Les ventes de Tesla reculent, Musk se dit prêt à réduire son implication dans le Doge

Tesla a fait état mardi soir d’un bénéfice trimestriel en recul de 71 % sur un an, sur fond de ventes qualifiées de décevantes. Si l’entreprise admet souffrir de l’incertitude économique générale liée à la guerre commerciale lancée par Donald Trump, ses représentants réaffirment leur confiance dans sa stratégie à long terme, et récusent l’idée selon laquelle Tesla souffrirait de l’implication d’Elon Musk aux côtés du président des États-Unis. L’intéressé fait quant à lui souffler le chaud et le froid quant à sa participation active au désormais célèbre Doge.
Publiés mercredi soir, les résultats de Tesla pour le premier trimestre 2025 confirment le ralentissement des ventes de l’entreprise sur son marché principal qu’est l’automobile.
Dans le détail, Tesla indique avoir produit 362 000 véhicules sur le trimestre, en recul de 16 % sur un an, tandis que les livraisons se montent à 337 000 véhicules sur la même période (- 13 %). Faut-il y voir une baisse de la demande, comme le supputent de nombreux observateurs ?
Les ventes de véhicules ralentissent
Pas forcément : la baisse des livraisons découlerait ainsi « en partie » de la conversion des lignes de production vers le nouveau Model Y au sein des quatre usines concernées, indique l’entreprise dans sa communication financière (PDF). Elle note par ailleurs une légère baisse du prix de vente moyen de ses véhicules, qu’elle attribue à la fois au mix (la répartition entre les différentes versions d’une même voiture) et aux incitations à la vente pratiquées dans son réseau de distribution.

Les manifestations anti-Tesla, qui ont défrayé la chronique aux États-Unis suite à la mise en œuvre par Elon Musk de son plan d’épuration des finances publiques, semblent tout de même avoir affecté l’homme d’affaires. « Comme les gens le savent, il y a eu des réactions négatives suite au temps que j’ai passé au gouvernement », a-t-il commencé, avant d’affirmer sans ambages y voir le signe d’un complot. « Les manifestations que vous avez pu voir étaient très bien organisées. [Les participants] ont été payés pour ça », a notamment déclaré le cofondateur de Tesla lors du webcast de présentation de ces résultats, sans préciser ses allégations.
Des finances toujours très solides
Résultat des courses ? Sur son activité principale qu’est l’automobile, Tesla réalise sur le trimestre un chiffre d’affaires global de 13,967 milliards de dollars, en recul de 20 % sur un an. Au sein de cet ensemble, qui réunit principalement les ventes (12,925 milliards de dollars) et le leasing (447 millions de dollars), on note que Tesla engrange aussi 595 millions de dollars grâce à la vente de crédits carbone à d’autres acteurs industriels. Une activité indirecte, qui a déjà représenté 2,8 milliards de dollars de chiffre d’affaires pour le groupe en 2024.
Outre les véhicules, Tesla réalise 2,730 milliards de dollars de chiffre d’affaires sur les activités liées au stockage et à la production d’énergie (batteries domestiques ou industrielles, actifs ENR), et 2,638 milliards de dollars via sa division dédiée aux services (au premier rang desquels la recharge).
L’ensemble représente un chiffre d’affaires trimestriel total de 19,335 milliards de dollars, en baisse de 9 % par rapport au premier trimestre 2024. En bas de bilan, Tesla parvient tout de même à un résultat positif en dépit de dépenses d’exploitation qui augmentent (+ 9 % sur un an) : son bénéfice net s’établit ainsi à 409 millions de dollars, en baisse de 71 % sur un an.
Tesla souligne dans ce contexte sa robustesse financière, avec un cycle de conversion achevé au niveau de ses principales usines, des travaux déjà bien avancés pour ses futures usines dédiées au Robotaxi/Cybercab (Texas) et au Tesla Semi (Nevada), ainsi qu’une trésorerie largement disponible de l’ordre de 2,2 milliards de dollars. Elle se montre également très optimiste quant à la future contribution de sa Megafactory de Shanghai, qui a déjà produit 100 Mégapacks (stockage d’énergie par batteries à l’échelle d’un conteneur) et doit arriver à une production annuelle de l’ordre de 40 GWh.
