts liés aux cartes de crédit, aux prêts automobiles et immobiliers, mais aussi les prêts des petites entreprises. Selon la médiane des prévisions des responsables de la Fed, deux baisses de taux supplémentaires pourraient encore intervenir en 2025, ce qui impliquerait une nouvelle détente à chacune des réunions programmées d’ici la fin de l’année.
A pied, à vélo où à bord de véhicules, les Palestiniens fuient en nombre la ville de Gaza, cible depuis mardi d’une offensive majeure de l’armée israélienne, dont les bombardements ont fait mercredi des dizaines de morts à travers le territoire. L’Etat hébreu a annoncé hier l’ouverture jusqu’à vendredi matin d’un nouveau passage pour permettre aux habitants de quitter la plus grande ville du territoire palestinien. Déterminé à éliminer ses ennemis où qu’ils se trouvent, Israël a aussi mené ces derniers jours des frappes aériennes contre le Hezbollah au Liban, les rebelles houthis au Yémen et des dirigeants du Hamas au Qatar. Mercredi toutefois, l’un des principaux chefs du mouvement palestinien, ciblé par la frappe israélienne à Doha, a refait surface pour un entretien en direct sur la chaîne qatarie Al Jazeera.
Les infos à retenir
⇒ L’armée israélienne bombarde le nord de Gaza, quatre soldats tués dans le sud
⇒ Emmanuel Macron affirme qu’Israël est en train de "détruire totalement" sa "crédibilité"
⇒ Les hôpitaux de Gaza sont "au bord de l’effondrement", alerte le chef de l’OMS
Gaza : l’armée israélienne bombarde le nord, quatre soldats tués dans le sud
Israël a mené jeudi d’intenses bombardements sur Gaza-ville, cible d’une offensive terrestre majeure, provoquant de nouveaux déplacements de la population vers le sud où sont morts quatre soldats israéliens selon l’armée. La route côtière longeant la bande de Gaza est saturée de personnes fuyant vers le sud, à pied, en voiture ou sur des charrettes tirées par des ânes, leurs affaires entassées à la hâte, rapportent des journalistes de l’AFP sur place.
Fort du soutien américain, Israël a annoncé le début mardi d’une campagne militaire terrestre et aérienne à Gaza-ville, dans le nord du territoire palestinien, pour y anéantir le Hamas, dont l’attaque du 7 octobre 2023 en Israël a déclenché la guerre dans la bande de Gaza.
Emmanuel Macron affirme qu’Israël est en train de "détruire totalement" sa "crédibilité"
Emmanuel Macron a affirmé jeudi, dans une interview à une télévision israélienne, qu’Israël était en train de "détruire totalement" son "image et sa crédibilité" dans l’opinion publique mondiale, en raison des victimes civiles à Gaza. "Israël a obtenu des résultats uniques en termes de sécurité", "mais mener ce genre d’opérations à Gaza est totalement contreproductif et, je dois le dire, c’est un échec", a dit le président français à la chaîne 12.
Emmanuel Macron a également défendu sa décision de reconnaître un Etat palestinien, assurant qu’il s’agit de "la meilleure manière d’isoler le Hamas" dans le cadre du plan porté par la France à l'ONU. Interrogé par la chaîne 12, le président français a aussi reconnu qu’il avait voulu se rendre en Israël en amont de la réunion de la semaine prochaine à New York pour expliquer sa position, avant que les autorités israéliennes refusent sa venue. Il a ajouté vouloir continuer à "travailler" avec le Premier ministre israélien Benyamin Netanyahou.
Gaza : l’armée israélienne recommande de suspendre l’aide en provenance de Jordanie après l’attaque d’Allenby
L’armée a recommandé jeudi soir aux autorités israéliennes de suspendre l’aide en provenance de Jordanie à destination de Gaza après l’attaque ayant fait deux morts dans l’après-midi au point de passage d’Allenby entre la Cisjordanie occupée et la Jordanie. "En raison de [cette] attaque […] le chef d’état-major […] a conseillé à l’échelon politique de suspendre l’entrée de l’aide humanitaire en provenance de Jordanie jusqu’à la fin de l’enquête sur l’incident et la mise en oeuvre de procédures de contrôle revues pour les chauffeurs jordaniens", indique un communiqué militaire.
