News - Assassin’s Creed Shadows : Ubisoft confirme son arrivée sur Switch 2 le 2 décembre (Switch 2)

Si vous avez grandi dans les années 80 et 90, la simple vision d’un magazine de jeux vidéo vous fait très certainement encore quelque chose. Sur ce titre pessimiste, j’avais besoin de vous donner mon avis sur la mort lente et douloureuse de la presse gaming. Dans cet édito, j’aimerais vous détailler ce qui explique, selon moi, le déclin de ce média qui n’a plus grand chose d’intéressant à offrir. Et pourquoi nous en sommes arrivés là. Bonne lecture !
J’ai créé Playerone.tv en décembre 2009. C’est à la fois lointain et proche. Sur certains points, on croirait en effet parler du siècle dernier tant les choses ont changées. A cette époque là, il y avait une véritable guerre des « nouveaux sites de jeux vidéo » qui tentaient tous de sortir de l’anonymat. C’était une concurrence assez bizarre par ailleurs.
Mais de 2009 à 2015, la presse était LE point central de l’information autour des jeux vidéo, consoles et PC. Les magazines disparaissaient alors logiquement un par un, par manque d’intérêt et de réactivité de l’information. Les jeux sortaient par dizaines de février à avril, puis de septembre à novembre. On ne savait plus où donner de la tête en étant quelques rédacteurs. Les éditeurs étaient en mode « séduction » dès que les statistiques de fréquentation des sites étaient potentiellement bons pour faire parler de leurs projets : communiqués de presse en pagaille, invitations à des sessions de jeux bêta, soirées spécialement dédiées à la presse, jeux reçus en avance pour les tester dans de bonnes conditions etc.
La première raison du déclin est à mettre sur le dos des joueurs / lecteurs. Si les sites ferment les uns après les autres, c’est avant tout parce qu’ils ne cliquent plus sur les articles. Et qu’ils ne font quasiment plus de recherches sur internet. Pourquoi ? Selon moi, il y a deux raisons majeures.
Raison N°1 : Les publicités ont tué Internet
J’en suis le premier agacé : il est parfois impossible de lire le contenu d’un article sans que celui-ci ne soit noyé, voire souvent TOTALEMENT superposé par des publicités. Cela fait des années que j’utilise un bloqueur de pubs. Plus les lecteurs en ont utilisé un, plus les gros sites ont démultipliés les formats toujours plus intrusifs les uns des autres. Le serpent s’est mordu la queue jusqu’à se manger lui-même.
Un visiteur avec un bloqueur de publicité, c’est zéro centime qui entre dans la poche du site. C’est quelque part mérité, beaucoup ayant vraiment trop abusés ! Mais quand ton site n’affiche que peu de formats non intrusifs, tu payes quand même les débordements des autres.
Raison N°2 : Les articles pour ne rien dire et le putaclick / clickbait
Pour maximiser les profits sur un article, on a beaucoup vu leur substance diminuer. Un gros titre bien accrocheur (voire mensonger ou n’ayant aucun lien avec le sujet de l’article), trois ou quatre lignes de texte, et c’est parti ! On a souvent l’impression de ne rien apprendre.
Sur ce point, c’est aussi la faute des éditeurs et constructeurs qui ne livrent plus assez de détails dans leurs annonces pour en faire quelque chose d’intéressant. La plupart des communiqués tenant en un Tweet, il est compliqué d’en extraire de la substance. Si avant nous avions des communiqués de presse complet, l’information est aujourd’hui totalement morcelée. On reçoit au compte gouttes : date de sortie, teaser du trailer, annonce de la date de publication du trailer, des trailers qui ne racontent pas grand chose, et du gameplay qui ne dévoile quasi rien. C’est ultra superficiel et donc vide de substance exploitable pour une véritable travail journalistique.
Au-delà d’être journaliste, je suis aussi et surtout un joueur. Et tout comme vous, je me suis lassé d’aller sur des sites d’actualité jeux vidéo pour ces deux raisons. Je n’en consulte plus aucun en France, et seulement quelques uns aux USA. Avec Adblock bien entendu…
Pour payer les pigistes et / ou les rédacteurs, il faut de l’argent. D’où vient l’argent des sites ? De la publicité. Avec le paragraphe précédent, j’imagine que vous avez déjà compris pourquoi la presse jeux vidéo est quasiment morte. Entre les bloqueurs de publicité qui transforment les visiteurs en fantômes financiers et le désintérêt des joueurs envers la presse, il est logique de voir tant de médias disparaitre.