Une visibilité limitée
Un mauvais trimestre n’est pas un problème dans la trajectoire d’une entreprise de croissance… tant que cette dernière peut rassurer quant à ses perspectives futures. Et sur ce point, Tesla ne semble pas beaucoup mieux lotie que les autres acteurs de l’industrie automobile.
« Il est difficile de mesurer l’impact de l’évolution des politiques commerciales mondiales sur les chaînes d’approvisionnement automobile et énergétique, notre structure de coûts et la demande de biens durables et de services associés. Bien que nous réalisions des investissements prudents qui prépareront nos activités automobiles et énergétiques à la croissance, le rythme de croissance cette année dépendra de divers facteurs, notamment l’accélération de nos efforts en matière d’autonomie, la montée en puissance de nos usines et le contexte macroéconomique général », expose ainsi Tesla dans sa communication financière.
Elon Musk prêt à lever le pied du Doge, mais pas à le quitter
L’attitude d’Elon Musk vis-à-vis de ses multiples engagements, professionnels ou politiques, interroge tout particulièrement dans ce contexte. Un analyste de Wall Street tirait d’ailleurs la sonnette d’alarme la veille de la publication de ces résultats financiers, estimant que Musk s’exposait au risque d’un « code rouge » s’il ne revenait pas pleinement aux manettes de Tesla.
Le message semble avoir été entendu, mais l’intéressé entretient tout de même un certain flou quant à la suite de sa mission au sein du Doge, le ministère de l’efficacité gouvernementale installé par Donald Trump.
« À compter probablement du mois prochain, mai, le temps que je consacre au Doge devrait diminuer significativement, a ainsi déclaré Elon Musk aux analystes, avant d’immédiatement nuancer son propos, en expliquant qu’il devrait veiller à ce que l’action du Doge ne soit pas défaite jusqu’à la fin du mandat de Donald Trump. Je pense que je continuerai à consacrer un jour ou deux par semaine aux affaires gouvernementales, aussi longtemps que le Président le souhaitera et tant que c’est utile ». Selon les termes initiaux de l’annonce formulée par Donald Trump, la mission de Musk en tant que conseiller spécial de la Maison-Blanche devait durer 130 jours.
Musk prudent dans son désaccord avec Trump sur les droits de douane
Au-delà de son agenda personnel, Elon Musk était également attendu sur l’épineux dossier des droits de douane, qui a plongé les bourses du monde entier dans une crise de volatilité depuis le début d’avril. Sur ce point, le milliardaire avait déjà laissé entendre, via son très prolifique compte X, qu’il ne partageait pas totalement les vues de Trump, semblant plutôt se ranger du côté des soutiens du libre-échange.
Une opinion confirmée mardi. « Je suis partisan des structures de taxes prévisibles, et je soutiens en général le libre-échange et des droits de douane plus modérés, a admis Elon Musk, avant là encore quelques précautions oratoires. Je pense que ça reste à traiter stratégiquement au cas par cas. Le Président est le représentant élu du peuple, et il est complètement dans son droit de faire les choses comme il le souhaite ».
Si Tesla affirme avoir sécurisé les grands maillons stratégiques de sa chaîne d’approvisionnement, Musk reconnait que les tensions entre la Chine et les États-Unis pourraient avoir d’autres impacts opérationnels sur les diversifications du groupe, notamment la branche incarnée par le robot humanoïde Optimus. Bien qu’il soit encore au stade du développement, Tesla prévoit d’en assembler « quelques milliers » d’unités en 2025, et se heurte actuellement aux restrictions mises en place par la Chine sur les terres rares, dont les aimants permanents. « On y travaille avec la Chine », a indiqué Musk, qui réaffirme par ailleurs son ambition de produire un million de robots par an d’ici 2030.