Deux personnes ont été tuées par balles jeudi par un assaillant ayant ouvert le feu du côté du point de passage du pont Allenby tenu par Israël, selon les autorités israéliennes. La Jordanie a condamné l’attentat et indiqué que son auteur était un Jordanien conduisant un camion d’aide humanitaire pour la bande de Gaza.
Gaza : les hôpitaux sont "au bord de l’effondrement", alerte le chef de l’OMS
Le directeur général de l’Organisation mondiale de la santé (OMS) a alerté jeudi sur l’offensive majeure de l’armée israélienne dans le nord de Gaza, affirmant que les hôpitaux sont "au bord de l’effondrement". "Les blessés et les personnes handicapées ne peuvent se mettre en sécurité, ce qui met leur vie en grave danger. Les hôpitaux, déjà débordés, sont au bord de l’effondrement alors que l’escalade de la violence bloque l’accès et empêche l’OMS d’acheminer des fournitures vitales", a déploré Tedros Adhanom Ghebreyesus, sur le réseau social X.
Israël : un fourgon militaire caillassé par des ultra-orthodoxes après l’arrestation de déserteurs
Un fourgon militaire transportant des déserteurs juifs ultra-orthodoxes, arrêtés par l’armée israélienne pour être conduits en prison, a été pris pour cible par des manifestants ultra-orthodoxes dans la nuit, ont indiqué l’armée et la radio militaire. Des milliers d’appels à la conscription ont été envoyés ces derniers mois à des juifs ultra-orthodoxes, jusque-là largement exemptés de service militaire.
"Plusieurs insoumis ont été arrêtés, jugés dans le cadre d’une procédure disciplinaire et envoyés en détention", a indiqué l’armée dans un communiqué mercredi soir. "Alors qu’ils étaient en route vers la prison militaire […] plusieurs manifestants ont jeté des pierres et pulvérisé du gaz lacrymogène en direction du véhicule", a indiqué l’armée, précisant qu’un des détenus avait réussi à s’échapper.
Des discussions visant à modifier le texte de loi sur la conscription s’intensifient ces derniers mois, mettant le gouvernement sous pression. Les deux partis ultra-orthodoxes ont quitté le gouvernement et attendent qu’une loi pérennisant l’exemption soit votée par le gouvernement.
L’Espagne va enquêter sur des "violations des droits humains" à Gaza
L’Espagne va enquêter sur des "violations des droits humains à Gaza" pour coopérer avec la CPI, a annoncé jeudi le procureur général, plus haut magistrat du parquet dans le pays. "Le procureur général de l’Etat a publié un décret décidant la création d’une équipe de travail chargée d’enquêter sur les violations du droit international des droits humains à Gaza", a indiqué ce parquet dans un communiqué, afin de "recueillir des preuves et de les mettre à disposition de l’organe compétent, respectant ainsi les obligations de l’Espagne en matière de coopération internationale et de droits humains".
La Syrie et Israël vont conclure des accords avant la fin de l’année
La Syrie et Israël, techniquement en état de guerre, vont conclure "plusieurs accords" de sécurité d’ici la fin de l’année, a déclaré jeudi à l’AFP une source au ministère des Affaires étrangères à Damas. "Il y a des progrès dans les négociations avec Israël. Il y aura plusieurs accords avant la fin de l’année, en premier lieu des accords militaires et de sécurité", a précisé cette source qui a requis l’anonymat.
Depuis la prise du pouvoir en décembre par une coalition islamiste, les deux pays ont amorcé un dialogue et le président par intérim Ahmed al-Chareh a affirmé la semaine dernière que les négociations avaient pour but de parvenir à un accord de sécurité.
La source a précisé que les deux pays voulaient d’abord parvenir à "un accord qui mettrait un terme aux actions militaires en Syrie". Depuis la chute de Bachar el-Assad en décembre 2024, Israël a mené des centaines de frappes contre des positions militaires en Syrie. L’armée israélienne a également pénétré dans la zone tampon démilitarisée du Golan, à la lisière de la partie du plateau syrien occupée par Israël, et ses forces effectuent régulièrement des incursions dans le sud de la Syrie où ses troupes occupent des positions.
L’un des principaux dirigeants du Hamas apparaît à la télévision après la frappe israélienne au Qatar
Ghazi Hamad, un des principaux dirigeants du Hamas, est apparu mercredi soir pour un entretien diffusé en direct sur la chaîne qatarie Al Jazeera, devenant le premier haut responsable du mouvement islamiste palestinien à refaire surface depuis l’attaque israélienne sur Doha le 9 septembre.
