10 ans d’évolution sur l’extinction de l’éclairage public en France
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La crise énergétique de 2021/2022 a eu des effets notables sur les éclairages publics des communes françaises. Elles sont aujourd’hui près de 12 000 à pratiquer une extinction totale, selon le Cerema.
Le Cerema (Centre d’études et d’expertise sur les risques, l’environnement, la mobilité et l’aménagement) est un établissement public placé sous le ministère de l’Aménagement du territoire. Il vient de mettre en ligne une étude sur les pratiques des collectivités concernant l’éclairage public la nuit.
Satellite Suomi NPP et instrument VIIRS de la NASA
Le Centre s’appuie sur des données du radiomètre à balayage VIIRS (pour Visible Infrared Imaging Radiometer Suite) de la NASA, installé dans le satellite météorologique Suomi NPP lancé en 2011 pour le compte du National Oceanic and Atmospheric Administration (NOAA). Ses données « permettent un suivi dans le temps de l’éclairage nocturne à l’échelle communale », explique le Cerema.
Entre 2014 et 2024, 19 262 communes ont ainsi été étudiées, sur les près de 35 000 que compte le territoire. Sur cet ensemble, « 11 980 semblent pratiquer une extinction totale, 3 547 une extinction partielle ou une rénovation d’ampleur et 131 ont décidé de rallumer en cœur de nuit ».



La crise énergétique de 2022 a fait bouger les lignes
En plus de compter les extinctions totales, l’analyse sur 10 ans permet de suivre les évolutions dans le temps : « À l’échelle nationale, 30% des extinctions totales ont été mises en place au moment de la crise énergétique entre septembre et décembre 2022 ».
Le Centre apporte une précision importante : « une détection d’extinction totale n’assure pas que quelques points d’éclairage soient toujours présents, surtout si ceux-ci sont rénovés en LED ». Les images satellites permettent de couvrir toute la France métropolitaine, mais ne permettent évidemment pas d’avoir le détail de chaque lampadaire dans la rue.
Une cartographie détaillée pour chaque commune
Ajoutons que l’algorithme peut aussi parfois se faire berner, notamment dans des « communes ayant un fort éclairage privé qui aurait connu un changement de pratique (industrie, serres) ». Une cartographie détaillée est disponible par ici.
Voici un exemple avec La Rochelle :

Le Cerema rappelle que les extinctions en cœur de nuit étaient déjà pratiquées historiquement par certaines régions comme la Bretagne et la Bourgogne, mais principalement dans les milieux ruraux. La crise énergétique de 2022 a changé la donne et accélérée les extinctions, y compris dans des zones denses.
Sans surprise, les plus petites communes (et donc avec le moins de moyens) ont davantage mis en place des extinctions totales. C’est le cas de plus de 50 % de celles avec 1 000 à 5 000 habitants, contre 36 % pour celles de 20 000 à 40 000 habitants et 23 % si elles ont plus de 40 000 habitants.
Les LED à la rescousse
« Les communes de grandes tailles ont par contre mis en place des extinctions partielles ou des rénovations d’ampleur », précise le Cerema. En plus des extinctions, le passage aux LED permet aussi de réduire la consommation.
Ce type d’éclairage représente « aujourd’hui 40 % du parc national », selon le Cerema. Ce dernier rappelle que l’éclairage public représentait, en 2024, 0,54 % de la consommation électrique nationale.
Difficultés techniques et biodiversité
L’extinction de l’éclairage publique n’est pas sans poser des difficultés. Il faut, par exemple, des interventions sur le terrain pour « reprogrammer les horloges » et parfois réorganiser le réseau électrique. « Cela impacte également les dispositifs « intelligents » qui gèrent les phases d’abaissement de puissance en cœur de nuit, qui ne sont pas adaptés à une coupure en cœur de nuit ».
Sur la question de l’influence de ce changement sur la biodiversité, la question reste en suspens précise le Cerema : « La littérature scientifique est encore très pauvre sur le sujet de l’effet des extinctions de l’éclairage sur la biodiversité ». En France, les changements sont encore récents pour tirer des conclusions.
Quid des astronomes ?
Dernier point abordé : les astronomes. Profitent-ils d’une baisse de la pollution lumineuse ? Oui… et non, enfin cela dépend. « L’extinction d’une commune ne suffit pas forcément à réduire fortement la clarté du ciel si une autre agglomération voisine continue à générer des flux lumineux qui viennent « polluer » le ciel de la commune qui pratique l’extinction ».
Le Cerema rappelle qu’il existe pour cela des Réserves internationales de Ciel étoilés (RICE) qui travaillent justement à réduire la pollution lumineuse. Il y en a sept en France selon DarkSky : le parc du Morvan, le parc des Landes de Gascogne, le parc du Vercors, le parc des Millevaches, le parc du Mercantour, le parc des Cévennes et le Pic du Midi.