Et une fois que les joueurs ont perdu cette habitude de lecture et de recherches autonomes sur un jeu vidéo, il me paraît impossible de faire machine arrière. Les réseaux sociaux ont remplacé totalement le lieu où l’information doit être dévoilée.
En 15 ans, Facebook, YouTube, TikTok et Instagram ont tué les sites internet d’actualité gaming. Leurs algorithmes aussi. Puisqu’il faut être toujours plus sensationnel dans le contenu pour être lu et partagé, cela a participé à la dégradation en qualité des médias. Il suffit de regarder ce qui marche le mieux en France pour s’en convaincre…
Autre point qui me paraît important : Il est impossible de faire un vrai travail journalistique dans le secteur des jeux vidéo. Cela n’a jamais été possible, et cela ne le sera très certainement jamais. La raison ? Les éditeurs et constructeurs souhaitent contrôler leur communication de A à Z. La place à l’investigation est donc verrouillée de tous les côtés. Si vous avez la chance d’accéder à un jeu avant sa sortie, c’est le NDA (accord de non divulgation) qui vous musèle.
Si vous souhaitez obtenir des informations sur un jeu en cours de développement, la seule réponse que vous obtiendrez est, au mieux : « nous communiquerons lorsque nous serons prêts ». Au fil de mes nombreuses interviews de ces 16 dernières années, je n’ai littéralement JAMAIS ramené un scoop. Même en « cuisinant » les développeurs, éditeurs et constructeurs rencontrés, ils ne lâchent RIEN. Ce n’est souvent pas l’envie qui manque, mais la peur de la sanction, puisqu’ils ne doivent pas dire autre chose que ce qui est prévu.
Depuis 2021, l’actualité est souvent morte. De phases de désert d’actualités en phases de maigres sorties, difficile de maintenir une communauté en haleine. C’est d’ailleurs cette pénurie de matière première que tant de rumeurs et fake news tombent de partout. Il faut faire du chiffre quand même !
Avec une industrie du jeu vidéo AAA en crise, la scène indépendante aurait pu prendre le relai. Mais les jeux indé n’intéressent quasiment personne. On ne peut pas faire tourner une boutique avec cela. C’est triste, mais c’est comme ça.
Quelle insulte, lorsque certaines entreprises me contactent en me collant directement dans la case « influenceur » parce que je fais des vidéos sur les réseaux sociaux… Mais passons. Aujourd’hui, il n’y en a que pour eux. Je ne dis pas ça par jalousie, mais par constat. Leur audience est tellement aveuglée par diverses choses que c’est du pain béni pour les éditeurs, et ces fameux influenceurs. Toute une économie s’est créée autour d’eux : liens d’affiliation, codes promo, vidéos sponsorisées, opérations spéciales etc. C’est aujourd’hui le moyen le mieux rémunéré pour faire de l’actualité gaming. Quand ça marche.
Mais en martelant leurs chaînes de contenus, plusieurs fois par jour, quitte à ne rien dire de nouveau sur 12 vidéos de GTA 6, ils retiennent leur audience chez eux. Un cercle fermé de joueurs qui ne se renseignent plus ailleurs. L’information tombe tout cuit dans le bec des scrolleurs infinis de réseaux sociaux. Plus besoin d’aller chercher par soi-même !
Tout comme la lecture de livres et magazines papiers, la lecture d’articles (je dis bien articles, et pas « news » de 12 mots) est en train de mourir. Tout se passe sur les réseaux sociaux aujourd’hui. Et un réseau peut devenir démodé en l’espace de quelques années seulement. Cela ne serait pas un problème si ces plateformes n’étaient pas régies par des algorithmes sournois qui incitent à faire du sensationnel pour sortir de la masse. Avoir une communauté de 100 000 personnes ne garantit en effet pas que la totalité de vos abonnés verront passer votre contenu dans leur fil d’actualité.