Dans cet entretien, Ghazi Hamad donne sa version de l’attaque à laquelle il a survécu. Ce jour-là, "nous étions en réunion, la délégation des négociateurs et quelques-uns de nos frères [du Hamas et] nous avions commencé à étudier la proposition […] américaine" de cessez-le-feu à Gaza, a-t-il dit. Moins d’une heure [plus tard] nous avons entendu le bruit d’un gros bombardement" [et] nous sommes partis rapidement parce que nous savions sans l’ombre d’un doute qu’il s’agissait d’une attaque ciblée israélienne". "Les roquettes se sont abattues successivement, sans pause : environ 12 missiles en moins d’une minute", a-t-il encore déclaré.
Selon des sources proches du Hamas, cinq autres dirigeants du mouvement se trouvaient avec Ghazi Hamad à Doha dans le bâtiment visé par Israël au moment de la frappe.
Les mauvaises langues assurent qu’elle a eu de la chance. Que ses prédécesseurs avaient déjà largement entamé le travail d’assainissement des comptes publics. Que la présidente du conseil italien peut dire merci à l’Europe, qui octroie à son pays une manne financière non négligeable pour moderniser ses infrastructures. Qu’elle s’est jusqu’à présent bien gardée de s’attaquer aux réformes structurelles.
Tout ceci est sans doute vrai. Mais tous ces bémols ne retirent rien aux prouesses budgétaires de notre voisin italien, très longtemps considéré comme l’homme malade de l’Europe. Non seulement l’Italie est parvenue à se défaire de cette image - en refilant au passage le mistigri à la France, où le coût de l’emprunt à 10 ans dépasse désormais celui pratiqué à Rome - mais elle a également rétabli la confiance des investisseurs. Ce n’est pas un hasard si Giorgia Meloni, perçue hier comme l’incarnation du danger populiste, a été désignée en décembre 2024 comme "la personnalité la plus puissante de l’Europe" par Politico. Ou si son grand argentier, Giancarlo Giorgetti, un des piliers de la Ligue aux côtés de Matteo Salvini, a été élu "ministre des Finances de l’année" par la très sérieuse revue britannique The Banker.
Le déficit divisé par deux l’espace d’un an
Côté chiffres, le bilan du gouvernement Meloni étincelle, au point de susciter des jalousies hexagonales. Le déficit public ? Divisé par deux l’espace d’un an, il frôle presque la barre des 3 % du PIB, un objectif que la France ne cesse de reculer dans un avenir toujours plus lointain. La dette ? Elle reste certes dantesque – 135 % du PIB contre 114 % pour la France - mais elle a reculé de 20 points depuis l’arrivée de Meloni au Palais Chigi. Et ce n’est pas tout. L’Italie est le seul pays du G7 à avoir engrangé en 2024 un excédent primaire du budget (recettes supérieures aux dépenses, avant la prise en compte des charges d’intérêt), symbole d’une gestion rigoureuse des deniers publics. Au passage, la dette, en valeur absolue, n’occupe plus la première place du podium de l’Union européenne, laissée à la France avec son fardeau de 3 345 milliards d’euros de dette.
"Mais comment font-ils ?", peut se demander le nouveau Premier ministre Sébastien Lecornu, chargé de sortir la France de son impasse budgétaire. Ni recette magique, ni vidéo sur YouTube ou grande conférence de presse pour avertir les Italiens du précipice financier qui les guetterait, ni même une frénésie fiscale endiablée, comme celle à laquelle se livrent ces derniers jours les socialistes Français. Mais du pragmatisme, un peu d’humilité et surtout une bonne dose de rigueur discrète. "Giorgia Meloni, bien conseillée par Mario Draghi, a compris qu’elle ne dispose que de très peu de marge de manœuvre, relève Lorenzo Gazzoletti, directeur général à Paris de Richelieu Invest. Résultat, son gouvernement évite les erreurs économiques et la déstabilisation, ce qui procure de la confiance et permet aux consommateurs de consommer et aux entreprises d’investir". En clair, Meloni rassure, et l’Italie assure. Ça paraît simple, non ?
Sur les marches de l’opéra Garnier, sur l’autoroute à Chalon-sur-Saône, ou encore au péage de l’A63 près de Biarritz. Ce 15 décembre 2018, les mêmes scènes se rejouent partout en France : des manifestants en colère, qui bravent le froid et la pluie, bloquent les routes, scandent des slogans, et portent tous le même vêtement devenu un symbole : le gilet jaune.
C’est l’acte 5 de ce mouvement social historique. 33 500 personnes ont manifesté ce jour-là selon le ministère de l’Intérieur. C’est un peu moins que les semaines précédentes, mais la colère, elle, ne retombe pas. Et les annonces d’Emmanuel Macron, cinq jours auparavant, n’ont rien apaisé, bien au contraire.
Des réclamations concrètes commencent à se faire entendre. Plus d’un mois après les premiers rassemblements, un nouveau mot apparaît sur les pancartes, un mot qu’on a déjà évoqué dans un précédent épisode cette semaine : le RIC.
Le besoin de démocratie directe éclate au grand jour. Et si les manifestants proposent de nouveaux outils pour participer au processus décisionnaire, c’est parce que le dernier référendum "classique" ne leur a pas laissé de très bons souvenirs.
J’ai d’ailleurs retrouvé dans les pages de L’Express une analyse intéressante à ce sujet. C’est une interview du politologue et sondeur Jérôme Sainte-Marie, qui date de novembre 2018. En pleine crise des gilets jaunes, il distingue trois caractéristiques aux sympathisants du mouvement : ce sont souvent des employés ou des ouvriers, qui viennent de petites communes. Et l’expert ajoute, je le cite : "Un troisième clivage se superpose. Il est politique. C’est celui qui opposait la France du oui et la France du non lors du référendum sur l’Europe de 2005".
Ceux qui ont voté "non" à la Constitution européenne en 2005 auraient donc 13 ans plus tard enfilé un gilet jaune. Et dans cet épisode, on va tenter de comprendre pourquoi l’ombre de ce référendum plane encore sur la politique française.
Jacques Chirac répond à Patrick Poivre d'Arvor lors d'une émission télévisée en direct sur TF1, le 14 avril 2005 à Paris, dans le but de relancer la campagne en faveur du "oui" à la Constitution européenne.
Il existe, au Moyen-Orient, un homme qui plaît autant aux Israéliens qu’aux membres du Hamas. Un diplomate du Qatar qui fait l’aller-retour entre les deux camps depuis plus de dix ans, surmontant l’impossible pour trouver des compromis et rapprocher les positions de ces deux ennemis mortels. Une perle rare. A force de passer du temps avec les Israéliens, ces derniers l’ont surnommé "Mister Cohen", un sobriquet que ses collègues de l’émirat gazier utilisent aussi avec affection désormais.
Le 9 septembre, Mister Cohen l’a échappé belle. Ce jour-là, comme le racontent plusieurs sources proches des négociations, il a rendez-vous à 16 heures au QG du Hamas à Doha, où certains membres en exil du mouvement palestinien se réunissent depuis 2012 pour échanger. Ils négocient, reçoivent des diplomates étrangers, des journalistes occidentaux, certains vivent même dans les lieux. En milieu d’après-midi, les négociateurs du Hamas doivent remettre à Mister Cohen leur conclusion sur la proposition américaine de cessez-le-feu qui leur a été adressée deux jours plus tôt. Une équipe qatarienne avait reçu le document à Paris, le 5 septembre, des mains de Steve Witkoff, l’envoyé spécial de Donald Trump au Moyen-Orient. Les médiateurs – Qatar, Etats-Unis et Egypte — espèrent alors une percée diplomatique, ponctuée d’une trêve dans la bande de Gaza.
Dans la soirée du 8 septembre, le Premier ministre du Qatar, Mohammed ben Abderrahmane Al-Thani, avait quant à lui reçu les négociateurs du Hamas, les enjoignant d’accepter cet accord, qui porte le sceau du président Trump. Il est donc convenu de se revoir le lendemain pour conclure. Les Qatariens en informent les Américains puis les Israéliens, à l’aube du 9 septembre.
Vers 13 heures, les membres du Hamas se retrouvent dans leur villa de Doha, au beau milieu d’un quartier résidentiel, où se concentrent les ambassades et les écoles. La petite dizaine de diplomates palestiniens ne parvenant pas à s’entendre, ils décident à 15 heures d’en rester là et de faire une pause dans leurs discussions. Ils quittent le salon des négociations, mais certains membres de leur staff et de leurs familles restent dans la pièce. Mister Cohen est prévenu, son rendez-vous se voit reporté à 18 heures. Le diplomate qatarien en profite pour aller chez le barbier.