Ce n’est même quasiment jamais le cas. Cela a également participé à l’effondrement de la qualité des contenus sur internet, puisque seuls quelques rares types d’actu arrivent à percer le mur de votre noyau communautaire.
Ce que je remarque en revanche depuis 16 ans n’est pas très glorieux : la feignantise a remplacé la curiosité. Avec des outils d’accès à l’information ultra performants, la plupart des joueurs ne font qu’attendre que l’actualité ne tombe du ciel. Inondés de contenus en tous genres sur une ribambelle d’applications mobiles, c’est aujourd’hui aux médias d’aller chercher les lecteurs où ils sont, et plus l’inverse.
Autre exemple de ce que la technologie peut donner de pire en termes de feignantise ? L’arrivée de l’I.A. Si Grok dit que c’est vrai, c’est que c’est vrai ! Je vois même de plus en plus de contenus écrits par Intelligence Artificielle. L’avenir des sites reposera-t-il sur de la rédaction automatisée à 100% ? Fort probable, et c’est pour moi le dernier clou du cercueil d’une presse déjà en état de mort cérébrale depuis pas mal d’années.
Je ne me pose pas en « vieux con », l’I.A pouvant avoir de chouettes avantages pour économiser du temps. Mais faire confiance aveuglément à un robot n’est pas la meilleure preuve d’évolution de l’humanité en ce qui me concerne…
1200 journalistes partis en 2 ans. C’est ce que révèle le fondateur de Press Engine, plateforme sur laquelle je suis inscrit également. Et selon lui, le pire n’est pas encore passé. Il explique cela également par la perte d’intérêt des lecteurs avec l’avènement des jeux service qui n’ont pas besoin de la presse pour vivre.
Le problème est que plus aucun jeu vidéo n’a besoin de la presse pour vivre. Seuls restent quelques irréductibles qui aiment lire, se renseigner, comparer les avis de différents médias. Le grand public, lui, se contente d’ouvrir le bec et de picorer ce qui tombe sous son nez. Encore une fois, ce n’est pas une critique, juste la réalité des faits.
Cela fait maintenant plusieurs mois que je n’écris plus d’articles d’actualité sur le site. Je réserve cela à Facebook et Instagram, cela touche en effet beaucoup plus de monde. Je réserve Playerone.tv pour les tests écrits des jeux, et pour m’exprimer par éditos comme avec celui-ci. J’ai pris cette décision l’année dernière, après plusieurs années à voir les statistiques chuter.
Il n’y a malheureusement plus que ça qui marche. A grande échelle tout du moins. Quand vous regardez les YouTubers qui font le plus de clics, et les rares sites internet qui fonctionnent encore, c’est souvent une insulte à l’intelligence humaine. Le ton de parole est infantilisant. Le niveau d’écriture est très bas. Les éléments de langage sont partout. L’actu du pauvre, en somme. J’ai toujours refusé de me plier à cela personnellement. Et je vois trop souvent sur Facebook et YouTube des gens trop habitués à cette médiocrité qui ne comprennent plus rien à rien.
Il faudrait vraiment être aveugle pour ne pas voir que tout a changé très vite depuis 2020. Entre irrespect, comportements haineux et autres joies des réseaux sociaux, il faudrait vraiment être fou pour continuer à aimer ce métier de journaliste gaming.
Et bien vous pouvez me qualifier de fou ! Malgré toutes ces transformations, j’adore encore et toujours traiter l’actualité jeux vidéo. Et par dessus tout, échanger avec tous mes abonnés, que ce soit sur Facebook et YouTube, les deux plus grandes réussites numériques de Playerone.tv !
A mon humble avis : pas grand chose. Peut-être même rien du tout. Le mal est fait. Beaucoup ont cru que faire payer des abonnements à leurs lecteurs les tiendraient dans le troupeau tout en maintenant un niveau financier correct, mais cela n’a pas fonctionné. En tout cas pas longtemps. Et je me mets à la place d’un joueur : qui voudrait payer de 5 à 10 abonnements par mois pour simplement lire de bons articles ? Tout travail mérite salaire, certes, mais il y a des limites à l’empathie.
En bref, et à mes yeux, la presse jeux vidéo vit ses dernières années. Est-ce que c’est bien ? Est-ce que c’est mal ? Je ne sais pas, mais c’est en tout cas la réalité.
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