Un policier tué
À 15h46, tout le Qatar tremble. Littéralement. Pendant huit minutes, une dizaine de missiles israéliens s’abat sur le QG du Hamas, désintégrant le rez-de-chaussée de cette maison à deux étages. Absents, les négociateurs palestiniens en sortent indemnes. Mais cinq de leurs proches meurent dans les frappes, 23 autres sont blessés. Un policier qatarien, chargé de protéger la délégation, est tué. Un de ses collègues se trouverait dans un état grave à l’hôpital. "Tout ce que les Israéliens ont réussi avec ces frappes, c’est de commettre des atrocités et de tuer un officiel qatarien de 23 ans, ce qui a meurtri le cœur de chaque citoyen de notre pays", témoigne Khalid Al-Khulaifi, analyste au Center for International Policy Research. C’est la première fois qu’Israël tue un citoyen d’un pays du Golfe sur son sol. Un tournant tragique, aux lourdes conséquences géopolitiques.
"Jamais, dans l’Histoire, une partie d’un conflit n’a attaqué de telle sorte, délibérément, le pays médiateur et l’équipe de négociations de l’autre partie", fulmine une source de la région. Le Qatar, d’ordinaire si paisible, enrage. Le Premier ministre israélien est la cible de tous les reproches, lui qui aurait décidé, contre l’avis des services de renseignements israéliens et de son état-major, de bombarder l’équipe du Hamas à Doha. Les négociations partent en fumée, tout contact est rompu.
Surtout, malgré les remontrances des Etats-Unis, qui possèdent leur plus grande base militaire de la région au Qatar, Benyamin Netanyahou poursuit sa rhétorique agressive, assurant que les membres du Hamas "ne sont en sécurité nulle part" et qu’Israël est prêt à se transformer en "super Sparte", en référence à la cité militarisée de l’Antiquité. "En public, Netanyahou continue de menacer le Qatar en disant qu’ils tueront les membres du Hamas où qu’ils soient, et d’un autre côté les Etats-Unis nous demandent de continuer la médiation puisque nous sommes l’unique chemin pour espérer trouver la paix, constate un diplomate qatarien. Nous avons réussi à obtenir deux cessez-le-feu et à faire libérer plus de 130 otages depuis le début de la guerre dans la bande de Gaza, Israël devrait nous envoyer des remerciements plutôt que des missiles."
Le Qatar n’écarte toutefois pas un retour à la table des négociations. "Cela prendra du temps, il faut reconstruire le lien de confiance pour que le Qatar reprenne son rôle de médiateur neutre, sans émotions négatives", souligne l’analyste qatarien Sultan Al-Khulaifi.
De la fumée s'élève après la destruction d'une tour par des frappes israéliennes dans la ville de Gaza, le 15 septembre 2025
Mais le temps presse dans la bande de Gaza. Deux millions de Palestiniens de l’enclave continuent de survivre dans des conditions catastrophiques, et l’armée israélienne vient de lancer, le 16 septembre, son offensive terrestre sur Gaza-ville, laissant craindre un nouveau carnage. Une "campagne destructrice, qui n’a plus de logique militaire", a dénoncé la diplomatie française. "Les dirigeants politiques israéliens sont focalisés sur le très court terme et, dans ces conditions, la diplomatie passe au second plan, remarque l’ancienne députée israélienne de centre-gauche, Ksenia Svetlova. Un sentiment d’impunité flotte dans l’air, lié à la proximité du gouvernement israélien avec la Maison-Blanche, qui fait croire à Netanyahou que la diplomatie peut être reléguée à plus tard."
Dans ces conditions, seul Donald Trump semble pouvoir infléchir la position du Premier ministre israélien. Son secrétaire d’Etat, Marco Rubio, a fait le déplacement à Jérusalem puis à Doha, une semaine après les frappes israéliennes au Qatar. Il exhorte l’émirat à reprendre son rôle de médiateur, afin de boucler un accord de cessez-le-feu "dans le très court délai pendant lequel il est encore possible de le faire". "Il y a un accord sur la table de Netanyahou en ce moment même, nous confirme un proche du dossier. S’il le signe, tous les otages seront libérés et nous prendrons le chemin de la paix." Le travail est encore loin d’être achevé pour "Mister Cohen".
Images de la télévision du Qatar, où l'on voit l'émir du Qatar, Cheikh Tamim bin Hamad Al Thani, aux funérailles des six personnes tuées la veille dans des frappes israéliennes, à Doha le 11 septembre 2025.